Les armes secrètes des végétaux - Société d`Histoire Naturelle du

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"Les armes secrètes des végétaux" au
belvédère de Champvermol à Mandeure
(25)
Samedi 2 mai 2015
Au travers d’une promenade le long du sentier des belvédères de Champvermol à Mandeure (25), les observations
botaniques portent sur les différentes stratégies de défense des végétaux face aux agressions dont ils peuvent faire l’objet.
Cette sortie fait partie des Rendez-vous 1, 2, 3 Nature de Pays de Montbéliard Agglomération.
Compte rendu par Jean-Claude Vadam.
I – Rappel de la place des végétaux dans la chaîne alimentaire
Grâce à la présence de chlorophylle, les plantes vertes captent l’énergie lumineuse et combinent le
dioxyde de carbone (CO2) de l’air à l’eau (H2O) puisée dans le sol pour synthétiser de la matière
organique :
-
cellulose pour édifier leurs structures et
amidon pour stocker des réserves.
Ce sont des producteurs qui fourniront les aliments aux herbivores (consommateurs primaires).
II – Défenses face aux prédateurs
-
plantes en rosette (hémicryptophytes), moins
accessibles à la dent du consommateur (ex.
pâquerette, pissenlit, plantains). Les plantains sont
par ailleurs adaptés physiologiquement au
piétinement,
Pâquerette
(Bellis perennis).
Photo François THIERY
-
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Photo Caroline MAFFLI
2.1 – Les protections mécaniques
Par leur type biologique et l’acquisition d’organes spécialisés, les plantes s’adaptent à la prédation
alimentaire :
feuilles coupantes, grâce à la formation de cristaux de silice
sur leurs bords qui deviennent tranchants (diverses
cypéracées et poacées),
Laîche glauque (Carex flacca).
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Sortie "Les armes secrètes des végétaux" – 2 mai 2015
-
revêtement sur les tiges et les feuilles de poils raides, pour éviter la consommation par les
gastéropodes (ex. diverses boraginacées, dipsacacées, scrofulariacées, primulacées…),
Photo Michèle ESCHEVINS
Poils épidermiques (2).
Tige pileuse de knautie (Knautia).
Molène (Versbascum).
Photo Michèle ESCHEVINS
formation d’aiguillons, productions épidermiques
vulnérantes sur les feuilles et les tiges (ex. cirses,
chardons, églantiers, robiniers,…) ou sur les bractées
florales (carlines,…).
Photo Catherine BARBIER
-
Vipérine (Echium).
Aiguillons sur bractées de cirse (Cirsium oleraceum).
transformations d’extrémités de rameaux, de marges foliaires, en épines, où à la différence des
aiguillons, les vaisseaux conducteurs participent à la réalisation de l’appareil vulnérant (ex.
prunellier, aubépines, …).
Photo Arlette VADAM
-
Aiguillons sur tige d’églantier (Rosa canina).
Épine du prunellier (Prunus spinosa) (3).
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Épines foliaires sur houx (Ilex aquifolium).
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Cependant, si ces procédés sont efficaces face aux gros herbivores, la protection est sans effet contre
les attaques de la plupart des insectes.
2.2 – les armes chimiques
Certaines plantes élaborent des principes chimiques répulsifs qui les font délaisser des herbivores
(refus), mais cette protection n’est pas générale, elle est surtout fonction du prédateur :
plantes urticantes (ex. orties) qui présentent des ampoules fragiles dont la rupture libère de l’acide
formique, de l’histamine, de l’acétyl-choline, de la sérotonine…),
Photo Bernard BINETRUY
-
Touffe d’ortie (Urtica dioca).
plantes irritantes (écorce répulsive des cornouillers, production de raphides d’oxalate de calcium
dans les vacuoles des cellules de feuilles de l’Orchis mâle,
Photo Catherine BARBIER
-
Détail du poil urticant (5).
Feuilles d’orchis mâle (Orchis mascula).
-
Cristaux aciculaires (raphides)
des cellules foliaires (2).
saveur acide à la consommation (cristaux d’acide oxalique chez les patiences, les oxalides, …) ou
amer (tanins, gommes, résines).
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Photos Bernard BINETRUY
Chez la chélidoine et les euphorbes se réalisent des éléments anatomiques (laticifères) dans
lesquels s’accumulent des substances étrangères au métabolisme général, latex (substances
diverses d’aspect laiteux), essences et résines (alcools, esters, aldéhydes, cétones), gommes et
mucilages (oléorésine, térébentine, myrrhe, encens…).
Chelidoine (Chelidonium majus).
Euphorbe (Euphorbia amygdaloides).
Coupe transversale de tige d’euphorbe et localisation des laticifères dans le parenchyme cortical (5).
Ces composés se localisent dans des poils épidermiques, dans des poches ou des canaux secréteurs,
-
toxicité (plantes médicinales) par leur teneur en alcaloïdes. Parmi les plantes les plus toxiques
observées, citons l’Aconit tue-loup (Aconitum vulparia) qui renferme de l’aconitine et les
renonculacées (Anemone nemorosa, Helleborus foetidus, Ranunculus div. sp.) qui contiennent des
cardiotoniques, des saponosides, tout comme l’Arum maculatum (conicine). Le Sceau de Salomon
multiflore a des propriétés vomitives, l’Asaret d’Europe produit une huile camphrée, le Lierre
grimpant renferme des saponosides terpéniques…
Cette énumération est loin d’être exhaustive : des fougères (Polypodium interjectum) produisent de
l’acide filicinique…
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Parmi les plantes toxiques
Photo Arlette VADAM
Photo François THIERY
Photo Catherine BARBIER
Éllébore fétide (Helleborus foetidus).
Photo François THIERY
Photo Catherine BARBIER
Anémone sylvie (Anemone nemorosa).
Photo Caroline MAFFLI
Aconit tue-loup (Aconitum vulparia).
Arum tacheté (Arum maculatum).
Sceau de Salomon multiflore
(Polygonatum multiflorum).
Photo François THIERY
Photo François OLLIET
Renoncule âcre (Ranunculus acris).
Asaret d’Europe (Asarum europaeum).
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Lierre commun (Hedera helix).
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À la lumière de ces quelques exemples, une grande prudence s’impose et une bonne
connaissance botanique s’avère nécessaire avant de recueillir tout ou partie de plantes sauvages
pour réaliser une cuisine (dite naturelle), souvent mise en avant par une gastronomie très
"tendance".
2.3 – Les défenses passives
Les réserves nutritionnelles accumulées par les végétaux sont habituellement dissimulées dans des
organes végétaux (bulbes, rhizomes, tubercules).
III – Lutte contre les parasites
Photo Michèle ESCHEVINS
La prédation des insectes et des nématodes est minimisée par la formation de galles ou cécidies : le
végétal produit un corps nouveau qui abrite et nourrit les larves ou les parasites. C’est la "part du feu", la
consommation de cette galle évite la destruction d’organes essentiels à la survie de la plante (ex.
Pediaspis aceris, sur les feuilles d’érables, divers Andriscus sur les jeunes rameaux et les feuilles des
chênes, …).
Galle sur chêne, agent cécidogène : Hyménoptère cynipidé (4).
Dans le parasitisme entre plantes à fleurs dont les représentants appartiennent surtout à la famille des
loranthacées, l’écorce épaisse (liège) des chênes et la production de tanins rendent difficile la fixation du
gui (hémiparasite) sur cette essence, d’où son importance dans la mythologie celtique ; tandis que
l’écorce plus mince des rosacées (pommiers) est très facilement attaquée.
Remarque : les cuscutes se fixent spécifiquement sur diverses plantes (fabacées, éricacées,
urticacées,…).
IV – Compétition entre végétaux
Celle-ci s’exerce dans la conquête du territoire par la plante. Elle fait appel à l’émission dans le sol de
substances télétoxiques racinaires inhibitrices de la germination et du développement de plantes
appartenant à une autre espèce. Il s’agit d’un phénomène allélopathique qui favorise un végétal au
détriment des autres et qui réalise de vastes populations (faciès) au niveau de la couverture végétal (ex.
les renouées, les épervières, les mercuriales).
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Photo Catherine BARBIER
Éperviève (Hieracium pilosella).
Les substances mises en jeu ne sont pas toujours identifiées, elles peuvent parfois devenir
autotoxiques (germination des résineux alternativement sapin / épicéa).
V – Lutte contre les agents microbiens et fongiques
Photo Catherine BARBIER
Les phanérogames sont parfois victimes d’attaques fongiques [ex. une rouille (Puccinia) provoque une
castration parasitaire chez l’Anémone sylvie, une autre rouille (Uromyces) induit des anomalies de
croissance et une stérilité sur diverses euphorbes].
Rouille parasitant Euphorbia flavicoma subsp. verrucosa.
Ces atteintes sont généralement limitées.
Des travaux récents portent sur les mécanismes génétiques de défense des plantes contre les maladies
microbiennes et fongiques. Ces moyens de lutte d’ordre métabolique se déroulent en trois phases :
-
reconnaissance de l’agent pathogène,
activation et transmission de signaux d’alerte,
expression de moyens de défense (en particulier, production d’antibiotiques végétaux, les
phytoalexines…).
La cellule modifie sa structure et induit la synthèse de protéines spécifiques provoquant la
dégradation de l’agent pathogène.
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La réaction immunitaire s’accompagne parfois d’un accroissement de la résistance des parois
cellulaires aux enzymes microbiennes (barrage limitant l’étendue des nécroses).
Cependant, certains pathogènes (ex. Chalara fraxinea, responsable du flétrissement du frêne) sont la
cause de redoutables épidémies, car peu d’arbres paraissent montrer une résistance à la maladie.
Cette résistance des plantes aux infections est d’origine génétique n’est pas sans rappeler les
réactions immunitaires observées dans le règne animal.
Sources bibliographiques
Photo Michèle ESCHEVINS
1 - BACH D., MASCRÉ M. & DEYSSON G., 1963. Organisation et classification des plantes vasculaires.
Sedes, Paris 345 p.
2 - BOULLARD B., 1990. Guerre et paix dans le règne végétal. Ellipses, 336 p.
3 - COSTE H., 1937. Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes,
TII, 623 p.
4 - DAUPHIN P. & ANIOTSBEHERE J.-C., 1997. Les galles de France. Mém. Soc. Linnéenne de Bordeaux,
382 p.
5 - DEYSSON G., 1954. Eléments d’anatomie des plantes vasculaires. Sedes, Paris 266 p.
6 - KAUFFMANN S., DOREY S. & FRITIG B., 2000. Les strategies de défenses in "De la graine à la plante",
dossier pour la science h.s. : 116-121.
Panorama sur le fossé d’effrondrement de Mathay depuis le belvédère de Mandeure.
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VI – Les participants
Société
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SHNPM
25490 Dampierre-les-Bois
25600 Vieux-Charmont
25200 Montbéliard
SHNPM
SHNPM
Pays de Montbéliard Agglomération
25310 Hérimoncourt
SHNPM
25420 Dampierre-sur-le-Doubs
SHNPM
Photo Michèle ESCHEVINS
Prénom, Nom
Claude ANTONY
Alain BARTHOLEMOT
Estelle BEAUCHAUD
Guy CHARCOSSET
Béatrice DELIERE
Michèle ESCHEVINS
Marie-Claire GOTTARDI
Jacqueline GRIFFON
Aurélien LAPIERRE
Raymond LINDAUER
Guy RISTORI
Chantal & Jean-Claude TERREAUX
Jean-Claude VADAM
Les participants au départ de la sortie.
Société d'Histoire Naturelle du Pays de Montbéliard - 4, rue d’Audincourt - 25230 SELONCOURT - Téléphone : 03.81.37.35.24
ISSN - 0755 - 2491
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