Notice sur
HERICOURT
précédée d’un petit aperçu sur l’Enseignement de la Géographie dans
les écoles primaires
Par C. CANEL
Instituteur à Héricourt ( Hte Saône )
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N° 3
Auteur : M. Charles CANET, instituteur à Héricourt ( Haute Saône )
Cahier relié 102 pages- 7 cartes ou plans
Ce mémoire ne répond nullement aux questions qui font l’objet du concours. L’auteur le reconnaît lui-
même et on s’en rend compte en examinant de près son travail.
Il avait fait, sans doute avant l’ouverture du concours, une Notice historique sur Héricourt en remontant
aux temps les plus anciens, et l’a fait précéder d’un petit aperçu sur l’enseignement de la Géographie dans les
écoles primaires. C’est ce qu’il est facile de constater par l’inspection matérielle du cahier relié : les deux
premières feuilles ont été placées après coup.
On trouve dans les quatre pages et demie de ce petit aperçu des indications fort sommaires sur la
marche qu’il convient de suivre pour enseigner la Géographie dans les écoles primaires. M. Canel veut qu’on
aille du connu à l’inconnu, qu’on parte de la Commune pour passer au Canton, à l’arrondissement, au
département et enfin à la France. C’est là ce que Pestalozzi faisait déjà à Yverdon, dit-il. Mais il croit qu’on peut
adopter aussi une marche contraire ; partir d’un point de vue d’ensemble et faire connaître en détail les
différentes contrées de la terre, leurs climats, leurs productions, leur industrie, leur commerce, leurs mœurs, leur
culte, etc….
Il ne veut point qu’on procède par des leçons répétées machinalement comme les patrenôtres mais
qu’on habitue l’élève à dessiner des cartes au tableau noir. Cependant quelques lignes plus loin il défie qu’on
réussisse autrement que par la mémoire à faire apprendre les chefs-lieux, sous-préfectures et villes principales
des départements.
On ne voit pas une méthode bien déterminée, mais de simples vues. D’ailleurs il fallait passer à
l’application et c’est ce que l’auteur ne fait pas.
Héricourt n’est pas présenté sous le point de vue géographique, mais bien dans la suite de son histoire.
Il faut aller aux cinq dernières pages du mémoire ( 98 à 101 ) pour trouver sous ce titre La Luzienne, une
description du cours d’eau qui arrose Héricourt. La partie économique domine même la partie topographique
dans cette étude.
Dans la partie historique, l’unité fait défaut. Il y a de nombreuses digressions, presque de plaidoyers ici
contre les institutions du Moyen âge, sur les avantages de la Réforme religieuse. Il y a me un chapitre sur
la principauté de Montbéliard depuis 1700 jusqu’à 1793.
M. Canel cite longuement les documents et quelquefois il respecte trop peu l’enfance à laquelle il s’adresse .
En résumé, le mémoire n’est pas du tout dans la question. Il ne fait que de l’histoire et sur un plan qui ne saurait
convenir à l’école primaire. Il doit être écarté.
Paris, le 11 janvier 1878.
Berger
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Petit aperçu
Sur l’Enseignement de la Géographie dans les Ecoles primaires
L’Enseignement de la Géographie est de date récente dans les écoles primaires. Ce n’est que depuis les
dernières années du second empire qu’il est devenu obligatoire et que, comme tel, il est inscrit sur les
programmes ; mais de à l’application complète, il y a loin ; et il n’a fallu rien moins que nos dernières
calamités pour le faire entrer réellement dans la pratique ; c’est seulement depuis ces temps douloureux qu’il a
pris l’allure d’une science qui marche, se développe et progresse.
On a généralement compris que cette étude ne devait pas uniquement être l’apanage de quelques rares
personnalités : chefs d’armées ou voyageurs en quête d’aventures, mais qu’utile à tous, à divers titres, elle devait
être mise à la portée de tous. C’est ainsi que des établissements secondaires, depuis de longues années déjà,
elle était inscrite sur les programmes et exigée aux examens, elle est descendue dans nos écoles primaires. Et
l’on peut dire que dès le premier jour, elle a été la bienvenue, amenant avec elle tout un cortège de choses
aimables, attrayantes, instructives ; aussi c’est bien à elle que l’on peut appliquer l’adage « utile et agréable ».
Cet enseignement est par conséquent nouveau dans la plupart de nos écoles primaires : il n’est donc pas
étonnant qu’il s’y soit manifesté çà et quelques hésitations et que généralement partout, on ait fait fausse
route : comme pour toute chose nouvelle, il y a un apprentissage à faire.
Comment s’y est-on pris pour commencer ? La plupart n’ont vu dans la géographie qu’une matière à
confier à la mémoire comme le catéchisme ou la grammaire ; un manuel fut placé entre les mains de l’élève, et la
récitation par ur fit tous les frais de cette étude : l’enfant récitait aujourd’hui, demain et toujours. Tout,
assurément, n’est pas à condamner dans ce procédé et nous dirons plus loin quelle part il convient de réserver à
l’action directe de la mémoire. Ce manuel s’appelait ou Moissas, ou Gautier, ou Ansart. L’ouvrage, de petit
format et embrassant toutes les parties du globe, ne pouvait offrir qu’une sèche et stérile nomenclature- pour me
servir de la phrase consacrée.
Mais cette méthode ne pouvait satisfaire aux exigences des esprits avides de progrès ; on reconnut
bientôt l’importance d’un procéqui n’apprenait que des noms aux enfants. Les Suisses et les Allemands nous
devancèrent dans cette voie. les premiers, en ce qui les concerne, modifièrent ou plutôt transformèrent
complètement cet enseignement ; c’est ainsi que l’on vit les élèves du célèbre institut d’Yverdon apprendre les
premières notions de géographie dans des promenades, dans lesquelles on faisait observer aux enfants tous les
accidents du terrain, les ruisseaux, les vallons, et on allait me jusqu’à y joindre les notions géologiques de la
contrée.
On ne saurait le nier, c’est une méthode fort rationnelle, et personne n’a jamais contesté que la meilleure
et la plus sûre manière d’apprendre la géographie d’un pays était de le parcourir en tous sens. Mais ce procédé,
praticable avec un petit nombre d’élèves du même âge, ne l’est plus lorsqu’il s’agit de l’employer dans une école
nombreuse et à plusieurs divisions, et c’est ce qu’ont compris nos géographes actuels ; aussi reprenant l’idée des
disciples de Pestalozzi, ils l’ont modifiée dans certaines parties et l’ont appropriée aux besoins et aux exigences
de l’enseignement primaire.
Que l’on conseille Levasseur, ou les ouvrages de Cortambert, de Pigeonneau on y trouvera le me
plan, le même enchaînement d’idées, le même point de départ. L’étude de la rue, de la commune, du canton, du
département, de la France, de l’Europe, etc…, la manière de s’orienter, la connaissance des quatre points
cardinaux occupent les premières leçons. Puis la reconnaissance de la carte de la commune, du département que
le maître doit dessiner et faire dessiner à ses élèves. A cet égard, il est bon de remarquer que, lorsque cet
enseignement sera plus avancé, les cartes seront muettes autant que possible, afin d’obliger l’enfant à retenir les
noms, ce qu’il ne fait pas lorsqu’il est assuré de les retrouver au besoin dans son atlas.
Telle est la marche synthétique que l’expérience a déjà consacrée et que des maîtres autorisés nous
proposent : aller du simple au composé, du coin de rue que l’on habite à la surface entière du globe.
Ces premières connaissances une fois acquises- et on y parvient assez vite- on peut adopter une marche
contraire : partir d’un point de vue d’ensemble et faire connaître en détail les différentes contrées de la terre,
leurs climats, leurs productions, leur industrie, leur commerce, leurs mœurs, leur culte, etc… rien ne contribuera
plus à donner de la vie à cet enseignement que les récits de voyages, les aventures des explorateurs anciens et
modernes, les publications hebdomadaires ou mensuelles à l’usage de la jeunesse, publications qu’il est inutile
de nommer : tout le monde les connaît…..de nom, malheureusement pour un trop grand nombre. Heureux qui
peut les posséder ! Ses élèves après lui, y trouveront une source de jouissances pures, d’utiles et instructives
récréations. Ce sera la géographie politique. J’aurais voulu la présenter avec plus de détails, mais le cadre qui
nous est imposé ne me permet pas de plus longs développements.
Nous ne terminerons pas toutefois ce court exposé de l’enseignement géographique sans dire un mot de
la cosmographie qui en est le complément indispensable ; on peutme dire que certaines parties sont tellement
liées entre elles qu’on ne saurait les séparer ; telles sont les notions générales sur la sphère : forme de la terre,
axe, pôle, rotondité de la terre, équateur, cercles, méridiens, l’étude des zones, de la longitude et de la latitude,
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etc… Toute cette nomenclature doit marcher de front avec la géographie et ne peut être bien apprise qu’à l’aide
d’une sphère en carton qui devrait faire partie du mobilier de chaque école.
Nous l’avons dit plus haut, ce n’est point par des leçons récitées machinalement comme les
« patrenôtres » que doit s’apprendre la géographie, nous répétons donc, après tant d’autres que le procédé le plus
efficace et le plus attrayant tout à la fois, car il récrée l’enfant plus qu’il ne le fatigue est « d’habituer l’élève à
dessiner au tableau noir, à tenir, rédiger dans de petits albums, des cartes dont chacune soit l’expression de la
leçon donnée, d’y joindre des tableaux qui disent ce que ne peut dire la carte : climat, aspect du pays,
monuments, évènements, mœurs, gouvernement, industrie, etc… »
Cependant il ne faudrait pas non plus tomber dans l’excès contraire et brûler ce qu’on a adoré en
délaissant complètement le rôle si important, pour certaines choses, de la mémoire du texte. Plusieurs parties de
la géographie ne sauraient être apprises et ne peuvent « se retenir » que par ce moyen, et que pour n’en citer
qu’un exemple, je défie qu’on réussisse autrement à confier à la mémoire, rapidement et bien, de manière à le
garder longtemps et toujours, les chefs-lieux, sous-préfectures et villes principales des départements. Que chacun
se rappelle ses souvenirs ! Et combien d’autres choses encore. Non, ne mettons pas la mémoire de côté !
utilisons-la modérément ; sachons surtout distinguer ce qui doit être confié par le moyen du texte, ce qui peut
l’être par le moyen des yeux.
Avertissement
Je n’ai pas la prétention d’avoir fait une histoire d’Héricourt ; c’eût été de la présomption de ma part :
mon but, plus modeste, a été de réunir et de choisir par ordre chronologique tous les faits relatifs à notre petite
localité.
Je tiens à dire que je me suis servi presque uniquement de l’ouvrage si rempli, malgré ses défauts des
Ephémérides du Comté de Montbéliard de Ch. DUVERNOY ; je me suis occupé à donner de la suite aux
évènements morcelés, semés à travers cet important volume auquel on reviendra toujours lorsqu’on s’occupera
de notre histoire locale, et d’où a été tiré, à peu de choses près, tout ce qu’on a publié sur ce sujet jusqu’à ce jour,
bien que les différents auteurs qui y ont puisé à plusieurs mains n’ont pas toujours eu le soin et la délicatesse
d’en indiquer la source ; le dictionnaire des communes de Mr Suchaux et le Manuel à l’usage de l’habitant du
département de la Haute- Saône, cet ouvrage si complet et varié dans ses détails par Ed. Thirrier, m’ont fourni de
précieuses indications. De l’Histoire de la maison de Bourgogne par de Barante, j’ai emprunté le récit de la
bataille d’Héricourt en 1474, bataille dont l’emplacement n’a pu encore être déterminé jusqu’aujourd’hui d’une
manière positive ; et enfin lorsqu’il s’est agi d’administration et de législation du moyen-âge, je me suis adressé
à Mr Tuefferd juge au tribunal de Montbéliard.
Nous avons laissé le récit de cette courte notice au moment de l’incorporation définitive de notre pays à
la France, c’est à dire à l’époque de la Révolution française. Dans la seconde partie, après avoir présenté
l’historique de nos diverses industries et leur développement, nous nous occuperons d’en poursuivre le récit
jusqu’à nos jours, de raconter les principaux évènements de l’occupation allemande et surtout des journées des
15 et 16 janvier 1870, autrement dit de la bataille d’Héricourt, alors que tous les faits saillants, les épisodes
divers sont encore présents à la mémoire des assistants de ce long, douloureux et humiliant spectacle.
Signé : Ch Canel
Héricourt le 31/10/1877
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Notice
Sur
HERICOURT
La Gaule et la Séquanie
Mes petits amis, je vous ai promis, lorsque nous nous sommes occupés de la Géographie d’Héricourt, de
vous raconter quelque jour son histoire. Je tiens aujourd’hui ma promesse, et viens vous exposer brièvement tout
ce que j’ai pu recueillir concernant notre petite localité.
Vous savez tous qu’anciennement notre pays s’appelait la Gaule, et les plus grands parmi vous pourront
me dire que la province que nous habitons était autrefois nommée la Séquanie ; ce nom vient d’un mot latin :
sequana qui veut dire Seine.
La Seine traverse-t-elle en entier ou même en partie notre pays ?….Nullement. Alors pourquoi ce nom ?
serait-ce parce qu’il touche aux provinces qu’arrose ce fleuve ? C’est possible, car en effet, il borne le bassin de
Seine au S.E.
Les peuples voisins des Séquanais étaient : au N.E., les Latobriges, peuplade germaine, les Triboques et
les Leuques ; au N., appartenant aux Belges, les Lingons et les Eduens ; à l’O. peuplades celtiques ; au S. les
Allobroges, et à l’E., au delà du Jura , les Helvètes. Tels étaient nos voisins un demi-siècle environ avant la
naissance de J.C.
C’est à cette époque que la Gaule fut envahie par un de ces hommes extraordinaires qui laissent dans la
postérité un mémorable sillon de leur passage ici-bas : Jules César, qui sous prétexte de secourir les Helvètes
attaqués par les Allemands, s’empara de leur pays, entra dans les Gaules, et après dix années de luttes, de
combats, de mutilations barbares, de massacres, écrasa les derniers fenseurs de l’indépendance gauloise à
Alésia ( Alise Ste Reine ) chez les Mandubiens, à quelque distance de Dijon actuellement. Vercingétorix, le
glorieux vaincu, fut jeté dans les humides cachots de Rome, et après cinq années de captivité, il servit à orner le
triomphe de son impitoyable vainqueur. Quelques jours après, on le faisait mourir en l’égorgeant honteusement.
Dès lors, la Séquanie devint une province romaine, sous la domination de consuls ou proconsuls d’au-
delà des Apennins, dont le premier fut Labiénus, l’un des plus fameux lieutenants de Jules César.
Pendant les cinq siècles que dura l’occupation romaine en Gaule, il n’est nulle part question de notre
petite localité ; peut-on en conclure qu’elle n’existait pas ? ce serait trop avancer car les vestiges de constructions
que l’on rencontrait il y a quelque temps dans les environs et surtout dans les endroits élevés prouvent qu’au
contraire, le pays devait être habité depuis fort longtemps.
Le Retranchement du Mont-Vaudois
Et à ce sujet, la plupart d’entre vous se rappellent et ont pu voir qu’à la place qu’occupe le fort en
construction de notre Mont Vaudois, on remarquait des travaux relativement considérables, des ouvrages de
défense faits d’une manière toute primitive, c’est à dire sans art, en terre et en pierres, mais qui n’en attestent pas
moins la main de l’homme
Quelle était leur destination ?
On a voulu y voir un poste d’observation, un lieu de refuge contre les attaques des bêtes et des
hommes ! vous le savez, il consistait en un vaste espace découvert, situé au sommet du Mont-Vaudois,
comprenant tout le terrain sur lequel le fort s’élève, protégé au N. par une ligne de rochers à pic qui dominent les
villages de Luze, Chagey et Echenans ; à l’E et au S c’est à dire sur le versant qui regarde Héricourt, par un fort
talus de 2 à 3 mètres d’élévation et de vingt mètres à sa base. C’est un emplacement admirablemement situé
parce qu’il permet d’embrasser dans un coup d’œil tout le pays qui s’étend des Vosges au Jura et du col de
Valdieu ou la trouée de Belfort aux sommets qui dominent Besançon. Il représentait assez exactement un vaste
triangle rectangle avec son grand formant talus, gèrement convexe et ayant un développement de 300
mètres environ ; la ligne de rochers avait 270 mètres de longueur.
A quelle époque fallait-il faire remonter ces constructions ? C’est ici que les doutes s’élevaient et que
les hypothèses les plus hardies peuvent se donner carrière.
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