Page 3
montre aussi une insertion sociale beaucoup plus précise des personnages et une diversification
des types sociaux. Ce qui permettra d’interpréter
Dandin
comme une satire sociale ( travail de
Roger Planchon).
L’intrigue farcesque est la même. Comment passe-t-on d’un acte, essentiellement rempli des
discours oiseux du docteur à une comédie sérieuse en trois actes ?
Enfin la comparaison scène à scène de la péripétie finale du mari confondu (ou de l’arroseur
arrosé car est pris qui croyait prendre), fera apparaître l’évolution des personnages : du
stéréotype au personnage doué d’une relative épaisseur psychologique. On sentira dans
l’écriture de la scène 6 de l’acte III de
Dandin
, confrontée à la même scène dans
Le Barbouillé
,
l’espace qui s’instaure entre le personnage et son discours, interstice par lequel s’engouffre
une véritable mise en question du personnage et par là une liberté d’interprétation de la part du
metteur en scène et de l’acteur.
3/ Le texte de théâtre comme somme de ses représentations.
La plasticité des grands textes de théâtre se prête à des interprétations multiples. Aucune
n’est la bonne, toutes participent à l’approfondissement de l’œuvre, à son enrichissement et
n’en sont que des lectures provisoires.
Daniel Mesguich dans L’Eternel Ephémère écrit :
« Le texte classique possède dans son
écriture, un passé antérieur d’imprimerie et un passé de représentation. Le texte premier est le
texte matériellement visible, signé de l’auteur. Le texte second est constitué de toutes les
traces alluviales (commentaires, analyse, mises en scène et leurs critiques) ce texte second
n’est jamais fini parce qu’il est l’histoire du premier. »
L’ambiguïté de
Dandin
, entre rire et larmes, comme le souligne la mise en scène d’Anne
Marie Lazarini, est perceptible à travers les déclarations d’autres metteurs en scène comme
Planchon et Lassalle. On trouvera ces textes dans le dossier pédagogique ainsi que partiellement
reproduits dans le manuel de français de première Soleil d’Encre chez Hachette, édition 2005.
Dans ce manuel qui consacre deux chapitres à Texte et Représentation, on trouve un sujet
d’EAF, établi à partir d’un corpus autour de Dandin.
La lecture la plus frappante de cette œuvre est bien celle de Catherine Hiegel qui non
seulement renouvelle la relation Angélique-Dandin par le choix d’un acteur aussi jeune et
séduisant que Bruno Putzulu, mais renouvelle totalement la traditionnelle scène de séduction
entre valets ( Acte II scène 1), donnant ainsi au personnage de Claudine une étonnante
profondeur en la dotant d’une histoire personnelle et d’un passé susceptibles d’expliquer son
comportement avec sa maîtresse et Dandin. Si on peut se procurer l’enregistrement du film de
Brialy, on mesurera combien la mise en scène de Hiegel s’éloigne du traitement conventionnel
de l’œuvre et pousse le texte dans une direction qui n’était sans doute pas celle voulue par
Molière, mais qui pourrait se rapprocher de ce que le texte a à nous dire aujourd’hui sur les
rapports de couple.
Une comparaison de l’Angélique de Hiegel et de l’Angélique de Lazarini montrera
l’importance de la distribution. Une Angélique en fraîche et pure jeune première conduira à
provoquer la sympathie du spectateur qui la verra en agneau sacrifié par ses parents à leurs
intérêts. Une Angélique plus mûre sera porteuse d’une autre dimension du personnage. Il en