Chapitre 13 La légitimité d’une intervention de l’État
La légitimité de l’intervention de l’État dans la vie économique d’un pays repose historiquement sur des
arguments juridiques et économiques, toujours invoqués en référence à la place occupée par le marché
comme instrument d’organisation des échanges dans une société. Tout d’abord, le premier rôle dévolu à
l’État a été de créer un cadre favorable au développement de l’activité économique à travers ses missions
régaliennes (A.). Ensuite, l’intervention croissante de l’État dans la sphère économique a été justifiée par
l’existence de défaillances du marché, qui rendent impossible la répartition efficace de certaines
ressources dans la société par des organisations marchandes, (B.) et par l’existence d’imperfections qui
viennent perturber le fonctionnement concurrentiel du marché (C.).
A. Une intervention de l’État pour créer un cadre favorable aux échanges
Historiquement, l’intervention de l’État a permis de créer un environnement institutionnel favorable à
l’activité économique à travers l’instauration de règles garantissant la protection des droits de propriété
et le respect des contrats, mais aussi la prise en charge de certaines missions assurant la stabilité
politique du pays. Cette conception du rôle de l’État renvoie à la notion de fonctions régaliennes qui a
contribué à délimiter le champ d’intervention de l’État (1.), le plus souvent a minima (2.).
1. Les fonctions régaliennes : une conception traditionnelle du rôle de l’État
On peut définir les fonctions régaliennes comme l’ensemble des missions fondamentales pour une société,
qui sont placées sous la responsabilité de l’État et ne peuvent, en principe, être déléguées à des acteurs
privés.
Traditionnellement, les missions régaliennes de l’État consistent à assurer la sécurité intérieure (police),
la sécurité extérieure (armée), à rendre la justice et à émettre la monnaie. Ces missions sont
amenées à évoluer au cours du temps, une preuve étant la perte du pouvoir que possédait l’État d’émettre
la monnaie, celui-ci ayant été transféré à des banques centrales devenues indépendantes du pouvoir
politique. Ces fonctions étaient censées fournir un environnement propice à l’essor des échanges.
2. Les fonctions régaliennes : une conception minimaliste du rôle de l’État
Les fonctions régaliennes renvoient à la conception d’un État neutre, ou « État gendarme », dont le
degré d’intervention dans l’économie est faible. Le rôle dévolu à l’État est dès lors de protéger la
concurrence et de chercher à supprimer les barrières aux échanges. Il correspond donc à une vision de
l’économie selon laquelle des relations marchandes libres permettent d’assurer le bien-être maximum de la
société. L’État doit se garder de trop s’immiscer dans la sphère économique car il risquerait d’entraver la
liberté des échanges. Cette conception minimaliste du rôle de l’État a été progressivement remise en
cause en raison de l’existence de situations dans lesquelles le libre fonctionnement du marché ne
conduisait pas à une production et une répartition efficace des ressources dans l’économie.
B. Une intervention de l’État pour lutter contre les défaillances du marché
Il existe certains phénomènes qui mettent en échec le fonctionnement du marché. Il s’agit principalement
de l’existence de biens collectifs, aussi appelés « biens publics » et d’effets externes, ou « externalités ».
1. L’existence de biens collectifs
Les biens collectifs sont des biens qui peuvent être consommés simultanément par plusieurs individus sans
que la consommation des uns ne réduise celle des autres, et sans que l’on puisse les en empêcher
(exemples : services comme l’éclairage public, la sécurité extérieure et l’éducation).
Ces biens doivent être fournis par l’État, qui les financera par l’impôt. En effet, ce type de biens n’est pas
individualisable puisqu’il est impossible d’empêcher les individus de les consommer même s’ils ne les payent
pas. Chacun aura donc tendance à se comporter en « passager clandestin », c’est-à-dire espérer que les