CRITIQUE
HISTORIQUE
PLAN DU COURS
Introduction : définition, obstacles, paradoxes, problématiques
Chapitre I : Histoire de l’histoire
• différents supports de l’écriture
• naissance de l’histoire
3 pionniers :
1) Hérodote
2) Thucydide
3) Polybe
• notion de recul : positif et négatif
• question de la vision du temps : cyclique et linéaire
transformations du temps :
1) polythéisme -> monothéisme
2) harmonisation du temps
3) nécessités pratiques
• naissance de la critique historique
Chapitre II : Règles de la critique historique
1) HEURISTIQUE
classification des sources :
1) écrites
2) figurées
3) matérielles
4) orales
5) audiovisuelles
• problématiques :diversité, distinction entre sources et travaux, précision
• peu de sources : Antiquité
• trop de sources : époque contemporaine
• ennemi des sources : le temps : effets naturels et humains
2) CRITIQUE EXTERNE ET CRITIQUE INTERNE
• Mabillon
principes :
1) meilleure copie
2) données concernant le copiste
3) phénomène de la pente vers la passivité
4) originaux lacunaires
CRITIQUE EXTERNE :
1) qui ?
2) quand ?
3) où ?
4) comment ?
5) par où arrive-t-elle ?
CRITIQUE INTERNE :
1) d’interprétation
2) de sincérité
3) de compétence
4) d’exactitude
5) contrôle des témoignages
• degrés variables de certitudes
3 types de certitudes
1) hypothético-déductives
2) expérimentales par induction
3) historico-critiques
3) HERMENEUTIQUE :
deux dimensions :
1) explication
2) signification
Chapitre III :
• trois théories du soupçon au XIXème siècle
1) marxisme
2) freudisme
3) structuralisme
contre-point :
1) positivisme
2) technicisme
3) histoire nouvelle
catégories en histoire :
1) en profondeur : division analytique
2) en largeur : division géographique
3) en longueur : division chronologique
concepts en histoire :
CHAPITRE I: L'HISTOIRE DE L’HISTOIRE
Avec l'invention de l'écriture, il y a passage de la préhistoire à l'histoire. Le souci du temps est à mettre
en rapport avec la nature des supports. Il y a différents supports d'écriture.
Les annales, rédigées par des logographes, sont des ouvrages rapportant les événements dans l'ordre
chronologique, année par année. Elles font mention pêle-mêle d'événements récurrents tels les naissances, les
annonces nécrologiques...
Les généalogies sont l'historique des souverains, des familles régnantes, sous forme de listes. Le temps est divisé
par règne.
Les codes juridiques font allusion à des événements du passé avec un souci de structurer les règles de vie.
Les arrangements religieux rassemblent plusieurs textes, plusieurs histoires légendaires qui font l'apologie du
passé mais pas une représentation rationnelle du passé. C'est donc un pasréinventé pour nourrir la doctrine
religieuse. Par exemple, l'Ancien Testament. Les premiers récits littéraires sont constitués des éloges des chefs,
des rois, pour glorifier leurs règnes au présent. Ceux-ci ont diverses formes telles que des poèmes, des hymnes...
Les mythes sont les témoins de la vitalité culturelle des sociétés. Ils sont riches car ils comportent plusieurs
entrées, plusieurs portées. Leur fonction est d'expliquer le réel, ils donnent une explication globale, non-
analytique. Ils veulent tout expliquer même ce qui dépasse nos sens. Les mythes sont anti-historiques car ils
nient une évolution de l'histoire en se référant sans cesse à un âge d'or.
Les légendes contiennent des éléments de vérité historique amplifiés par la fabulation, l'imaginaire. Par exemple,
la chanson de Roland. Les légendes sont plus souples, plus divertissantes, plus gères, moins explicatives que
les mythes. Elles laissent plus de place à la création littéraire. Les épopées sont des exaltations des faits glorieux
de personnages célèbres. L'histoire est sacrée car elle ne se pose pas certaines questions à savoir, pourquoi cela
s'est-il passé ainsi, que s’est-il réellement passé, quelles sont les causes, comment les causes sont-elles agencées.
Ces questions sont pourtant la nature même de la démarche historienne.
La naissance de l'histoire se situe au cinquième siècle ACN, en Grèce, dans un contexte de mutations, de
transformations en profondeur, concernées par le phénomène de la rationalité. On découvre l'efficacité de la
raison, qui est un outil pour comprendre et maîtriser le réel. La démarche historienne peut alors prendre corps car
le rationalisme s'appuie sur les sens, sur l'observation. On voit l'apparition de sciences telles que la médecine, la
musique... La philosophie est ramenée sur terre. On invente la morale, au niveau individuel, la question est
comment bien vivre et au niveau collectif, comment je vis avec les autres. C'est le point de départ de la politique,
avec le triomphe de l'idée de cité. L'individu devient un citoyen actif, qui exerce ses fonctions dans la cité, et
concerné par la collectivité, en relation avec les citoyens. C'est le début de la recherche positive et rationnelle
basée sur l'observation analytique.
3 pionniers:
Dans l'Antiquité, il y avait peu de différences entre l'histoire et la rhétorique. Hérodote, considéré comme le père
de l'histoire, est un grec d'Asie Mineure du cinquième siècle ACN, contemporain des guerres médiques (qui
s'achève en 449 avec la victoire des Grecs sur les Perses). Il les étudie dans historia. Il ne s'appuie plus sur des
mythes mais mène une enquête sur ce qui s'est passé. Il voyage, interroge des témoins, observe les coutumes, les
mœurs des populations, constate les différences des climats, des économies, des pensées religieuses... Il adopte
une attitude nouvelle, celle d'aller voir. Le but est de comprendre, de sauver un souvenir. Il avait un sentiment de
l'importance de l'enjeu de ces guerres, il veut leur donner une place à perpétuité dans les mémoires. Il a le
sentiment que les choses auraient pu se passer autrement (révolution mentale) ; idée de la relativité des éléments
du passé. Il ouvre la porte à l'incertitude dans le présent et dans le futur. Hérodote est révolutionnaire car il est
plus difficile de gouverner des hommes dans l'incertitude. Il fait ressortir la question de l'importance d'un sujet.
Les guerres médiques sont importantes pour lui, car il est grec et que ce conflit oppose la civilisation à la
barbarie, la Grèce composées de petites îles à l'empire perse. Toute histoire me avec une volonté rationnelle,
une enquête objective, contient une profonde subjectivité. Toute enquête historique repose sur des idées
préconçues. Mais celle-ci rend l'objectivité en corrigeant les idées de départ et en les modifiant éventuellement.
"Je" part en quête du passé, toute histoire commence par un choix arbitraire et subjectif. L'idée de choix induit
donc l'exclusion de quelque chose. Si on choisit, on rejette, on privilégie, on extrait, mais le temps, l'histoire ne
s'arrête jamais. Quand on rompt la continuité, parce qu'on découpe un sujet, on s'éloigne du temps. C'est un
paradoxe dont l'historien doit tenir compte. Si l'on ne crée pas de hiérarchie, l'histoire est plate, morte. L'histoire-
réalité est inaccessible car le temps nous en sépare. L'histoire-connaissance est le produit de nos choix, est ce que
nous rendons intelligible du passé. Quand un historien fait un choix, il est subjectif car lui-même fait partie de
l'histoire, subit les conséquences de ce qu'il étudie. Il est difficile de ne pas associer nos questions à celles
d'autrefois, de ne pas repérer des analogies, de tirer des conclusions pour l'avenir. Le présent vient polluer,
niveler le passé. Hérodote nous invite à fléchir sur le fait que la connaissance du passé n'est jamais immédiate,
mais se fait avec des intermédiaires, documents, témoignages, traces... l'histoire est inséparable de l'historien.
L'histoire-connaissance implique la création d'une hiérarchie et provoque donc une rupture dans la continuité de
l'histoire.
Thucydide est un athénien du cinquième siècle ACN, concerné par les guerres du Péloponnèse, qui vont
marquer le déclin d'Athènes. Il avait une haute responsabilité, or il a échoué et a donc été contraint de s'exiler. A
partir de son échec personnel, de sa position d'exilé, il repense les guerres, refait l'historique des guerres, pour
comprendre les raisons de son échec, en tant qu'acteur et en tant qu'observateur. Il est rationaliste, il veut tout
comprendre tout analyser en profondeur. Il souhaite qu'il n'y ait plus d'échecs dans des situations analogues, il
tire des leçons du passé pour maîtriser l'avenir. Il souligne la fonction sociale de l'histoire, son rôle pédagogique.
Il est nécessaire de comprendre le passé pour ne plus qu'il se reproduise. Il croit que l'histoire qu'il produit est
définitive, que personne ne pourra mieux faire, comprendre, analyser que lui-même. Il transforme l'histoire en un
théorème. Pour sa version finitive du passé, on peut le mettre en rapport avec les positivistes du dix-neuvième
siècle. Thucydide est habité par le rationalisme, il est sûr de la raison. Il a la volonté d'ordonner ce qui est
hétéroclite, n'est pas intelligible.
Polybe est un grec du deuxième siècle ACN, qui vit dans le monde romain. Il veut faire une histoire
universaliste. Il a l'idée d'une histoire globale, totalisante, donc il doit faire de l'histoire comparative. Tous les
événements du passé conduisent à un résultat, le triomphe de Rome est évident, déterminé. Polybe annonce les
philosophes de l'histoire, universelle et totalisante, car il a un point de vue globalisant. Il est influencé par le
stoïcisme ; la raison universelle, associée au tout de l'univers, est supérieure à l'homme, la raison fait l'histoire.
L'histoire-connaissance fait partie de la réalité, elle se transforme en fonction de la réalité, elle n'est pas détachée
de la réalité. L'historien doit regarder le passé avec les sensibilités d'autrefois, pas avec ses propres sensibilités.
L'histoire est une vision changeante, en évolution, un va-et-vient entre le passé et le présent. Hérodote,
Thucydide et Polybe sont tous très proches de l'événement qu'ils racontent. Le recul est positif car, plus on
s'éloigne d'un événement, plus il est accessible, on retrouve des sources, le temps joue en faveur des historiens.
Par exemple, les archives diplomatiques. Le temps permet à l'événement de s'accomplir, il permet une
accumulation de flexions sur le passé, il permet une certaine sérénité sur l'objet étudié. Le recul est négatif car,
une trop grande sérénité peut amener à l'indifférence, il peut rendre étranger au passé. Il y a ici un paradoxe,
lorsque l'on est engagé, il y a des éléments de subjectivité, et lorsque l'on est désengagé, c'est une source de
mépris, d'indifférence.
L'illusion de la rétrospectivité, c'est le fait de dire que ce qui c'est pasdevait nécessairement se passer ainsi.
C'est la projection sur le passé d'un état de fait que ce passé ne pouvait qu'ignorer. Mais en histoire, il n'y a pas
de déterminisme, l'avant n'est pas toujours la cause de l'après. Il ne faut pas confondre la causalité et la
temporalité, un événement n'arrive pas parce qu'il est précédé d'un autre événement.
Transformations du temps:
La représentation du temps est non universelle, non éternelle. Il y a deux grandes visions contradictoires.
A l'Antiquité, c'était une vision cyclique, car tout est cycle : saisons, jour, nuit... La caractéristique fondamentale
est qu'il n'y a ni début, ni fin, et donc provoque une certaine harmonie. Les choses sont inscrites à l'avance. Il n'y
a pas de place au progrès, à l'inconnu de l'évolution, mais bien à l'immuable, à ce qui ne change pas. C'est une
vision à la fois rassurante, car il y a un équilibre, et pesante, car nous fait prisonnier. La transition d'une vision
cyclique à une vision linéaire se passe dans le bassin méditerranéen. Le judéo-christianisme devient religion
d'état et amène le monothéisme. Il n'y a plus qu'un seul dieu, créateur et colérique, les relations se distancent.
Avec la nouvelle vision, tout ce qui est produit est unique, il y a un côté dynamique, irrésistible, incertain,
aléatoire, mais avec des garde-fous, un début, la naissance du monde et une fin, la Parousie, c'est à dire le retour
du Christ sur Terre pour châtier les méchants et sauver le monde. La venue du Christ sur Terre réintroduit la
dimension cyclique, adoucie par la place du Christ dans le christianisme. Donc, le temps est un peu moins
irréversible, définitif. La vision monothéiste dramatise le temps et l'adoucit. Le moteur de la dynamique linéaire,
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