XXVI. L’EXPANSION FRANÇAISE DANS LE MONDE AU 19E SIECLE
députés en 1892 et de publications comme la Quinzaine coloniale, fondée en 1893. Surtout,
une sensibilité coloniale se développe, faite de l'imagerie répandue par les publications
missionnaires, de la part d'exotisme que comportent les Expositions universelles de 1889 et
1900, et de nationalisme diffus. Publié en 1874, l'Essai sur la colonisation chez les peuples
modernes de P. Leroy-Beaulieu connaît cinq rééditions jusqu'en 1908 : indice d'une audience
certaine. La politique coloniale eut cependant de farouches adversaires. Tenants du
« recueillement », Clemenceau et les radicaux s'élèvent en 1885 contre « ces expéditions
coloniales qui nous prennent notre or et le meilleur de notre sang », affaiblissent l'armée
nécessaire à la défense nationale, sont contraires aux « droits de l'homme ». Les
monarchistes avancent des raisons analogues. Mais, à partir du début du siècle, l'état d'esprit
est tout autre. Au pouvoir, les radicaux ont assuré la continuité de la politique coloniale.
Longtemps hostile, la droite nationaliste en arrive à soutenir celle-ci : « J'aime le Maroc,
écrit Maurice Barrès en 1912, parce qu'il est dans le destin de la France. »
XXVI.b.ii. Les domaines d'action.
L'intervention de la France en Tunisie, en 1881, prend prétexte d'un incident frontalier
entre Algérie et Tunisie. Le traité du Bardo, signé avec le bey de Tunis, permet à la France
d'établir son protectorat, malgré une résistance très vive du Sud tunisien. La formule se veut
souple, pour éviter le poids d'une administration directe, mais la pratique amène bientôt les
fonctionnaires français à doubler les autorités tunisiennes. Heurtées de plein fouet par la
révélation déchirante de la modernité, les élites musulmanes de Tunisie déclinent, tandis que
les bourgeoisies juives autochtone ou européenne immigrée s'affirment rapidement.
La pénétration au Maroc se fait par étapes. Les problèmes de frontière avec l'Algérie,
la conquête du Sahara après 1900, l'anarchie où le pays se trouve plongé amènent la France à
imposer progressivement au sultan une véritable mainmise économique. Écartée des accords
qui établissaient les « droits » français au Maroc, l'Allemagne ne peut éviter, après deux
crises internationales, et moyennant compensation au Congo, l'établissement du protectorat
français au Maroc (1912).
L'influence française en Syrie et au Liban était bien établie. En Egypte, la dette
énorme contractée par le khédive Ismaïl, à l'égard de la France comme de l'Angleterre,
conduit à une mainmise politique de l'Angleterre qui devance la France en 1882 dans la
répression de la révolte d'Arabi Pacha. Les Anglais occupent l'Egypte, faisant pièce à
l'influence culturelle et scolaire des missions françaises.
En Afrique, la France, l'Angleterre et l'Allemagne se partagent le continent après la