Master 2 de Biologie Cellulaire, Moléculaire et Oncologie, spécialité Biologie Moléculaire et Cellulaire Ecole Normale Supérieure de Lyon Rapport technique, Juin 2005 Lise RIVIERE Conservation des Fonctions de la Protéine Vpx Issue de Différents Lentivirus de Primates dans l'Infection des Cellules Dendritiques Humaines Directeur de recherche: Dr Jean Luc Darlix Tuteur: Dr Andrea Cimarelli LaboRetro Unité de Virologie Humaine Inserm U412 Ecole Normale Supérieure de Lyon 46, allée d'Italie 69364 LYON cedex 07 REMERCIEMENTS: 1 Jury : Dr Branka HORVAT Dr Eric WATTEL Dr Ioan NEGRUTIU Je tiens à remercier Jean Luc Darlix de m’avoir accueillie dans son équipe pour mon stage de master 2. Merci beaucoup à Andrea Cimarelli qui m’a encadrée pendant ce stage. Je remercie aussi Caroline Goujon ainsi que Lorraine Jarrosson-Wuillème pour leur aide et leurs conseils. Enfin, je remercie tous les membres du Labo Rétro pour leur sympathie. SOMMAIRE: Résumé.................................................................................................................................1 Introduction...........................................................................................2 Matériels et Méthodes..............................................................................7 Résultats...............................................................................................12 La transduction de cellules dendritiques humaines par SIVmac peut être restaurée par les Vpx de différents lentivirus de primates.......................................................................12 La protéine Vpr peut elle avoir la même fonction que Vpx dans la transduction des DCs Humaines par SIVmac, chez des lentivirus ne possédant pas Vpx ?..................................14 Y a-t-il une relation entre l’adaptation d’une souche à l’humain et son indépendance à Vpx ou Vpr pour infecter les DCs ?...................................................................................15 Discussion.............................................................................................17 Références.............................................................................................20RESU ME: 2 Les lentivirus sont une sous-famille des retroviridae et comprennent le virus de l'immunodéficience humaine (HIV) ainsi que de nombreuse souches de SIV, son homologue simien. Ils possèdent, en plus des gènes structuraux et enzymatiques gag, pro-pol et env présents chez tous les rétrovirus, des gènes accessoires dont vpr et chez certaines souches vpx, issu de la duplication de vpr. Vpr et Vpx sont incorporés dans les virions grâce à une interaction avec un domaine conservé de Gag. Chez les lentivirus ne possédant pas Vpx tels que HIV-1, Vpr possède deux fonctions principales: elle provoque l'arrêt du cycle cellulaire en phase G2/M, et participe à l'import nucléaire de l'ADN proviral, permettant l'infection de cellules en arrêt de division, ces deux fonctions étant réparties entre Vpr et Vpx respectivement, chez les souches de lentivirus qui possèdent les deux protéines. Des résultats obtenus au laboratoire ont clairement montré que Vpx était nécessaire à l'infection des cellules dendritiques (DCs) mais pas d’autres cellules dont les macrophages humains par une souche de SIV infectant le macaque (SIVmac). Le fait que Vpx soit nécessaire dans l’infection des DCs mais pas des macrophages bien que ces deux types cellulaires ne se divisent pas suggère que Vpx pourrait avoir une autre fonction, différente de l’import nucléaire. Etant donnée l’importance des DCs dans la pathogénèse du HIV in vivo nous avons décidé de caractériser plus précisément ce blocage. En parallèle d’autre études menées au laboratoire pour caractériser précisément l’effet de Vpx du SIVmac sur les DCs, nous avons aussi voulu déterminer si des Vpx issus de différentes souches de SIV et de HIV-2 partageaient des fonctions similaires à celle de Vpx du SIVmac dans l'infection des DCs. Nous avons pour cela utilisé des vecteurs lentiviraux SIVmac minimaux (dépourvus de gènes accessoires) auxquels ont été apportés en trans les différents Vpx à tester, puis évalué leur capacité à infecter des DCs. Nous avons ainsi montré que la fonction de Vpx impliquée dans l'infection des DCs était conservée chez les souches de SIV proches du SIVmac. Vpx du HIV2 en revanche ne semble pas partager ces fonctions, bien que HIV-2 appartienne à la même lignée que SIVmac. L'adaptation du HIV-2 à l'humain pourrait lui permettre de surmonter un blocage dans l'infection des DCs humaines, de même que HIV-1 qui est capable d'infecter les DCs sans Vpr ni aucune autre protéine accessoire. Le cas du HIV-2 semble pourtant différent puisqu'une délétion touchant vpx, vif et peut être des sites d'épissage de vpr abolit sa capacité à infecter les DCs et celle-ci n’est pas restaurée par l’apport en trans de Vpx du HIV-2, suggérant qu’une autre protéine telle que Vpr ou Vif pourrait jouer un rôle dans l’infection des DCs par HIV-2. 3 INTRODUCTION: Le virus de l'immunodéficience humaine (HIV), l'agent causal du SIDA (syndrome de l'immunodéficience acquise) et son homologue simien SIV appartiennent à la sous-famille rétrovirale des lentivirus. Comme tous les rétroviridae, les lentivirus sont des virus enveloppés, possédant un génome ARN simple brin de polarité positive, ayant la particularité d'être rétrotranscrit au cours du cycle réplicatif en ADN proviral double brin, puis intégré dans le génome de la cellule hôte. Le génome des lentivirus de primates comprend les 3 gènes principaux présents chez tous les rétrovirus: gag, pro-pol et env. Gag et pro-pol codent des polyprotéines clivées pas la protéase virale pour donner les protéines structurales sous leur forme mature (MA: matrice, CA: capside, NC: nucléocapside et p6 issues de Gag), et les enzymes virales (PR: protéase, RT: transcriptase inverse et IN: intégrase issues de Pro-Pol). Env code une polyprotéine clivée par une enzyme cellulaire en deux sous unitées: SU (surface) et TM (transmembanaire). Les lentivirus possèdent, en plus de ces 3 gènes, des gènes accessoires et régulateurs (tat, rev, nef, vif, vpu, vpr et chez certaines souches de lentivirus vpx) (fig. 1A). Le cycle réplicatif viral débute par la reconnaissance entre la glycoprotéine d'enveloppe du virus et le récepteur de la cellule cible, permettant la fusion des membranes virale et cellulaire puis la libération dans le cytoplasme d'un complexe nucléoprotéique contenant l'ARN génomique et des protéines virales. L'ARN génomique est rétrotranscrit en ADN proviral à l'intérieur de ce complexe par la transcriptase inverse puis importé dans le noyau. Chez les lentivirus, contrairement aux rétrovirus dits simples, cet import se fait de façon active à travers les pores nucléaires car l'ADN proviral est associé à des protéines virales aux propriétés nucléophiliques, dont Vpr, MA et IN. Les lentivirus, contrairement aux autres rétrovirus, sont donc capables d'infecter des cellules qui ne se divisent pas. L'ADN proviral, une fois importé dans le noyau, est intégré dans le génome de la cellule hôte grâce à l'intégrase virale, ce qui marque la fin des phases précoces de l'infection. Les phases tardives ont ensuite lieu avec l'expression du génome viral et la production des protéines virales qui s'assemblent avec l'ARN génomique pour former de nouvelles particules virales, libérées de la cellule (fig. 1B, ). Si HIV provoque le SIDA chez l'humain, ce n'est pas le cas pour la plupart des souches de lentivirus. Il existe en effet de nombreuses souches de SIV (fig. 2) qui infectent naturellement diverses espèces de singes sans causer de pathologie mais c'est la transmission d'une souche de SIV à une nouvelle espèce de primate qui cause souvent une immundéficience grave. Ainsi 4 le SIDA humain est la conséquence de la transmission du SIV à l'homme qui a donné naissance au HIV, un nouveau virus adapté à l'humain. Les deux grands types de HIV (HIV-1 et HIV-2) sont issus de deux souches de SIV différentes (SIVcpz du chimpanzé et SIVsm du singe sooty mangabey, respectivement) ayant été transmises à l'humain à plusieurs reprises et de façon indépendante (). Les zoonoses (passage d'un virus à une nouvelle espèce), souvent délétères, peuvent se produire si le virus d'origine est capable de s'adapter à un nouvel hôte, mais sont cependant limitées par des barrières d'espèces. Parmi ces barrières, des facteurs de restriction cellulaires récemment décrits sont capables de limiter l'infection par des lentivirus de primates, de façon spécifique pour chaque espèce hôte. C'est le cas du facteur cellulaire Trim5alpha, responsable de la restriction à l'infection par HIV-1 dans certaines cellules de singe et qui pourrait expliquer le fait que HIV-1 ne puisse pas infecter les singes à l’exception du chimpanzé dont il est originaire. Le mécanisme d'action de ce facteur, encore mal connu, cible la capside virale après son entrée dans la cellule et bloque l'infection à une étape antérieure à la transcription inverse qui pourrait impliquer la déstabilisation du complexe nucléoprotéique entrant (, ). Des protéines accessoires virales peuvent cependant, dans certains cas, permettre aux virus de s'adapter aux facteurs cellulaires. C'est notamment le cas de la protéine Vif du HIV-1 qui permet de protéger le virus contre APOBEC3G, un facteur cellulaire antiviral responsable d'hypermutations dans l'ADN proviral néosynthétisé (, , ). Un blocage de l'infection par SIVmac, levé par la protéine accessoire Vpx, a été mis en évidence au laboratoire, dans l'infection des cellules dendritiques (DCs) humaines. Les DCs sont des cellules présentatrices d'antigène, cibles de HIV in vivo qui jouent un rôle important dans l'infection puiqu'elles font partie des premières cellules infectées par le virus et permettent sa dissémination et sa transmission aux lymphocytes T (). Le gène vpx n'est présent que chez certaines souches de SIV et chez HIV-2 (fig. 2). Vpx est issu de la duplication de vpr, un autre gène accessoire présent chez tous les lentivirus de primate (). Ces deux gènes codent des protéines de 112 et 96 acides aminés, respectivement, qui sont incorporées dans les particules virales via une interaction avec le domaine p6 de la protéine structurale Gag (, ). Chez les lentivirus qui, comme HIV-1, ne possédent pas Vpx, Vpr a deux fonctions principales. Elle provoque d'une part l'arrêt du cycle cellulaire en fin de phase G2, ce qui pourrait permettre de garder un environnement cellulaire favorable à la transcription virale (, ). D'autre part Vpr joue un rôle dans l'import nucléaire de l'ADN proviral, étape nécessaire pour l'infection de cellules qui ne se divisent pas telles que les macrophages ou les cellules dendritiques (, , ). Chez les lentivirus possédant à la fois Vpr et Vpx, comme HIV-2 ou SIV du macaque (SIVmac), ces fonctions sont séparées entre les deux protéines (): Vpx 5 semble impliquée dans l'import nucléaire de l'ADN proviral (, , , ) alors que Vpr provoque l'arrêt du cycle cellulaire en phase G2/M (). Bien que Vpx soit considéré comme important pour l'import du complexe de préintégration de l'ADN proviral, des résultats obtenus au laboratoire suggèrent la possibilité de fonctions supplémentaires pour cette protéine, qui seraient spécifiques du type cellulaire. En particulier, Vpx du SIVmac est nécessaire pour l'infection de DCs humaines mais pas de macrophages humains (fig. 3 A, ). Pourtant les macrophages comme les DCs, aussi cibles du HIV in vivo, sont deux types de cellules primaires en arrêt de division. Leur infection par un lentivirus requiert donc l'import nucléaire de l'ADN proviral dans les deux cas. La fonction connue de Vpx dans l'import nucléaire n'est donc pas suffisante pour expliquer la différence d'infectivité entre DCs et macrophages, ce qui suggère qu'une nouvelle fonction de Vpx est en cause, avec un effet dépendant du type cellulaire. Dans le cas du HIV-1, en revanche, la protéine homologue Vpr n'est nécessaire ni pour l'infection de macrophages humains ni pour l'infection de DCs humaines (fig. 3B) suggérant qu'une adaptation du HIV-1 à l'humain en dehors de ses gènes accessoires pourrait lui permettre de surmonter ce blocage sans l'aide de protéine accessoire. La présence de facteurs cellulaires restreignant l'infection des DCs par des lentivirus pourrait jouer un rôle important in vivo dans les premières phases de l'infection puisque ces cellules sont les premières à être infectées, il est donc important de clarifier ce blocage non seulement dans le cadre de l'infection par SIV mais aussi parce que sa compréhension pourrait permettre d'identifier les éléments du HIV qui permettent l'infection des DCs. Vpx est présent chez différentes souches de lentivirus mais sa séquence est relativement variable (fig. 4). Nous avons donc voulu savoir, en premier lieu, si les Vpx de souches de lentivirus différentes possédaient une fonction comparable à Vpx du SIVmac et pouvaient restaurer son infection des DCs humaines. Une deuxième question a été de savoir, de la même manière, si Vpr pouvait avoir cette fonction dans l'infection des DCs chez les souches de lentivirus qui ne possèdent pas Vpx. Enfin, nous avons voulu déterminer si HIV-2 avait besoin de Vpx ou d'autres protéines accessoires pour infecter les DCs humaines et s'il pouvait y avoir une relation entre l'adaptation d'un lentivirus à l'humain et sa capacité à infecter les DCs humaines sans protéine accessoire. Afin de pouvoir étudier facilement l'infection lentivirale, des vecteurs lentiviraux (ou lentivecteurs) dérivés de lentivirus infectieux sont utilisés, ce qui permet une manipulation en 6 laboratoire de niveau de sécurité L2 et non L3. Le principe des lentivecteurs repose sur la séparation des facteurs cis du génome viral (notamment les séquences permettant la mobilisation du génome ARN viral) et des facteurs trans (séquences codant les protéines structurales et régulatrices) sur des plasmides différents. Le plasmide contenant les séquences cis permet la production du génome viral mais les gènes viraux sont remplacés par un gène rapporteur (fig. 5A). Les différents plasmides sont cotransfectés dans la lignée cellulaire 293T de fibroblastes humains ce qui permet la production de particules virales infectieuses, car elles contiennent toutes les protéines virales, mais non réplicatives puisque le seul gène exprimé après l'infection par les lentivecteurs est le gène rapporteur (fig. 5B). Ce système permet aussi de déterminer facilement la quantité de cellules transduites par mesure de l'expression du gène rapporteur. De plus les lentivecteurs sont de bons outils pour l'étude des phases précoces de l'infection puisqu'ils se comportent de la même manière que les virus réplicatifs dont ils dérivent jusqu'à l'étape d'intégration du génome proviral (). Notre approche a été basée sur l'utilisation de lentivecteurs minimaux ne contenant pas de gènes accessoires, à partir de 3 plasmides: un premier plasmide code les gènes gag pro-pol du lentivirus étudié, un deuxième permet la production du génome et contient les séquences cis spécifiques du lentivirus et le gène rapporteur eGFP (enhanced green fluorescent protein), et un troisième plasmide code la protéine G du VSV (virus de la stomatite vésiculeuse), une glycoprotéine d'enveloppe conférant un large tropisme cellulaire au lentivecteur. La protéine accessoire d'intérêt, Vpx ou Vpr, peut alors être apportée en trans par l'ajout d'un quatrième plasmide porteur de son gène. Les protéines Vpx issues de différentes souches de lentivirus ont ainsi été apportées en trans dans un vecteur minimal SIVmac afin de comparer leur capacité à restaurer la transduction des DCs humaines (fig. 6). Les résultats obtenus montrent une conservation des fonctions nécessaires à la transduction des DCs parmi les Vpx issus de souches de SIV appartenant à la même lignée que SIVmac (lignée SIVsm). Vpx du HIV-2 en revanche ne semble pas partager ces fonctions, bien que HIV-2 appartienne aussi à la lignée SIVsm, suggérant que les virus adaptés à l'humain pourraient avoir évolué et acquis une nouvelle activité indépendante de Vpx pour surmonter ce blocage. Enfin, pour deux autres souches de lentivirus chez lesquelles Vpx n'est pas présent, la protéine homologue Vpr ne semble pas posséder la même fonction dans la transduction des DCs, de même que pour HIV-1. Des difficultés ont cependant été rencontrées dans la détection de certains Vpx ou Vpr car nous ne disposions pas d'anticorps capable de reconnaître toutes les protéines et nos tentatives pour générer un nouvel anticorps MATERIELS ET METHODES: ont échoué. 7 Souches de lentivirus: SIVmac251, SIVsmPBj, SIVagm, HIV-2ROD et HIV-1NL4-3 sont des souches clonées et adaptées au laboratoire pour lesquelles l'ADN proviral est disponible sous forme de plasmide. L'hôte naturel d'origine de chaque souche est respectivement le macaque, le singe sooty mangabey, l'humain et le singe vert africain. SIVsm660, SIVrcm, SIVhu, HIV-1MVP et HIV1BCF sont des isolats primaires pour lesquels seul le virus est disponible et dont les hôtes sont respectivement les singes sooty mangabey (sm), red capped mangabey (rcm) et l'humain (infecté accidentellement par SIVsm dans le cas de SIVhu) (NIH AIDS reagent program). HIV-1NL4-3, HIV-1BCF et HIV-1MVP appartiennent à la lignée HIV-1/SIVcpz, mais HIV-1NL4-3 fait partie du groupe M de HIV-1, le plus fréquent, alors que HIV-1BCF et HIV-1MVP sont deux souches proches appartenant au groupe O, plus rare et plus proche du SIVcpz que du groupe M. Plasmides et clonages moléculaire: Le lentivecteur minimal SIVmac est produit avec le plasmide pSIV15(-) codant les gènes gag pro-pol, et le génome pGAE-CMV codant le gène de l'eGFP et porteur des séquences cis, tous deux dérivés de SIVMAC251 (). Le lentivecteur minimal HIV-1MVP est produit avec le plasmide pHIV8.91 ex MVP () codant les gènes gag pro-pol de HIV-1MVP et le génome pRRLsin.PPT.hPGK.GFPpre dérivé du HIV-1. Le lentivecteur minimal HIV-1 8.91 est produit avec le plasmide pHIV8.91 codant les gènes gag pro-pol du HIV-1NL4-3 et le génome pRRLsin.PPT.hPGK.GFPpre dérivé du HIV-1NL4-3 (). Le lentivecteur complet HIV-2 (noté HIV-2 sauvage) est produit à partir du plamside pSVRNBDM issu du génome complet du HIV-2ROD dans lequel le gène env et la séquence d'encapsidation psi ont été délétés, et du génome pSVRNBPuroH issu du génome complet du HIV-2ROD dans lequel le gène env a été délété et remplacé par le gène de l'eGFP et l'expression des gènes gag pro-pol a été inactivée par l'introduction d'un codon stop prématuré (). Ces deux plasmides codent donc tous les gènes accessoires du HIV-2ROD. Aucune carte précise de ces plasmides n'étant disponible, des délétions affectant vpx ont ensuite été réalisées en digérant chacun des deux plasmides par l’enzyme de restriction Nsi dont un site unique est présent à l’intérieur du gène vpx, puis par la nucléase Bal. Les plasmides ont ensuite été circularisés par ligation des deux extrémités digérées. Le séquençage des délétions effectuées a permis de les localiser dans la partie 5’ de vpx, chevauchante avec la partie 3’ de vif et pouvant aussi toucher des sites 8 d’épissage de vpr. Le lentivecteur produit à partir de ces plasmides est appelé HIV-2 délété. Tous les vecteurs sont pseudotypés par la protéine G d'enveloppe du virus de la stomatite vésiculeuse (VSV-G) exprimée à partir du plasmide MD.G qui confère un large tropisme cellulaire aux lentivecteurs (). Les plasmides pTG651 vpx et pcDNA3 vpr codent respectivement les gènes vpx et vpr de SIVMAC251. Pour cloner les gènes vpx des souches SIVsm660, SIVsm PBj, SIVrcm, SIVhu, HIV-2ROD et les gènes vpr des souches SIVagm et HIV-1BCF, les séquences ont été amplifiés par PCR en utilisant comme matrice l'ADN proviral lorsqu'il était disponible ou l'ARN extrait des virus dans le cas contraire, avec les amorces contenant les sites de restriction présentées dans le tableau 1. Les produits de PCR ont été insérés dans le plasmide pcDNA3.1+ (Invitrogen) après digestion par le couple d'enzymes correspondant au couple d'amorces utilisées. La séquence des différents vpx a ensuite été vérifiée. Cellules La lignée cellulaire 293T dérive de cellules embryonnaire rénales humaines. Elle est utilisée pour la production des lentivecteurs car elle est facilement transfectable. La lignée HelaP4 (HeLa exprimant CD4+) a été obtenue à partir de la lignée HeLa dérivant d'un carcinome humain et est utilisée pour titrer les lentivecteurs. Ces deux lignées sont cultivées en milieu DMEM (Dulbecco modified Eagle medium) additionné de 10% de sérum de veau fétal (SVF) et de 10U de pénicilline et 10 mg/ml de streptomycine. Les cellules dendritiques (DCs) sont obtenues par différenciation de monocytes purifiés à partir du sang périphérique d'un donneur. Afin d'éliminer les plaquettes, 145 ml d'une solution de NaCl 0,9% sont ajoutés à environ 450 ml de sang total. Après centrifugation 20 min à 800 rpm, le surnageant composé du plasma et des plaquettes est éliminé. La fraction restante qui contient toutes les autres cellules est ensuite diluée deux fois dans du PBS 1X (phosphate buffer saline: KH2PO4 1,06 mM, NaCl 154 mM, Na2HPO4 5,6 mM) puis déposée sur un coussin de milieu de séparation des lymphocytes (Eurobio, Les Ulis, France) en proportions 2:1 et centrifugée 20 min à 1800 rpm, afin de séparer les cellules mononucléées des autres cellules. Les cellules monocucléées, regroupées en un anneau de densité moyenne, sont prélevées et lavées plusieurs fois en milieu RPMI hgg SVF (RPMI-1640 additionné d'Hepes 10 mM, L-glutamine 2 mM, 10U de pénicilline, 10 mg/ml de streptomycine et 10% de sérum de veau fétal). Après numération, les cellules sont resuspendues en milieu RPMI hgg SVF à raison de 30.106 cellules/ml puis déposées sur coussin de Percoll 52% (Percoll d'une densité 9 de 1,130g/ml; Parmacia, Uppsala, Suède, dilué dans du PBS 1X) dans les proportions 1:2, afin de séparer les monocytes des lymphocytes. Après centrifugation 20 min à 2000 rpm, les monocytes, regroupés en anneau de densité moyenne, sont prélevés puis lavés 3 fois en milieu RMPI hgg SVF. Les monocytes sont ensuite purifiés par sélection négative sur des microbilles MACS couplées à un cocktail d'anticorps anti CD3, CD7, CD16 CD19, CD56, CD123 et glycophorine A selon le protocole fourni par le fabricant (Miltenyi Biotec, Paris) pour obtenir une pureté supérieure à 90%. Les monocytes ainsi purifiés sont congelés en milieu RPMI-1640 additionné de 20% de sérum AB humain et de 10% de DMSO. Après décongélation les monocytes sont cultivés en milieu RPMI-1640 additionné de 5% de sérum de veau fétal, 10mM d'Hepes, 10U de pénicilline, 10 mg/ml de streptomycine et 200mM de glutamine, en présence de 100ng/ml d'IL-4 et de GM-CSF pendant 4 jours pour les différencier en cellules dendritiques. Les macrophages sont obtenus par différenciation de monocytes cultivés dans le même milieu mais uniquement en présence de 100 ng/ml de GMCSF, pendant 6 jours. Les DCs et les macrophages obtenus sont capables de phagocyter des billes de latex. Les DCs expriment les marqueurs caractéristiques des DCs immatures: forte expression de HLA DR, CD1a, CD40, faible expression de CD83 et absence d'expression de CD14 (après maturation avec CD40L ou TNFalpha, forte expression de CD83). Les macrophages expriment notamment les marqueurs CD32, CD14, HLA-DR et CD68. Production de lentivecteurs (fig. 6) Transfection de cellules 293T au phosphate de calcium: Les cellules 293T sont mises en culture à raison de 3x106 cellules par boîte de 10 cm la veille de la transfection. Le jour de la tranfection, les ADN plasmidiques nécessaires à la production des lentivecteurs sont ajoutés à 500 µl de CaCl2 0,25 mM qui sont ensuite mélangés goutte à goutte sous agitation à 520 µl de tampon HBS (NaCl 140 mM, KCl 5 mM, Na2HPO4 0,75 mM, glucose 6 mM, Hépès 25 mM pH 7,05) par boîte de 10 cm. Le mélange est homogénéisé puis versé goutte à goutte sur les cellules dans leur milieu de culture. Le milieu est changé après 12h d'incubation. Purification des lentivecteurs produits sur double coussin de sucrose: Deux jours après la tranfection, le surnageant des cellules est filtré (0,45 µm) puis ultracentrigugé sur double coussin de sucrose 45%-25% pendant 1h15 à 28000 rpm (rotor SW28, Beckman) à 4°C. L'interface entre le sucrose 45% et 25% est prélevée et diluée 6 fois dans du PBS 1X puis ultracentrifugée sur simple coussin de sucrose 25% dans les mêmes 1 0 conditions. Le culot est alors repris dans 150 µl de milieu RPMI-1640 additionné de 1 mM de MgCl2 et 200 µM de dNTPs permettant la rétrotranscription inverse endogène. Cette procédure assure assure une pureté suffisante pour l'infection de cellules primaires. Normalisation par titre infectieux des lentivecteurs: Afin de déterminer le nombre de particules infectieuses par ml de préparation virale, ou titre infectieux, 100000 cellules HeLaP4 sont transduites par 2 µl ou 0,2 µl de lentivecteur (voir paragraphe « transduction des cellules »). Le titre infectieux est déterminé grâce au pourcentage de cellules HeLaP4 transduites (exprimant la GFP), par la formule: titre infectieux = % cellules HeLaP4 exprimant la GFP x 100000 100 x volume de lentivecteur utilisé Normalisation des lentivecteurs par test d'activité transcriptase inverse exogène: Le test d'activité transcriptase inverse exogène permet de quantifier l'activité de la transcriptase inverse, dont il a été montré qu'elle était proportionelle à la quantité de particules virales (). 3 µl de vecteurs purifés sont ajoutés à 50 µl de mélange réactionnel (Tris/HCl 60 mM pH8, Kcl 180 mM, MgCl2 6mM, EGTA 0,6 mM pH8, Triton X-100 0,12%, DTT 6 mM, oligo dT 6 µg/ml, poly rA 12 µg/ml, 10 µCi de P 32 alpha dTTP à 800 Ci/mmol) et incubés 1h à 37°C. 5 µl de la réaction sont déposés sur membrane DE81 et rincés 3 fois par du SSC 2X (NaCl 0,3 M, NaCitrate 0,3M) puis la radioactivité est quantifiée au phosphor imager. Transduction des cellules 105 cellules HeLaP4 ou DCs sont transduites par les lentivecteurs, en plaque de 12 ou 96 puits respectivement dans 500 µl ou 100 µl de milieu complet additionné de 6 µg/ml de polybrene. Le milieu est changé 3h après l'ajout des lentivecteurs. Le pourcentage de cellules transduites est estimé après 3 jours par mesure du pourcentage de cellules exprimant la GFP au cytomètre de flux (FACS Calibur). Empreinte Western Des échantillons de lentivecteurs normalisés par test d'activité transcriptase inverse exogène sont additionnés de tampon 5X (Tris 500 mM pH 6,8; SDS 0,8%; glycérol 40%; bleu de bromophénol 2%) et dénaturés 5 min à 95°C puis déposés sur gel SDS-PAGE à 10 ou 15% d'acrylamide. Après migration des protéines sur le gel, les protéines sont transférées sur membrane PVDF (Hybond-P; Amersham) en tampon de transfert 1X (Tris/Base 3g/l; Glycine 14,4 g/l; méthanol 20%). La membrane est ensuite saturée 30 min dans du TBST1x (Tris Hcl 50 mM pH8; NaCl 30 mM; Tween 0,05%) additionné de 5% de lait en poudre, puis incubée 1h dans l'anticorps primaire dilué dans du TBST1X-lait 0,5%. Après plusieurs rinçages en 1 1 TBST1X elle est incubée avec l'anticorps secondaire couplé à la peroxydase, dilué dans du TBST1X-lait 0,5%. Après rinçage en TBST1X, la révélation est effectuée par incubation de la membrane dans un substrat de la peroxydase dont le produit est luminescent (Enhanced ChemiLuminescence; Amercham) et le signal est révélé sur un film. Les anticorps primaires utilisés sont un anticorps anti Vpx monoclonal de souris dirigé contre Vpx de HIV-2 (réf. 2751, AIDS reagent & reference program, NIH), un anticorps anti Vpr de lapin (réf. 3951, AIDS reagent & reference program, NIH), ou un anticorps anti capside de souris (dirigé contre la protéine p27 de SIV, réf. 183, AIDS reagent & reference program, NIH). Les anticorps secondaires utilisés sont un anti-souris ou un anti-lapin couplées à l'HRPhorseradish peroxydase (Dako). RESULTATS: La transduction des cellules dendritiques humaines par SIVmac peut être restaurée par les Vpx de différents lentivirus de primates: Afin d'étudier la conservation des fonctions de Vpx dans la transduction des DCs humaines, nous avons comparé l'effet de Vpx issus de différentes souches de lentivirus de primates dans un vecteurs SIVmac dépourvu d'autres gènes accessoires. L'incorporation de Vpx dans les particules virales se fait grâce à une interaction avec le domaine P6 de Gag et cette interaction semble bien conservée puisque le domaine de P6 impliqué est conservé chez la plupart des lentivirus, suggérant que des Vpx de différentes souches peuvent être incorporés dans SIVmac (, ). Pour cela, le clonage du gène vpx a été réalisé pour chaque souche dans un vecteur d'expression eukaryote. Les souches SIVsm660, SIVsmPBj, SIVhu et HIV-2ROD appartiennent à la même lignée que SIVmac251 (lignée SIVsm/HIV-2) sur laquelle ont été réalisées les premières observations et possèdent toutes le gène vpx. SIVrcm appartient à une lignée différente mais possède aussi vpx et la séquence de la protéine codée présente une faible identité avec les autres Vpx (fig. 4). Parmi ces souches, certaines (SIVmac251, SIVsmPBj et HIV-2ROD) sont des souches clonées après plusieurs passages en cultures cellulaires et sont adaptées au laboratoire. Elles sont donc susceptibles d'avoir accumulé des mutations qui changent leur réplication. Les autres souches (SIVsm660, SIVrcm et SIVhu) sont issues d'isolats primaires et sont donc plus proches des virus sauvages (fig. 2). 1 2 Des vecteurs SIVmac minimaux ou additionnés de l'un des Vpx en trans ont ensuite été produits et purifiés sur double coussin de sucrose. Leur titre infectieux sur cellules HeLaP4 (voir la partie matériels et méthodes) ne montre pas de différence significative de transduction entre les différents lentivecteurs pour ce type cellulaire. Des DCs humaines issues de monocytes sanguins différenciés en présence d'IL4 et de GM-CSF pendant 4 jours ont ensuite été transduites à une MOI de 5 (multiplicity of infection, ou nombre de particules infectieuses par cellule) par les lentivecteurs ainsi normalisés et le pourcentage de transduction des DCs a été déterminé en mesurant de l'expression de la GFP par cytométrie de flux. Cette expérience a été réalisée plusieurs fois, sur des DCs issues de donneurs différents. Afin de pouvoir comparer entre eux les résultats obtenus, l'effet des Vpx à tester a été évalué pour chaque série d'expérience par rapport au Vpx du SIVmac servant de référence. Les résultats présentés dans la figure 7A sont donc exprimés en pourcentage de restauration de la transduction des DCs pour chaque Vpx testé, par rapport au Vpx issu du SIVmac, calculé selon la formule: % de restauration = % de transduction par SIVmac et Vpx de la souche à tester % de transduction par SIVmac avec Vpx du SIVmac Les résultats montrent que les Vpx issus des souches SIVsm660, SIVsmPBj, et dans une moindre mesure SIVhu sont capables de rétablir la transduction des DCs par SIVmac et semblent donc posséder la même fonction dans la transduction de DCs. En revanche les vecteurs SIVmac produits avec les Vpx issus des souches SIVrcm et HIV-2ROD ne peuvent pas transduire les DCs. Nous nous sommes donc interrogés sur la présence de Vpx dans ces particules virales. En effet, si l'interaction entre Vpx et le domaine P6 de Gag semble bien conservée il est cependant possible qu'un Vpx d'une souche éloignée du SIVmac ne soit pas incorporé dans les particules SIVmac. La présence des différents Vpx dans les particules virales a été vérifiée par empreinte western réalisée sur des quantités de lentivecteurs normalisées par test d'activité transcriptase inverse exogène, en utilisant deux anticorps primaires, l'un dirigés contre la protéine Vpx du HIV-2, l'autre contre la capside (CA) du SIVmac (fig 7B). L'empreinte western montre des quantités de CA similaires entre les différents vecteurs, bien que les Vpx des souches SIVmac, SIVsm660, SIVsmPBj et SIVhu soient détectés dans les particules virales à des taux variables. Les différences de niveau de détection de ces protéines peuvent être dues à des différences d'incorporation dans les particules virales SIVmac mais aussi à une moins bonne détection par l'anticorps, celui-ci étant dirigé contre Vpx du HIV-2. La protéine Vpx issue du HIV-2 est aussi détectée fortement dans les particules virales mais elle n'a pas d'effet sur la transduction des DCs. Une 1 3 différence de poids apparent entre Vpx du HIV-2 et les autres Vpx est aussi observée mais n'est pas due à une différence dans la taille des protéines (112 acides aminés pour Vpx du HIV-2, SIVsm660, SIVmac et SIVsmPBj), les gènes clonés ayant été séquencés et vérifiés. En revanche Vpx du SIVrcm n'est pas détecté. Dans ce dernier cas on ne peut cependant pas trancher entre l'absence du Vpx du SIVrcm dans les particules virales SIVmac ou une mauvaise reconnaissance de cette protéine par l'anticorps anti Vpx utilisé puisque la séquence de Vpx du SIVrcm est très éloignée de celle de Vpx du HIV-2 contre lequel est dirigé l'anticorps (fig. 4). Nous avons donc commandé et testé un nouvel anticorps synthétisé chez le lapin en utilisant un région conservée de Vpx mais l'anticorps obtenu n'est pas efficace. La protéine Vpr peut elle avoir la même fonction que Vpx dans la transduction des DCs humaines par SIVmac, chez des lentivirus ne possédant pas Vpx? Les protéines Vpx de plusieurs souches de lentivirus semblent posséder la même fonction que Vpx du SIVmac dans l'infection des DCs humaines. Or le gène vpx n'est présent que chez certaines souches de lentivirus et est issu de la duplication de vpr des lentivirus de primates. Les principales fonctions connues de la protéine Vpr sont réparties, chez les souches qui possèdent les deux gènes, entre Vpr et Vpx, il serait donc intéressant de déterminer si la fonction de Vpx dans l'infection des DCs humaines est une nouvelle fonction spécifique à Vpx ou si elle existe aussi pour les Vpr de lentivirus qui ne possèdent pas Vpx. Les premières études réalisées au laboratoire ont montré que ce n'était pas le cas pour HIV-1, ce qui nous a conduit à tester une autre souche de lentivirus aussi dépourvue de vpx mais infectant le singe : SIVagm (du singe vert africain, fig.2). Le gène vpr du SIVagm a été cloné de la même façon que dans le cas des vpx, et apporté en trans à un vecteur SIVmac minimal. Des contrôles ont aussi été réalisés avec vpx ou vpr du SIVmac. Après purification et normalisation des vecteurs produits, des DCs humaines ont été transduites à une MOI de 5 et le pourcentage de cellules transduites a été déterminé par mesure de l'expression de la GFP (fig. 6). Le pourcentage de restauration de la transduction des DCs par rapport à Vpx du SIVmac est indiqué figure 7C. Une empreinte western a été réalisée avec un anticorps anti CA et anti Vpr (fig. 7D) pour vérifier l'incorporation des Vpr dans SIVmac sur des quantités de lentivecteurs normalisées par titre infectieux sur cellules HeLaP4. Des quantités similaires de CA sont détectées pour chaque vecteur, cependant aucune des protéines Vpr n'est détectée (non montré), car l'anticorps anti Vpr utilisé est dirigé contre la protéine du HIV-1 et ne reconnaît pas les Vpr de souches différentes. Cependant la protéine Vpr du SIVmac est certainement présente dans les particules virales puisqu'elle 1 4 interagit, comme Vpx, avec le domaine P6 de Gag du SIVmac. Une étude antérieure a aussi montré que Vpr du SIVagm pouvait interagir avec le domaine P6 de Gag du SIVmac et être incorporée dans ces particules virales (). Il semble donc qu'aucun des Vpr testés ici n'ait la fonction de Vpx du SIVmac dans l'infection des DCs humaines, de même que pour HIV-1. Vpr ne semble donc pas pouvoir se substituer à Vpx même pour un lignée de SIV possédant uniquement Vpr. Y a-t-il une relation entre l'adaptation d'une souche à l'humain et son indépendance à Vpx ou Vpr pour infecter les DCs? Après avoir testé les protéines Vpx ou Vpr de différentes souches de lentivirus pour leur capacité à restaurer la transduction des DCs humaines par un vecteur SIVmac nous avons voulu savoir si les lentivirus d'origine avaient besoin de ces protéines pour infecter les DCs. Les premiers résultats obtenus au laboratoire ont montré que HIV-1, une souche adaptée à l'humain, pouvait se passer de gènes accessoires pour infecter les DCs humaines alors que SIVmac, adapté au singe, avait besoin de Vpx. Il est donc possible que la capacité à infecter les DCs humaines sans gène accessoire soit la conséquence d'une adaptation à l'humain chez HIV-1. Nous avons donc voulu déterminer pour d'autres souches de lentivirus si l'adaptation à l'humain était corrélée à une capacité à infecter les DCs humaines sans gène accessoire. Les souches HIV-2ROD et HIV-1MVP ont donc été utilisées comme exemples de lentivirus adaptés à l'humain. HIV-2ROD, qui appartient comme SIVmac à la lignée SIVsm, possède comme tous les membres de cette lignée le gène vpx alors que HIV-1MVP appartient à la lignée HIV-1/SIVcpz qui ne possède que vpr. Cependant HIV-1MVP fait partie du groupe O (outgroup) de HIV-1, un groupe plus rare que le groupe M sur lequel ont été réalisées les premières expériences, et plus proche du SIVcpz que du groupe M (fig. 2). Le vecteur HIV-2 dont nous disposons n'est pas un vecteur minimal et code aussi tous les gènes accessoires. Des délétions affectant la partie 5' de vpx ont donc été réalisées dans le plasmide auxiliaire codant gag pro-pol et dans le génome, par digestion avec la nucléase Bal, cependant ces délétions affectent aussi le gène vif, chevauchant avec celui de vpx, et pourraient aussi affecter des sites d'épissage de vpr, ceci restant à déterminer. Des vecteurs HIV-2 pseudotypés par VSV-G ont ensuite été produits par cotransfection des plasmides sauvages, ou des plasmides délétés pour vpx seuls ou avec le plasmide codant vpx du HIV- 1 5 2ROD, ou vpx du SIVmac en trans. Après leur purification les vecteurs ont été normalisés sur cellules HeLaP4 et ne montrent pas de différence d'infectivité pour ce type cellulaire. Des DCs humaines ont ensuite été transduites à des MOI de 5 et 25, les DCs étant des cellules primaires difficiles à transduire. Comme attendu le vecteur HIV-2 sauvage peut transduire efficacement les DCs (fig. 8A), le vecteur délété pour vpx en revanche n'en est pas capable bien qu'il puisse transduire les cellules HeLaP4 de façon comparable. Cependant l'apport en trans de Vpx du HIV-2 ne permet pas de rétablir la transduction alors que Vpx du SIVmac le permet. Une empreinte western réalisée sur des quantités de vecteurs normalisées par titre sur cellules HeLaP4 a confirmé la présence de ces deux types de Vpx dans le vecteur HIV-2 délété (fig. 8B) bien que le signal obtenu pour Vpx du SIVmac soit beaucoup plus faible, pour des quantités de CA semblables. Vpx du SIVmac est probablement moins bien incorporé que Vpx du HIV-2 dans les particules virales HIV-2, mais aussi moins bien reconnu par l'anticorps utilisé qui est dirigé contre Vpx du HIV-2, la quantité de Vpx du SIVmac réellement incorporée est donc probablement plus élevée qu'il ne semble. Le fait que Vpx du HIV-2 ne rétablisse pas la transduction du vecteur HIV-2 délété confirme que cette protéine ne possède pas la même fonction que Vpx du SIVmac. Les délétions effectuées dans les plasmides HIV-2 utilisés affectant cependant d'autres régions que vpx, il est possible que ces régions soient impliquées dans la transduction des DCs. En particulier les gènes vpr ou vif pourraient jouer un rôle, dont l'étude est en cours. D'autre part il a déjà été montré au laboratoire qu'une souche HIV-1 appartenant au groupe M pouvait transduire des DCs humaines sans Vpr, et que l'apport de Vpr n'améliorait pas l'infection (fig. 3) mais nous avons voulu savoir s'il en était de même pour une souche de HIV-1 appartenant au groupe O, plus proche de SIVcpz (fig. 2). La souche HIV-1MVP a donc été utilisée pour produire des lentivecteurs minimaux ou auxquels Vpr du HIV-1BCF a été apporté en trans. HIV-1BCF est une souche proche de HIV-1MVP appartenant aussi au groupe O de HIV-1 dont le gène vpr a pu être cloné dans un plasmide alors que nous ne disposions pas d'une matrice permettant de cloner celui du HIV-1MVP. Un contrôle a été réalisé avec le vecteur minimal HIV-1 8.91 appartenant au groupe M. Les vecteurs purifiés et titrés sur cellules HeLaP4 ont été utilisés pour transduire des DCs à une MOI de 5 ou 25. Le pourcentage de cellules transduites par chaque vecteur, déterminé par mesure de la GFP est indiqué danas la figure 9 et montre que quelque soit la MOI utilisée, le vecteur HIV-1MVP est capable de transduire les DCs indépendamment de Vpr, mais de façon moins efficace que le vecteur HIV-1 du groupe M. Cependant l'empreinte western réalisée sur des quantités de 1 6 vecteurs normalisées par titre infectieux sur cellules HeLaP4 permet de détecter la CA des vecteurs, en quantités comparables mais ne permet pas de détecter Vpr du HIV-1BCF car aucun anticorps anti Vpr spécifique du groupe O de HIV-1 n’étant disponible, l'anticorps anti Vpr utilisé ici est dirigé contre Vpr d'un HIV-1 du groupe M et ne reconnaît probablement pas un Vpr d’une souche plus éloignée. Il est donc difficile de savoir si Vpr du HIV-1BCF est réellement présent dans les particules virales HIV-1MVP. Des expériences de RT-PCR sont aussi en cours pour déterminer si l'ARN codant cette protéine est présent. Les souches HIV-1 du groupe O semblent se comporter de la même manière que celles du groupe M et ne nécessitent pas Vpr pour transduire les DCs. DISCUSSION: La transduction des DCs humaines par un vecteur SIVmac minimal peut être restaurée non seulement par l'apport en trans du Vpx de cette souche de lentivirus, mais aussi, dans une moindre mesure, par les Vpx d'autres souches de SIV proches du SIVmac (SIVsm660, SIVsmPBj, SIVhu). La fonction de Vpx dans l'infection des DCs semble donc conservée parmi les SIV de la lignée SIVsm, qu'elles soient adaptées au laboratoire ou non, ce qui suggère qu'il s'agit d'une réelle fonction de Vpx. D'autre part dans le cas de souches plus éloignées comme SIVrcm il est difficile de conclure. En effet la protéine Vpx de cette souche ne semble pas rétablir l'infection des DCs par SIVmac, cependant il est possible qu'elle ne soit pas encapsidée dans les particules virales SIVmac, aucune étude précise n'ayant analysé cette reconnaissance chez SIVrcm. L'anticorps dont nous disposons pour le vérifier est dirigé contre Vpx de HIV-2, et n'est probablement pas capable de reconnaître un Vpx d'une souche plus éloignée. Un nouvel anticorps dirigé contre une portion de Vpx conservée chez toutes les souches a été généré mais s'est malheureusement révélé inefficace. Il n'a pas non plus été possible d'ajouter des tags en N ou C terminal de la protéine car les essais réalisés sur Vpx du SIVmac entrainaient une perte de fonctionnalité de la protéine (non montré). La fonction de Vpx du SIVmac dans l'infection des DCs ne semble cependant pas partagée par la protéine Vpx du HIV-2, un autre membre de la lignée SIVsm, puisqu'elle est efficacement incorporée dans les particules virales SIVmac mais ne rétablit pas leur transduction des DCs. Il serait alors possible que l'adaptation de HIV-2 à l'humain lui ait permis de se passer de Vpx pour infecter les DCs humaines, de même que HIV-1 peut se passer de Vpr. Ceci expliquerait que la fonction de Vpx dans l'infection des DCs humaines ait été perdue chez HIV-2 alors qu'elle est conservée chez tous les SIV testés dans cette lignée. 1 7 Cependant, le vecteur HIV-2 délété dans la partie 5' de vpx, bien que capable de transduire efficacement les cellules HeLaP4, perd sa capacité à transduire les DCs et celle-ci n'est pas restaurée par l'apport de Vpx de HIV-2 en trans, elle est par contre partiellement restaurée par Vpx du SIVmac. Étant donné que la délétion effectuée touche aussi d'autres régions de HIV2, en particulier la partie 3' du gène vif dont la séquence chevauche celle de vpx, ou des sites d'épissage de vpr, une hypothèse expliquant ce résultat serait la nécessité de vif ou vpr dans la transduction des DCs par HIV-2. Pour le vérifier, des DCs seront transduites par le vecteur HIV-2 délété où la protéine Vif ou Vpr aura été apportée en trans, cette étude est en cours de réalisation. Enfin, la protéine Vpr testée chez SIVagm, une souche de lentivirus ne possédant par Vpx, ne semble pas rétablir la transduction des DCs par le vecteur minimal SIVmac. La protéine Vpr n'a cependant pas pu être détectée dans les particules virales par empreinte western car nous ne disposions pas d’un anticorps anti Vpr spécifique du SIVagm. Il a pourtant été montré que Vpr du SIVagm pouvait interagir avec le domaine P6 de Gag du SIVmac et être incorporé dans ces particules virales (). D'autre part un vecteur minimal HIV-1MVP appartenant comme HIV-1BCF au groupe O du HIV-1, plus proche du SIVcpz que du groupe M du HIV-1 (fig. 2), est capable de transduire les DCs sans gène accessoire, HIV-1MVP se comporte donc de la même manière qu'un virus appartenant au groupe M de HIV-1 (fig. 3). Ces résultats semblent donc suggérer que la fonction de Vpx dans l'infection des DCs n'est pas remplacée par Vpr chez les souches qui ne possèdent pas Vpx. Une protéine codée par les gènes gag pro-pol pourrait alors jouer ce rôle et son identification serait intéressante. D'autres résultats obtenus au laboratoire suggèrent que la fonction de Vpx dans l'infection des DCs est distincte de sa fonction dans l'import nucléaire de l'ADN proviral, et se situe à une étape antérieure du cycle viral puisqu'une absence d'accumulation de l'ADN proviral est observée. L'étape touchée pourrait être la dissociation de la capside virale. Cette étape semble être une étape clé du cycle viral puisqu'elle est aussi la cible de facteurs de restriction cellulaires tels que Trim5alpha qui, en ciblant la capside virale, pourrait accélérer la dissociation du complexe nucléoprotéique entrant ce qui affecterait aussi la transcription inverse (). Il est possible que Vpx agisse contre un facteur cellulaire comparable qui restreindrait l'infection par SIVmac mais pas par HIV-1. Ce dernier aurait pu acquérir une nouvelle fonction au cours de son évolution lui permettant de s'adapter à son hôte en contournant le blocage levé par Vpx dans le cas du SIVmac. La compréhension des mécanismes contrôlant l'infection des DCs est importante étant 1 8 donné leur rôle in vivo au cours d'une infection lentivirale et pourrait fournir de nouvelles pistes pour la recherche d'antiviraux contre HIV. Ces cellules présentatrices d'antigène sont en effet les premières cellules infectées, au niveau des muqueuses, et contribuent à la dissémination du virus dans l'organisme en migrant vers les ganglions lymphatiques où elles transmettent le virus aux lymphocytes T (). D'autre part des mutants de SIV dont le gène vpx a été délété ont une réplication atténuée et une dissémination plus lente chez le macaque (, ), suggérant un rôle important de Vpx in vivo. Pour déterminer si le blocage observé dans les DCs humaines touche d'autres virus non adaptés à l'humain et différents de SIVmac il serait intéressant de savoir si SIVrcm et SIVagm peuvent infecter les DCs en l'absence de Vpx ou Vpr respectivement. Cependant les vecteurs dérivés de tels lentivirus n'existent pas jusqu'à présent et doivent être générés. Pour cela les clonages des gènes gag pro-pol de ces deux souches sont en cours, mais le clonage de grands fragments d'ADN dérivés de virus est parfois difficile car de tels fragments sont sujets à une forte recombinaison. De plus ces résultats suggèrent qu'une protéine de HIV-1 codée par les gènes gag pro-pol confère une protection que ne possède pas SIVmac. Il serait donc intéressant de rechercher les déterminants de cette protection chez HIV-1. Les résultats concernant la conservation de Vpx pourraient aussi être utilisés pour déterminer la portion de cette protéine qui permet l'infection des DCs en comparant les séquences des Vpx qui permettent l'infection avec ceux qui ne le permettent pas étant donné que des expériences préliminaires ont montré que des mutant de délétion de vpx perdaient leur activité, mais les protéines obtenues n'étant plus reconnues par l'anticorps nous ne pouvons pas savoir si elles sont réellement exprimées et incorporées dans les particules virales. REFERENCES : 1 9