Le COMESA : clé d`une meilleure intégration régionale

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UNIVERSITE DE COCODY
Programme de Formation en Gestion
de la Politique Economique
UFR- SEG/ CIRES
GPE-ABIDJAN-2009/2010
INTEGRATION AFRICAINE
Expériences d’intégration africaine
Professeur Moustapha Kassé
www.mkasse.com
Doc.4
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Quatre expériences : le COMESA, la SADC
CEDEAO et UEMOA
I/ Le COMESA : clé d'une meilleure intégration
régionale
Le Marché Commun de l'Afrique de l'Est de l'Afrique Australe ou COMESA
de son acronyme anglais, regroupe une vingtaine (20) de pays de cette partie du
continent africain. Afin de permettre à nos lecteurs de mieux comprendre les buts et
objectifs de cette communauté panafricaine dont la République de Djibouti est l'un
des pays membres fondateurs, nous consacrons notre dossier à cette organisation
régionale qu'est le COMESA.
Principaux objectifs du COMESA
Le Traité du COMESA qui définit le programme de l'organisation, couvre un
grand nombre de secteurs et d'activités. Cependant, la pleine réalisation de la
mission du COMESA est considérée comme un objectif à long terme. Afin de garantir
une plus grande efficacité à sa mission en tant qu'institution, le COMESA a défini
dans le cadre de son mandat sa priorité qui est la promotion, à moyen terme,
l'intégration régionale par le commerce et l'investissement.
Le rôle du secrétariat du COMESA est d'assurer la direction en aidant ses Etats
membres à faire les ajustements nécessaires pour pouvoir entrer dans l'économie
mondiale dans le cadre des réglementations de l'OMC et des autres accords
internationaux. Cela se fera par la promotion d'une intégration régionale " orientée
vers l'extérieur ". Par conséquent, les buts et objectifs du COMESA tels que définis
par le Traité et ses Protocoles, sont de faciliter la suppression des faiblesses
structurelles et institutionnelles des Etats membres, afin qu'ils soient à même
d'atteindre le développement collectif et soutenu.
Le COMESA cherche à devenir une communauté économique régionale
pleinement intégrée au niveau international ; une communauté qui connaît une
prospérité économique démontrée par le niveau de vie élevé de ses populations, avec
une stabilité politique et sociale ; une communauté où les biens, les services, les
capitaux et la main d'œuvre circulent plus librement à travers les frontières
géographiques.
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Domaines de concentration
Le COMESA a choisi de se concentrer sur les domaines d'intégration suivants :
- Commerce des biens et des services, y compris les mécanismes de paiement et de
règlement ;
- Promotion et facilitation de l'investissement ;
- Développement des infrastructures ;
- Commerce électronique ;
- Paix et sécurité.
Le tarif extérieur commun
L'introduction d'un tarif extérieur commun est prévue pour 2004. Les pays
COMESA ont conclut un accord sur les taxes : 0% sur les biens de production, 5% sur
les matières premières, 15% sur les biens intermédiaires et 30% sur les biens finals.
Rappel historique
La genèse du Marché commun de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe
remonte au milieu des années 1960. L'idée de coopération économique régionale a été
considérablement stimulé par l'atmosphère effervescente et optimiste qui a
caractérisée la période post-indépendance dans une grande partie de l'Afrique.
L'heure était à la solidarité panafricaine et à l'autosuffisance collective portées par un
destin commun.
C'est dans ce contexte qu'en 1965, la Commission des Nations-Unies pour l'Afrique
(CEA) organisa une réunion ministérielle des Etats alors nouvellement indépendants
de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe en vue d'examiner les propositions de
mise en place d'un mécanisme chargé de promouvoir l'intégration économique sousrégionale.
La réunion qui s'est tenue à Lusaka en Zambie a recommandé la création
d'une communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique
australe.
Un conseil provisoire des ministres, assisté par un comité économique intérimaire,
fut ultérieurement constitué pour négocier le traité et initier des programmes de
coopération économique en attendant la fin des négociations du traité.
En 1978, lors d'une réunion des ministre du Commerce, des Finances et du
Plan tenue à Lusaka, fut recommandée la création d'une communauté économique
sous-régionale, en commençant par une zone d'échanges préférentiels sous-régionale
qui devait graduellement, sur une période de dix ans, se constituer le marché
commun et finalement en communauté économique. A cette fin, la réunion a adopté
la Déclaration d'intention de Lusaka et l'engagement pour la création d'une Zone
d'échanges préférentiels de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe (ZEP). Elle a
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constitué par ailleurs un groupe intergouvernemental chargé de négocier le Traité
portant création de la ZEP. La réunion a également convenu d'un calendrier de
travail du groupe intergouvernemental.
A l'issue des travaux préparatoires, une réunion des chefs d'Etat et de
gouvernement fut organisée à Lusaka le 21 décembre 1981 au cours de laquelle le
Traité portant création de la ZEP fut signé. Le Traité est entre en vigueur le 30
septembre 1982 après sa ratification par plus de sept Etats signataires conformément
à l'Article 50 du Traité.
La ZEP fut créée en vue de tirer profit d'un marché plus étendu, de partager le
patrimoine et le destin communs de la région et de permettre une plus grande
coopération socio-économique, l'objectif ultime étant la création d'une communauté
économique.
Le Traité de la ZEP prévoyait sa transformation en un marché commun.
Conformément à cette disposition, le Traité portant création du Marché commun de
l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe (COMESA) fut signé le 5 novembre 1993 à
Kampala en Ouganda. Il fut ratifié une année plus tard à Lilongwe (Malawi) le 8
décembre 1994.
Il est important de souligner que la création de la ZEP et sa transformation en
COMESA, sont conformes aux objectifs du Plan d'action de Lagos (PAL) et de l'Acte
final de Lagos (AFL) de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA).
Le PAL et l'AFL prévoyaient tous les deux un processus évolutif dans
l'intégration économique du continent dans le quel les communautés économiques
régionales devraient constituer les piliers sur lesquels va en fin de compte s'ériger la
communauté économique africaine.
Opportunités dans les défis : Les technologies de l'information et des
communications (TIC)
Les progrès phénoménaux des sciences et des technologies particulièrement
les technologies de l'information et des communications donnent une opportunité
unique aux pays du COMESA. Les nouvelles technologies de communication par
satellite et sans fil suppriment la nécessité de développement et d'investir dans de
coûteuses infrastructures des télécommunications conventionnelles. De cette
manière, les pays du COMESA peuvent sauter les étapes et tirer profit de ces
nouvelles technologies.
Les technologies numériques et les réseaux de communications créent
également la possibilité d'une économie sans frontières dans des secteurs clé. Au
cours de la dernière décennie, le coût des télécommunications et du matériel
informatique a considérablement chuté, alors que leur vitesse et capacité
augmentaient.
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Cette économie sans frontières et de plus en plus basée sur l'information est mieux
symbolisée par l'Internet, un outil de communication globale et une source de
connaissances dont l'expansion double chaque année depuis sa création.
D'autres technologies comme les marchés financiers informatisés, le courrier
électronique, les échanges de données électroniques et les opérations bancaires par
téléphone nous dirigent vers une économie sans frontières, tirée par l'information.
Ce progrès phénoménal des technologies de l'information et des
communications représente à la fois un défi et une opportunité pour le COMESA.
Indication du potentiel en ressources
90% des terres arables potentielles du COMESA sont encore à
exploiter
Certains des plus larges fleuves du monde (Zambezi, Congo,
Limpopo ) et les plus longs du monde (Nil) se trouvent dans la
région, avec un énorme potentiel d'exploitation (transport par voie
d'eaux, énergie hydroélectrique avec un potentiel de 700 milliards
de KW, dont 96% sont innexploités, l'irrigation et la pêche).
Le COMESA a un des plus larges lacs d'eau douce (Victoria) et
certains des plus larges faits par l'homme (Owen Falls, Kariba,
Aswan)
La région compte beaucoup de merveilles naturelles et faites par
l'homme du monde, telles que Great Pyramids, Great African Rift
Valley, serengeti Plains, Great Zimbabwe, Cradle of Mankind (Kobi
Fora, lac Turkana,etc…) qui sont des sites touristiques avec un
grand potentiel.
Le COMESA a des ressources minerales estimées à environ 300
milliards de tonnes de phosphate, 105 milliards de tonnes de
minerai de fer, 200 milliards de tonnes de pétrole et de grandes
quantités d'uranium, de cuivre et de colbalt.
La région du COMESA a 60 pour cent du cheptel africain (estimé à
300 millions de têtes en 1997).
II/ LA SADC : La Communauté de développement de
l'Afrique australe (SADC)
La SADC souffre d'un problème structurel fondamental qui réside dans la
domination politique et économique de la nouvelle Afrique du sud. Si l'ancienne
SADCC avait pour unique vocation de faire barrage à la déstabilisation sud-africaine,
la SADC a besoin d'une plus grande homogénéité économique pour parer au risque
d'une hégémonie sud-africaine.
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Le développement économique et politique des différents pays de la SADC
fait apparaître d'énormes disparités. D'un côté le Mozambique, le Malawi et la
Tanzanie font partie des sept pays les plus pauvres du monde (avec un revenu
moyen par habitant inférieur à 170$ par an); de l'autre l'Ile Maurice et l'Afrique du
sud sont en passe d'entrer dans la catégorie des pays industriels. Seule l'Afrique du
sud dispose d'un marché intérieur suffisamment grand, et au pouvoir d'achat
suffisamment élevé, pour que les investissements directs dans les secteurs des biens
de consommation et des biens d'investissement y soient jugés rentables. Tous les
autres pays de la SADC présentent pour les investissements directs étrangers un
intérêt circonscrit à la production de matières premières (minérales et agricoles) et à
la production pour l'exportation.
Hétérogénéité économique et politique de la SADC
Sur les 14 pays de la SADC, seule 1'Afrique du Sud, et partiellement le
Zimbabwe, disposent de structures industrielles diversifiées; les autres membres (à
l'exception de Maurice) exportent principalement des matières premières et
importent des produits finis. Cela a conduit non seulement à des relations
commerciales inégales (voir ci-dessous), mais aussi à des économies nationales
présentant de très grandes différences structurelles dans leur développement.
La faiblesse des structures de production industrielle dans la plupart des pays
de la SADC renforce la position de l'Afrique du Sud en tant que site le plus attrayant
pour les investissements directs étrangers et tend à consolider les déséquilibres
existants. A moyen terme aucun changement ne doit non plus être attendu de la
libéralisation économique pratiquée depuis quelques années par la quasi-totalité des
Etats de la SADC. Ce tournant vers l'économie de marché a certes aboli de sérieux
obstacles aux investissements, mais l'amélioration du climat des affaires ne suffit pas
à susciter de nouveaux investissements. A cela il faut ajouter que dans certains pays
les réformes économiques n'ont qu'une incidence superficielle et que le lourd
héritage de plus de vingt années, parfois, d'économie dirigiste se fait encore sentir
dans des réglementations et des directives anti-économiques, ainsi que dans
l'existence d'administrations et d'entreprises semi-publiques pléthoriques et
coûteuses.
Cela confère aussi aux économies de la SADC un attrait très contrasté qui a été
mis en lumière par une enquête effectuée auprès d'hommes d'affaires de quatre pays
de la SADC (Namibie, Zambie, Zimbabwe et Afrique du Sud). Il en ressort que le
Botswana, suivi de près par l'Afrique du Sud, possède en Afrique australe le meilleur
climat d'investissement, les places suivantes étant occupées par le Zimbabwe, la
Zambie et le Mozambique.
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Au chapitre politique tous les Etats de la SADC, à l'exception de la monarchie
traditionnelle du Swaziland, affirment encourager et protéger la démocratie. En
réalité, seule l'Afrique du Sud a pour l'instant un comportement réellement «
démocratique », et cela explique précisément qu'elle soit déjà entrée plusieurs fois en
collision avec les gouvernements plutôt autocratiques de la Zambie et du Zimbabwe.
Lors du sommet annuel de la SADC à Blantyre, au Malawi, le président Nelson
Mandela, en sa qualité de président de la SADC, a notamment reproché à certains
chefs de gouvernements de bafouer les droits démocratiques fondamentaux dans
leurs pays, de réprimer la liberté de la presse et de manière générale de faire trop peu
de cas du respect des droits de l'homme. Mandela est même allé jusqu'à déclarer que
le rêve d'une renaissance de l'Afrique, tel qu'il est nourri par la SADC, dépendait au
bout du compte de l'action de groupements régionaux comme la SADC en faveur de
la démocratie et des droits de l'homme.
L'engagement de l'Afrique du Sud pour la démocratie et le respect des droits
de l'homme dans d'autres pays de la SADC a été à l'origine, ces trois dernières
années, de certaines crispations. Si l'intervention politique conjointe du Botswana, du
Zimbabwe et de l'Afrique du Sud au Lesotho en 1995 a été saluée de toutes parts, la
tentative de médiation de Nelson Mandela dans la campagne électorale zambienne
en 1996, la pression sud-africaine sur le Swaziland (en faveur de l'instauration de la
démocratie) et les critiques adressées au Botwsana à propos de la liberté de la presse,
ont a chaque fois pesé sur les relations bilatérales. Bien que justifiées sur le fond, et
intégrées dans l'exercice de la présidence sud-africaine à la tête de la SADC, les
initiatives sud-africaines en faveur de la démocratie et des droits de l'homme n'en ont
pas moins renforcé au sein de la SADC le sentiment de la domination et de
l'arrogance sud-africaine.
Démocratisation
Les critiques formulées par l'Afrique du Sud sur l'état de la démocratisation et
la situation des droits de l'homme touchent dans les pays voisins des points d'autant
plus sensibles qu'aucun pays ou presque de la SADC ne peut se prévaloir d'une
légitimation démocratique convaincante. Seuls le Botswana, Maurice et le Zimbabwe
ont été dans le passé à l'abri du système de parti unique; jusqu'à présent l'alternance
démocratique n'a été le fait que de six pays, Maurice ayant été le seul Etat à connaître
un changement de pouvoir opéré dans le cadre d'un système démocratique. Dans
tous les autres pays des régimes autocratiques ou minoritaires ont été éliminés par le
biais d'élections organisées démocratiquement. Mais bien qu'étant, de jure, des
systèmes multipartites, la plupart des Etats de la SADC sont encore gouvernés, de
facto, comme des systèmes de parti unique, avec un parti au pouvoir qui exerce un
contrôle absolu sur l'administration et les organes exécutifs (voire judiciaires), une
opposition qui n'a qu'une faible marge de manoeuvre, une presse souvent proche du
gouvernement et des présidents qui considèrent l'Etat et l'économie comme un pré
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carré fait pour assurer leur maintien au pouvoir et leur enrichissement personnel.
Cela tient, d'une part à une culture politique de la démocratisation encore
insuffisamment ancrée dans les moeurs, de l'autre au fait que dans certains Etats les
dirigeants sont restés les mêmes après le passage du monopartisme au multipartisme
(par exemple au Mozambique et en Tanzanie), qu'il n'y a jamais d'alternance
démocratique (Botswana et Zimbabwe) ou qu'un tel changement de pouvoir ne s'est
traduit que par un recyclage des élites (Malawi, Zambie, et en partie au Lesotho).
Toute attaque portée au sein de la SADC par un système démocratiquement
légitimité contre les différents systèmes de préservation du pouvoir politique (mais
pas toujours très démocratique) met donc en péril la base sur laquelle repose la forme
donnée jusqu'à présent à la coopération gouvernementale.
Au-delà de la domination économique, la domination politique de l'Afrique
du Sud menace elle aussi l'unité de la SADC. Avec un président aussi charismatique
que Mandela, l'Afrique du Sud n'a pu résister à la tentation de jouer au maître d'école
en matière de « démocratie ». En termes de realpolitik, il aurait été assurément plus
habile, de la part de l'Afrique du Sud, de laisser la préséance (au conseil de sécurité
ou à la présidence de la SADC) à des hommes politiques comme Mugabe, Chissano,
Nujoma ou Chiluba, pour désamorcer ainsi dans les petits pays de la SADC les
craintes d'une suprématie sudafricaine.
Flux commerciaux
Avant l'adhésion de l'Afrique du Sud, les échanges commerciaux à l'intérieur
de la SADC étaient insignifiants, ils ne représentaient que 4% du total des
exportations et 2,5% des importations. Après l'entrée de l'Afrique du Sud, la situation
a vite changé: depuis 1995, le commerce entre membres de la SADC pèse de plus en
plus lourd dans le volume commercial global des Etats de la SADC. Cette
augmentation toutefois est due en premier lieu à l'intensité des échanges entre
l'Afrique du Sud et le Zimbabwe puisqu'ils représentent à eux seuls 85% du
commerce réalisé à l'intérieur de la SADC. L'Afrique du Sud est le principal
partenaire commercial de pays comme la Zambie, le Zimbabwe ou le Malawi ainsi
que des membres de la SACU (Botswana, Lesotho, Namibie et Swaziland). Les
produits échangés entre membres de la SADC sont principalement des biens de
consommation et d'investissement, des produits semi-finis et des produits chimiques
(fournis principalement par l'Afrique du Sud et, dans une moindre mesure, par le
Zimbabwe), ainsi que des textiles, des produits agricoles, du ciment et des matières
premières brutes.
Depuis la fin de l'apartheid en 1994 et l'ouverture de l'Afrique du Sud à ses
voisins, les exportations sud-africaines vers le Zimbabwe, la Zambie et le
Mozambique, de même que les investissements sud-africains dans ces trois pays, ont
très fortement augmenté, alors qu'aucune extension notoire des exportations des
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autres pays de la SADC vers l'Afrique du Sud n'a été observée. Si en 1993 le volume
des exportations sud-africaines vers le Zimbabwe n'était encore que de 535 millions
de $, il était déjà passé en 1995 à 811,5 millions de $ (+51,7) et à 1,2 milliard de $
(+47,9) en 1996 8).En revanche les importations sud-africaines en provenance du
Zimbabwe n'ont que très légèrement augmenté: 203,3 millions de $ en 1993,273,5
millions en 1995 (+ 34,5%) et 261,5 millions en 1996 (- 4,4%). D'autres Etats comme le
Mozambique ou la Zambie font venir jusqu'à 30% de leurs importations d'Afrique du
Sud, mais ne trouvent pratiquement pas de débouchés pour leurs produits en
Afrique du Sud. Ce déséquilibre commercial est encore plus marqué entre l'Afrique
du Sud et les Etats de la SACU. Selon un indice des déséquilibres commerciaux, la
SADC affiche avec 67 un taux relativement élevé, comparé à 8 avec l'UE et 23 avec
l'ASEAN.
Le volume moyen des échanges intracommunautaires reste relativement
faible, même si on inclut la forte part des exportations sud-africaines vers la Zambie,
le Zimbabwe, le Mozambique, le Malawi et les pays de la SACU. En 1995 le volume
des exportations des Etats de la SADC vers d'autres pays de la SADC se chiffrait à
7,8% et le volume des importations à 7,4%. Edifier sur des relations commerciales
aussi faibles une zone de libre-échange censée servir d'outil à un approfondissement
de l'intégration régionale semble donc très osé, d'autant qu'en dehors de l'Afrique du
Sud et du Zimbabwe aucun autre Etat de la SADC pour ainsi dire ne dispose de
biens et de services compétitifs pour le marché régional.
Ces déséquilibres commerciaux ont déjà provoqué de vives tensions, tant
entre le Zimbabwe et l'Afrique du Sud qu'entre la Zambie et l'Afrique du Sud. La
Zambie et le Zimbabwe reprochent à l'Afrique du Sud de fermer ses marchés à leurs
rares produits concurrentiels par des barrières douanières élevées et des obstacles
non-tarifaires. C'est ainsi que sous la pression de son lobby textile et agricole,
l'Afrique du Sud n'a toujours pas renouvelé les préférences douanières qui existaient
du temps de l'apartheid avant d'arriver à expiration en 1992.
Les relations commerciales entre la Zambie et le Zimbabwe ne sont pas non
plus exemptes de tensions. Bien que la Zambie ait fortement abaissé ses droits de
douane ces dernières années, le marché zambien n'en est pas devenu pour autant
plus accessible. Les autorités zambiennes ont à leur disposition tout un arsenal
d'obstacles non-tarifaires pour empêcher les importations en Zambie (qu'il s'agisse de
directives sur la teneur en matière grasse du fait pasteurisé ou de la perception de
taxes pour l'utilisation obligatoire d'un entrepôt de transit douanier qui ne fonctionne
pas). Ces obstacles commerciaux résultent d'une part du manque de concertation
entre différents ministères, de l'autre de la corruption de hauts fonctionnaires et
d'hommes politiques. Ils affectent en priorité le Zimbabwe dont le solde commercial
avec la Zambie est par tradition fortement excédentaire; en 1995 ses exporitations de
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biens et de services vers la Zambie ont atteint une valeur de 807 millions de ZWD
(SADC 1997).
De son côté le Zimbabwe entrave les importations en provenance de Zambie
par un mélange de barrières douanières et de directives qui compliquent
l'implantation des exportateurs zambiens sur le marché zimbabwéen. En mars 1997,
le Zimbabwe a augmenté sans prévenir les droits de douane sur le ciment, l'un des
principaux produits d'exportation de la Zambie vers le Zimbabwe. Les tarifs sont
passés à l'équivalent de 60 FCFA la tonne, et cela bien qu'à la suite d'un boom dans le
bâtiment les usines zimbabwéennes de ciment n'arrivent pas à satisfaire la demande
nationale.
Une enquête effectuée auprès de chefs d'entreprises de Namibie, de Zambie,
du Zimbabwe et d'Afrique du Sud a révélé que pour les milieux d'affaires les
barrières commerciales les plus élevées se situent au Zimbabwe et en Afrique du
Sud, alors que la Zambie, la Namibie, le Botswana et le Mozambique obtiennent de
bonnes notes. Les Zambiens considèrent les barrières commerciales du Zimbabwe
comme de loin les plus hautes, alors que du point de vue zimbabwéen le commerce
avec la Zambie se déroule sans accrocs majeurs.
En résumé, les problèmes commerciaux au sein de la SADC se posent dans les
termes suivants:
à ['exception de l'Afrique du Sud et du Zimbabwe, aucun pays
pratiquement ne produit des biens compétitifs qui rencontrent aussi
une demande dans les autres pays de la SADC;
beaucoup d'Etats de la SADC ont une gamme de produits trop
semblable pour jeter les bases d'une imbrication commerciale
intracommunautaire et d'une zone de libre-échange qui fonctionne;
jusqu'à présent seuls l'Afrique du Sud et le Zimbabwe ont réalisé
des excédents notables dans les échanges commerciaux à l'intérieur
de la SADC;
l'Afrique du Sud et le Zimbabwe ferment leurs marchés aux
importations en provenance d'autres pays de la SADC par des
barrières douanières élevées et une série d'obstacles commerciaux
non-tarifaires. En revanche l'Afrique du Sud en particulier pratique
une politique commerciale agressive et conquiert des parts de
marché de plus en plus grandes dans de nombreux pays de la
SADC.
Tout en occupant une place centrale pour la poursuite de l'intégration, le secteur
commercial est hypothéqué par de graves problèmes structurels qui, à moyen terme,
pourraient compromettre la cohésion interne de la communauté régionale.
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Intégration juridique
Une communauté économique régionale ne peut perdurer que si, à côté des
gains de prospérité qu'elle permet de réaliser, des relations transnationales
culturelles, sociales et économiques voient également le jour. Cela présuppose une
harmonisation des lois et des règlements dans les Etats membres de la dite
communauté. L'extension des échanges commerciaux passe par la suppression, non
seulement des droits de douane, mais aussi des obstacles commerciaux non-tarifaires
ainsi que par l'harmonisation des textes régissant la circulation routière et les
investissements. Le renforcement des contacts sociaux exige une simplification des
procédures de franchissement des frontières et une suppression de l'obligation de
visa. De telles harmonisations et simplifications sont un préalable indispensable à
l'application des décisions de politique économique prises au niveau ministériel ou
présidentiel. Si les « petits rouages » sont grippés, les « grands rouages », ne peuvent
pas tourner rond.
Pour une communauté régionale géographiquement aussi vaste que la SADC, il
est donc d'une importance capitale:
que la circulation des personnes soit simplifiée et rendue moins
coûteuse,
que la circulation des marchandises par la route soit soumise à une
réglementation commune et simplifiée,
que le trafic ferroviaire de marchandises soit simplifié et que ses
coûts soient abaissés (droits de transit),
que les codes d'investissement soient uniformisés afin d'éviter une
concurrence interne superflue,
enfin que les autres lois et réglementations influant sur le climat des
investissements soient harmonisées.
Les Etats de la SADC n'ont toujours pas réussi, en 17 ans:
à abolir l'obligation de visa; l'Afrique du Sud continue d'exiger un
visa de tous les Etats n'appartenant pas à la SACU; le Malawi, le
Mozambique et l'Angola appliquent une politique similaire;
à introduire des formulaires uniques pour le passage des frontières.
Chaque Etat de la SADC utilise encore ses propres formulaires
d'entrée, de douane, ou de sortie du territoire;
à appliquer, ne serait-ce que timidement, une politique
d'investissement uniforme; le moindre investissement fait l'objet
d'une concurrence active entre les différents Etats, même lorsqu'il
est économiquement ou écologiquement peu judicieux;
à imposer une politique régionale de naturalisation;
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à developper, au-delà d'une première ébauche d'harmonisation, des
directives applicables aux entreprises de toute la région, par
exemple pour l'utilisation des réseaux routiers (nombre d'essieux,
poids total autorisé, longueur du véhicule);
à mettre sur pied, entre communes et districts, des structures
facilitant des contacts transnationaux qui ne peuvent que consolider
les fondations socioéconomiques de la SADC.
Les lenteurs observées dans l'harmonisation et la simplication des modalités
d'application tiennent pour une part à la faiblesse des structures administratives de
nombreux pays de la SADC et des structures de coordination de la SADC elle-même,
de l'autre à des réticences politiques. Beaucoup d'Etats de la SADC pratiquent encore
une politique de conservation du pouvoir qui interdit largement tout esprit
d'initiative à l'appareil administratif. De plus beaucoup de pays de la SADC situés au
nord du fleuve Limpopo souffrent d'un exode des cerveaux vers l'outre-mer,
l'Afrique du Sud et le Botswana qui se traduit souvent par un manque de cadres
moyens compétents dans l'administration publique. Le Mozambique et l'Angola sont
de surcroît confrontés aux séquelles de sanglantes guerres civiles.
Problèmes
Les réserves politiques émises sur la suppression des visas et la simplification
des contrôles frontaliers dans la circulation des biens et des personnes sont en
premier lieu le fait de l'Afrique du Sud. L'abrogation du visa obligatoire - c'est la
crainte nourrie à Prétoria - conduirait à une augmentation fulgurante du nombre
d'immigrants clandestins et attiserait les tensions qui existent déjà sur le marché de
l'emploi en Afrique du Sud. Un débat sur une nouvelle politique d'immigration est
actuellement en cours en Afrique du Sud. Les résultats ne sont toutefois pas à
attendre avant 1999. D'ici là la réglementation sur les visas restera en vigueur pour
les Etats septentrionaux de la SADC.
Les services de police et de douane redoutent qu'une simplification des
contrôles douaniers n'entraîne une forte augmentation du trafic de drogue, d'armes
et de substances soumises à une autorisation. Le trafic de drogue en particulier est
déjà devenu un problème dans la région. La Zambie, où une partie de la mafia de la
drogue est étroitement mêlée à la direction politique du pays, est aujourd'hui la
plaque tournante de ce trafic.
Autre problème: celui posé par le maintien de la Southern Africa Custom
Union (SACU), l'Union douanière de l'Afrique australe, qui regroupe le Botswana, le
Lesotho, la Namibie, l'Afrique du Sud et le Swaziland. La survivance de cet espace
économique uni au sein d'un marché commun plus vaste en voie de formation est un
anachronisme qui empêchera l'évolution de la SADC vers une zone de libre-échange.
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Alors que les Etats de la SADC ont adopté en 1995 une clause d'incompatibilité entre
l'appartenance à la SADC et à la COMESA, clause qui entraîne une résiliation de
l'appartenance à la Comesa, rien de comparable n'a encore été décidé à propos de la
SACU. Pour les petits pays membres de la SACU les paiements effectués par
l'Afrique du Sud pour compenser le manque à gagner dans les recettes fiscales et
douanières représentent souvent le principal poste budgétaire dans les recettes de
l'Etat, ils ne souhaitent donc pas la dissolution de la SACU.
En résumé on retiendra que des progrès concrète vers l'intégration seront
difficiles à accomplir sur la seule base d'accords ou de conventions si, parallèlement,
les modalités d'application ne sont pas harmonisées. L'expérience enseigne que le
processus législatif dure au minimum deux ans, après quoi il doit être encore
entériné par les gouvernements nationaux. La SADC se doit donc d'axer plus
fortement son travail sur l'action si elle ne veut pas se trouver prise dans un «
bouchon décisionnel ». Il importe pour cela d'accélérer certains processus de décision
et de mettre au point des mécanismes d'application.
Mouvements migratoires
La région de l'Afrique australe est marquée depuis l'époque coloniale par de
forts mouvements migratoires. Les mines (et plus tard les plantations) de l'Afrique
du Sud ainsi que les régimes coloniaux ayant précédé l'avènement d'Etats comme la
Zambie, le Zimbabwe, la Namibie et le Botswana, avaient besoin d'une main
d'oeuvre bon marché. Avec l'indépendance des Etats formant à présent la SADC les
migrations de travailleurs ont généralement pris fin. L'exception était représentée par
les mines et les plantations sud-africaines ainsi que les plantations de canne à sucre
du Swaziland qui, même dans une moindre ampleur, ont continué à recruter de la
main d'oeuvre étrangère (principalement du Lesotho et du Mozambique). En 1993 les
mines sud-africaines employaient encore légalement 200 000 étrangers, alors que plus
de 70 000 Mozambicains travaillaient illégalement dans les plantations de canne à
sucre du Swaziland. Selon les estimations sud-africaines, il y a actuellement en
Afrique du Sud entre 2,5 et 4,1 millions de travailleurs migrants clandestins.
La fin de l'apartheid en Afrique du Sud et la reprise de relations
diplomatiques et économiques (parfois étroites) avec les autres Etats de la SADC ont
accru les migrations clandestines d'une main d'oeuvre en quête d'un travail et d'un
revenu, principalement à partir de l'Angola, du Mozambique, du Zimbabwe, de la
Zambie, de la République démocratique du Congo, du Malawi ainsi que de pays
n'appartenant pas à la SADC (Rwanda, Burundi, Nigéria, etc.). Le gouvernement
sud-africain se montre particulièrement dur envers les travailleurs migrants
mozambicains et zimbabwéens qui sont régulièrement expulsés. Si le Botswana, le
Swaziland, la Namibie et, dans une moindre mesure, le Zimbabwe sont également la
13
cible d'une immigration clandestine, l'Afrique du Sud reste le pays qui exerce le plus
fort attrait.
Bien que l'immigration clandestine ait sur le marché sud-africain de l'emploi
une influence négative incontestable, l'Afrique du Sud ne peut moralement ni se
soustraire à sa responsabilité historique pour ce qui est des répercussions de la
migration de main d'oeuvre en provenance de ses voisins du nord, ni traiter plus mal
que les touristes européens les ressortissants d'autres Etats de la SADC si elle veut
préserver la cohésion de la communauté. Le gouvernement sud-africain est,
officiellement du moins, conscient de cette responsabilité et a commencé à élaborer
une politique d'immigration qui doit aussi tenir compte des intérêts des Etats de la
SADC. Il est toutefois à prévoir que deux ans au moins stécouleront d'ici à l'adoption
de cette nouvelle politique; en attendant 1'Afrique du Sud maintiendra sa politique
restrictive aux frontières avec ses voisins.
Les pays du nord de la SADC - principalement le Zimbabwe, le Malawi, le
Mozambique et la Zambie - aspirent à une ouverture du marché sud-africain de
l'emploi pour soulager leur propre marché du travail et s'assurer, par le biais des
travailleurs migrants, d'importants transferts d'argent. D'un autre côté l'émigration
d'une main d'oeuvre qualifiée affaiblit précisément l'administration, l'industrie et le
secteur des services dans ces pays qui connaissent déjà des problèmes de
qualification.
Le sommet de la SADC réuni en septembre 1997 à Lilongwe, au Malawi, a
donc recommandé, sur cette question des mouvements migratoires, l'élaboration
d'une politique commune qui tienne compte à la fois des intérêts des pays
d'immigration et des pays d'émigration. Un protocole de la SADC sur la « Libre
mobilité des personnes dans la région » est actuellement en discussion mais ne
pourra entrer en vigueur que s'il est ratifié par deux tiers au moins des membres de
la SADC. A la lumière des problèmes décrits plus haut et des conflits d'intérêts entre
patronat et syndicats, cela semble plutôt improbable.
Le dossier des travailleurs migrants à l'intérieur de la SADC recèle une
dangereuse bombe politique et sociale pour la communauté régionale. Il n'existe pas
de solution « simple ». La SADC devra bien plutôt trouver une réglementation qui
prenne en compte les exigences de développement économique.
Réorientation de la SADC
Le passage de la SADCC à la SADC a inauguré une prudente transition entre
une communauté essentiellement défensive et une communauté régionale se
forgeant et s'intégrant activement par le biais du commerce. Cette nouvelle
orientation, de même que l'accueil de nouveaux membres, ont non seulement élargi
14
la gamme des domaines de coopération (ont été ajoutés: les finances et les
investissements) mais ont aussi modifié le mode de travail de la SADC.
Cela s'est clairement exprimé dans la formulation des premiers protocoles
adoptés en juillet 1996 après de longs débats internes. Le morcellement des
compétences en points de contact sous-sectoriels (en particulier dans le secteur
agricole dont 3 Etats se partagent la responsabilité) a fait monter au sein de la SADC
l'aspiration à une réorientation. Une étude commandée en 1996 par la SADC propose
deux options à la réflexion.
Option 1: rationalisation du statu quo
La SADC conserve la même forme de coopération, avec des compétences sectorielles
par pays, mais elle la rationalise conformément à la volonté de privilégier
l'intégration sur une coopération strictement fonctionnelle:
les points centraux de la réforme s'articulent autour de la définition
des secteurs et la répartition des compétences entre les pays
membres. L'extension des aires de coopération à pratiquement tous
les aspects de l'activité gouvernementale a conduit à un
chevauchement des compétences et à la concentration, entre les
mains des mêmes fonctionnaires nationaux, de la responsabilité de
plusieurs secteurs. De là une surcharge du système et de ses
ressources humaines limitées. Le fractionnement des compétences
en secteurs de plus en plus petits doit être stoppée et les
compétences regroupées en 12 grands secteurs. Les nouveaux
secteurs ne seraient plus attribués aux pays suivant des
considérations politiques mais sur la base d'avantages comparatifs
et des ressources disponibles. Conformément à ce principe la
responsabilité du secteur touristique a déjà été transférée du Lesotho
à Maurice. Compte tenu des ressources nécessaires, le secteur «
agriculture », ne pourrait sans doute être coordonné, dans toute son
étendue, que par l'Afrique du Sud.
il est recommandé de tenir compte de nouveaux développements,
de réduire les compétences matérielles des gouvernements
nationaux au profit de groupes de la société civile et d'autres
groupements d'intérêts et d'étendre ainsi les compétences pour des
institutions régionales. Le passage d'une économie dirigiste à
diverses formes d'une économie de marché libéralisée exige aussi un
changement de mentalité dans la coordination de la SADC: les
ministères responsables des différents secteurs ne peuvent plus se
contenter de donner des ordres mais doivent coopérer avec les
représentants d'autres groupes d'intérêts. Ils devraient en outre se
15
concentrer, non pas sur la planification et la réalisation de projets
ponctuels, mais sur l'amélioration des conditions d'ensemble.
Option 2: regroupement des compétences
La SADC opterait pour une concentration encore plus forte de ses activités et
mettrait en place de nouvelles structures de compétences purement régionales. Les
conséquences en seraient les suivantes:
Il y aurait d'une part une séparation entre compétences régionales et
nationales, de l'autre un regroupement encore plus serré des
secteurs. Au lieu d'agir exclusivement, comme jusqu'à présent, sur
la base de compétences sectorielles rationales, cette approche prévoit
de créer de nouvelles structures vouées spécifiquement à des
questions d'intérêt régional (directions de la planification et de la
coordination) pour confier ensuite, au niveau national, la
coordination de ces seules compétences à des comités nationaux de
la SADC.
La SADC devrait s'écarter d'un fonctionnement axé sur des projets
et des secteurs, avec un appareil administratif réduit, pour se
réorienter vers une approche pluridisciplinaire centrée sur des
programmes de développement. La condition préalable en est que
l'intégration régionale soit perçue non pas comme un but à
atteindre, mais comme un processus. Cela exige une structure
institutionnelle plus large qui puisse à la fois opérer au niveau
stratégique et coordonner les modalités d'application (directions de
la planification et de la coordination).
Conjointement avec les directions de la planification et de la
coordination, le secrétariat serait appelé à jouer un rôle plus
important que jusqu'à maintenant dans le regroupement et la
gestion des activités régionales.
Au niveau national tous les intérêts majeurs seraient rassemblés
dans des comités nationaux de la SADC. Le morcellement sectoriel
pourrait être ainsi surmonté.
La SADC n'a pas encore fait son choix entre les deux options. Compte tenu des
expériences du passé, on peut néanmoins supposer que l'option n°1 l'emportera.
C'est en effet celle qui modifie le moins les structures traditionnelles et qui est donc la
plus facile à imposer. Il est toutefois à prévoir que la consolidation des secteurs et
l'attribution de leur coordination suivant des critères d'efficacité et de ressources se
heurtera tout particulièrement à la résistance des Etats « moyens » de la SADC,
comme la Zambie, le Zimbabwe et le Botswana, ces derniers ayant à redouter un
renforcement de la domination sud-africaine. La plus forte intégration du secteur
16
privé et des ONG dans le processus de décision au niveau de la SADC renforcera
également le poids de l'Afrique du Sud, ses milieux d'affaires étant organisés d'une
manière infiniment plus efficace que ceux des autres pays de la SADC.
Synthèse et perspectives
La SADC a décidé dès 1992 de se transformer en une communauté régionale
s'intégrant par le commerce et le développement. Elle a accompli jusqu'à présent des
progrès importants dans cette direction (accueil de nouveaux membres plus
fortement orientés vers l'économie de marché; signature de protocoles; ouverture au
secteur privé). Il lui reste néanmoins à prendre des décisions infiniment plus lourdes
de conséquences qui détermineront dans une large mesure sa capacité à affronter la
dynamique d'une intégration économique centrée sur le commerce.
L'un des problèmes majeurs est posé ici par la juste répartition des
coûts et des bénéfices de la SADC entre les pays membres, aucun
d'entre eux ne devant être privilégié par rapport aux autres. La
controverse porte tout spécialement sur la position de l'Afrique du
Sud qui, du fait de sa puissance politique et économique, exerce déjà
aux yeux de ses voisins une domination excessive. La SADC aura
besoin d'un mécanisme de compensation économique qui garantisse
aux Etats plus faibles de tirer également profit de leur participation
à la SADC. La difficulté à mesurer les coûts et les bénéfices rend leur
perception particulièrement problématique. Dans le passé
l'agressivité de la politique sudafricaine dans la région et ses
réticences à ouvrir ses marchés aux importations (limitées) en
provenance d'autres pays de la SADC ont nourri les soupçons de
certains Etats de la SADC envers une Afrique du Sud suspectée de
ne pas prendre au sérieux l'édification d'un véritable partenariat. La
mise en place d'un fonds compensatoire, calqué sur le modèle du
budget de l'UE ou de la SACU, serait une option. Une autre
possibilité résiderait dans la protection sélective de certains secteurs
industrials des petits pays de la SADC contre la domination sudafricaine. L'une et l'autre options n'ont cependant guère de chances
de se traduire dans les faits: la première (fonds compensatoire) est
impossible à financer; la seconde s'oppose à l'objectif de créer une
zone de libre-échange et de libéralisation économique. On pourrait
alors imaginer une solution politique: l'Afrique du Sud ouvre de
préférence son marché aux importations en provenance d'autres
pays de la SADC et renonce à toute hégémonie politique au sein de
la SADC.
Les relations extérieures de la SADC, marquées par des divergences
d'intérêts entre l'Afrique du Sud d'une part, les autres pays de la
17
SADC de l'autre, principalement vis-à-vis de l'UE, sont une autre
source de problèmes. Son statut de « pays industriel émergent » et
de « grande puissance régionale » vaut à l'Afrique du Sud un intérêt
politique et économique infiniment plus grand, de la part des pays
industriels, que pour les autres pays de la SADC. La tentative sudafricaine d'obtenir un traitement préférentiel dans le commerce avec
l'UE, son premier partenaire commercial, s'est déjà heurtée à la
résistance d'autres Etats de la SADC (Zambie et Zimbabwe) qui y
voient l'accord d'un privilège inconvenant dans l'attribution de
quotas d'importation par l'UE. L'engagement de l'Afrique du Sud en
faveur de la démocratie et des droits de l'homme, y compris dans les
pays de la SADC, n'a suscité que peu d'enthousiasme dans la
mesure où rares sont les autres pays de la SADC à pouvoir faire
figure d'élèves modèles en matière de démocratie. Pour désarmorcer
le potentiel de conflit qui couve ici, il importe que l'Afrique du Sud
et les autres pays de la SADC renforcent entre eux la concertation et
l'information.
Le fait est par ailleurs que les gouvernements dotés d'une faible
légitimation démocratique rechignent à déléguer des compétences
rationales à des structures régionales de décision. Jusqu'à présent le
renforcement du secrétariat général de la SADC et de la SADC ellemême a toujours buté sur le refus des gouvernements d'abandonner
leur autorité sur les secteurs économiques. Dans les Etats aux
structures politiques encore fragiles, le transfert de prérogatives
nationales à une institution régionale est actuellement difficile à
imaginer. L'idée de renoncer à un pouvoir politique hérité de fraîche
date des puissances coloniales exige une rationalité et une vision qui
est pour l'instant inexistante. Dans le sillage de l'intégration par le
commerce, une telle renonciation sera néanmoins inévitable
puisqu'il faudra harmoniser les législations, les réglementations et
les modalités d'application, uniformiser les tarifs et les taxes et
simplifier les contrôles douaniers. La prise en compte accrue du
secteur privé dans les choix économiques de la SADC conduira
également à un affaiblissement de la souveraineté nationale et
devrait donc se heurter à la résistance de certains Etats de la SADC.
Même si le processus est laborieux, la modification des structures de
décision devra done passer par des stratégies « souples » et
graduelles, fondées sur la concertation.
Enfin la SADC ne pourra échapper à une réforme de ses structures si
elle veut satisfaire aux impératifs d'une intégration économique.
Une telle réforme implique la réorganisation des secteurs et des
responsabilités
par
secteur,
la
création
d'instruments
18
supplémentaires de coordination et l'abandon idéologique de «
l'organisation active du marché » (économie dirigiste). Compte tenu
de la multitude d'intérêts impliqués, cette réforme des structures ne
pourra sans doute être imposée que de manière graduelle, elle
prendra donc du temps et cela risque d'engendrer des problèmes
dans la mise en oeuvre de la zone de libre-échange. Les mêmes
lenteurs sont à attendre dans l'application d'un guidage économique
qui, bien que régulièrement invoqué, n'est jamais pratiqué de
manière conséquente. Les chefs de gouvernements de la SADC sont
appelés ici à prendre rapidement des décisions sur les nécessaires
regroupements de compétences et de ressources dans les ministères
nationaux.
Pour conclure:
La SADC n'est animée que d'une volonté politique limitée de
maîtriser le passage d'une communauté basée sur une coopération
sélective et fonctionnelle à une communauté régionale reposant sur
le commerce; à sa décharge il faut reconnaître qu'elle ne réunit
encore pour cela que des conditions économiques insuffisantes
(faiblesse du volume commercial intracommunautaire, déséquilibres
commerciaux, domination économique de l'Afrique du Sud).
La réussite, d'ici au milieu du siècle prochain, de cette transition
visée dans le protocole commercial dépend essentiellement du
succès des réformes allant dans le sens de l'économie de marché, de
l'harmonisation des réglementations concernant le commerce et les
transports et de la solution des déséquilibres commerciaux entre la
Zambie, le Zimbabwe et l'Afrique du Sud. Au plan de 1'organisation
la SADC doit viser plus fortement l'action et se débarrasser du poids
des susceptibilités nationales si elle veut que sa transformation en
zone de libre-échange soit un succès.
Les problèmes faisant obstacle à la création de la zone de libreéchange doivent être réglés. Il faut citer ici: les différents aspects de
la domination sudafricaine (déséquilibres commerciaux, leadership
politique), la juste répartition des coûts et des bénéfices de
l'intégration commerciale (migration de main d'oeuvre, mécanisme
compensatoire, SACU) ainsi que l'harmonisation des lois, directives
et réglementations (transports, régimes frontaliers, code
d'investissement).
La SADC doit tenir compte, dans se structures d'organisation, de
l'évolution de l'environnement global (participation du secteur
privé, abandon de l'économie planifiée) et des exigences placées
19
dans les prestations de la communauté (efficacité des processus de
décision, consolidation de la coordination des secteurs,
élargissement du rôle du secrétariat général). Une réforme s'avère
nécessaire, mais sans doute sera-t-elle politiquement plus longue à
imposer qu'il ne faudrait le souhaiter.
III- Analyse comparative UEMOA CEDEAO
L'intégration est un Processus par lequel deux ou plusieurs pays cherchent à éliminer
les barrières discriminatoires existant entre eux pour établir un espace économique
unique.
Devant les changements profonds qui affectent l'économie mondiale, l'intégration
apparaît comme la réponse adéquate au phénomène de globalisation. La constitution
des blocs telles que l'union Européenne, l'Accord de libre Échange Nord Américain
(ALENA), témoigne de la nécessité des pays à cheminer en groupe. Le Burkina Faso,
à l'instar des pays de la sous région appartient aux organisations d'intégration
économique suivantes :
La Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO)
L'union Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)
Dans le cadre de ce travail, nous présenterons d'abord dans le tableau ci dessous les
deux communautés, ensuite les avantages et les coûts de l'intégration et enfin les
mesures prises pour remédier aux conséquences négatives de l'intégration
Présentation de deux organisations d'intégration économique
Communauté
Union Économique et Monétaire
Économique des États
Ouest africaine
de l'Afrique de l'Ouest
1- Nom (sigle)
Communauté
économique des États Union économique et
de l'Afrique de l'Ouest Ouest africain (UEMOA)
(CEDEAO)
Monétaire
2- Date et lieu de 28 Mai 1975 à Lagos
10 Janvier 1994 à Dakar (Sénégal)
création
(Nigeria)
3- États membres
Bénin, Burkina, Cap
vert, Côte
d'ivoire, Bénin, Burkina, côte d'ivoire, Guinée
Gambie,
Ghana, Bissau(,12 Mai 1997) Mali, Niger,
Guinée, Guinée Bissau, Sénégal, Togo
Mali,
Mauritanie,
20
Niger, Nigeria, Sénégal,
Sierra Léone, Togo
4- population
Superficie
- 240 Millions d'hts - 6
67 Millions d'hts - 3 509 125 km2
194 000km2
Promouvoir
la
coopération
et
l'intégration
afin
d'améliorer le niveau de
vie de ses populations
Maintenir et renforcer
la stabilité économique
Favoriser les relations
entre ses membres,
contribuer au progrès et
5Principaux au développement du
objectifs
continent africain
Harmoniser
et
coordonner
les
politiques nationales
Créer un marché
commun et une union
économique
Participer
à
la
création
de
la
communauté
économique africaine
Renforcer la compétitivité des
activités économiques et financières
des États membres dans le cadre d'un
marché ouvert et concurrentiel et d'un
environnement juridique, rationalisé
et harmoniser
Assurer
la
convergence
des
performances et des politiques
économiques des États membres par
l'institution
d'une
surveillance
multilatérale
Créer entre les États membres
commun basé sur la libre circulation
des personnes et des biens , des
services et des capitaux et sur le droit
d'établissement
des
personnes
exerçant une activité indépendante ou
salariée ainsi que sur un tarif extérieur
commun et une politique commerciale
commune
Harmoniser les législations des Etats
membres et particulièrement le régime
de la fiscalité
Instituer une coordination des
politiques sectorielles nationales par la
mise en œuvre d'action commune et
éventuellement
de
politiques
communes notamment dans les
domaines des ressources humaines de
l'aménagement du territoire, des
transports et télécommunication, de
l'environnement, de l'agriculture de
l'énergie, de l'industrie et des mines.
La conférence des La conférence des chefs d'Etat et de
6
Instances chefs d'Etat et de Gouvernement
dirigeantes
Gouvernement
Le conseil des ministres
Le
conseil
des La commission
21
ministres
La cour de Justice
Les
commissions
techniques spécialisées
Le secrétariat exécutif
Le
conseil
économique et social
Le parlement de la
communauté
Le secrétaire exécutif
est assisté de deux
adjoints; (S.E.A)
Le secrétaire exécutif
adjoint
chargé
de
l'administration et des
finances est responsable
des sections suivantes :
Affaires juridiques
Affaires sociales et
culturelles
Administration
et
finance
7 - Organigramme
L'autre
chargé
des
affaires
économiques
est responsable des
sections
Commerce, Douane,
Immigration, Questions
monétaires
et
paiements
Transport,
communication, énergie
Industrie, Agriculture
et ressources naturelles
Recherche
et
statistiques
La cour de justice
La cour des comptes
Le comité inter-parlementaire
La chambre consulaire régionale
La
commission
commission
comprend huit membres et est dirigé
par un président élu pour quatre ans.
La présidence qui est renouvelable
est assurée par chaque État membre à
tour de rôle. Les commissaires sont
chargés
de
la
direction
des
départements ci-dessous :
Le département de l'amenagement
du territoire et des infrastructures, des
transports et des communications ;
Le département des ressources ;
Le département de l'énergie, des
mines, de l'industrie et de l'artisanat ;
Le département des politiques
commerciales et douanières ;
Le département des politiques
économiques ;
Le département du développement
rural et de l'environnement ;
Le département des politiques
financières
8
Institutions Agence monétaire de Banque centrale des Etats
spécialisées
l'Afrique de l'Ouest l'Afrique de l'Ouest (BCEAO)
22
de
(AMAO)
Banque
Ouest
africaine
Fonds de coopération, développement (BOAD)
de compensation et de
développement
de
Avantages
Les principaux avantages découlant de l'intégration sont :
La baisse des coûts de production à l'intérieur de la région grâce aux
économies d'échelle due à la réduction des barrières tarifaires et non
tarifaires,
La substitution du commerce légal au commerce transfrontalier
illégal généralement associé aux activités improductives et
onéreuses encouragées par des différences de prix découlant des
politiques diverses ;
L'accélération du rythme des investissements attirés par un marché
élargi et un code communautaire des investissements plus libéral.
La baisse des prix due à la réduction des tarifs et à la concurrence et
l'élargissement de la gamme de choix pour les consommateurs.
Au delà de ces avantages considérés comme globalement positifs pour la zone,
l'intégration, entraîne des coûts.
Les coûts
Le schéma de libéralisation préconisé dans le cadre de l'UEMOA et de la CEDEAO
entraîne, au moins dans l'immédiat des moins values budgétaires, et une inégalité
dans la répartition des avantages et des coûts de l'intégration pour les différents
pays.
Les moins values budgétaires
La fiscalité de l'ensemble des pays de la sous région se caractérise essentiellement par
l'importance de la fiscalité de porte dans le montant total des recettes budgétaires des
Etats.
Dans un tel contexte, toute diminution ou suppression des droits de douane entraîne
des moins values budgétaires importantes pour les différents pays. Surtout pour des
pays en proie à de graves difficultés financières, toute perte de recettes est lourde de
conséquences.
Mais au delà de ces moins values budgétaires, on note une inégalité des avantages et
des coûts pour les pays.
Une inégalité des avantages et des coûts
23
Celle-ci résulte des écarts de développement existant entre les différents pays,
en particulier sui- le plan industriel.
Les pays dotés de tissus industriels plus développés et de circuits de distribution
plus élaborés profitent plus des effets de l'intégration que les pays moins avancés à
tissus industriels peu étoffés. Ceci s'explique par le jeu des .avantages comparatifs
généralement défavorables à ces derniers.
A l'intérieur de l'UEMOA, la Côte d'Ivoire constitue l'économie dominante avec
34,7%, du PIB de l'Union. Elle est suivie du Sénégal (22,1% du PIB) et ensuite les
autres pays qui représentent chacun environ 8,5% du PIB de l'Union.
C'est la disparité des niveaux de développement des économies que semble attester
la liste des produits et des entreprises agréés à la taxe préférentielle communautaire ;
A la date du ler septembre 1997, sur les 211 entreprises dont les produits sont
agréées., on note., la répartition suivante :
98 pour la Côte d'Ivoire
56 pour le Sénégal
18 pour le Mali
15 pour le Burkina Faso
9 pour le Togo
8 pour le Niger
6 pour le Bénin
D'autre part, l'hétérogéinité des mesures tarifaires et non tarifaires, notamment sur le
plan du droit des affaires, sur le plan de la fiscalité et dans le domaine des règles de
concurrence fausse le jeu de la libre concurrence.
De telle hétérogénité viennent, le plus souvent aggraver entre les pays l'inégalité
dans la répartition des avantages et des coûts pour les différents pays.
Face à toutes ces conséquences on note un effort de mise en place de mécanismes de
compensation pour y remédier.
Les mécanismes de compensation aux moins values budgétaires et
aux
inégalités et disparités
Ces compensations peuvent être regroupées en deux catégories :
la compensation par les fonds
la compensation par le droit
La compensation par les fonds comprend :
Le fonds de compensation financière provisoire pour pertes de
recettes de l'UEMOA ,
Le fonds de coopération, de compensation et de développement
(FCCD) de la CEDEAO;
24
Les fonds structurels pour l'aménagement équilibré du territoire
communautaire
La compensation des disparités par le droit comprend d'une part l'harmonisation des
fiscalités et des législations et, d'autre part, l'adoption de règles garantissant la libre
concurrence
25
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