SEPTIEME PARTIE : LE ROLE ECONOMIQUE ET SOCIAL
DES POUVOIRS PUBLICS
RAPPELS : Les justifications de l’intervention de l’Etat
L’Etat complète le marché.
L’intervention de l’Etat a d’innombrables objectifs, et notamment une dimension proprement politique, dont il n’est
pas question de rendre compte ici, qu’il s’agisse de la politique de défense, de la politique pénale ou de la législation sur
la famille, même si ces politiques ont des implications économiques et sociales évidentes. Dans une économie de marché,
priorité est donnée à ce mécanisme dans la régulation des activités économiques parce qu’il est jugé efficace. L’Etat n’a
donc qu’un rôle subsidiaire, il intervient là où le marché ne donne pas satisfaction. Ce rôle est néanmoins très important
pour plusieurs raisons. En premier lieu, le marché ne peut pas être simplement livré à lui-même et s’autoréguler. En effet,
la concurrence reste rarement équilibrée, certaines entreprises prennent l’avantage et finissent par obtenir une position
dominante, voire un monopole. Il faut que l’Etat surveille et organise la concurrence, empêchant les ententes entre
acheteurs et vendeurs, démantelant les monopoles. Il s’agit ici d’une activité de réglementation, déréglementation et
reréglementation.
D’autre part, la régulation par le marché est inefficace en présence d’externalités, car tous les coûts ou avantages ne
sont pas pris en comte dans le prix, qui ne peut servir de base au calcul économique. L’Etat peut y remédier par une
politique de taxation des externalités négatives, ou de subvention des externalités positives, ce qui rétablit la vérité des
prix. Cependant, il faut pour cela évaluer précisément l’externalité, ce qui est toujours difficile, et parfois impossible. Il est
également possible de créer un marché sur lequel se négocient les externalités. De même, pour les biens collectifs, il peut
être impossible d’obliger le consommateur à acquitter le prix correspondant à sa consommation (principe de non-
exclusion), ou bien parce que cette consommation n’engendre aucun coût qui lui soit propre (principe de non-rivalité).
Dans le premier cas, il n’y a généralement pas de production (défense nationale) ou de gestion par le marché (air,
poisson). La production peut alors être directement assurée par l’Etat. Dans le second cas, le marché prend en général la
forme d’un monopole naturel dont la politique de prix n’est pas conforme à l’intérêt général. La nationalisation de ce
monopole lui permet de pratiquer des tarifs équivalents à ceux qui résulteraient d’une situation de concurrence. Il s’agit
ici de l’Etat producteur.
Enfin, l’économie ne semble pas susceptible de rester en équilibre, notamment en plein-emploi, par le seul jeu des
forces du marché. Il faudrait, en effet, pour cela que les comportements soient parfaitement rationnels et les prix
parfaitement flexibles, ce qui n’est pas toujours vérifié. De ce fait, des crises se produisent, du chômage involontaire
apparaît. Là encore, l’intervention publique peut contribuer à résoudre le problème, par une politique économique active,
quelles soient conjoncturelles (budgétaire, monétaire) ou structurelle (industrielles, planification).
L’Etat favorise la cohésion sociale.
Les inégalités de revenu, de patrimoine ou de niveau de vie qui découlent du fonctionnement des marchés sont
considérables, et probablement supérieures aux inégalités considérées comme justes par la majorité des individus, même
si le manque d’informations précises sur ce sujet oblige à la prudence. L’Etat intervient pour réduire les inégalités en
fonction du mandat, généralement très imprécis, que les électeurs donnent aux gouvernants à ce sujet à l’occasion des
consultations électorales. Les principaux instruments de cette intervention sont la fiscalité, modulée selon les ressources,
et les prestations sociales, souvent soumises à condition de ressources. Mais, elle passe également par la garantie d’un
accès bon marché à divers services jugés essentiels (téléphone, éducation, santé, logement, etc.). Il s’agit de la
redistribution des revenus vers moins d’inégalités.
Mais la cohésion sociale ne se limite pas à la réduction des inégalités. La maillage du territoire obtenu par les
grands réseaux ou l’existence d’un système éducatif unifié, l’accès égal à divers services publics, quel que soit le lieu,
marquent l’unité de la collectivité nationale. Diverses prestations expriment la solidarité à l’égard de telle ou telle
catégorie, le système de retraite par répartition manifeste la solidarité des générations. Cependant, cette division en
quelques grandes catégories d’objectifs est un peu artificielle, dans la mesure où une même politique peut viser de
nombreux objectifs simultanément. Ainsi, l’action des pouvoirs publics sur les salaires répond à un souci de justice
sociale, favorise l’augmentation de la demande globale et oriente le développement de l’appareil productif.