16/10/06 CM Monde Arabe Introduction Le monde arabe s’étend de la Mauritanie à l’Irak (22 états arabes). Il est en très forte expansion démographique. Le nombre exact d’habitants du Caire est par ex inconnu. En Syrie, plus de 65% de la population a moins de 18 ans ; les difficultés économiques en perspective sont donc importantes. Le monde arabe est également très hétérodoxe. Grand paradoxe car bien qu’objectivement très différencié géographiquement, sociologiquement, démographiquement, etc. mais il ressent un sentiment « mythique » d’unité extrêmement fort. La culture politique (idéologie pour certains) cimente le MA, d’où le sentiment d’appartenance commune à la « nation arabe ». Politiquement, l’un des grands problèmes du MA qui fabrique le politique est justement cette forte tension entre la raison de la nation arabe (unifiée) et celle des états considérés comme artificiels par les militants unificateurs. Il explique les discours et comportements politiques, ainsi que les crises du MA. Lire : Michael Hudson, Arab politics: The quest for legitimacy Cette tension fait que l’Etat arabe a un problème de production de légitimité du fait de cette unité arabe mythique : tant qu’elle n’aura pas été réalisé, leur existence est marquée d’illégitimité. L’état est « transitoire », « artificiel », « injuste ». Il y a très peu de points communs entre des états comme l’Arabie Saoudite et le Liban, au plan géographique, démographique, économique… http://fr.wikipedia.org/wiki/Ligue_arabe Composition de la ligue arabe Aujourd'hui composée de 22 membres, elle était constituée de sept membres fondateurs : Égypte Irak Liban Arabie saoudite Syrie Jordanie (il s'agissait initialement de la Transjordanie devenue l'actuelle Jordanie après la perte de la Cisjordanie en 1967). Yémen le Yémen du Nord puis le Yémen du Sud (1967) À ceux-ci se sont ajoutés : Libye (1953) Soudan (1956) Maroc (1958) Tunisie (1958) Koweït (1961) Algérie (1962) Bahreïn (1971) Qatar (1971) Émirats arabes unis (1971) Oman (1971) Mauritanie (1973) Somalie (1974) Djibouti (1977) Comores (1993) Palestine : L'OLP (Organisation de libération de la Palestine) a été admise comme représentante du peuple palestinien en 1976. Les 22 pays membres de la ligue arabe sont également membres de l'organisation de la conférence islamique Typologie On peut diviser les pays arabes en deux catégories : les riches et les pauvres Rich States vs. Poor States, Malcolm Kerr Ou encore par population : les pays surpeuplés et les sous-peuplés. Ou d’autres encore. Ici, on retient le MA comme un système politique composé de sous-systèmes qui ont une cohérence interne en terme géo-écologique. Le Maghreb et le Machrek sont différents. Il existe des différences humaines et sociologiques avec des régions unifiées dans un même mode de vie. La division en 3 sous-systèmes provient de la forte cohérence politique dans le mode de formation des états. - - I- Il y a d’abord un Machrek (est Méditéranéen) qui s’est formé dans l’entre-deuxguerres, marqué par la domination ottomane, puis un Maghreb marqué par la domination coloniale avec une indépendance tardive, marqués par leur rapport avec l’autre bord de la Méditerranée, et enfin le Golfe persique qui n’a pas été marquée par des invasions, mais reste comme l’espace de la rente pétrolière. Plus un 4e qui sera rapidement évoqué, le bassin du Nil, Egypte et une partie du Soudan. Région marquée par la culture pharaonique, par le Nil, politiquement par le mode de formation égyptien (plus vieil état central du monde, probablement) Le Maghreb ou le legs du colonialisme Maghreb : رب عرب يغم GHARB = OUEST au sens géographique et au sens « Occident du MA ». Il représente l’Afrique du Nord C’est la zone du MA qui a connu le plus tardivement l’arabisation et sur le mode le plus différencié par rapport au reste du MA. Son islamité est aussi très différenciée. Islamité = Arabité ? Oui et non (voir plus tard dans le cours) L’espace est donc très décentré par rapport au reste du MA. La présence européenne, essentiellement française a été primordiale. Les élites sont très liées également à la France. C’est également la France qui accueille le plus de flux migratoires Les indépendances ont été très tardives. Tunisie, Maroc : 1955 et Algérie : 1962 La formation étatique, surtout en Algérie est marquée par l’anticolonialisme, voire l’autofrancisme. Aujourd’hui encore, les questions coloniales perdurent dans les relations avec la France. 1) La Tunisie http://fr.wikipedia.org/wiki/Tunisie Indépendante en 1955. Elle se dote, inspiration française, très rapidement en apparence d’une République parlementaire. Un homme, extrêmement charismatique s’impose, gagnant sa légitimité par le combat antifrançais : Habib Bourguiba. Il devient un peu comme Mustapha Kemal Atatürk en Turquie. Bourguiba impose une occidentalisation rapide et forcée : laïcisation totale des institutions politiques, liberté de la femme, alphabétisation. Le prix à payer est la place du président : le système est extrêmement autoritaire avec une police très présente. L’homme fort disparu, ne subsiste que le côté autoritaire. Bourguiba est écarté par son successeur, ancien chef des services de renseignement, Zine El-Abidine Ben-Ali. C’est le premier coup d’état médical : Bourguiba est envoyé en exil en Italie pour se reposer. http://fr.wikipedia.org/wiki/Bourguiba http://fr.wikipedia.org/wiki/Zine_El-Abidine_Ben_Ali Le pays conserve un très fort libéralisme économique fondé sur le tourisme, une grande occidentalisation des institutions. Mais Ben Ali reste le dirigent autoritaire avec une police politique très importante. Les atteintes aux droits de l’homme sont très fréquente. Bourguiba a minorisé la place des islamiste. Aujourd’hui, c’est apparemment le pays où la présence islamiste est la moins importante. Mais c’est également là où la menace peut être la plus forte (Ghannouchi : http://fr.wikipedia.org/wiki/Mohamed_Ghannouchi) Le 11-septembre a permis à ces états de remonter dans « l’estime » des pays occidentaux. 2) Le Maroc Indépendant en 1955. Les structures politiques ne suivent pas le même processus que la Tunisie. Le pouvoir royal prend une importance extrêmement forte. Il s’appuie sur une légitimité à la fois tribale (la dynastie du roi) et produite par une descendance religieuse dynastique dont le roi se réclame. Le roi est à la fois souverain et commandeur des croyants La légitimité est qualifiée de charifienne. Charif = noble, honorable. Les chérifiens se réclament de la descendance du prophète Mahomet. Cette conception est un élément de division du MA (division chiites/sunnites) La France très républicaine et laïque s’appuie durant la colonisation sur la monarchie Dans l’Islam sunnite (90% de l’Islam dans le monde), il existe des écoles d’interprétation différentes. La partie juridique de l’Islam est leur domaine. On compte 4 principales écoles - la Hambanite le Hanafisme le Malékisme le Chaféisme Ces écoles sont plus ou moins différemment réparties dans le MA. Le tribunal de la Charia statue selon le corps de jurisprudence établi. Au Maghreb, c’est le Malékisme qui domine, dont le fondateur est un ancêtre du roi marocain. Mohammed V se réclame donc de cette légitimité historique et religieuse. Il est l’héritier direct de l’école malékiste. Depuis l’effondrement de l’Empire ottoman, le califat (autorité religieuse forte, presque représentant du prophète sur terre) est recherché pour combler le vide d’autorité dans l’Islam. La question de l’islamisme politique est : comment revenir au califat ? D’où un pilier de légitimité pour le pouvoir marocain. La construction de l’état marocain s’est donc faite à l’opposé de la Tunisie. Quand le roi du Maroc instaure un corps de législation, par exemple la modernisation du code de la famille, est considérée par ses partisans comme islamiquement acceptable. Le prix à payer est également très autoritaire, même si Mohammed VI est aujourd’hui très moderniste. La France s’était appuyée sur la légitimité du roi mais également les grandes familles marchandes en ascension. A l’accession au pouvoir, pour se construire une base de légitimité, le roi affaiblit les notables locaux en favorisant une petite paysannerie qui devient Le défenseur du trône (Rémy Leveau). Le pluripartisme en compétition aux échéances électorales reste sous l’influence du roi au sommet de l’Etat. La nationalisme marocain (comme en Algérie) est très fort et est centré sur le problème du Sahara occidental. Le SO est revendiqué par le Maroc, contre un mouvement indépendantiste soutenu par l’Algérie, le Front Polisario. http://fr.wikipedia.org/wiki/Sahara_occidental Question : le rôle de la France dans la relation Algérie/Tunisie ? D’importants flux migratoires traversent le Maghreb vers l’Europe. De même entre les pays maghrébins eux-mêmes. L’Algérie, en phase de récupération de la guerre civile, exporte de la main d’œuvre vers Tunisie, Maroc, France… Le contrôle des flux est un enjeu de puissance. Contrôler les migrations ou pouvoir encourager l’émigration illégale d’un surplus de population est primordial. La France n’a pas de grande influence, à part probablement une coopération policière française. 23/10/06 3) L’Algérie Le plus peuplé des pays du Maghreb et avec l’Egypte un des plus peuplés du monde arabe. Très fort taux de natalité. Très fort poids économie. Grand producteur de gaz, producteur de pétrole. Dispose donc d’une rente pétro-gazière qui lui a donné un grand poids dans les 70’s parmi les pays dits nonalignés. Poids politique en raison de la très longue lutte contre la puissance coloniale française entre 1954 et 1962. Combat remarquable car précurseur d’autres luttes de libération nationale. Grand nombre de morts et de victimes. Dans l’histoire officielle algérienne, c’est la « guerre du million de martyrs ». L’Algérie indépendante gagne après 1962 un pays leader au Maghreb, dans le monde arabe et dans le tiers-monde. C’est le FLN qui est devenu pendant très longtemps le parti principal sinon l’unique en Algérie. L’ALN (Armée de Libération Nationale), bras armé du FLN obtient l’indépendance après les accords d’Evian de 1962 et propulse le FLN au pouvoir. Comme en Tunisie, forte personnalisation du pouvoir : le colonel Boumediene met le pays en route vers la modernité au prix de la personnalisation du pouvoir. Jusque la moitié des années 90, voire aujourd’hui pour certains, le FLN préside à la destinée du pays. Dans les 90, surtout entre 90 et 92 sous le poids de la fin de la guerre froide, les pressions internationales et les revendications populaires, le FLN ouvre la voie à d’autres partis, dont des partis islamistes comme le FIS (Front Islamiste du Salut). En 92, le pouvoir fait le grand saut avec des législatives. Le FIS remporte largement les élections et est censé former le nouveau pouvoir. Le pouvoir algérien, à l’instigation de l’armée, annule les élections et instaure un régime autocratique qui dure une dizaine d’année accompagnée d’une véritable guerre civile. Bouteflika proclame en 2005 une amnistie générale pour les rebelles islamistes. La question en suspend est donc de savoir ce qui se passera après le « départ biologique » du président aujourd’hui malade. Un peu comme au Maroc, mais plus encore, l’Algérie est un cas type du nationalisme arabe car il est l’ossature du FLN porté au pouvoir, et un état confronté à une plus forte diversité. Il existe des minorités berbères et kabyles. Le droit à parler la langue est une de leurs revendications. L’islamisme algérien a malgré les préjugés occidentaux joué la carte de la démocratie mais s’est vu ravir la victoire politique. L’islamisme et les minorités sont des cas d’école pour les autres pays dans leur rapport à la démocratie et ce que cela implique. Il y a quelques mois, Moubarak a rétorqué aux américains qui voulaient une plus grande démocratisation en Egypte de manière officielle en s’interrogeant si « ils » voulaient un autre Algérie. Les pays exclusivement pétroliers comme le Koweit sont dépendants du cours du pétrole. Il s’agit d’économies pétrolières qui redistribuent donc la rente de manière arbitraire. En Algérie, une industrie s’est développée. Dans les années 90, l’Etat se trouve incapable de pourvoir aux besoins de la population et met de nombreux algériens à la rue et dans les bras des islamistes. 4) La Libye Elle fait partie de l’UMA (Union du Maghreb Arabe). Jusqu’en 1951 (indépendance), elle est sous protectorat britannique avec influence italienne. C’est alors un régime monarchique, qui vit sous l’influence britannique. En 1969, à l’époque de la fin du président Nasser, les « officiers libres » (repris d’Egypte de ceux qui entourent Nasser) commandés par le colonel Moammar Kadhafi à moins de 30 ans. La Gamahiriya, « république des masses », utopie socialiste est instaurée officiellement. Dans les fait, un système policier et dynastique s’installe. Kadhafi a un programme politique qu’il consigne dans le Livre Vert, sur le modèle du Livre Rouge de Mao. Il y développe de manière très formalisée (pour la première fois officiellement) un anti-occidentalisme. Il veut hisser le monde arabe, la Libye en tête dans l’opposition contre l’Ouest. Il tente également de réunifier islamisme et marxisme. Il veut donc gauchiser l’Islam ou islamiser la gauche. Derrière les mouvements de libération nationale et terroristes se trouvera donc beaucoup la Libye. Financement, experts militaires… L’IRA, le mouvement basque, le FLNC, dans la guerre du Liban (75-90) pour tous les groupuscules… Un embargo est lancé contre la Libye après l’explosion d’un avion au dessus de Lockerbie derrière laquelle se trouvent les services spéciaux libyens. Les américains bombardent la Libye. C’est le premier pays arabe mis au ban de la communauté internationale. La Libye a il y a quelques années décidé de revenir à l’échelle internationale. Elle livre quelques coupables désignés à la justice internationale en sauvant la tête de Kadhafi. Cette attitude hypocrite est devenue un modèle en diplomatie. Par exemple des USA envers la Syrie. A l’opposé, l’invasion de l’Irak. II- La Vallée du Nil Importance : - par la superficie par sa fertilité par son poids démographique 1) L’Egypte Continuité historique de l’Etat la plus forte du monde. Base d’un fort nationalisme égyptien. L’Egypte est le lieu du plus fort nationalisme arabe sous Nasser tout en puisant ses racines dans l’Egypte pharaonique. Les deux sont au cœur du discours politique A partir du XVIIIe avec l’expédition bonapartiste (1799) et jusqu’au milieu des années 80, l’Egypte est le cœur du monde arabe. 1922 : Indépendance formelle (domination britannique). Monarchie dynastique de descendants lointains de mameluks. La monarchie est très forte et centralisée avec une forte influence britannique. Elle est décadente. 1952 : événement historique du MA contemporain avec le coup d’Etat d’un groupe d’officiers issus souvent de classes sociales défavorisées dont Gamal Abd-El Nasser qui lui-même est issu du milieu populaire. En effet, 1948 : événement « tremblement de terre » avec la création d’Israël Les armées de nouveaux pays arabes réunies ont été défaites choc psychologique et politique dans le MA. Dans les états du « champ de la confrontation » avec Israël, dans les années qui suivent 1948 Cela pousse les officiers à prendre le pouvoir en renversant un pouvoir civil accusé de décadence, de corruption. C’est d’abord en Syrie puis en Egypte. Les militaires se sentent sous-équipés, vendus par une classe dirigeante décadente. La conjonction de ces deux phénomènes mène à 1952 Nasser ne domine pas les « officiers libres ». Il s’agit de remettre l’Egypte sur les rails du développement, sans prise de partie face à l’Occident. Ils ne s’intéressent pas à la Guerre Froide. Au contraire, Nasser noue même contact avec la CIA. Les « officiers libres » formés à l’occidentale dénoncent la sous-utilisation des richesses du pays. Il faut donc reprendre possession des ressources égyptiennes. Les deux grandes ressources non utilisées sont le Nil avec ses crues et décrues importantes. Personne n’a alors encore pensé à la construction de barrage. Existe également le canal de Suez creusé par les français et contrôlé par les britanniques qui contrôle le passage de nombreux navires. Les redevances du canal vont à la GB. Nasser décide donc la nationalisation du canal et la construction de barrages sur le Nil. En 1955-6, Nasser dans une volonté de se tourner vers les occidentaux demande un prêt à la Banque Mondiale pour construire les barrages. Les USA font pression contre car l’Egypte puissante comportait des risques de perte d’influence. 26 jullet 1956 : nationalisation prise par Nasser de la nationalisation du canal pour financer les barrages. De facto, l’Egypte tourne anti-occidentale. Le MA cherche un prestige perdu et Nasser apparaît comme l’homme providentiel capable de dire non à l’Occident. GB « spoliés », France contre le nationalisme arabe vu la situation algérienne, et Israël s’allient pour « l’agression tripartite » (expression du MA). Confrontation traumatique entre l’Occident allié (« comme par hasard ») à Israël et le pays emblématique du MA. L’influence de cet événement perdure jusqu’aujourd’hui. Le modèle égyptien de Nasser aura une influence jusqu’en Amérique Latine et au Vietnam. L’histoire de l’Egypte se confonds alors avec celle de Nasser. Il se lance dans une surenchère apparemment anti-occidentale mais dans les faits antiisraélienne. Car selon les pays, c’est lui qui va regagner la Palestine au MA. Juin 67 : guerre des 6 jours. Autre défaite traumatique mais que le prestige de Nasser transforme en victoire politique. 1969 : Kadhafi suit le modèle nassérien pour son coup d’Etat. 1968 : Hussein en Irak + Syrie Novembre 1970 : Nasser meurt en laissant le modèle de l’officier nationaliste orphelin. El-Sadate lui succède, plus pragmatique. 1973 : guerre à trois noms, suivant le point de vue : la guerre d’octobre, du Kippour, du Ramadan. http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_du_Kippour Sur le front syrien, Israël emporte le Golan en quelques jours, qui reste aujourd’hui encore annexé et en Egypte du désert du Sinaï rendu à l’Egypte en 1978 après Camp David. Jérusalem Est est prise aux Jordanien. + Gaza à l’Egypte (puis à la Palestine avec Oslo) Résolution 242 après 1967 : Israël aura la paix contre le retrait des territoires occupés. Mais (erreur ?) traduction différente en anglais : selon sa version officielle en français, « retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés lors du récent conflit » ; selon sa version officielle en anglais, « withdrawal of Israel armed forces from territories occupied in the recent conflict » http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9solution_242 en 1973, c’est la menace atomique américain qui arrête la guerre qui mène aux accords de Camp David. Dans les 70’s commence à s’exprimer en Egypte l’islamisme politique. L’accord de paix séparée signé par l’Egypte avec Israël à Camp David signifie un pacte avec le diable, contre la figure nassérienne unificatrice. L’opposition se renforce donc. Les islamistes et précisément les Frères Mulsumans gagnent en influence. En 1981 lors du défilé commémorant la guerre du Kippour, El Sadate est assassiné en direct à la télévision par l’un de ses officiers. Mohammed Hosni Moubarak lui succède. III- La Péninsule du Golfe Dans le langage politique, on parle souvent du Golfe, ou de la péninsule arabique. Dans les faits, fortes disparités, dans tous les domaines. En particulier, différenciation en terme de systèmes politiques. La région a vécu de façon distante la domination ottomane durant plusieurs siècles. Le golfe arabo-persique ne semblait présenter que peu d’intérêt. Ce qui explique la différenciation du Golfe avec le Mashrek. Par contre, les régions périphériques, ie. les côtes (ex : Yémen) connaissent une domination occidentale. Les principaux lieux saints de l’Islam se trouvent dans la péninsule, en particulier la Mecque, ville de naissance de Mahomet. Les pays du Golfe ne prennent pas leur indépendance ou ne se forment pas au même moment : Arabie Saoudite dans les 30’s, les EAU ou le Koweït indépendants dans les 60’s. Typologie proposée des états du Golfe : 1) les états de « tribalisme dynastique absolu » (Maurice Flory et autres, Les Régimes politiques arabes, PUF, Paris, 1991) Le pouvoir politique est organisé autour d’une famille régnante extrêmement puissant (patrimonialisme absolu). L’Arabie Séoudite porte le nom de la famille reignante (al Saoud). On parle de 2000 à 2500 personnes pour la famille Séoudite. Il existe des modes implicites de consultation pour assurer la légitimité populaire, c’est Al Choura (= la consultation). Après la première guerre d’Irak, l’Arabie Saoudite a senti le besoin de moderniser quelque peu sa politique. Elle a créé un Majlis (conseil de consultation) nommé sur base de l’appartenance aux principales tribus. La tribu du roi Abdallah d’Arabie Saoudite, celle des Chammar s’étend de la région de la Mecque au nord de l’Irak actuel. Les frontières n’ont par respecté ces aires d’influence. Dans le mode de vie quotidien, la frontière reste souvent ignorée. Les frontières restent donc en partie virtuelles. La famille des Saoud associe via la Choura les grandes familles à la décision politique (une soixantaine de personnes). Le membre est révocable par le roi et n’a aucune latitude à la décision, ce n’est qu’un organe de consultation. Ces états sont des états rentier, par le pétrole pour l’Arabie (gaz au Qatar), avec une ressource quasi unique par celui-ci. Cette richesse entre directement dans les caisses de l’état et est ensuite distribuée arbitrairement par la famille au pouvoir. Le pouvoir de la famille régnante est donc très important. La compréhension du pays en est difficile. Un regard anthropologique averti est nécessaire. Dans la mesure où la redistribution de la richesse nationale se fait par le bon vouloir du prince et non des principes économiques occidentaux et donc où il n’y a pas de taxation, le principe du « no taxation without representation » à la base de la démocratie anglaise fait qu’il n’y a aucune contrepartie représentative à apporter. Le problème de ces états apparaît quand la ressource s’épuise, que le prix du marché baisse, etc. A ce moment la revendication de la représentation commence à s’exprimer de plus en plus fort. Aujourd’hui, l’Arabie Séoudite est largement endettée. Elle doit baisser ses redistributions d’où l’émergence de revendications sociales. Ce qui fabrique la légitimité étatique, c’est le caractère religieux. La légitimité religieuse est conférée par l’Islam à l’Arabie Séoudite. Il n’y a pas de texte de loi autre que le Coran ou ne s’appuyant pas sur la Charia (loi islamique). La famille royale elle-même s’est alliée au XIXe avec la très puissante tribu des al wahhab qui donne son nom au wahhabisme, doctrine religieuse qui domine aujourd’hui en Arabie. Aux XVIIIe et XIXe, coexistent un ensemble de tribus qui fonctionnent selon un système proche d’un équilibre de la terreur. Leur territoire est celui de pâturage de leur troupeau. Les al Saoud sont assez puissants pour asservir progressivement les autres tribus. Pour se doter d’une légitimité, ils s’allient avec les al Wahhab dont le père fondateur est un Cheick reconnu comme le dépositaire de la doctrine hambanite, la plus rigoriste et conservatrice des 4 doctrines de l’Islam. Al Saoud devient donc dépositaire du wahhabisme. Il y a alliance du Coran et du glaive, à l’origine de la formation de l’Arabie Saoudite. La présence de Médine et de la Mecque sont également un élément important de la légitimité saoudienne. Enfin à partir des années 20-30 s’ajoute la légitimité rentière. On peut aussi mettre dans cette typologie les EAU (confédération de 6 mini-états), le sultanat d’Oman, le Qatar, malgré des différences 2) les « états à tribalisme dynastique semi-compétitif Deux états principalement : le royaume du Bahreïn (« les deux mers ») et le Koweït. Il y a également un famille d’état au pouvoir. La différence avec le 1) est que la domination politique de la famille régnante est à la tête de l’état parce que le pouvoir lui a été concédé. Les al Sabah au pouvoir au Koweït depuis le XVIIIe. Les grandes familles marchandes considéraient le politique comme secondaire. La dynastie la moins active commercialement est chargée du politique. Le pouvoir est donc dévolu par l’ensemble des autres familles. En 1991, les al Sabah fuient à Londres et négocient avec les autres familles car sont des primus inter pares (premiers parmi les autres). L’économie rentière ou semi-rentière entraîne une concertation entre les familles et la famille régnante pour la redistribution. Le conseil des ministres koweitien est formé des principales familles. A partir des 70’s est introduite une grande part de vie démocratique avec des élections plus ou moins libres et transparentes au Koweït par exemple. Au gré des caprices de la famille régnante, des conflits extérieurs, la vie démocratique sera suspendue pendant quelques temps. Mais ce n’est à chaque fois que temporaire (même si cela peut durer une dizaine d’années). Le Bahreïn est l’Etat qui comporte le plus grand nombre de chiites du Golfe, donc pro-iranien. Ce qui a une incidence dans le conflit du nucléaire iranien. 3) la République du Yémen, un régime de « tribalisme républicain » Ressemble aux régimes maghrébins, mais avec la composante tribale en plus. Fatiha Dazi-Heni, Les Monarchies arabes, Presses de Sciences Po, 2006 : propose une autre subdivisition : - les monarchies conservatrices - les monarchies mondialisées : EAU, Qatar - les monarchies semi-libérales ou semi-compétitives : Koweït et Bahreïn Le Mashrek Berceau du nationalisme arabe et de différentes écoles islamiques. Les relations franco-britanniques y ont eu une grande influence. Les dénominations sont très importantes en politique, et particulièrement dans le monde arabe Maghreb : là où le soleil se couche Mashrek : là où il se lève Le Machrek est aussi appelé le « croissant fertile ». Cette dénomination fait référence à la forme de la région (Liban, Syrie, la région actuelle d’Israël, Jordanie, Golfe, Irak). Le Parti Syrien National Socialiste aujourd’hui Parti Nationaliste Syrien est l’un des plus fervents utilisateurs de ce nom qui cherche l’union de cette union. C’est pour eux également le Bilad-el-Cham, pays du Cham. En arabe parlé, le Cham désigne Damas. En arabe littéraire, Damas = [dimašq]. [L’arabe écrit et lu est un arabe des élites. Il y a un fossé intellectuel et culturel entre les élite et la majorité des population qui ne comprend pas ou peu l’arabe littéraire. Entre elles, les différentes populations arabes parlent des dialectes qui varient suivant les régions. D’où l’erreur à parler d’un monde arabe unifié. Les chaînes satellitaires utilisent un arabe à cheval entre arabes littéraire et parlé] La Grande Syrie, idéologie politique, fait que nombre d’élites politiques syriennes considèrent le Liban, la Palestine, jusqu’à la Syrie actuelle comme des entités artificielles qui nécessite une réunification. L’Irak est appelé « pays mésopotamien », ou en arabe le « pays d’entre les deux fleuves » (Tigre et Euphrate). Après la Première Guerre Mondiale, les grandes puissances qui se divisent la région (Empire britannique et France) se la partagent plus ou moins en fonction du Bilad el-Cham et de l’espace mésopotamien, à l’exception d’Israël. Il faut donc comprendre l’effondrement de l’empire ottoman d’où émergera l’idée nationaliste arabe et (sujet du cours d’aujourd’hui) les politiques coloniales françaises et britanniques, particulièrement les trois promesses contradictoires. La Première Guerre Mondiale a opposé l’alliance franco-britannique (+USA) et l’axe Prusse / Empire austro-hongrois allié à l’Empire ottoman. Parmi les buts de WWI existait la volonté de se partager les dépouilles de l’Empire ottoman en décomposition avancée. Dans les provinces arabes de l’empire ottoman la notion de monde arabe n’existait pas. La concurrence France / GB existait bien pour qu’aucun n’émerge de la guerre plus fort que l’autre. Promesse 1 : Durant le conflit, les britanniques, à l’instigation d’un colonel des Services Secrets, Sir Lawrence, promettent l’indépendance du monde arabe. Le territoire de l’Arabie Saoudite, à l’époque territoire de l’empire ottoman, est dominé par les tribus bédouines. Le Hijaz, au Nord recouvre principalement la Mecque et Médine Le Najd, plus au sud, est celle où aujourd’hui on trouve les capitales politique et économique, Riyad (pol.) et Jeddah (éco.). Sur le Najd règne la famille des el-Saoud (à l’origine de l’Arabie Saoudite) alliée aux Wahhab. Sur le Hijaz règne les Hachem (d’où descend la dynastie jordanienne). Le chef des Hachem est le Charif Hussein. La légitimité religieuse repose là où sont les lieux saints. Le roi d’Arabie Saoudite aujourd’hui est le serviteur des lieux saints. A l’époque, ce rôle est assumé par le Charif Hussein. Déjà à l’époque il est difficile de séparer arabité et islam. C’est avec Charif Hussein que Lawrence d’Arabie négocie. McMahon, officier du Foreign Office reprend une correspondance qui dit que si les tribus arabes du Hijaz et le Cham créent un mouvement de révolte pendant la guerre contre l’empire ottoman (déjà contesté par les populations arabes), après la guerre sera créé un « empire arabe unifié ». Frontières, formes, structure politique ne sont pas évoquées. 2e promesse : Au même moment, un deuxième officier, Lord Balfour tenait un autre correspondance (de manière concertée avec McMahon), dans les même années 1915-16, avec le baron Rothschild qui était un représentant du sionisme (congrès de Bâle, 1882). Les sionistes achètaient des terres à un empire ottoman à genoux financièrement. La « déclaration Balfour » (2 novembre 1917), jour pratiquement de deuil dans le monde arabe, dit que si la communauté juive finance les efforts de guerre français et anglais, est promis la création d’un « National Homeland ». Nouvelle ambiguïté sur le contenu. Les 2 promesses sont donc conflictuelles. Les germes du conflit israélo-palestinien sont déjà là. 3e promesse : Au même moment, anglais (Sykes) et français (Picot) négocient entre eux la carte géographique de l’après empire ottoman. L’accord Sykes-Picot donne à la France le Bilad El-Cham (territoire grand-syrien) pour les raisons principalement de protection des minorités religieuses (chrétiens du futur Liban) avec un territoire suffisamment viable. En échange, les anglais prennent le sous-sol mésopotamien (déjà soupçon anglais de ressources intéressantes – 40% du pétrole mondial) et Palestine. Sesonov représentait l’Empire tsariste. En 1917, la Révolution éclate en Russie. Sesonov part donc et révèle les accords Sykes-Picot. Ces trois promesses restent dans la psyché politique arabes comme un traumatisme dans le rapport entre Occident et Monde Arabe. En 1985-6, par exemple, vague d’attentats à Paris (rue de Rennes, …). Les tracts diffusés ensuite faisaient allusion directement à Sykes-Picot. Plan américain (Condie Rice) de refaçonner la région, actuellement. Il viserait à tourner la page de Sykes-Picot dans sa distribution des états. 1918 : la guerre est gagnée par les Alliés. L’Empire ottoman s’effondre. La Turquie se fonde (Mustapha Kemal Atatürk). Disparaît avec l’Empire ottoman le Sultan (Prince) ottoman, à la fois Calife (Commandeur des croyants), donc la référence religieuse. La question de savoir qui est le gardien des lieux saints devient importante. Le Charif Hussein devient donc important, puis les Saoud prennent le Hijaz et les américains négocient avec eux. Les troupes menées par le fils du Charif Hussein, le prince Faysal défont les ottomans et à Damas en 1918 hissent le drapeau arabe et proclament l’Empire arabe. Jusqu’en 1920, brève parenthèse d’un état arabe unifié. Il n’est pas reconnu mais existe de facto. Mais par le Nord entre Français et Anglais. Pendant ces deux années vont coexister au Liban-Syrie-Palestine, trois armées coexistent ayant chacun légitimité légale à gouverner la région. Un bras de fer avec Faysal a lieu, en parallèle avec un bras de fer franco-britannique pour utiliser Faysal contre l’autre. En 1920, la SDN prend un résolution pour mettre en œuvre les mandats, forme juridique et polie de Sykes-Picot. Forts de la légitimité internationale, Français et Anglais mettent en œuvre par la force Sykes-Picot. En septembre 1920, la bataille de Maysaloun oppose Faysal aux troupes françaises. Elle est très facile pour les Français. C’est un massacre pour Faysal. Aujourd’hui cela reste l’exemple de l’humiliation du nationalisme arabe dans le Monde Arabe. Faysal sort de la vie politique. Les Français règne sur le Bilad el-Cham. Faysal, exilé politique, est récupéré pour les Anglais (qui avaient pourtant soutenu les Français dans la bataille de Maysaloun) pour lui donner le trône d’Irak. Les motivations anglaises ne sont pas totalement claires.