improprement appelée « messe en latin » – avait montré, sans réserves, la volonté
papale de mettre fin au schisme de la Fraternité Saint Pie X.
La démarche du pape n’avait fait qu’accélérer un processus né au moment même de
l’excommunication de 1988. Car cet acte grave avait été décrété « latae sententiae »,
c’est-à-dire « du fait même de la faute commise », de façon automatique, dès lors que
Mgr Lefebvre procédait au sacre de quatre évêques en dehors de l’autorité canonique de
l’Eglise. Le pape de l’époque, Jean-Paul II, avait tout fait pour éviter d’en arriver à ce
point de non retour. Il avait été aidé dans ces efforts par celui qui était à l’époque le
préfet de la Congrégation pour le doctrine de la foi, le cardinal Joseph Ratzinger. En
vain : le jeudi 30 juin 1988, à Ecône, dans le Valais suisse, Mgr Lefebvre procédait au
sacre de « ses » quatre évêques. Le schisme était consommé, comme le confirmera
formellement, le lendemain, un décret du cardinal Gantin, alors préfet de la
Congrégation des évêques.
L’acte d’excommunication fut donc un acte de nature disciplinaire. Il n’a pas
sanctionné un clivage théologique irrémédiable ou une rupture philosophique définitive.
Si les intégristes se caractérisent bien, grosso modo, par leur rejet du concile Vatican II,
il faut rappeler que Mgr Lefebvre avait signé les différents actes du Concile, à
commencer par la réforme liturgique, par obéissance au pape qui promulguait ces textes.
Clin d’œil de l’histoire : quand Mgr Lefebvre fait du nouveau missel de Paul VI, en
1969-70, son cheval de bataille idéologique, un professeur de théologie nommé Joseph
Ratzinger, qui enseigne à Ratisbonne, peste, lui aussi, contre cette réforme liturgique
trop brutale.
A cette époque, Lefebvre n’est pas plus « extrémiste » que les cardinaux les
plus conservateurs de la Curie, tels Ottaviani ou Siri. C’est sa propre obstination qui
l’oppose de plus en plus durement au pape. Il faut d’ailleurs souligner que ses sujets de
contestation de la ligne générale de l’Eglise vont beaucoup évoluer dans le temps,
jusqu’à se concentrer, sous Jean-Paul II, sur le dialogue interreligieux caractérisé par la
réunion d’Assise et le rapprochement avec les juifs symbolisée par la visite à la
synagogue de Rome (1986). On est loin, alors, du missel de Paul VI.
Ainsi, le vrai faux schisme intégriste ne demandait qu’à être résorbé. Mgr Bernard
Fellay, le supérieur général de la Fraternité Saint Pie X qui a succédé à Mgr Lefebvre à
la tête du mouvement, a fait preuve, depuis deux ans, de quelques gestes de bonne
volonté, et déclare que le dialogue avec le pape est « nécessaire ». Lui non plus ne
s’attendait pas, apparemment, à la provocation de son collège Williamson.
Or celle-ci est grossière et manifeste. En niant publiquement et spectaculairement
l’existence des chambres à gaz, Richard Williamson jette l’opprobre sur Benoît XVI,
accusé par les médias du monde entier de vouloir réintégrer dans l’Eglise des gens fort
peu recommandables. Il blesse aussi la communauté juive internationale, dont
l’indignation est aussi vive que légitime. Il déstabilise enfin la grande majorité des
catholiques du monde entier, qui considèrent avec méfiance les intégristes, et avec
horreur les négationnistes.
Une seule cuiller de soupe…