étaient persuadés que la France voulait empêcher l’unité de l’Allemagne. Pendant les WWI et
WWII, il y a un réel climat de haine entre les deux peuples. Ce sentiment naît en 1806 côté
allemand, et entre 1866 et 1870 en France. Bismarck se sert de ça pour réaliser l’unité
allemande, et il signe l’officialisation de la création de l’Etat prussien au Château de
Versailles en 1871. En 1866, Bismarck élimine l’Autriche pour l’unité allemande, puis en
1870, il convainc les Etats encore indépendants (Bavière) à s’allier contre la France. Dans la
conception du XIXe siècle, les Français voient les Allemands comme des romantiques, alors
que la raison s’est imposé en France. Certes il y a des « ennemis héréditaires », mais
seulement sur trois générations de 1870 à WWII.
La nécessité de diviser l’Allemagne est une paranoïa des historiens français, mais il y a une
autre origine que la force diplomatique française, puisque ça remonte au Traité de Verdun en
843. En France, il y a un triptyque avec l’affirmation nationale (le territoire français est alors
pentagonal, mais il n’y a pas vraiment de volonté expansionniste), l’émergence d’une
catégorie nouvelle avec la bourgeoisie, et finalement un régime politique républicain. C’est
pareil en Angleterre. En Allemagne, c’est très différent. Il y a l’ambition impériale, avec la
volonté de rétablir le Saint Empire Romain Germanique, et pas de faire l’unité allemande. Le
pouvoir des princes est hostile à l’émergence de la bourgeoisie. Au XVIe siècle, il y a un
passage avec Luther, qui prône la soumission au pouvoir politique : il faut être du côté des
princes, car l’homme vit dans un monde déchu depuis le pêché originel, donc le pouvoir est
injuste par la volonté divine. Cette philosophie explique en partie le ralliement et la
subordination du peuple allemand à l’autorité nazie. Avec la Réforme très importante en
Allemagne, il y a un élément supplémentaire de division. Durant tout ce temps, la France n’a
aucune obsession allemande. En 1815 avec la défaite de Waterloo, il n’y a pas l’impression en
France d’être opposé à la Prusse ou aux Allemands, mais plutôt d’être face au réel ennemi
héréditaire : l’Angleterre (qui a derrière elle le reste de l’Europe, dont les Allemands).
Bouvines, la Guerre de Cent Ans, puis après Louis XIV, avec la Guerre de Sept Ans pour la
possession du Canada et des Indes de 1756-1763 : l’obsession française, ce n’est pas
l’Allemagne mais l’Angleterre. Car Français et Anglais sont en lutte pour le leadership
européen et mondial. cf. Les Mémoires de Guerre de DG, avec la certaine vision de la France,
de sa place et de sa grandeur. Le problème allemand est donc très intense, mais pas si ancien.
2) Les origines et la nature de la question allemande.
A la fin du XVIIIe (cf. Candide de Voltaire). Cette question c’est le sentiment des Allemands
d’être menacés par ses voisins, et le sentiment des voisins d’être menacés par l’Allemagne. Il
y avait une Allemagne qui était un ventre mou allemand, une France puissante mais pas si
expansionniste, et à l’Est le grand empire lituano-polonais, mais désordonné, jusqu’au grand
Empire russe. Puis avec l’affirmation du géant russe sous Pierre le Grand et Catherine II, les
Allemands vont devoir créer une armée suffisamment puissante pour résister à la Russie à
l’Est et à la France à l’Ouest, sans menacer toute l’Europe (analyse d’Henry Kissinger). Puis
avec Napoléon, il y a le développement de l’idée hystérique de dominer toute l’Europe. Ça
accentue en Allemagne ce sentiment de précarité face aux Russes et à la France impérialiste et
révolutionnaire. Il se développe donc une nation qui prend conscience d’elle-même, de la
nécessité de s’unir, et de créer une armée très puissante. L’Allemagne est à la fois confrontée
à une unité nécessitée par le devoir de puissance, et d’autre part à une unité impossible car il
faudrait la prise de pouvoir d’une bourgeoisie nationale, mais l’aristocratie des princes a la
force militaire donc contrôle la bourgeoisie.
Ça conduit au passage d’une Allemagne menacée à une Allemagne menaçante. Il y a la
dissociation des aspirations nationales et libérales à cause des princes, contrairement à tous les
autres pays d’Europe. L’unité allemande se fera donc à partir des féodaux, de l’aristocratie
militaire avec Bismarck. Il y a l’apparition à partir de 1870 d’une classe dirigeante allemande