UE 11 – Parcours N°3 – cours n°6 20/01/2016 Pr Patrizia Paterlini-Bréchot [email protected] RT : Sophie Baltassis, Alexandre Meunier RL : Victor Quentin Les cellules rares circulantes, un outil pour la médecine de demain : personnalisée, prédictive et non invasive Plan : Avant-propos 1. Les cellules rares circulantes (CRC) 2. Les cellules tumorales circulantes (CTC) a. Organes d’implantation préférentielle des métastases b. Prérequis et étapes de l’invasion métastatique c. Inefficacité de l’invasion métastatique d. Applications : diagnostic et adaptation de traitements e. Diagnostics de cancers 3. Les cellules fœtales circulantes (CFC) Mot des RT Il faut bien comprendre que la méthode ISET (développée par l’équipe de Patrizia Paterlini) est une méthode de filtration du sang ; elle ne peut être considérée comme une méthode diagnostique seulement si elle est associée à la cytopathologie. Les exemples de cas cliniques et d'études sont indiqués en italique. Abréviations : - CRC : Cellules Rares Circulantes - CTC : Cellules Tumorales Circulantes - CFC : Cellules Fœtales Circulantes Avant-propos Ce cours est axé sur un nouveau domaine de la médecine qui prévoit de pouvoir faire des tests non invasifs (sans extraction corporelle), c'est-à-dire par la biais d’une simple prise de sang (biopsie liquide). Cette méthode représente bien la médecine moderne qui se veut adaptée à l'individu et non basée sur des critères généraux. Cette filière de la médecine prend appui sur une découverte récente : en plus des cellules sanguines communes (globule rouge ou globule blanc), on retrouve dans le sang des cellules extrêmement rares. 1. Les cellules rares circulantes (CRC) Les CRC sont présentes en très petite quantité dans le sang de chaque individu ; on en compte d’une à quelques-unes par millilitre de sang, soit une cellule pour 10 millions de leucocytes ou encore une cellule pour 5 milliards d’érythrocytes. Elles ne sont donc pas visibles lors des examens courants du sang, où l’on prélève de 20 à 50mL de sang. On distingue cinq types de CRC : Les cellules tumorales qui représentent l’intermédiaire entre la tumeur primitive et la métastase. Les cellules tumorales restent plusieurs années dans le sang avant la formation éventuelle de métastases. Ainsi, on peut détecter ces cellules avant la formation d'une métastase et intervenir de façon précoce. Les cellules épithéliales non tumorales, d’origine organique. Les cellules d'origine organique circulantes ne sont pas toujours tumorales : on peut en retrouver dans le sang, typiquement après une inflammation. Cette caractéristique physiologique nécessite ainsi d’opérer une distinction entre les cellules tumorales et non tumorales. Les cellules endothéliales, diffusées dans le sang à partir de la paroi intérieure des vaisseaux dans deux situations distinctes : o maladie tumorale accompagnée d’une angiogenèse et d’une augmentation de la production de cellules endothéliales (d’où l’utilisation de traitements angiostatiques suivis par des comptages de cellules en thérapie) ; o vasculopathie (comme l’infarctus) qui entraîne une lésion des vaisseaux et le départ de cellules endothéliales dans le sang. Les cellules souches, de nature hématopoïétique principalement, sont extrêmement rares. Elles intéressent la médecine régénérative. Les cellules fœtales (cf. 3.), dont la découverte permet de conclure sur l’absence de perméabilité complète du placenta. 2. Les cellules tumorales circulantes (CTC) La tumeur primitive seule n'est pas souvent létale, sauf si elle est localisée dans le cerveau ou à proximité d'une artère, par exemple. Ce sont les métastases qui causent généralement la mort des patients. L’objectif de l’exploitation des CTC est ainsi l’élaboration de méthodes visant à diagnostiquer des cancers précocement, avant l’apparition de métastases. Les métastases représentent la survie et la croissance de cellules tumorales à distance de leur lieu d’origine. Elles reflètent l’expression de la malignité et de la létalité de la tumeur. La capacité d’un cancer de donner des métastases n’est pas la même dans les différents organes : il y a des terrains plus ou moins favorables. Ainsi, la mécanique de formation des métastases est globalement inefficace, sélective, et multiétapes : la cellule doit perdre un nombre important de propriétés, comme le déclenchement de l’apoptose en cas de détachement de l’édifice épithélial. a. Organes d’implantation préférentielle des métastases Cancer Métastase préférentielle Foie Poumons Colon, pancréas, estomac Foie Prostate Os Poumons Os, cerveau Note : le cancer du foie donne en règle générale peu de métastases, malgré la circulation des cellules tumorales dans le sang. Les cellules tumorales d’origine hépatique doivent atteindre un état très indifférencié pour devenir métastatiques. Comme pour l’image de la « graine et du terrain », les cellules tumorales ont besoin d'un terrain approprié pour pouvoir proliférer. Ces préférences concernent l'environnement offert par les organes, notamment les facteurs de croissance présents. C’est par exemple le cas des cellules tumorales hépatiques qui ont une nette préférence pour le foie. Il a été montré que ces cellules passent dans le sang et reviennent parfois au niveau du foie pour former d'autres foyers tumoraux à proximité de la tumeur primitive. En cas d'ablation de la tumeur primitive, il existe alors un risque de réimplantation de la tumeur sur le foie. b. Prérequis et étapes de l’invasion métastatique Différents facteurs sont nécessaires au développement tumoral. L’angiogenèse tumorale joue ici un rôle prépondérant : elle intervient quand le volume tumoral atteint 1 ou 2 mm3, permet la survie, la prolifération, la différenciation et participe à la migration. Cependant, des tumeurs de plus petite taille sont également capables de se disséminer. C'est un phénomène important pour le diagnostic : les cellules tumorales peuvent commencer à diffuser avant même que la tumeur ne soit visible en imagerie. La détection des CRC permettent donc un diagnostic très précoce de cancers invasifs. Étapes de l’invasion métastatique : i. Perte d'adhésion cellulaire. La cellule tumorale perd ses molécules d'adhésion et de connexion, comme les intégrines (permettent la communication entre cytosquelette et matrice extracellulaire) ou les cadhérines, et commence une transformation qui va la rendre plus semblable à une cellule mésenchymateuse qu'à une cellule épithéliale ; on parle de transition épithélio-mésenchymateuse. Les cellules tumorales sont extrêmement plastiques et peuvent se transformer facilement. Elles ont ainsi une structure qui leur permet de migrer d'abord dans les tissus, puis dans le sang et à nouveau dans les tissus grâce au mécanisme inverse de transition mésenchymo-épithéliale. ii. Production d'enzymes par la cellule tumorale. Ces enzymes protéolytiques permettent la dégradation de la matrice extracellulaire ainsi que le développement de pseudopodes pour permettre la migration dans le tissu (gènes de l’actine et différents oncogènes comme le MSF ou le HGF). Ces enzymes sont en équilibre avec leurs inhibiteurs respectifs. Les cellules tumorales expriment par ailleurs des antigènes pour se cacher au système immun. iii. Franchissement de la membrane basale. Les cellules qui parviennent à franchir la membrane basale sont souvent incapable de proliférer. Leur évolution est indépendante et l’accumulation de mutations les conduisent à proliférer. iv. Arrivée dans un vaisseau sanguin. Les cellules tumorales franchissent la paroi endothéliale, événement favorisé par la recherche de nutriments et de dioxygènes. Elles peuvent alors migrer dans le vaisseau, mais aussi « ramper » le long de l’endothélium. Ce phénomène est également retrouvé au niveau des nerfs où certaines cellules migrent le long des terminaisons nerveuses. v. Circulation sanguine et migration. Dans certaines conditions, les cellules métastatiques tumorales peuvent s’agréger entre elles ou avec des plaquettes. Ces microemboles tumoraux peuvent être arrêtés dans les microvaisseaux d’un organe et développer une nouvelle tumeur à cet endroit. Ce risque est d’autant plus accru quand les cellules tumorales emportent des fibroblastes et des cellules du stroma de leur milieu d’origine : le terrain devient plus favorable à la prolifération. Ce phénomène d’agrégation plaquettaire des cellules tumorales peut être contré par certains antiagrégants plaquettaires comme l’Aspirine. Pour les métastases il existe des gènes qui favorisent leur formation et d'autres qui l'empêchent, à l’image des proto-oncogènes et des antioncogènes (pour les tumeurs). Parmi les gènes suppresseurs de métastases, on peut citer : E-cadhérine qui favorise l'adhésion cellulaire ; Nm23 qui agit sur l'adhésion cellulaire, l’assemblage des microtubules, la mobilité cellulaire et la transduction du signal. c. Inefficacité de l’invasion métastatique La formation des métastases reste cependant un processus inefficace. Chez l'animal, à peu près une cellule tumorale sur 10 000 qui passe dans le sang est capable de former une métastase ; chez un sujet moyen qui dispose de 5L de sang, on estime le nombre de CTC à 5000, ce qui est bien inférieur à 10 000. Il est très difficile d’observer la sortie des cellules tumorales dans le sang. Pour étudier ce phénomène, des chercheurs ont injecté directement des cellules tumorales chez des animaux. À J3, 80% des cellules sont extravasées (dans le sang) et une sur 40 forme des micrométastases (tumeurs secondaires de 4 à 16 cellules). À J13 une cellule sur 10 000 a formé une métastase. Par ailleurs, certaines cellules restent en « repos » : elles ne sont pas détruites et ne forment pas non plus de métastase. Certains mécanismes viennent expliquer cette inefficacité : - - - Les CRC restent des années dans le sang avant d'éventuellement former une métastase : l'invasion débute 5 à 10 ans avant le diagnostic de cancer, lorsque la tumeur est visible à l'imagerie. L’invasion tumorale est un processus précoce. Le détachement de la tumeur à l’édifice épithélial entraîne son apoptose. Les cellules tumorales font face aux attaques du système immunitaire. Les cellules sont fragiles : leur structure est modifiée et leur passage dans différents organes entraîne leur lyse progressive. Les cellules ont une difficulté importante à s’arrêter dans les organes pour s’implanter. Après implantation, certaines cellules ne sont pas capables de proliférer du fait de l’absence de certains facteurs de croissance par exemple. Une réaction inflammatoire stimule cependant la prolifération. Peu de micrométastases donnent d’autres métastases. Les cellules en état de « repos » ne prolifèrent pas. 0,01% des cellules tumorales donnent des métastases et 0,1% des microemboles donnent des métastases. Par ailleurs, certaines tumeurs primitives peuvent produire de l’angiostatine qui bloque la prolifération des cellules tumorales dans les tissus à distance et augmente ainsi leur risque d’apoptose. Ce facteur définit également le passage au « repos » de certaines cellules métastatiques. Exemples de conséquences cliniques. Cas clinique 1 : un patient avec métastases non visibles a été opéré pour enlever sa tumeur primitive du poumon. Après l'intervention chirurgicale, les métastases ont « flambé », apparaissant un peu partout, avec un développement rapide. Cas clinique 2 : Une femme qui avait été traitée pour un mélanome et qui était considérée guérie depuis des années a été donneuse de reins. Les receveurs ont été traités par immunosuppresseurs et sont morts d’un mélanome disséminé. d. Applications : diagnostic et adaptation de traitement Bien que leur existence soit soupçonnée dès le XIXe siècle, seules les techniques modernes d’analyse ont pu mettre en évidence les CTC, rarissimes dans le sang. Les premières méthodes consistaient en l’extraction de l’ensemble des ARN à partir du sang total et de faire une RT-PCR afin d’amplifier les transcrits spécifiques d’un tissu donné (transcrits du gène PSA pour un cancer de la prostate, par exemple). Ce procédé ne se révèle finalement pas diagnostic : certains marqueurs pensés comme spécifiques des tumeurs ont été retrouvé dans des cellules saines. Il existe un véritable enjeu diagnostic dans la détection des CTC. Celle-ci pourrait permettre de : - - effectuer une surveillance pour un diagnostic de récidive précoce et ainsi changer, adapter ou reprendre le traitement pour tuer les cellules cancéreuses ; effectuer une surveillance au cours d’un traitement en déterminant la présence d’une amélioration ou non (baisse de la quantité de CTC par exemple) ; prescrire des traitements ciblés, chers, mais personnalisés selon le cancer et certains facteurs qui le causent. Ces traitements ont toute fois des limites : les cellules tumorales ont tendance à muter très rapidement entraînant une perte d’efficacité au bout de quelques années seulement. Par ailleurs, ces thérapies nécessitent du fait de leur nature des investigations sur la nature de la mutation entraînant la cancérisation. Pour ce faire, une biopsie doit être réalisée (impossible chez certains patients) ; on peut également effectuer une prise de sang et en étudier les CTC. Enfin, ces investigations conditionnent le remboursement de ces traitements par l’Assurance Maladie ; diagnostiquer précocement un cancer (invasif), permettant ainsi une action rapide. L’intérêt de ces méthodes est également économique : un cancer diagnostiqué précocement demande moins de soins et coûte moins cher à la société. e. Diagnostics de cancers Le diagnostic s’est d’abord tourné vers les marqueurs tumoraux et leur détection dans les cellules. Cependant, leur emploi est difficile et non concluant. L’orientation des recherches vers la cytopathologie s’est concentrée sur l’extraction et l’analyse des CRC intactes avec, par exemple, la recherche de cellules de taille importante, avec un noyau d’une taille de ~24µm. La méthode ISET (Isolation by Size of Tumor cells) permet d’isoler ces cellules efficacement. La sensibilité est importante (1 cellule / 10mL de sang) et la structure des cellules filtrées n’est pas altérée. Aux États-Unis, les recherches se sont tournées vers les anticorps dirigés contre les cellules épithéliales, considérées à tort comme étant le signe d’un cancer (cf. 1.). Cette première erreur mène à des faux positifs. L’utilisation de marqueurs mésenchymateux se révèlerait aussi peu concluante : les cellules tumorales répriment les marqueurs épithéliaux du fat de leur transition épithélio-mésenchymateuse. Cette particularité mène à des faux négatifs. Cette méthode n’est donc pas satisfaisante. Le filtrage a donc permis la mise au point d’un système ouvert qui permet de multiples analyses quelque soit le type des cellules tumorales. L’analyse cytopathologique est indispensable dans ce sens et permet l’analyse ciblée de l’ADN des cellules tumorales, diminuant le risque d’erreur. Le test idéal doit en effet avoir une haute sensibilité et une haute spécificité diagnostique. Ils sont utilisés pour les check-up annuels des patients à hauts risques de rechute, avant que les métastases ne soient visibles par imagerie. Cette analyse de l’ADN tumoral a permis de mettre en évidence l’hétérogénéité de l’ADN dans les cellules tumorales ; au sein d’une même tumeur, on peut retrouver deux composantes génétiques fortement différentes. Par ailleurs, il a été établi que les cellules les plus malignes avaient un ADN très différent de celui de la cellule d’origine. En oncologie, on parle de “théranostique”, contraction de « thérapie » et de « diagnostique ». Les protéines utilisées ciblent certains sous-types de cancers. Critères de définition d’une cellule tumorale. - Présence de mutation(s). Est-ce qu'une mutation suffit pour conclure qu'une cellule est tumorale ? Cette question reste aujourd’hui sans réponse : une étude a montré que des maladies bénignes présentent des mutations. Exemple 1 : dans le cancer du rein (peu d'hétérogénéité), on a une mutation VHL, cette mutation est présente dans toutes les cellules définies comme tumorales (par le cytopathologiste) et dans 20% des cellules atypiques non tumorales. → Spécificité de 100% ; sensibilité de 80%. Exemple 2 : Étude de patients BPCO (= maladie pré-tumorale du poumon). Les patients ont été suivis plusieurs années avec la méthode ISET et scanner et on a trouvé chez 5 patients la présence de CTC. Les chercheurs ont vu chez ces patients des nodules au scanner de 1 à 4 ans après. Dès l'apparition des nodules les patients ont été opérés. À 5 ans presque tous les cas de cancers du poumon sont morts (87% de mortalité). - Imagerie. Le scanner pour les nodules au poumon a 96% de faux positifs, et la biopsie de nodule a une morbidité importante. En conséquence, le radiologue préfère attendre avant de donner un diagnostic d'opération. Le cancer (si c'en est un) a le temps de se développer et le pronostic devient moins favorable. - Actuellement, les chercheurs veulent développer un test pour savoir de quels organes les CTC dérivent. 3. Les cellules fœtales circulantes Les méthodes invasives (amniosynthèses, biopsies des villosités chorales) pour obtenir l’ADN fœtal sont associées à un risque important de fausses couches (0,5 à 1 %, soit environ 800 fausses couches). On cherche donc à faire des diagnostics moins risqués. Il faut pour cela obtenir de l’ADN fœtal de manière moins invasive. On dénombre deux sources d’ADN fœtal dans le sang de la mère : les cellules fœtales circulantes (CFC), très rares l’ADN fœtal libre, mélangé à celui de la mère, mais en faible proportion (de 5 à 10 %). Il est très difficile de le dissocier de l’ADN de la mère. On dénombre également quatre types de cellules fœtales circulantes rarissimes : lymphoïdes myéloïdes érythroïdes épithéliales (trophoblastic cells) Les cellules lymphoïdes et épithélioïdes restent dans le sang maternel toute la vie de la mère. Elles se révèlent donc inutiles dans le cadre d’un diagnostic, car elles sont mélangées à celles des enfants précédents de la mère, y compris des fausses couches. Par ailleurs, il existe chez les mères un pourcentage de cellules souches de fœtus qui sont capables d’aider à réparer les organes lésés de la mère. Chez des souris gestantes dont la peau a été volontairement lésée, on a ainsi pu retrouver des cellules souches masculines venues des différentes grossesses venues réparer la lésion. Les chercheurs ont décidé d’utiliser la méthode ISET pour isoler les cellules fœtales (trophoblastiques et érythroïdes) circulantes (CFC). Le sang a été filtré, puis, comme il n’existe pas de marqueurs des cellules trophoblastiques, ils ont utilisé un marqueur des cellules épithéliales. Ils ont ensuite utilisé un marqueur des cellules portant un chromosome Y sur des cellules microdisséquées, et ils ont isolé les cellules fœtales. Cette méthode ne marchant que pour les cellules d’origine masculine : il a fallu développer une méthode fonctionnant pour les 2 sexes par génotypage. On s’intéresse dans ce sens aux régions du génome extrêmement variables chez le père et la mère et, particulièrement, aux domaines informatifs. Ce sont les endroits où l’ADN du père et de la mère est différent. Cette analyse de séquences ne peut être pratiquée qu’à partir d’ADN pur. Cette expérience a permis de pratiquer un test de paternité en prénatal. De même, un diagnostic prénatal de mucoviscidose est possible après amplification du segment habituellement muté dans cette pathologie (∆F508 où on peut observer une délétion de trois bases). Si la mutation n’est pas connue, il est nécessaire de connaître un individu malade appartenant à la même famille. La méthode ISET a été testée à l’aveugle, puis comparée avec une biopsie des villosités choriales. La sensibilité retrouvée est alors de 100 %, à l’instar de la spécificité. Cette méthode constitue donc un succès clinique. Dans le cadre d’un diagnostic prénatal, cette méthode présuppose l’existence d’ADN fœtal dans le sang de la mère. Des recherches ont pu établir que : à la 4e semaine d’aménorrhée : la moitié des mères a de l’ADN fœtal dans le sang ; à la 5e semaine d’aménorrhée : toutes les mères ont de l’ADN fœtal dans le sang. En cas de problème, il est donc possible de mettre un terme à la grossesse de manière très précoce. Aux États-Unis, certaines recherches sur l’ADN circulant associées au séquençage à haut débit ont permis de déterminer si un fœtus est porteur d’une trisomie 21. Cette méthode permet ainsi un diagnostic non invasif, mais n’est pas applicable aux maladies génétiques non récessives. Par ailleurs, ces tests sur l’ADN circulant ne permettent pas d’établir un caryotype qui pourrait révéler d’autres types de mutations, comme des translocations. D’autres chercheurs encore ont tenté d’isoler les cellules fœtales retrouvées au niveau du col de l’utérus de la mère, présentes de la 8e à la 12e semaine d’aménorrhée, sans succès et non sans risques. Enfin, le paptest recueille des cellules dans la partie externe du col de l’utérus, desquelles des cellules fœtales ont pu être isolées. Ce test est non invasif et sans risques. FICHE RÉCAPITULATIVE Tout l'enjeu de ce nouveau domaine de la médecine est de mettre au point de nouvelles méthodes diagnostiques non invasives grâce à l'utilisation d'une découverte récente : les cellules rares circulantes. L'intérêt étant alors de pouvoir accéder par une simple prise de sang à de nombreuses informations diagnostiques. 1. Les cellules rares circulantes (CRC) 5 types de cellules rares circulantes : les cellules tumorales : détectables avant les métastases les cellules épithéliales non tumorales : à différencier des cellules tumorales car elles peuvent être présentes physiologiquement les cellules endothéliales : présentes dans 2 situations possibles : les maladies tumorales accompagnées d'angiogenèse ou les valvulopathies les cellules souches : de nature hématopoïétique les cellules fœtales : traduisent l'absence d'imperméabilité totale du placenta. 2. Les cellules tumorales circulantes (CTC) Important : La majorité des décès liés aux cancers est causée par les métastases et non par la tumeur primitive elle même. Le diagnostic avant toute invasion du cancer est donc un objectif primordial. Le phénomène de métastase est régi par de nombreux paramètres (lieu de métastase, type de cancer, propriétés cellulaires, angiogenèse tumorale, etc.) ; c'est globalement un phénomène inefficace. Les cancers ont des lieux de métastases préférentiels selon leur origine : Cancer Foie Colon, pancréas, estomac Prostate Poumons Métastase préférentielle Poumons Foie Os Os, cerveau L'invasion métastatique repose sur plusieurs grandes étapes (5 schématiquement) : i. Perte d'adhésion cellulaire, détachement de cellules cancéreuses pour migrer dans les tissus, grâce au passage d'une cellule épithéliale à une cellule de type mésenchymateuse. ii. Production d'enzymes par la cellule tumorale pour se créer un chemin dans la matrice extracellulaire (enzymes protéolytiques). iii. Franchissement de la membrane basale. iv. Arrivée dans un vaisseau sanguin par franchissement de la membrane endothéliale par les cellules tumorales. v. Circulation sanguine et migration avec un important risque de formation d'agrégats tumoraux ou plaquettaires dans la circulation. La métastase se forme lors de l'arrivée vers un organe filtre, comme le foie. N.B. Gènes suppresseurs de métastases : E-cadhérine et Nm23 La métastase est un phénomène très peu efficace ! Applications du diagnostic des CTC : effectuer une surveillance pour un diagnostic de récidive, effectuer une surveillance au cours d’un traitement, prescrire des traitements ciblés personnalisés et diagnostiquer précocement un cancer. Le diagnostic de cancers repose sur l’extraction et l’analyse des CTC, aujourd’hui permises par la méthode ISET. Contrairement aux tests déjà existants, la méthode ISET repose sur la filtration des CTC dans un premier plan et, deuxièmement, sur leur analyse cytopathologique. Cette analyse permet alors une étude ciblée de l'ADN des cellules tumorales. Cette méthode a considérablement fait baisser le risque d'erreurs. Le diagnostic du cancer repose sur l'étude des mutations présentes dans l’ADN des cellules tumorales et sur l'utilisation conjointe de l'imagerie. 3. Les cellules fœtales circulantes Important : l'enjeu de l'étude de ces cellules est de mettre au point des examens beaucoup moins invasifs que ceux proposés aujourd’hui (amniosynthèses et biopsie des villosités choriales). Tout repose sur l'obtention d'ADN fœtal via deux sources possibles : les CFC ou l'ADN fœtal libre circulant. Cependant ce dernier est très difficilement dissociable de celui de la mère. 4 types de CFC : lymphoïdes ; myéloïdes ; érythroïdes ; épithéliales N. B. les cellules lymphoïdes et myéloïdes sont présentes dans le sang de la mère tout au long de sa vie et ne sont donc pas utiles au diagnostic. La méthode ISET est utilisée ici pour l'étude de l'ADN fœtal en ciblant des portions précises : les domaines informatifs (domaines génomiques variables et différents chez le père et la mère). La méthode ISET permet par exemple le diagnostic prénatal de la mucoviscidose pour ses formes connues (ex. : délétion ΔF508 de trois paires de bases, connue pour entraîner la mucoviscidose). Conclusion. L'étude des cellules rares circulantes est une piste très prometteuse aussi bien pour le diagnostic comme pour la thérapie du cancer via les CTC ou pour le diagnostic prénatal dans le cadre des maladies héréditaires via les CFC.