psychanalyste l’amène à construire un dispositif qui articule voix et regard pour faire exister
ces enfants sans les montrer – petit détour par la fiction qui encapsule le réel en jeu pour le
rendre transmissible.
Durant le débat, Ivan Ruiz a témoigné des effets de son film sur les sujets interviewés eux-
mêmes. Comme Albert, qui « peut parler vingt-quatre heures d’affilée » et dont la principale
difficulté est de ne trouver que difficilement un point d’arrêt. Grâce aux coupures introduites
au montage dans ses interviews, il a découvert à l’écran (et subjectivé) qu’il « pouvait
s’arrêter de parler », l’artifice cinématographique opérant ainsi un délicat travail de
capitonnage.
La dimension politique du film est là : la psychanalyse en situant le savoir chez le sujet lui-
même, au lieu de se placer en maître du savoir, trace une ligne de partage irréductible qui
l’oppose aux autres pratiques du champ « psy ». Sans commenter, en montrant combien ces
sujets nous enseignent pour peu qu’on prenne la peine de les écouter, D’autres voix témoigne
que sur cette position éthique, la psychanalyse ne cédera jamais.
En sortant de cette projection, les spectateurs étaient étonnés de s’entendre eux-mêmes
qualifier par les mots de tendresse et respect la manière dont ces sujets avaient été abordés. Ils
cherchaient ainsi à nommer une dimension du film présente en creux, muette et cependant très
parlante, présente dans les regards. Poser un autre regard sur l’autisme conduit Ivan Ruiz à
effacer sa présence pour ouvrir aux sujets l’espace de la parole. Chacun assiste en direct à
quelque chose de rarement visible : l’effet d’un changement de discours, dont Lacan dit dans
le Séminaire XX qu’il fait toujours « émerger l’amour »
.
Ce film parle ainsi toutes les langues tout en ayant le talent de parler à chacun. Nous pouvons
parier – caramba ! – qu’il sera diffusé et présenté dans de nombreuses Écoles de l’AMP,
ACF, villes, pays et en plusieurs langues.
Ivan Ruiz Acero et Sylvia Cortes Xarrie, D’autres voix. Un autre regard sur l’autisme, Documentaire
en V.O. sous-titré en Espagnol, Catalan, Anglais ou Français.
Armelle Gaydon est responsable de l’activité « Psychanalyse et Cinéma » avec une équipe restreinte
d’organisation constituée en Cartel, dont il faut saluer la forte implication, composé de Pascale Bouda, Lisa
Huynh-Van, David Daron, Michèle Morani et Armelle Gaydon, plus-un.
Le film était projeté en exclusivité mondiale, expression du métier pour signifier que Nice accueillait la
sortie officielle et publique du film.
Laurent É., La bataille de l’autisme, Paris, Navarin-Le Champ freudien, octobre 2012.
Aflalo A., Autisme, nouveaux spectres nouveaux marchés, Paris, Navarin-Le Champ freudien, juin
2012.
Maleval J.-C., Étonnantes mystifications de la psychothérapie autoritaire, Navarin-Le Champ
freudien, octobre 2012.
Membre de l’École de la Cause freudienne (ECF), de l’Association Mondiale de Psychanalyse (AMP),
responsable de la Section Clinique de Nice.
Membre de l’ECF, Délégué régional de l’ACF-ECA, François Bony est à l’origine de cette nouvelle
activité « Psychanalyse et cinéma » dont il a confié la responsabilité à Armelle Gaydon.
Lacan J., « Sur “L’assassin musicien” de Benoît Jacquot », in Miller J.-A. (Dir.) et Joucla J.
(Coordination), Lacan regarde le cinéma. Le cinéma regarde Lacan, collection Rue Huysmans, Paris, 2011,
p. 195.
Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, Paris, Seuil, 1975, p. 20-21 : « Il faut dresser l’oreille à la
mise à l’épreuve de cette vérité qu’il y a de l’émergence du discours analytique à chaque franchissement d’un
discours à un autre. Je ne dis pas autre chose en disant que l’amour, c’est le signe qu’on change de discours. »