L'histoire de la Numidie
(Source)
La Numidie est un ancien royaume de l'Afrique septentrionale, correspondant à l'Algérie ;
la Mulucha (Moulouia) le séparait de la Maurétanie à l'Ouest; le Tusca (ruisseau de
Tabarka), du territoire carthaginois , qui forma ensuite la province d'Afrique (aujourd'hui
Tunisie ). Au Sud, la région saharienne était occupée par les Gétules. Les Numides, dont les
descendants sont les Kabyles, étaient divisés en tribus, dont les deux principales étaient, au
IIIe siècle, les Massyli et les Massaesyli, formant deux royaumes séparés par l'Ampsaga (oued
el-Kebir, entre les Sept Caps [Seba-Rous] et Djidjelli); les premiers à l'Est., les seconds à
l'Ouest. Le nom de Numides dérive du mot nomade et fut donné par les Grecs. La cavalerie
excellente de ces peuples était leur principale force militaire. Ils ignoraient encore le chameau,
qui ne fut introduit qu'à l'époque des Ptolémées, et d'abord vers la Cyrénaïque , mais ils
possédaient l'éléphant , qu'ils domestiquaient, chassaient la gazelle, l'âne sauvage,
l'autruche, le lion, très abondants. Les principales ressources végétales étaient l'olivier,
l'oranger, le ricin arborescent, le dattier. Les marbres veinés de Numidie furent les plus
recherchés à l'époque impériale.
Les Numides subirent la domination des Carthaginois , qui avaient été d'abord leurs
tributaires à leur arrivée en Afrique . Ils échouèrent dans plusieurs tentatives pour secouer ce
joug, et furent forcés de servir dans les armées de Carthage. L'intervention des Romains
dans la lutte entre Syphax, roi des Massésyliens, et Masinissa, roi des Massyliens, amena, en
203 av. J. C., le triomphe de ce dernier, qui demeura roi de toute la Numidie, et eut pour
successeur son fils Micipsa, en 148. Jugurtha, que Micipsa, son oncle, avait institué son
héritier conjointement avec ses deux fils, Adherbal et Hiempsal, fit périr ces deux princes et
s'empara du royaume. Il soutint contre les Romains, par son or et par ses armes, une guerre
mémorable, et leur fut livré en 106 par son beau-père Bocchus, roi de Maurétanie , qui reçut
en récompense de cette trahison le pays des Massésyliens. Cette partie occidentale de la
Numidie fut réduite en province romaine en 42. Une portion de la Numidie orientale fut
réunie à l'Afrique propre, et deux petits-fils de Masinissa, Hiempsal II et Mandrestal,
régnèrent sur les restes de la contrée. Ils eurent pour successeur Juba, fils de Hiempsal, qui
prit parti pour Pompée contre César, et fut vaincu par ce dernier à Thapse, en 40. Son
royaume devint une province romaine. Tacfarinas, chef numide, se souleva, en 17 de notre
ère, contre la domination de Rome; mais il fut défait et tué dans une bataille en 24.
A l'époque romaine , quand la région occidentale fut rattachée à la Maurétanie et la
Numidie réduite au pays des Massyli, les principales villes furent : avec la capitale Cirta
(Constantine ), son port de Rusicade (auj. Skikda), Hippo Regius (près d'Annaba), Tabraca
(Tabarka), Theveste (Tebessa ), Lambaesa, Thamucadis (Timgad), Bulla Regia, sur le
Bagradas (Medjerda), Sicca Veneria (le Kef), etc.
(Source)
Entre Carthage et Rome
Au IIIe siècle avant notre ère, la cavalerie numide faisait la force des armées carthaginoises
, et le contingent commandé par le métis Mutines faillit enlever la Sicile aux Romains . A
cette époque, le roi des Massyliens était Gala, voisin et allié de Carthage; le roi des
Massaesyliens, Syphax, s'était, au contraire, rapproché de Rome. Masinissa, fils de Gala, fut,
en 213, chargé de combattre Syphax, le vainquit et l'obligea à se réfugier chez les
Maurétaniens , l'empéchant d'exiler les Romains en Espagne. Lui-même (Massinissa, donc) y
passa avec ses cavaliers numides (212). On l'y retrouve en 209 et en 206 à la bataille de Silpia
Scipion écrasa l'armée carthaginoise d'Hasdrubal, Giscon et Magon. Le prince numide
(Massinissa toujours) négocia alors avec le vainqueur, eut une entrevue personnelle avec Scipion
et s'engagea à lui prêter son concours pour une invasion en Afrique. Cette défection fut, dit-
on, motivée par un manque de parole d'Hasdrubal, qui avait promis à Masinissa la main de sa
fille, la belle Sophonisbe, et qui la donna à Syphax pour le gagner; mais il se pourrait que
cette rupture fût postérieure à l'entente secrète de Masinissa et de Scipion.
Sur ces entrefaites, son (le père de Massinissa) père (Gala, donc), étant mort, il avait eu pour
successeur, selon l'usage numide, le mâle aîné de la famille, son frère Oesalcès, oncle de
Masinissa, lequel mourut bientôt et fut remplacé par son fils, le faible Capusa, lequel fut
évincé au profit de son frère, le jeune Lacumacès, sous le nom duquel le pouvoir fut exercé
par un chef du nom de Mezetulus. Masinissa revendiqua la couronne, sollicita vainement
l'appui de Bocchar, roi de Maurétanie, et n'en vainquit pas moins ses concurrents. Mais à
peine était-il établi qu'il fut attaqué par Syphax et trois fois de suite complètement défait et
réduit à se cacher. Il errait sur la côte avec une bande de maraudeurs quand Scipion débarqua
(204). Il ne lui rendit pas moins de signalés services, embaucha des cavaliers numides, défit
Hannon, fils d'Hamilcar, et eut une grande part à la décisive attaque de nuit qui dispersa les
forces d'Hasdrubal et de Syphax.
Masinissa, intimement lié avec Scipion et Laelius, révéla des qualités militaires remarquables,
une énergie à toute épreuve, une fidélité qui ne se démentit jamais. Après une seconde défaite
de Syphax et Hasdrubal, il reconquit son royaume; un retour offensif de Syphax fut repoussé
et le roi fait prisonnier. Sa capitale, Cirta , fut prise avec ses trésors et sa femme, la belle
Sophonisbe. Celle-ci était toujours aimée de Masinissa; mais le général romain , redoutant
l'influence de la fille d'Hasdrubal, mit l'amoureux en demeure de choisir, et Masinissa invita
Sophonisbe à s'empoisonner. En récompense, il obtint les honneurs royaux. Hannibal, revenu
en Afrique, fit une tentative pour le ramener à lui, mais sans y parvenir. Masinissa assistait à
la bataille de Zama , avec 6000 fantassins et 4000 cavaliers, et commandait la cavalerie de
l'aile droite; après avoir mis en fuite les cavaliers numides, qui lui étaient opposés, il revint
prendre à revers l'infanterie d'Hannibal et eut part au choc qui décida de la victoire. A la paix,
il obtint non seulement la protection romaine et ses anciens États, mais encore la plus grande
partie de ceux de Syphax (201).
A partir de ce moment, le redoutable chef régna pendant cinquante années sur la Numidie.
Son objectif constant fut l'annexion des fertiles territoires carthaginois , en particulier de
l'Emporia (Tunisie centrale, Sahel de Sfax-Sousse). Les querelles étaient portées à Rome
dont les Carthaginois invoquaient l'autorité pour faire observer le traité, mais qui favorisait en
sous main les agressions numides. Masinissa fournissait des auxiliaires commandés par son
fils Misagènes, des cavaliers, des éléphants, du blé pour les guerres de Macédoine et d'Asie.
Enfin, en 150, on en vint à un conflit, le parti favorable aux Numides fut exilé de Carthage par
les démocrates; le roi prépara la guerre; une ambassade envoyée par lui, avec ses deux fils
Micipsa et Gulussa, ne fut pas reçue et même fut attaquée au retour. Masinissa vint assiéger
Orocaspa. Hasdrubal lui livra bataille sans résultat.
Le jeune Scipion Emilien, venu visiter Masinissa, s'interposa sans pouvoir réconcilier les
ennemis, Carthage ayant refusé de livrer les déserteurs numides. Hasdrubal fut cerné, obligé
de capituler, et une grande partie de ses soldats furent égorgés au mépris du pacte, Ce fut alors
que les Romains intervinrent pour consommer la ruine de la cité rivale (149). Les
négociations conduites par eux avec une perfidie insigne désarmèrent Carthage, sans lui
laisser d'autre issue qu'une résistance désespérée. Masinissa s'abstint au début de la troisième
guerre punique, inquiet de voir les Romains opérer pour leur propre compte et peu soucieux
du redoutable voisinage qu'allait procurer à son royaume leur installation permanente en
Afrique. Il mourut plus que nonagénaire au moment où une ambassade romaine venait le
mettre en demeure d'envoyer ses auxiliaires. Jusqu'à la fin, il avait conservé son activité
physique et marché lui-même à la tête de ses troupes. Des 54 fils qu'il avait eus de ses femmes
ou concubines, trois seulement survivants ont joué un rôle, Micipsa, Mastanabal et Gulussa. A
son lit de mort, le vieux monarque avait mandé Scipion Emilien, le chargeant de régler sa
succession (148).
La geste de Jugurtha
Le fils aîné, Micipsa, eut Cirta et les trésors paternels; la mort de ses frères le laissa bientôt
seul roi de la Numidie agrandie jusqu'aux Syrtes après la chute de Carthage . Il fut fidèle à
l'alliance romaine , envoya des auxiliaires pour les guerres d'Espagne, notamment contre
Viriathe (142) et contre Numance . En 125, une peste ravagea la Numidie et fit périr 800
000 personnes. Micipsa, comme ses frères, était fort cultivé, s'entourant de lettrés et savants
grecs; il embellit beaucoup sa capitale. A sa mort (118), il laissa son royaume à ses fils
légitimes. Adherbal et Hiempsal et à son neveu Jugurtha, qu'il avait adopté. Il restait encore
un fils de Gulussa, du nom de Massiva, et un autre fils de Mastanabal, du nom de Gauda, qui
fut désigné comme héritier à défaut des trois premiers princes. De ceux-ci, le plus
remarquable était Jugurtha, fils d'une concubine de Mastanabal; son grand-père Masinissa
l'avait tenu à l'écart, mais le doux Micipsa l'adopta et l'associa à ses fils Adherbal et Hiempsal.
Jugurtha, très brave et habile aux exercices physiques, était populaire parmi les Numides; il
commanda brillamment le corps auxiliaire envoyé à Scipion contre Numance. Dès que
Micipsa fut mort, la brouille éclata entre Jugurtha et ses cousins, surtout le plus jeune, le
bouillant Hiempsal. On était convenu de partager le royaume et les trésors, mais pendant les
pourparlers Hiempsal, logé à Thirmida chez un serviteur de Jugurtha, fut assassiné. Adherbal
prit les armes, mais fut battu et se réfugia dans la province romaine d'où il gagna Rome afin
de plaider sa cause devant le sénat.
Jugurtha, qui avait vécu devant Numance avec les nobles romains et savait leur
corruption, expédia des ambassadeurs qui, par des présents bien distribués, calmèrent
l'indignation des sénateurs. Ils décidèrent de partager la Numidie entre les deux compétiteurs
et en chargèrent une commission qui vint en Afrique. Jugurtha la corrompit et se fit adjuger la
portion occidentale, la plus vaste (117). Il ne tarda pas à reprendre ses tentatives pour devenir
maître de tout. Adherhal supportant sans répondre ses agressions, il finit par envahir son
royaume; vainqueur, il le bloqua dans Cirta . Une ambassade romaine arriva pour ordonner
la paix; Jugurtha la renvoya avec de belles paroles et de l'argent et reprit le siège. Une seconde
ambassade survint, dirigée par M. Aemilius Scaurus; elle se laissa berner, et quand elle fut
partie, la garnison de Cirta capitula sur la promesse d'avoir la vie sauve : ce qui n'empêcha pas
Jugurtha de faire aussitôt massacrer Adherhal et sa suite (112). C'était trop compter sur la
longanimité romaine; le tribun C. Memmius porta la question devant le peuple et la guerre fut
déclarée.
Le consul L. Calpurnius Bestia débarqua en Afrique et envahit la Numidie; Jugurtha l'acheta,
ainsi que M. Scaurus, son lieutenant, et en obtint une paix favorable (111). L'irritation
redoubla à Rome et l'intègre préteur L. Cassius fut dépêché au roi pour le sommer de venir à
Rome se justifier. Il déféra à l'invitation, mais acheta un tribun de la plèbe qui, lorsqu'il parut
devant l'assemblée du peuple, lui défendit de parler. Il resta à Rome, continuant ses intrigues,
et eut fini probablement par s'en tirer, s'il n'avait eu l'audace de faire assassiner son cousin
Massiva, fils de Gulussa, qui, allié d'Adherbal, s'était réfugié à Rome, où il briguait le trône de
Numidie (110). L'agent du crime, Bomilcar, fut mis en accusation, et Jugurtha reçut l'ordre de
quitter l'Italie. A son départ de Rome, il s'écria, dit-on :
« Ville vénale qui périrait vite s'il se trouvait un acheteur! »
Le consul Sp. Postumius Albinus, protecteur de Massiva, fut chargé de la guerre; il ne fit rien,
et son frère Aulus, qui le suppléait en son absence, laissa surprendre et battre son armée près
de Suthul; une partie passa sous le joug. Le traité consenti par Aulus fut annulé par le sénat, et
le consul désigné, Q. Caecilius Metellus, envoyé en Numidie (109). La campagne fut bien
conduite, Jugurtha fut battu, mais Metellus ne put prendre Zama . Suivant la méthode
romaine , il négocia, augmentant à mesure ses exigences, et, lorsque Jugurtha eut livré ses
éléphants et une grande partie de ses armes et de ses chevaux, il l'invita à se livrer lui-même.
Le roi reprit la lutte, déjoua le complot de Bomilcar et Nabdalsa, deux de ses fidèles gagnés
par l'ennemi, et qu'il fit tuer. Dès lors il n'eut plus confiance en personne et beaucoup de ses
adhérents furent immolés à ses soupçons. Il se retira vers le désert, où Metellus lui enleva sa
place forte de Thala, mais obtint l'alliance de Bocchus, roi de Maurétanie (108). Marius
réussit alors à se faire donner le commandement en lieu et place de Metellus (107). Il mena
vivement la guerre, emporta toutes les forteresses du roi numide et conquit ainsi tous ses
trésors. Désespérés, Jugurtha et Bocchus tentèrent une surprise, mais furent complètement
défaits. Jugurtha fut livré à Sylla, questeur de Marius, par son allié au début de l'an 106. Il
figura au triomphe de Marius le 1er janvier 104, puis fut étranglé dans son cachot. Ses deux
fils furent internés à Venouse. L'histoire de ce cruel et rusé personnage nous a valu le chef-
d'œuvre de Salluste.
Numidia propria
L'héritier du trône était le faible Gauda qui avait épousé la cause des Romains et s'était
attaché à Marius. Il eut probablement pour sa part la Numidie orientale, l'ancien royaume des
Massaesyli étant cédé à Bocchus et annexé à la Maurétanie . On peut supposer que le roi
Hiempsal, dont il est question ensuite, était le fils de ce Gauda, bien qu'une inscription le
présente comme petit-fils de Masinissa et en fasse un fils de Gulussa. Quoi qu'il en soit, cet
Hiempsal régnait en Numidie à l'époque de la guerre civile entre Marius et Sylla, et il se
prononça contre les Marianistes (88). Il fut, en raison de cette attitude, renversé par Cn.
Domitius Ahenobarbus, qui lui substitua Hiarbas. Mais après le triomphe des Sullaniens,
Pompée vint en Afrique écraser Domitius et restaurer Hiempsal (84), lequel vivait encore en
62. Salluste parle de ses ouvrages en langue punique.
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