Comme adjectif, « sujet » (du latin subjectus, « soumis ») renvoie à
l'idée de sujétion
. « Sujet » signifie soumis, astreint par sa nature ou
sa situation à subir un certain nombre de forces (« l'homme est sujet à
l'erreur »), porté, enclin à (« être sujet à l'alcool »)
, exposé à éprouver
certaines maladies, certains inconvénients
.
Le substantif « sujet » vient du bas latin subjectum, participe passé
neutre du verbe subjicere, « jeter dessous », et renvoie au sujet au sens
philosophique et grammatical par opposition à objectum.
Subjectum traduit en latin l'hupokeïménon grec (littéralement le sup-
posé), également rendu par substantia. Chez Aristote, hupokeïménon
s'applique à l'idée à définir dans une définition aussi bien qu'à la
manière qui permet à la forme de s'actualiser. Le sujet est cela dont
quelque chose est prédiqué tout en ne pouvant lui-même jamais être
prédiqué de quelque chose d'autre
. Il est ce qui demeure au
fondement de toute prédication possible. Ce n'est pas, dit Aristote,
l'illettré qui devienne lettré, mais l'homme. Étymologiquement, le
sujet est ce qui a été placé sous (quelque chose) d'où le glissement de
la soumission à la domination, et de la chose au moi selon le point de
vue auquel on se place. Soumis au pouvoir, le sujet soumet des objets
à sa réflexion. De fait, qu'est-ce qui peut représenter le substrat de
toutes choses, sinon le sujet lui-même ? Mais hupokeïménon
n'exprimait jamais l'idée de subjectivité.
Au sens objectif le sujet est l'entité ou l’être soumis à la réflexion
considéré(e) comme une substance support de qualités ou exerçant des
actions, à laquelle (auquel) s'attachent des accidents. Le sujet est
également le contenu du discours ou de la pensée (« sujet de
discussion »), terme général sur lequel porte un travail intellectuel (le
sujet d'un livre, le sujet d'un examen etc.). En cette acception, « sujet »
et « objet » finissent par échanger leurs valeurs. Ils se distinguent
néanmoins : le sujet d'un dialogue est la matière dont il traite, son
objet est le but que se sont proposé les interlocuteurs. Par ailleurs, on
appelle aussi « sujet » ce qui fournit matière à affection ou à action ;
en ce sens le terme est synonyme de cause, de raison, de motif (« un
sujet de mécontentement », « une dispute sans sujet »). Enfin, dans les
arts plastiques, on appelle « sujet » un motif ornemental contenant des
figures réalistes.
Au sens subjectif le sujet est l'individu pourvu de qualités ou de
talents propres à servir en telle ou telle circonstance (« un sujet
d'expérience ») ; du point de vue politique c'est l'individu soumis à
. L'ouvrage dans lequel John Stuart Mill analyse l'inégalité civile et politique des sexes s'intitule
The Subjection of Women.
. Dans cette acception, l'habitude remplace la nécessité.
. Dans cette acception, la contingence remplace la nécessité.
. Voir La substance.