Petit aperçu
Sur l’Enseignement de la Géographie dans les Ecoles primaires
L’Enseignement de la Géographie est de date récente dans les écoles primaires. Ce n’est que depuis les
dernières années du second empire qu’il est devenu obligatoire et que, comme tel, il est inscrit sur les
programmes ; mais de là à l’application complète, il y a loin ; et il n’a fallu rien moins que nos dernières
calamités pour le faire entrer réellement dans la pratique ; c’est seulement depuis ces temps douloureux qu’il a
pris l’allure d’une science qui marche, se développe et progresse.
On a généralement compris que cette étude ne devait pas uniquement être l’apanage de quelques rares
personnalités : chefs d’armées ou voyageurs en quête d’aventures, mais qu’utile à tous, à divers titres, elle devait
être mise à la portée de tous. C’est ainsi que des établissements secondaires, où depuis de longues années déjà,
elle était inscrite sur les programmes et exigée aux examens, elle est descendue dans nos écoles primaires. Et
l’on peut dire que dès le premier jour, elle a été la bienvenue, amenant avec elle tout un cortège de choses
aimables, attrayantes, instructives ; aussi c’est bien à elle que l’on peut appliquer l’adage « utile et agréable ».
Cet enseignement est par conséquent nouveau dans la plupart de nos écoles primaires : il n’est donc pas
étonnant qu’il s’y soit manifesté çà et là quelques hésitations et que généralement partout, on ait fait fausse
route : comme pour toute chose nouvelle, il y a un apprentissage à faire.
Comment s’y est-on pris pour commencer ? La plupart n’ont vu dans la géographie qu’une matière à
confier à la mémoire comme le catéchisme ou la grammaire ; un manuel fut placé entre les mains de l’élève, et la
récitation par cœur fit tous les frais de cette étude : l’enfant récitait aujourd’hui, demain et toujours. Tout,
assurément, n’est pas à condamner dans ce procédé et nous dirons plus loin quelle part il convient de réserver à
l’action directe de la mémoire. Ce manuel s’appelait ou Moissas, ou Gautier, ou Ansart. L’ouvrage, de petit
format et embrassant toutes les parties du globe, ne pouvait offrir qu’une sèche et stérile nomenclature- pour me
servir de la phrase consacrée.
Mais cette méthode ne pouvait satisfaire aux exigences des esprits avides de progrès ; on reconnut
bientôt l’importance d’un procédé qui n’apprenait que des noms aux enfants. Les Suisses et les Allemands nous
devancèrent dans cette voie. les premiers, en ce qui les concerne, modifièrent ou plutôt transformèrent
complètement cet enseignement ; c’est ainsi que l’on vit les élèves du célèbre institut d’Yverdon apprendre les
premières notions de géographie dans des promenades, dans lesquelles on faisait observer aux enfants tous les
accidents du terrain, les ruisseaux, les vallons, et on allait même jusqu’à y joindre les notions géologiques de la
contrée.
On ne saurait le nier, c’est une méthode fort rationnelle, et personne n’a jamais contesté que la meilleure
et la plus sûre manière d’apprendre la géographie d’un pays était de le parcourir en tous sens. Mais ce procédé,
praticable avec un petit nombre d’élèves du même âge, ne l’est plus lorsqu’il s’agit de l’employer dans une école
nombreuse et à plusieurs divisions, et c’est ce qu’ont compris nos géographes actuels ; aussi reprenant l’idée des
disciples de Pestalozzi, ils l’ont modifiée dans certaines parties et l’ont appropriée aux besoins et aux exigences
de l’enseignement primaire.
Que l’on conseille Levasseur, ou les ouvrages de Cortambert, de Pigeonneau on y trouvera le même
plan, le même enchaînement d’idées, le même point de départ. L’étude de la rue, de la commune, du canton, du
département, de la France, de l’Europe, etc…, la manière de s’orienter, la connaissance des quatre points
cardinaux occupent les premières leçons. Puis la reconnaissance de la carte de la commune, du département que
le maître doit dessiner et faire dessiner à ses élèves. A cet égard, il est bon de remarquer que, lorsque cet
enseignement sera plus avancé, les cartes seront muettes autant que possible, afin d’obliger l’enfant à retenir les
noms, ce qu’il ne fait pas lorsqu’il est assuré de les retrouver au besoin dans son atlas.
Telle est la marche synthétique que l’expérience a déjà consacrée et que des maîtres autorisés nous
proposent : aller du simple au composé, du coin de rue que l’on habite à la surface entière du globe.
Ces premières connaissances une fois acquises- et on y parvient assez vite- on peut adopter une marche
contraire : partir d’un point de vue d’ensemble et faire connaître en détail les différentes contrées de la terre,
leurs climats, leurs productions, leur industrie, leur commerce, leurs mœurs, leur culte, etc… rien ne contribuera
plus à donner de la vie à cet enseignement que les récits de voyages, les aventures des explorateurs anciens et
modernes, les publications hebdomadaires ou mensuelles à l’usage de la jeunesse, publications qu’il est inutile
de nommer : tout le monde les connaît…..de nom, malheureusement pour un trop grand nombre. Heureux qui
peut les posséder ! Ses élèves après lui, y trouveront une source de jouissances pures, d’utiles et instructives
récréations. Ce sera la géographie politique. J’aurais voulu la présenter avec plus de détails, mais le cadre qui
nous est imposé ne me permet pas de plus longs développements.
Nous ne terminerons pas toutefois ce court exposé de l’enseignement géographique sans dire un mot de
la cosmographie qui en est le complément indispensable ; on peut même dire que certaines parties sont tellement
liées entre elles qu’on ne saurait les séparer ; telles sont les notions générales sur la sphère : forme de la terre,
axe, pôle, rotondité de la terre, équateur, cercles, méridiens, l’étude des zones, de la longitude et de la latitude,