Farge 2010-2011
Damien Mercredi 16 Novembre
LMPHI172, R. Damien Philosophie Moderne
Philosophie moderne
Cours du 19 octobre rattrapé le Vendredi 18 novembre, de 14h à 17h, en A302.
Pas cours le 30 novembre.
Ouvrage de Naudé sur Considérations politiques sur les coups d'état disponible en ligne.
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Comment l’esprit fini, cerné, agressioné, peut-il saisir quelque chose de l’indéfinité d’un monde friable, vicié,
désorbité ? Certains disaient avant, dans la forteresse thomiste, à la condition de contenir Dieu en soi. Mais s’il
n’y a plus, ou pas encore d’esprit divin imposé, déposé, reposé dans l’homme, il n’y a plus de connaissance
universel que l’homme pourrait réfléchir en lui-même comme sujet pensant ; que l’homme pourrait admirer dans
l’ordre cosmique harmonique. Cosmos, c’est ce qui est beau par harmonie. Dans Harmonie, il y a monie, conseil,
avertissement. En quoi le cosmos harmonique est un conseil ? Tout est ordonné ensemble ; les différents
éléments du monde tournent ensemble, « et c’est bon », comme l’a dit le créateur au bout du 7e jour.
Pour reconstruire une raison savante, il n’y a plus de référence ontologique ancrant la raison dans un ordre
surnaturel du divin. Il n’y a pas encore d’assurance mathématique, pas encore de certitude mécanique, donc
comment affronter le tragique de l’existence humaine, inquiète, intranquille ? Ca impose un nominalisme des
représentations : ne demeurent que des existences singulières, idiotes, irreproductibles, incommunicables. C’est
l’expérience beckettienne du fugitif, innommable.
Il faut donc relier le bibliothécaire, nouveau théoricien de la culture, et le conseiller du prince. Il faut donc
construire deux artifices : l’état, la bibliothèque.
La bibliothèque : construire des répertoires, faire des inventaires, recenser des discours pour en tirer ce que l’on
va appeler des régularité, des ressemblances, des similitudes, de façon à peut être poser des identités, mais dont
la permanence est récusable, discutables.
Opposition entre la thèse galiléenne et la thèse naudéenne :
Galilée : Le chiffre et le nombre ne remplacent pas le nom pour qualifier le réel : je ne peux pas dire ce qu’est le
vrai dans le mouvement du réel par l’intermédiaire du chiffre, ce qui est pourtant la révolution galiléenne. Selon
Galilée, on ne nomme plus, on calcule.
Naudé : on reste dans l’idée que c’est le nom qui signifie. Pourquoi faire une bibliothification des significations
? Pour qu’on puisse se comprendre. On répertorie l’ensemble des discours et des significations, dans le domaine
de l’histoire. On reste dans le sens. Comment dépasser l’essence par le sens ? A travers un discours
compréhensible par tous. On cherche, en quelque sorte, la place de la Concorde, sachant bien que cette concorde
est instable. On demeure dans l’anxiété de l’incertain, et on cherche une chorégraphie de la dispersion. On
cherche à danser ensemble, à peu près harmonieusement. On est dans l’entente cordiale, chorale ; il n’y a plus
d’écoute absolue. Comment faire une symphonie harmonique deux fois discordante ? On cherche alors le chef
d’orchestre, à noter que cette musique est faite de hurlement, d’entourloupes.
Perte de l’assurance, pour ainsi induire des conduites.
Comment passer du langage à la causalité ? Comment passer du devoir être à dire ? Comment passer à l’être ?
Comment le mot peut-il causer de l’être ? Comment le mot fait être ce qu’il dit ?
Peu importe ce que je dis, pourvu que ce soit cru par ceux qui l’entendent. L’art du sophiste, c’est l’art de tenir le
langage dominant. Donc son seul critère, c’est la réussite, et pas forcément la vérité. Pour cela qu’il y a de
l’erreur, et de la vérité (Platon). Tout le travail de la philosophie est de dire qu’il y a du vrai et du faux : l’erreur à
propos de l’être existe. D’où la grande question : qu’est-ce que l’erreur ? L’erreur, c’est dire à propos d’un être
autre chose que son être. C’est dire, à propos d’un être, autre chose que ce qu’il dit ; il y a donc bien un être de
l’erreur, un critère. Il y a une réitification de l’erreur, un être de l’erreur, ce qui implique une connaissance de
l’être qui définit telle ou telle chose.
Ca implique donc une théorie de la définition, de chaque être dans son être, pour définir l’être qui le qualifie, sa
composition, son identité. Cette définition est-elle nominale, ou réelle ? Certes il y a de l’erreur, certes il y a des
définition, mais ces définitions ne peuvent être que nominales. Il n’y a pas de définition ontologique de l’être.
Je peux saisir nominalement l’être en le décomposant, par l’intermédiaire de l’analyse. C’est ce qu’on appelle la
logique analytique, ou décompositionnelle. Mais ce n’est pas parce que l’on décompose un être que l’on
comprend la totalité qui le constitue. Il faut donc passer par une logique, non pas analytique, mais synthétique.
Comment puis-je atteindre la synthèse ? Qu’est-ce que je dois mettre en œuvre pour atteindre l’identité
synthétique de l’être ? Y a-t-il une cause qui produit la synthèse de chaque être ? Il y a des modalités d’accès
synthétique ; c’est ce qu’on appelle la logique modale. Comment puis-je, par le mot, saisir l’être, sachant bien
qu’il y a une coupure ontologique ; qu’il n’y a pas d’ontologie.