Inégalités de développement, mondialisation et interdépendances

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Inégalités de développement, mondialisation et
interdépendances
INTRODUCTION
Présentation: A la base des interrogations qui se posent sur le monde actuel se trouve le
constat d'un inégal développement, générateur de tensions. Au lendemain de la
décolonisation, on avait beaucoup compté sur le dynamisme des pays développés capitalistes
ou communistes, faisant espérer un développement général de l'ensemble des pays du monde!
| entier. Tout ne devait-être qu'une question de temps et de bonne volonté. La crise
économique des années 70 et l'effondrement des régimes communistes ont fait disparaître les
illusions dans les pays du Tiers-Monde. A l'heure de la mondialisation, seule compte le
constat d'une inégalité croissante entre pays, qui est de plus en plus perçue comme une
injustice criante.
Problématique: En quoi la mondialisation est-elle un facteur de différenciation pour les
populations mondiales ?
Plan:
A - Développement: une inégalité Nord / Sud
B - Un monde à l'économie globalisée et aux espaces interdépendants
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A - Développement: une inégalité Nord / Sud
1 - Des inégalités considérables
Difficulté de mesurer le niveau de développement. Les indicateurs PIB et PNB se révèlent
insuffisants pour évaluer les disparités entre les différents pays du monde. Les aspirations de
l'homme ne sauraient se limiter à la richesse ou à la possessioi de biens matériels. Élaboration
d'un indicateur synthétique, l'IDH, l'indicateur de développement humain. Prend en compte la
richesse (PIB), mais également la santé, la durée de vie et l'éducation Cet indicateur connaît
quand même ses limites. Il existe d'autres éléments importants non quantifiables, notamment
ce qui touche au respect des droits fondamentaux de la personne.
Des inégalités considérables. Les pays de la Triade se partagent 75 % de la richesse
mondiale (France 4è puissance économique). Le progrès matériel continue (croissance
économique positive) mais profite anant tout aux pays déjà les plus développés. On peut
constater une croissance de la richesse dans les PVD, mais celle-ci ne parvient souvent pas à
compenser l'augmentait on de la population. Il y a globalement une augmentation du nombre
de pauvres.
2 - Des Nords et des Suds d'un même monde nécessairement solidaires
Le rêve déçu d'un développement partagé. Le développement des pays du monde entier fut
un des grands espoirs né de la décolonisation dans le cadre du monde nouveau constitué après
la deuxième guerre mondiale. Ces populations anciennement colonisées avaient fait le choix
de modèles différents mais dont on attendait un certain succès: modèle capitaliste proaméricain, en lien ou non avec les anciennes puissances coloniales; modèle communiste prosoviétique ou pro-chinois; voire des voies originales indépendantes de toute influence
extérieure (Inde). Le "tiers-mondisme" était à la mode. Le retournement de conjoncture dans
les années 70 et la désagrégation du modèle communiste laissèrent bien des pays en voie de
développement face à un surendettement excessif et à une population en pleine croissance
(transition démographique).
Une domination sans partage des pays les plus développés. Le contraste entre la richesse et
la pauvreté s'impose à travers le monde dans un contexte d'interdépendance. Les pays avancés
échangent surtout entre eux et sont de moins en moins dépendants économiquement des PVD
(pétrole), sur qui ils exercent un contrôle:
- échanges excédentaires entraînant un surendettement des PVD
- firmes transnationales ayant leurs sièges sociaux dans le Nord et imposant leurs conditions contrôle politique et militaire du Nord
- Nord pourvoyeur de services indispensables: éducation, techniciens, transferts de
technologies
Pourtant le Nord ne peut ignorer le Sud. Celui-ci se rappelle toujours à son bon souvenir ne
serait-ce que par le poids croissant de sa population. Qui peut ignorer l'Inde ou la Chine ? Le
Sud dispose d'une importante main-d’œuvre inoccupée: utilisable pour les délocalisations, à
l'origine des migrations économiques légales ou clandestines. Le Sud offre des gigantesques
marchés de réserve quand leur développement les aura rendus solvables. Marché chinois
toujours sujet de fantasmes de la part des occidentaux.
Diversité des Nords. Des ensembles géographiques distincts aux intérêts divergents et
concurrents. Pays de la Triade. Pays anciennement communistes (font-ils partis du Nord ? ne
doivent-ils pas faire l'objet d'une catégorie à part ? Crise créant des fractures au sein des
sociétés. Chômage persistant, alors que le travail représente le principal facteur d'intégration
sociale.
Diversité des Suds. Dans beaucoup de pays des élites profitent du développement ou des
transferts de richesses venus du Nord, alors que la majorité vit dans des conditions difficiles et
même misérables.
Différents types de PVD:
- Déshérités (PMA), principalement africains
- Pays rentiers (pétrole)
- Pays s'industrialisant avec succès mais facilement déstabilisés par les disfonctionnements de
la mondialisation (Asie du SE, Amérique latine)
- États continents à la population gigantesque devant nécessairement trouver des modes de
développement originaux. L'Inde et la Chine représentent à elles deux le tiers de la population
mondiale.
3 - Les migrations internationales révélatrices des inégalités
Migrations internationales de travailleurs. Personnes à la recherche d'un travail provisoire
ou définitif entraînant la nécessité d'une insertion provisoire ou définitive dans des pays et
populations d'accueil.
Régions d'accueil: Régions riches et dynamiques à l'échelle mondiale. Europe de l'Ouest,
Amérique du Nord. Golfe persique. (Exception notable du Japon). Régions dynamiques à
l'échelle continentale ou régionale. États pétroliers, pays neufs (Afrique du Sud, Argentine,
Australie). Importance des réseaux et filières de migration: le migrant privilégiera une
installation à proximité de nationaux (entraide).
Régions d'origine: Grandes masses asiatiques. Pays où la croissance démographique est forte
et la main d’œuvre surabondante. Pays anciennement d'économie socialiste en difficulté. Pays
déstabilisés par la guerre.
Conséquence pour les espaces d'origine: Baisse de la pression démographique. Apport
d'argent (rôle important de l'argent de l'émigration pour beaucoup de pays en voie de
développement) Apports culturels.
Conséquence pour les espaces d'accueil: Rajeunit des populations vieillies. Main d’œuvre
s'accommodant de conditions de vie et de travail difficiles. Apports culturels. Intégration plus
difficile en période de crise. États exerçants une stricte limitation des entrées. Phénomène de
l'entrée de clandestins et du développement d'une économie souterraine (travail clandestin,
trafics, criminalité). La limitation de l'immigration passe nécessairement par le
développement des pays d'origine.
Migrations essentiellement Sud / Nord
Les réfugiés. Personnes chassées pour des raisons politiques, religieuses ou raciales. Parfois
difficiles à distinguer des migrants économiques. Augmentation croissante du nombre de
réfugiés: guerres civiles et frontalières concernant souvent des populations en croissance
démographique. Problème de leur prise en charge. Pays voisins accablés. Rôle de l'UNHCR et
des ONG. Problème de leur rapatriement. Migrations caractérisant des espaces en grave crise,
souvent enclavés.
Les migrations internationales de touristes. Affaire de populations riches. Le tourisme
international s'est développé avec la croissance économique de l'après-guerre. Enrichissement
des particuliers avec revenus à consacrer aux voyages et évolution de la législation sociale
dégageant du temps et des moyens (congés payés, retraites).
Important progrès dans le domaine des transports. Rapidité et confort. Meilleure
combinaison des transports avec des systèmes sophistiqués de réservation. Moyens de
paiement simplifiés (change, chèques, cartes). Informations de plus en plus facilement
disponibles (agences, publicité, télématique) et dans de nombreuses langues. Pratique de
l'Anglais généralisée permettant de se débrouiller avec un minimum.
Trois grands bassins drainent les touristes venant des pays développés. Phénomène
d'héliotropisme prédominant: soleil, mer et patrimoine culturel. Pouvoir en hiver bénéficier de
l'été. Destinations de proximité privilégiées. Espace méditerranéen. Bassin des Caraïbes, dans
une moindre mesure littoraux du SE asiatique et de l'Océan indien. Phénomène du ski:
recherche des massifs montagneux de proximité.
Tourisme essentiel pour certains pays en voie de développement offrant les caractéristiques
recherchées mais assujetti à la conjoncture. Les troubles politiques et le terrorisme éloignent
les touristes (Moyen-Orient). Les difficultés économiques et la fluctuation des monnaies peut
faire varier les flux touristiques. Les pays d'accueil ne sont pas toujours maîtres de la
situation.
Migrations essentiellement Nord / Sud.
B - Un monde à l’économie globalisée et aux espaces interdépendants
1 - Une mondialisation croissante des échanges et des économies
Croissance considérable du commerce international. Multiplié par 7 depuis 1950. Les
relations entre producteurs et consommateurs sont de plus en plus conçues à l'échelle
internationale. Cette croissance des échanges concerne surtout les pays les plus riches et les
produits manufacturés.
Rôle essentiel des FMN. Firmes implantées dans de nombreux pays puor faire jouer les
avantages comparatifs (production et distribution). Conception de produits coûtant cher et
nécessitant d'être rentabilisée sur de vastes marchés de marchés de consommation, les
marchés nationaux étant bien souvent trop étroits. Division internationale du travail. La
dispersion des sites de production et de distribution entraîne un important trafic intra-firmes,
contribuant largement à la croissance des échanges internationaux. Certains espaces ont bâti
leur développement sur l'exploitation de cette mondialisation des échanges en offrant aux
FMN différents avantages (zones franches ou paradis fiscaux): Hongkong, Singapour,
Panama, Bahamas, Taiwan, Corée du sud.
Révolutions dans le domaine de l'information et de la gestion des capitaux accélérant la
mondialisation des échanges.
Nouvelle technologie des Autoroutes de l'information: système de débit à grande vitesse de
l'information. Union des télécommunications et de l'informatique: télématique. Numérisation
de l'information. Fibres optiques. Réseau satellitaire de plus en plus performant. Le monde
devient un "village planétaire". Possibilité d'informations démultipliées par l'accès à des
banques de données situées partout dans le monde. Travail aisé avec des correspondants
éloignés.
Circulation de plus en plus phénoménale de capitaux échappant au contrôle des États.
Logique de rentabilisation des capitaux utilisant les modes performants d'information et de
gestion instantanée des capitaux. Circulation instantanée d'une bourse à l'autre ("ronde des
bourses"). Circulation répondant au besoin croissant des FMN mais également à la
spéculation. Spéculation sur la variation des cours des monnaies, des marchandises, des taux
d'intérêts le développement de nouveaux secteurs d'activités et de pays émergents. Opérations
de change représentant plusieurs dizaines de fois le montant du commerce mondial.
Spéculation déconnectée de la réalité économique ("bulles financières"). Spectre de krach
revenant périodiquement.
Réguler le commerce et l'économie mondiale. Crainte des effets du libéralisme sauvage, de
la spéculation effrénée. Recherche de garanties vis-à-vis d'un trafic international mal maîtrisé.
OMC. Créé en 1994 à la suite des interminables discussions du GATT (réunions
périodiques). Organisme international devant jouer un rôle d'arbitre et de régulateur. Masque
les grandes difficultés à se mettre d'accord, chacun voulant conserver ses bénéfices et
avantages. Les rapports de force continuent déjouer.
Associations régionales de pays plus efficaces. Permet d'homogénéiser des marchés assez
vastes. Les dérives sont plus facilement contrôlables. Possibilités par des mesures
protectionnistes de se protéger de l'extérieur. Union européenne, ALENA, ASEAN,
MERCOSUR. Associations exprimant lé méfiance vis-à-vis de la possibilité de réguler le
commerce mondial de manière efficace. Associations profitant surtout aux pays les plus
développés. Pays en difficulté caractérisés par la division.
2 - Le rôle déterminant des réseaux de transport
Transports de passagers et de marchandises de plus en plus importants.
Passagers privilégient la vitesse. Route, rail, avion. Problème d'embouteillages autour des
noeuds de communication (route, air). Guerre des tarifs aériens entraînant une croissance
spectaculaire du trafic.
Les marchandises privilégient le coût. Grande variété de moyens de transports. Rôle
esssentiel du transport maritime, peu cher ( 1 t / 1000 km / 1 timbre poste). Handicap majeur
pour un pays de ne pas disposer d'un accès aux mers libres et océans.
Gestion du transport des passagers et marchandises de plus en plus performante.
Combinaison des différents modes de transport avec des délais d'embarquement et de
débarquement très courts. Conteneurs. Plates-formes multimodales. Gestion par informatique
donnant l’état de la situation du transport en temps réel. Ports et aéroports deviennent des
pôles d'activité majeurs.
La densité des réseaux de communication est révélatrice du niveau de développement
d'un pays. Les difficultés de communication demeurent un problème important dans les
PVD.
Les axes de transport maritimes lient surtout entre eux les trois groupes de pays de la
Triade, qui concentrent la grande majorité du commerce international. Exception notable du
Golfe persique (pétrole). Les noeuds de ce réseau de transport se retrouvent dans les pays de
la Triade (très grands ports: Rotterdam, New-York, Tokyo-Yokohame, Kobe,...)
Points de passages mondialement stratégiques (détroits et canaux trans-océaniques):
- Moyen Orient: Suez, Bab-el-Mandeb, Ormuz
- Asie du SE: Malacca, Sonde, Macassar, Luçon
- Europe: Gibraltar, Pas-de-Calais, Sund
- Amérique: Panama, Magellan
3 - Centres et périphéries de l'espace mondial
Modèle centre / périphérie. Par ce modèle, on cherche à identifier un ou des pôles
dynamiques entraînant à des degrés divers des périphéries de types différents. La globalisation
de l'économie et la nécessité d'ouverture des économies nationales rend les espaces mondiaux
interdépendants dans le cadre de l'économie mondiale. Seuls certains pays ou espaces tentent
encore de vivre de manière autarcique (Corée du Nord, ou sévit une famine catastrophique).
Ils se comportent comme des isolats.
Le centre. Les pays de la Triade. Etats-Unis, Japon, Union européenne, fournissant l'essentiel
de la production mondiale et associant à leur développement de nombreux autres pays du
monde dans le cadre de la division internationale du travail. Ces pays du centre ont souvent
comme coeur dynamique de puissante métropoles mondiales, animant l'économie mondiale et
fonctionnant en réseau. Ces métropoles sont soit situées sur le littoral (New-York, Los
Angeles, Tokyo, Hongkong, Singapour) ou y ont directement accès grâce à des ports avancés
ou des grands fleuves accessibles à la navigation maritime (Chicago, Paris, Londres,
métropoles du Rhin). Elles contribuent à une maritimisation croissante de l'économie.
Des périphéries intégrées. Pays industrialisés plus ou moins récemment, en se mettant à
élaborer des produits manufacturés finis ou intermédiaires qu'il n'est plus rentable de produire
dans les pays les plus développés où la main d'oeuvre est chère. NPI asiatique ou d'Amérique
latine. Pays s'étant enrichis en fournissant des produits agricoles ou des matières premières
(pays pétroliers).
Des périphéries en reconversion. Pays du nord, anciennement à économie communiste. Le
passage à l'économie de marché les a mis en difficulté. Ce sont pourtant des pays
anciennement industrialisés, à l'avenir semblant prometteur. Europe centrale et orientale,
Russie.
Des pays délaissés. PMA. Pays africains ou asiatiques trop enclavés ou aux difficultés trop
importantes.
Limites du modèle centre / périphérie. Les pays du centre recèlent des espaces subissant
une grave crise: espaces industriels ou agricoles sinistrés, coeur des grandes villes américaines
ghettoïsé. Certains pays sont difficiles à classer, tant leur importance historique, politique,
démographique ou culturelle ne peut guère en faire des périphéries. Il en est ainsi de la Chine,
de l'Inde ou de la Russie ou à une échelle moindre de pays comme le Brésil ou l'Iran.
---------------------------------------------CONCLUSION
Synthèse des éléments essentiels: Toutes les statistiques contribuant à présenter les niveaux de
développement arrivent au même constat navrant d'inégalités qui s'accroissent. Ces inégalités
sont la source de difficultés: les migrations économiques en témoignent. Ces migrations
constituent une forme d'adaptation à la mondialisation des échanges et des économies qui
privilégient les pays déjà les plus développés. La régulation internationale des
disfonctionnements paraît bien difficile, ce qui laisse la place à la constitution d'associations
régionales jouant un rôle protectionniste.
Réponse à la problématique: Si la mondialisation est le facteur principal de la croissance
économique actuelle, elle distingue, également, de manière assez nette, les pays qui profitent
de cette croissance et ceux qui en sont tenus à l'écart.
Elargissement du sujet: La mondialisation semble avoir pour conséquences d'abandonner à
leur sort des espaces trop enclavés pour participer au développement fulgurant. Bien des pays
enclavés s'enfonce dans des crises géopolitiques qui ont souvent pour origine le mal-vivre des
populations (Intérieur des Balkans, Afrique centrale, Afghanistan, pays producteurs de
drogue). Étant donné la persistance des périls liés à la course aux armements des décennies
précédentes, pourra-t-on longtemps laisser les inégalités s'accroître au nom de la liberté des
échanges réputée bénéfique pour la croissance mondiale ?
Pierre Delahaye, professeur d’Histoire-Géographie, lycée Yourcenar-Le Mans
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