chez l'homme, plus tardivement chez la femme en raison d'une relative protection du fait des
pertes menstruelles et des grossesses. Le tableau pleinement évolué ne s'observe plus que de
façon exceptionnelle ; il associe alors de façon variée de nombreuses manifestations cliniques
témoins des atteintes viscérales multiples : mélanodermie souvent accompagnée d'une
sécheresse ichtyosiforme de la peau, d'une déformation des ongles et d'une finesse anormale
des cheveux, hépatopathie cirrhogène évoluant vers un hépatocarcinome dans un tiers des cas,
rhumatisme chronique de type mécanique ou modérément inflammatoire, myocardie non
obstructive, diabète insulino-dépendant, insuffisance hypophysaire à prédominance
gonadotrope. L'évolution naturelle de la maladie est fatale, le plus souvent par insuffisance
cardiaque ou du fait d'un cancer primitif du foie.
Sous le double effet de la sensibilisation des médecins et de l'identification précoce des
malades par les enquêtes familiales, le diagnostic est aujourd'hui porté habituellement dans des
conditions tout à fait différentes, sur bilan biologique provoqué par un signe d'appel, par
exemple : arthralgies touchant en particulier les deuxième et troisième articulations
métacarpophalangiennes, asthénie non expliquée, élévation modérée des transaminases,
découverte d'une hypersidérémie à l'occasion d'un bilan biologique.
Le traitement par saignées est simple et parfaitement toléré. La mélanodermie, l'hépatomégalie,
la cardiomyopathie et l'asthénie y sont sensibles, par contre les autres complications,
insuffisance gonadotrope, diabète, cirrhose et ostéo-arthropathies, sont irréversibles. C'est dire
l'intérêt d'un diagnostic précoce avant toute complication majeure, et donc l'intérêt du conseil
génétique et éventuellement d'un dépistage systématique.
Le gène HFE
Le gène de l'hémochromatose (HFE suivant la nomenclature internationale) a été dès 1975
localisé sur le bras court du chromosome 6 du fait d'une association forte avec l'antigène HLA-
A3 [4]. Les études familiales ont ensuite conduit à penser que ce gène était physiquement situé
très près de HLA-A, car la distance génétique évaluée entre ces deux loci était inférieure à 1
centimorgan en raison de l'absence de recombinaison décrite [5].
Cette idée a été remise en cause à partir de 1993 par la description d'une association aussi forte
avec l'un des allèles du microsatellite D6S105 localisé à 2,5 mégabases télomériques à HLA-A
[6]. Il est apparu en fait qu'il existait une très vaste région de déséquilibre de liaison, de 2 à 3
mégabases, se traduisant sur toute cette distance par l'existence d'un haplotype HFE
majoritaire, sans doute témoin d'un effet fondateur sinon unique, du moins prépondérant, et d'un
phénomène de suppression de recombinaison qui reste inexpliqué [7].
La découverte rapportée par Mercator Genetics a donc constitué une surprise puisque le gène
candidat identifié, malencontreusement appelé HLA-H, est situé encore plus loin, à environ 4,5
mégabases de HLA-A. Une deuxième surprise a été le fait que la protéine potentielle déduite de
la séquence du gène, constituée de 343 acides aminés, est une protéine transmembranaire
présentant des similitudes importantes avec les protéines de classe I du complexe majeur
d'histocompatibilité, en particulier un domaine susceptible de se lier à la beta2-microglobuline
(figure 1).
Deux mutations ont été décrites dans le gène HLA-H : la mutation C282Y (remplacement de la
cystéine 282 par une tyrosine) et la mutation H63D (remplacement d'une histidine par un acide
aspartique).
* La mutation C282Y est très largement majoritaire puisque retrouvée chez 85 % des 356
chromosomes malades étudiés au départ ; ce pourcentage est de 94,7 % sur les 264
chromosomes HFE testés dans notre laboratoire, correspondant à 92,4 % de malades
homozygotes pour cette mutation [8] ; la mutation C282Y est par ailleurs retrouvée à l'état
hétérozygote chez 5,8 % des sujets dans notre population témoin. La preuve définitive que cette
mutation C282Y est responsable de l'apparition de l'hémochromatose n'est pas apportée mais,
au vu des résultats précédents, si ce n'est pas le cas, elle y est très fortement associée. Bien
que les mécanismes moléculaires en cause ne soient pas compris, un argument vient à l'appui
d'une implication directe de C282Y dans le déterminisme de la maladie ; en effet les souris dont
les deux gènes beta2M ont été invalidés (souris beta2M -/-) développent une surcharge martiale
tissulaire progressive [9, 10]. En faisant disparaître un pont disulfure, la mutation C282Y
désorganiserait le domaine alpha3 et l'empêcherait de contracter des liaisons avec une
molécule de beta2M (figure 1).
* La seconde mutation H63D a été retrouvée chez les malades avec une fréquence allélique de