« Le voyage » ( parties 7 et 8 )
Baudelaire
Introduction :
C’est le dernier texte du recueil et par conséquent sa place est sa principale caractéristique.
C’est donc le point d’aboutissement du poète mais aussi du lecteur, c’est l’endroit où
Baudelaire voulait nous conduire. Devant l’échec des tentatives précédentes, il nous propose
ici la dernière issue mais de façon poétique puisque c’est un aboutissement : c’est tout
simplement la mort. L’apparition de ce thème n’est que logique puisqu’il avait déjà été abordé
en relation avec le temps qui passe. Ici, la mort se voit matérialisée à travers la métaphore du
voyage. Ce poème se constitue de 8 parties : dans les premières, l’auteur présente les
différents voyages humains, leurs avantages et leurs inconvénients. Il montre ainsi qu’on
retombe toujours dans la même routine bien qu’on essaye d’y échapper ; le voyage n’apporte
rien de nouveau monotonie absolue. Les deux dernières parties sont la conclusion de ce
poème et l’évocation de la mort comme dernière expérience.
Hypothèse de lecture :
C’est le point d’aboutissement du recueil, là où se trouve les secrets cachés de l’œuvre.
Baudelaire dévoile sa quête et ses issues. Elles sont exprimées à travers l’idée du voyage qui
permet de sortir du temps. En réalité, le temps nous fait peur mais nous attire à la fois
Paradoxe. L’auteur utilise d’ailleurs le nous et l’impératif avec pour but de nous lancer
dans cet ultime voyage de lumière et de feu. Baudelaire n’évoque pas forcément une mort
Chrétienne pour sortir des conventions. « Enfer ou Ciel qu’importe ? ». Pour Lui , et il veut
nous en convaincre, la mort est quelque chose d’attirant, de séduisant et elle est le seul moyen
de découvrir l’inconnu. Ce n’est donc pas une vision sinistre mais positive Image positive
à une destinée négative.
Axes :
Evocation des différentes parties de ce voyage : le départ et ses moments préalables.
1) Avant le départ :
Prise de décision ( 3 premières strophes ).
Interrogation sur ce départ.
1e vers :
« Amer savoir, celui qu’on tire du voyage » : Il permet de faire le lien avec les 6 autres
parties qui précèdent c’est à dire le voyage au sens propre. La mort n’a pas encore été
évoquée mais d’après l’auteur le voyage amène de l’amertume.
Suite de la 1e strophe :
Explication de cette amertume et on retrouve évidemment la notion d’espace et de
temps. « le monde » « oasis » « désert » / « aujourd’hui, hier, demain, toujours »
La source principale de cette amertume et de cette vie monotone est encore une fois
l’ennui. « Une oasis d’horreur dans un désert d’ennui. »
« Le monde, monotone et petit,…nous fait voir notre image » : En voyageant, on essaye
de tromper notre ennui, pour sortir de soi mais en fait on retrouve toujours notre image, celle
de l’ennui. ( A mettre en relation avec la notion d’emprisonnement et de monde clos du
poème « Spleen »). Le poète, n’importe où il va, se trouve sinistre et ennuyeux, et par un jeu
d’antithèses et de métaphores, il va rendre le monde ainsi, comme lui.
« Oasis » (survie) « désert » (mort) + Parallélisme « Horreur » / « Ennui »
Le poète ne représente même plus le positif, il n’y a plus d’espoir.
2e et 3e Strophe :
La 1e strophe évoque l’absence de solutions, une interrogation apparaît donc : Faut-il
partir ? Rester ? » Cette interrogation est caractérisée par le point d’interrogation, un rythme
saccadé « Si tu peux rester, reste ; pars, s’il le faut » et enfin par un système hypothétique.
Incertitude de l’auteur.
« Pour tromper l’ennemi vigilant et funeste / Le Temps » : Mise en relief du temps par
le rejet.
Ce thème pose problème à Baudelaire et il le montre par des phrases qui enjambent
toujours la strophe suivante : « …des coureurs sans répit, comme le Juif errant… » « il en
est d’autres qui savent le tuer sans quitter leur berceau. » : Ceux qui n’arrêtent pas de bouger
mais qui ne trouvent jamais la paix éternels sédentaires qui ne s’activent pas pour oublier
le temps.
2) Rentrée dans le voyage :
1e étape du départ : 4e strophe + moitié de la 5e :
Allégorie du temps qui sort vainqueur : « Lorsque enfin il mettra le pied sur notre
échine… » ( A mettre en relation avec « Spleen » et la victoire du temps et de l’angoisse :
« et l’Angoisse atroce, despotique, sur mon crâne incliné plante son drapeau noir. » )
Image de la défaite liée à l’espoir et renforcée par les cris : préparation de la fin et en
l’occurrence de la mort « …nous pourrons espérer et crier…»
« De même qu’autrefois nous partions pour la Chine, les yeux fixés au large et les
cheveux au vent… » : Evocation du concret par un voyage réaliste et l’apparition d’un visage.
« Nous nous embarquons sur la mer des Ténèbres… » : Sens figuré, ultime voyage,
référence aux Ténèbres et à la mythologie Grecque ( Styx ). C’est un voyage vers la nuit,
l’inconnu, la mort. Mais on retrouve tout de même l’image de plaisir, d’espoir, de joie et de
jeunesse, notions qui préparent l’aboutissement du poème et du recueil. « Avec le cœur joyeux
d’un jeune passager. »
Décision de partir : Fin de la 5e strophe + 6e + 7e :
Cette décision se présente par une sorte d’aspiration, d’appel magique : « Entendez-
vous ces voix, charmantes et funèbres… » « Nos Pylades tendent le bras vers nous… » C’est
un appel au voyage rapporté au style direct qui vient de l’au-delà : appel de la mort.
+ « Charmantes » aspect magique : les voyageurs sont envoûtés.
La mort nous invite à retrouver la paradis artificiel : « Par ici ! vous qui voulez manger
le Lotus parfumé…fruits miraculeux…enivrer de la douceur étrange… »
Référence à l’Asie : évocation de l’exotisme, du paradis « Lotus »
Métaphores au sujet de la nourriture qui renforcent l’aspect paradisiaque et le pouvoir
de conviction de l’appel : les fruits sont capables de miracles « Les fruits miraculeux… »
Ouverture sur une nouvelle dimension : tout fait rêver, on est sorti de la pression du
temps « Venez vos enivrer de la douceur étrange de cette après-midi qui n’a pas de fin. »
7e strophe = relation avec ceux qui sont déjà partis. « A l’accent familier nous
devinons le spectre… » « …dont jadis nous baisions les genoux… »
Ce sont des voix d’outre-tombe dont la mort se sert pour pouvoir nous parler « Nos Pylades
-bas tendent leurs bras vers nous ». Il y a tout de même une certaine familiarité qui montre
que le poète a déjà avancé un pied vers ce voyage. Il semble s’assimiler à Oreste qui est déjà
mort : « Pour rafraîchir ton cœur nage vers ton Electre ! » Il se doit de rejoindre les gens qui
l’attendent comme Pylade ou Electre qui pourra peut-être lui apporter un apaisement car il a
voulu l’aider en acceptant sa demande de tuer leur mère.
Agamemnon - Clytemnestre Pylade est un ami d’Oreste et
Egysthe aidera Clytemnestre a
Oreste + Electre tué son mari.
Oreste sera poursuivi par le remord après avoir tué sa mère.
3) Le départ véritable :
Partie 8
Beaucoup de phrases exclamatives et impératives qui traduisent le mouvement de
départ, l’aspiration à la mort, la hâte de partir. « …il est temps ! » « levons l’ancre ! »
« Appareillons ! » « Verse tout ton poison pour qu’il nous réconforte… »
+ On retrouve aussi cette hâte dans l’utilisation de l’expression « il est temps ! » ou encore
dans les sentiments évoqués : « ce pays nous ennuie »
Apostrophes : personnification de la mort : « Ô mort… » « Verse nous…»
+ Métaphore filée du navire qui représente l’aspiration vers la mort : « capitaine »
« levons l’ancre » « Appareillons »
Baudelaire utilise le nous : volonté d’exprimer le destin de tous les hommes.
Antithèses : opposition entre le monde intérieur et extérieur, changement de ses
sentiments (espoir), la mort se charge de valeurs positives « Si le ciel et la mer sont noirs
comme de l’encre » « Nos cœurs …sont remplis de rayons »
Ambiguïté : dernière hésitation, après ses explications, il a tout de même peur de partir.
C’est la mort qui va lui apaiser ses dernières craintes, il ne se précipite pas. « Verse-nous ton
poison pour qu’il nous réconforte ! »
Les 3 derniers vers semblent éclairer le poème :
_ « Nous voulons » : Choix, volonté exprimée, la mort n’apparaît plus comme un
acte subi mais comme domestiquée.
_ « Tant ce feu nous brûle le cerveau » : métaphore de l’Enfer
+ incise « rayons » souffrance
_ « plonger au fond du gouffre » : Mis en relief par un rejet au vers suivant. C’est
un trou noir sans limite : image de la fin ( A mettre en relation avec la mort de Don Juan à la
fin de la pièce )
_ « Enfer ou Ciel, qu’importe: Baudelaire se retire ainsi des conventions de la
religion, du manichéisme.
_ « Au fond de l’Inconnu pour trouver du nouveau » : Quête poétique
Conclusion :
Avec Baudelaire, la poésie ne sert plus à transmettre des sentiments (lyrisme) mais à
découvrir des connaissances, l’inconnu, les limites de l’expérience humaine. Il exprime son
ambition poétique à travers les drames, les souffrances de l’homme, l’aspiration à trouver des
terres inconnues. Il veut ouvrir la poésie à l’inconnu et ainsi la décloisonner des simples
sentiments. Ces voies nouvelles se retrouvent par le rêve, l’imaginaire et les correspondances.
ENTRETIEN : _ Ambition de voyance du poète
_ Nouvelle perspective pour la poésie Sentiments Inconnu
_ Aboutissement : mort DJ
_ Images de l’Ennui et de la victoire de la mort Spleen
Sens figuré, ultime voyage, référence aux Ténèbres et à la mythologie Grecque ( Styx ). C’est
un voyage vers la nuit, l’inconnu, la mort. Mais on retrouve tout de même l’image de plaisir,
d’espoir, de joie et de jeunesse, notions qui préparent l’aboutissement du poème et du recueil.
« Avec le cœur joyeux d’un jeune passager. »
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