la construction typologique comme outil de connaissance (investie dès 1982) et la
résistance vis-à-vis de la division du travail, social et sociologique, à tous les sens du
terme. Ce dernier refus, très difficile à assumer dans un milieu professionnel, détermine
tant une affection pour la définition artisanale de l’enquête, que l’organisation de mes
divers travaux en équipe en tant que membre ou comme directeur de recherche.
Enfin, on ne peut parler d’identité sans évoquer l’altérité des voisinages. Deux
murs m’ont, très utilement, servi de repoussoir et d’appui. Le premier mur est celui de la
sociographie purement empirique, sans théorisation, que je nomme, à l’instar de certains
auteurs, empiricisme. Elle est incarnée par Paul Lazarsfeld. Pour simplifier
outrageusement (le recouvrement n’est pas total) on dira que cette sociographie présente
une vision plutôt éthérée, contingente et évanescente – souvent appuyée par la référence
aux préférences individuelles – de la socioculture et du social en général. Elle tend aussi
à agréger des actions ou des individus de manière univoque, sans fonder théoriquement
les critères de regroupement. De l’autre côté, se trouve le mur d’une sociologie de la
reproduction, et plus généralement d’un systémisme, qui nie l’acteur et les mouvements
travaillant la société et la culture vécue. Ce bloc, plutôt déterministe, incarné en France
par Pierre Bourdieu, présente une image figée, ou rigidement dépendante des évolutions
économiques, tant de la structure sociale que du quotidien ou des styles de vie.
De l’explication à l’explication en passant par la compréhension
Si le premier
travail de recherche se concrétise dans un rapport intitulé Mythe,
symbolique, idéologies de la maison solaire et si les derniers textes écrits accordent une
place importante au symbolique, ce n’est pas un hasard ou un fait de circonstance
circulaire. Finalement, le symbolique, qui tient une place si importante dans l’Ecole
durkheimienne, s’oppose aussi bien à l’individualisme empiriciste – qui le dégrade en
opinions saisies par sondage – qu’au systémisme des sociologies de la reproduction,
lesquelles en font une pauvre superstructure (de dispositions) complètement déterminée
par le bas.
En quoi mes travaux sur la vie quotidienne (que l’on peut aussi baptiser, après
d’autres, le champ de la socioculture), et la méthode hybride de l’explication
compréhensive qui leur est indissociable, prétendent-ils dépasser l’opposition de ces
deux regards ? C’est une des questions auxquelles le texte qui suit tente de répondre. Le
renvoi, dos à dos, de ces deux tendances, à la fois opposées et en collusion par certains
côtés, est pour un sociologue, me semble-t-il, la seule manière raisonnable de travailler :
d’expliquer et de comprendre non seulement la vie quotidienne, mon domaine privilégié
Avec une deuxième recherche sur le même thème, ces travaux, réalisés de 1981 à 1984, constitueront
l'essentiel des bases empiriques fondant ma thèse de troisième cycle soutenue en 1985.