Diabétiques : Protégez Vos Reins
Guide de dépistage et de prise en charge de la néphropathie diabétique
A/ Qu’est ce que la néphropathie diabétique (ND) ?
La ND se définit par une atteinte glomérulaire spécifique du diabète. Elle fait partie
des complications microvasculaires du diabète et atteint indifféremment les
diabétiques de type I et II.
B/ La néphropathie diabétique est-elle fréquente ?
La ND représente 25 à 50% des causes d’insuffisance rénale chronique
Elle complique
o 20 à 40% des diabétiques de type 1
o 10 à 30% des diabétiques de type 2
On note une augmentation de l’incidence de 10 à 15% annuellement,
essentiellement constituée des cas de ND secondaire au diabète type 2.
C/ Quels sont les facteurs impliqués dans la physiopathologie de la ND ?
Le schéma suivant résume les différents facteurs impliqués dans la genèse de la ND.
D/ Comment s’exprime la néphropathie diabétique (histoire naturelle) ?
Les deux types de diabète aboutissent à la néphropathie diabétique.
Il existe néanmoins certaines différences en terme d’évolution.
La figure 2 représente l’histoire naturelle de la néphropathie diabétique dans le
diabète de type 1 :
En effet, la néphropathie diabétique dans ce type de diabète passe par 5 stades :
- Stade 1 :
o Présent dès la découverte du diabète
o Aucune anomalie biologique ou clinique décelable
o Le débit de filtration glomérulaire (DFG) est augmenté
o Les seules anomalies anatomiques rénales sont une augmentation du
volume glomérulaire
- Stade 2 :
o Apparaît entre 2 et 5 ans après la découverte du diabète
o Aucune anomalie biologique ou clinique décelable
o Le DFG est augmenté ou normal
o Les anomalies anatomiques rénales sont un élargissement de la
matrice mésangiale
- Stade 3 : Néphropathie incipiens
o Apparaît entre 5 et 15 ans après la découverte du diabète
o la seule anomalie biologique décelable est la microalbuminurie
o Le DFG est normal
o Les anomalies anatomiques rénales sont un élargissement de la
matrice mésangiale avec ou sans glomérulosclérose
- Stade 4 :
o Apparaît entre 10 et 20 ans après la découverte du diabète
o Présence de macroalbuminurie (protéinurie avérée) et
d’hypertension artérielle (HTA)
o Le DFG peut être diminué < 60ml/mn (Insuffisance rénale)
o Les anomalies anatomiques rénales sont glomérulosclérose diffuse ou
nodulaire (Kimmelstiel Wilson)
- Stade 5 :
o Apparaît au-delà de 20 ans après la découverte du diabète
o Présence de macroalbuminurie (souvent syndrome néphrotique),
d’HTA et d’insuffisance rénale terminale.
o Le débit de filtration glomérulaire est 15 ml/min/1.73m²
o Les anomalies anatomiques rénales sont la glomérulosclérose globale
avec fibrose interstitielle, atrophie tubulaire et hyalinose artérielle
La figure 3 représente l’histoire naturelle de la néphropathie diabétique dans le
diabète de type 2 :
Dans le diabète de type 2, la microalbuminurie peut être présente dès la
découverte du diabète, bien avant l’installation des atteintes structurelles. Elle
représente le signe de l’atteinte endothéliale systémique chez ce type de patient et
elle est considérée comme un bon marqueur du risque vasculaire.
Au cours des deux premiers stades de la néphropathie diabétique, les anomalies
sont purement fonctionnelles et directement dépendantes de l’hyperglycémie ce qui
fait que ces stades soient réversibles et seulement 30 à 40% des cas passent au
stade suivant.
Le stade 3 est le stade charnière (réversibilité encore possible). 80 à 100% des
diabétiques de type 1 et seulement 20 à 40 % des diabétiques de type 2 passent au
stade suivant.
Les stades 4 et 5 sont irréversibles. L’insuffisance rénale apparaît entre 10 à 15
ans après l’apparition de la microalbuminurie. Le DFG diminue de 10ml/mn/an en
l’absence de traitement.
E/ Comment dépister la néphropathie diabétique ?
La néphropathie diabétique est caractérisée par sa latence clinique. Son dépistage
est donc systématique afin de la diagnostiquer et la prendre en charge précocement.
L’élément principal du dépistage est la microalbuminurie. Sa présence signe la
passage au stade 3 et donc l’irréversibilité de la néphropathie diabétique.
Sa recherche systématique doit se faire au moins une fois par an à partir de la 5°
année d’évolution dans le diabète de type 1 et à partir du diagnostic dans le diabète
de type 2.
Le dosage de l’albuminurie peut se faire de plusieurs manières. Le tableau suivant
regroupe les définitions nécessaires pour interpréter l’excrétion urinaire d’albumine.
Echantillon matinal
(µg/mg créatinine)
Recueil minuté
(µg/min)
Débit / 24h
(mg/24h)
Normal
< 30
< 20
< 30
Microalbuminurie
30 299
20 199
30 299
Macroalbuminurie
300
200mg/min
300
F/ Quels sont les éléments du pronostic rénal ?
Certains facteurs sont associés à un pronostic rénal réservé :
L’hérédité de diabète, de néphropathie ou d’HTA
L’équilibre glycémique médiocre
La protéinurie
L’HTA
L’aggravation de l’insuffisance rénale
G/ Comment traiter la néphropathie diabétique ?
Les bases du traitement de la néphropathie diabétique sont :
- L’équilibre glycémique rigoureux : Hémoglobine glyquée (HbA1c) ≤ 6,5% ;
- Le contrôle de l’hypertension artérielle avec :
o PA < 130/80 mmHg
o PA <125/75 mmHg si protéinurie > 1g/24H
- La néphroprotection, en luttant contre l’hyperfiltration glomérulaire.
o Les Inhibiteurs de l’Enzyme de Conversion (IEC) et les Antagonistes
des Récepteurs de l’Angiotensine II (ARAII) sont indiqués dès
l’apparition de la microalbuminurie.
o Un régime pauvre en protides ( 1g/kg/j) est aussi très utile.
- Les autres moyens :
o Lutter contre la dyslipidémie
o Arrêt du tabac
o Exercice physique
CONCLUSION :
La morbimortalité de la ND est très importante chez les diabétiques de type 1 et 2
enjeu économique et humain majeur.
Le dépistage précoce est nécessaire : dosage de microalbuminurie 1x/an.
Une prise en charge multiaxiale est nécessaire et doit inclure un contrôle
glycémique strict, un contrôle tensionnel rigoureux en utilisant de préférence des
IEC ou des ARAII et la lutte contre les facteurs de risque associés.
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