MODULE PATHOLOGIES INFECTIEUSES Les diarrhées infectieuses Dr BERAUD 04/04/2005 I. DIARRHEES INFECTIEUSES A. Définition : Emission trop rapide de selles trop liquides Elimination d’une quantité anormale de selles et notamment d’eau (>300g/jours) B. Physiopathologie : 1) Infection par un germe toxinogène Le micro-organisme se fixe à la surface de l’épithélium digestif sans le détruire. Il sécrète une toxine, qui entraîne une sécrétion d’eau et d’électrolytes. On parle de syndrome cholérique ou cholériforme (choléra, certains E.coli et S.doré). action au niveau de l’intestin grêle. 2) Infection par un germe entéro-invasif Le germe envahit les cellules épithéliales et s’y multiplie jusqu’à leur destruction. Il existe donc des lésions inflammatoires, ce qui entraîne la présence de glaire et de sang dans les selles. On parle de syndrome dysentérique (shigella). Atteinte de l’intestin grêle puis du colon. 3) Infection par un germe toxinogène et entéro-invasif Le germe pénètre la cellule épithéliale, traverse la muqueuse sans la détruire et se multiplie dans le tissu sous muqueux où il entraîne une réaction inflammatoire. Diarrhée banale des gastro-entérites aiguës (salmonella). C. Diagnostic : 1) Syndrome cholériforme : Diarrhée aqueuse avec selles liquides profuses « eau de riz », très fréquentes, avec parfois quelques douleurs abdominales et vomissements, aboutissant à la déshydratation. Il n’y a pas de fièvre. 2) Syndrome dysentérique : Selles nombreuses, afécales, glaireuses, mucopurulentes, parfois sanglantes, douleurs abdominales, souvent en cadre colique. Fièvre fréquente (mais pas dans l’amibiase). 3) Syndrome gastro-entérique : Selles liquides fréquentes, vomissements, douleurs abdominales et fièvre. D. Examens complémentaires : Recherche de leucocytes dans les selles au bleu de méthylène : > 5 leucocytes par champ → mécanismes invasifs Coproculture : on recherche les germes habituels. Si diarrhée avec un séjour récent en zone tropicale, VIH, diarrhée invasive, TIAC Examen parasitologique des selles (3 jours de suite) : en cas de séjour en zone tropicales et chez le sujet VIH NFS, ionogramme sanguin à la recherche d’une déshydratation, d’une hypokaliémie ou de signes inflammatoires. Hémocultures en cas de syndrome inflammatoire E. Diagnostic différentiel : Laxatif, fausse diarrhée du constipé Diarrhée par malabsorption (stéatorrhée de la pancréatite chronique : signe du papier taché, les selles biliaires qui facilitent habituellement l’absorption des graisses n’agissent plus et les graisses sont éliminées) Diarrhée des maladies inflammatoires de l’intestin (crohn, rectocolite hémorragique) II. SYNDROME CHOLERIFORME A. Choléra Dû à vibrio cholerae L’homme est le principal réservoir de germes, et la transmission se fait principalement par contact inter humain, par les mains ou par contamination alimentaire ou hydrique. L’immunité est de courte durée (quelques mois) B. clinique apparition brutale de vomissement, diarrhée majeure et douleurs abdominales. Les selles sont aqueuses, fécales, incolores (aspect eau de riz) jusqu’à 10 à 15 L par jour, aboutissant à une déshydratation majeure. Il n’y a pas de fièvre. L’évolution dépend de la qualité et la rapidité de la réhydratation. C. Traitement Basé sur la réhydratation parentérale Antibiothérapie pendant 2 à 3 jours (bactrim, fluoroquinolones…) Vaccination peu efficace (60%) Le traitement préventif : repose sur l’isolement des malades et des mesures d’hygiène générales D. Les différentes bactéries 1) E. coli entérotoxinogène : Responsable de la « turista » du voyageur, par sécrétion d’une entérotoxine. Il s’agit d’une diarrhée peu sévère, associant selles hydriques et douleurs abdominales, des nausées, parfois des vomissements et peu ou pas de fièvre Régression en 4 à 5 jours Pas d’antibiothérapie 2) Diarrhée à S. doré Fréquemment dans le cadre d’une TIAC, par l’ingestion d’une toxine préformée dans un aliment contaminé par le S. doré (ex : panaris du cuisinier) Il s’agit surtout des pâtisseries, des crèmes et des aliments conservés Le début est brutal, 1 à 6 heures après l’ingestion de l’aliment contaminé Le tableau comporte une diarrhée aqueuse, nausées vomissement pas de fièvre Evolution spontanément favorable en moins de 24 heures Pas d’antibiothérapie 3) Diarrhée à B. cereus Diarrhée aqueuse avec douleurs abdominales, 1 à 18 heures après l’ingestion de la toxine dans un aliment insuffisamment cuit (viande, sauces…) ou mal conservé (riz préparé à l’avance) « syndrome du restaurant chinois) 4) diarrhée à clostridium perfingens même tableau, 8 à 12 heures après l’ingestion de viande insuffisamment cuites ou de plats réchauffés 5) diarrhée post-antibiotique à clostridium difficile tout traitement antibiotique entraîne une modification de la consistance des selles, par un déséquilibre de la flore intestinale dans certains cas, une sélection bactérienne peut se faire au profit de clostridium difficile, qui sécrète une toxine, et peut réaliser la colite pseudo membraneuse (ulcère des parois digestives) Diagnostic : soit une simple diarrhée pendant un traitement antibiotique, soit une colite pseudomembraneuse avec AEG, fièvre à 39-40°C, des douleurs abdominales violentes et une diarrhée parfois sanglante avec émission de débris muqueux ou « fausses membranes » le diagnostic est morphologique grâce à la coloscopie qui objective la colite à fausses membranes, et bactériologique en isolent la bactérie et sa toxine Traitement : arrêt de l’antibiothérapie et administration PER OS de flagyl ou de vancomycine (la vancomycine de traverse pas la membrane gastrique : prescription per os pour ne pas passer la barrière de l’estomac) isolement (blouse, gants), mise au repos intestinale et réhydratation contagieux +++ désinfection des selles à l’eau de javel III. SYNDROME DYSENTERIQUE A. Shigella Problème de santé publique dans les pays en voie de développement Contamination par ingestion d’aliments ou d’eau souillés, ou par transmission inter humaine direct 1) Signes Syndrome dysentérique typique avec des selles glairosanglantes voire purulentes, associées à une fièvre 39-40°C, des douleurs abdominales intenses Il existe des formes plus graves avec des signes neurologiques, ainsi que des formes frustes 2) Diagnostic Sur l’isolement de la bactérie à la coproculture 3) Traitement Par bactrim ou fluoroquinolone pendant 5 jours (per os si possible) B. Amibiase colique Le plus souvent après un séjour en zone tropicale ou subtropicale Syndrome dysentérique non fébrile 1) Diagnostic Par examen des selles au microscope au laboratoire 2) Traitement Flagyl ou tibéral C. E. coli entéro-invasif Tableau proche de celui des shigelles Diagnostic sur l’isolement du germe Traitement similaire IV. SYNDROME GASTRO-ENTERIQUE A. Salmonella non typhique Contamination inter humaine ou par aliments contaminés consommés crus ou insuffisamment cuits 1) Signes 12 à 36 heures après l’ingestion, apparition d’une fièvre à 39-40°C, des douleurs abdominales, des vomissements et des selles liquides et fétides le risque est la déshydratation parfois compliquée d’insuffisance rénale chez les sujets fragiles (nourrisson, vieillards) 2) diagnostic isolement du germe à la coproculture voire aux hémocultures 3) traitement antibiothérapie seulement chez les sujets à risque : sujet âgé, jeunes enfants, immunodépression, prothèse vasculaire ou articulaire, drépanocytaire ou formes sévères antibiothérapie par fluoroquinolones pendants 5 jours B. campylobacter jejuni cause fréquente, souvent après consommation de volaille incubation de 1 à 3 jours syndrome gastro-entérique parfois les selles sont teintées de sang l’antibiothérapie n’est pas systématique C. yersinia enterocolitica bactérie capable de se multiplier au froid !!! diarrhée + fièvre + douleurs abdominales souvent localisées dans la fosse iliaque droite (syndrome pseudo appendiculaire) parfois associée à un érythème noueux diagnostic sur l’isolement du germe à la coproculture antibiothérapie sons systématique (forme sévère) D. E. coli entérophathogène Touche souvent les enfants dans les maternités ou les crèches Antibiothérapie car sujet jeunes et fragiles E. E. coli entérohémorragique Diarrhée hémorragique F. Diarrhée d’origine virale Rotavirus ++ Gastro-entérite aiguë : nausées, vomissements, douleurs abdominales, selles diarrhéiques et fièvre modérée Fréquents surtout chez l’enfant, souvent être responsable de déshydratations sévères V. SITUATIONS PARTICULIERES A. Toxi infection alimentaire collective Nécessite une enquête épidémiologique, avec identification du germe et de la source Déclaration obligatoire à la DDASS B. Diarrhée en retour d’un pays tropical Souvent de courte durée, mais pouvant être un diagnostic différentiel de paludisme Peut être due à des salmonelles ou des amibes C. Diarrhée chez le VIH Fréquent, souvent due aux même causes que chez le non-VIH En cas d’immunodépression profonde, recherche des cryptococcoses, microsporidioses… Le recours à la coloscopie courte est plus fréquent VI. TRAITEMENT Corriger ou prévenir la déshydratation : soir PO avec des solutés de réhydratation (GES45…), soit par voie veineuse si PO impossible ou si il existe une perte du poids du corps>10%, glucosé avec Na CL et KCl Réduire l’intensité de la diarrhée : IMODIUM* = ralentit le transit mais empêche l’élimination des germes et favorise les bactériémies, notamment en cas de syndrome dysentérique, et de diarrhée bactérienne. TIORFAN* = anti-sécrétoire, présente moins d’inconvénient. Ces produits sont contre-indiqués chez le nourrisson Traiter l’infection : non systématique. Pour les salmonelles : seulement si diarrhée profuse ou très fébrile, immunodéprimé, < 3 mois, drépanocytaire (sujet noir ou méditerranéen, hémoglobine pathologique qui se cristallise, prend la forme d’un croissant de lune et bouche les capillaires de foie, de la rate, etc.…) ou prothèse vasculaire, sujet âgé. Fluoroquinolones le plus souvent. Traitement préventif : hygiène des mains.