1 Chapitre 15 QUESTIONS À COURT DÉVELOPPEMENT 1. Comment les plasmides et la lysogénie peuvent-ils transformer E. coli, un organisme normalement inoffensif, en agent pathogène ? Une bactérie comme E. coli, normalement inoffensive, peut transporter un plasmide. Ce plasmide est un petit génome sur lequel se trouvent des gènes qui codent pour une entérotoxine. Lorsqu’elle exprime le gène présent sur le plasmide, la bactérie produit la toxine et la libère dans l’organisme hôte. La toxine entraîne des dommages tissulaires sévères, si bien que le plasmide est à l’origine de la transformation de la bactérie normalement inoffensive en agent pathogène. Un bactériophage peut introduire son ADN viral dans le chromosome bactérien et devenir un prophage : la bactérie qui contient un prophage est une bactérie lysogénique. La bactérie peut acquérir de nouvelles propriétés si elle exprime des gènes viraux qui codent par exemple pour des enzymes qui la rendent résistante à des antibiotiques ou pour la synthèse d’une toxine. 2. La cyanobactérie Microcystis æruginosa produit un peptide qui est toxique pour les humains. Selon le graphique ci-dessous, quel facteur influe sur la virulence de la cyanobactérie ? À quel moment cette bactérie est-elle le plus toxique ? Justifiez votre réponse. À quel moment de l’année peut-on s’attendre à des cas plus nombreux d’intoxication ? 1 2 L’intensité de la lumière est le facteur qui influe sur la virulence de la cyanobactérie. La dose nécessaire pour produire des symptômes chez la moitié des sujets atteints est plus petite lorsque l’intensité lumineuse est la plus grande. L’intensité lumineuse est plus grande en été. Par conséquent, on peut s’attendre à ce que les cas d’intoxication soient plus nombreux à cette époque de l’année. 3. Comment chacune des stratégies suivantes contribue-t-elle à la virulence d’un agent pathogène? a) Production de leucocidine, une enzyme b) Modification des antigènes de surface après son entrée dans l'hôte c) Production d’une endotoxine d) Croissance intracellulaire e) Présence de fimbriæ Chacune des stratégies suivantes contribue à la virulence d'un agent pathogène de la façon suivante : a) Production de leucocidine : cette enzyme tue les leucocytes, qui sont des cellules de la défense immunitaire, d’où une diminution de la résistance de l’hôte et la facilitation de l’infection. b) Modification des antigènes de surface quelques jours après son entrée dans l'hôte : les anticorps produits ne sont plus spécifiques au moment où ils rejoignent l’agent pathogène sur les lieux de l’infection, d’où la facilitation de l’infection. 2 3 c) Production d’une endotoxine : l’endotoxine l’endotoxine est une substance vasoactive qui diminue le débit cardiaque, ce qui entraîne une chute de la pression artérielle et une dépression subséquente de la résistance de l’organisme, d’où la facilitation de l’infection. d) Croissance intracellulaire : les microbes sont capturés mais ne sont pas digérés par les enzymes du phagocyte. En outre, les microbes se multiplient à l’abri du repérage immunitaire, d’où la facilitation de l’infection. e) Présence de fimbriæ : elles permettent l’adhérence aux cellules hôtes et freinent les effets du nettoyage naturel effectué par les muqueuses. 4. Parcourez les chapitres 21 à 26 du manuel et décrivez les facteurs de virulence pour chacun des agents pathogènes responsables des infections suivantes : a) Streptococcus pyogenes dans la scarlatine : présence de la protéine M dont les propriétés sont antiphagocytaires ; production de l’exotoxine érythrogène qui cause l’érythème. b) Hæmophilus influenzæ type b dans la méningite : présence d’une capsule de sérotype b. c) Virus de la poliomyélite : effet cytocide du parasite intracellulaire des neurones moteurs situés dans la corne antérieure de la moelle épinière. d) Giardia lamblia dans la giardiase : la grande quantité de protozoaires dans l’intestin grêle entrave l’absorption des nutriments. e) Escherichia coli O157:H7 dans la colite hémorragique : production d’une exovérotoxine. APPLICATIONS CLINIQUES N. B. Certaines de ces questions nécessitent que vous cherchiez des réponses dans les différents chapitres du livre. Vous pouvez aussi revoir les applications cliniques du chapitre 4. 3 4 1. Le 8 juillet, un homme de 47 ans se rend à une clinique médicale et on lui prescrit des antibiotiques pour traiter ce qu'on croit être une sinusite. Mais son état s'aggrave et il est incapable de manger pendant 4 jours parce qu'il souffre de raideur et de douleurs intenses dans la mâchoire. Le 12 juillet, il est hospitalisé pour des spasmes faciaux si graves que les contractures musculaires bloquent sa mâchoire. Lors de son admission, le patient signale au médecin que, le 5 juillet, alors qu’il était en camping, il s'est infligé une blessure par perforation à la base de l'orteil avec un vieux bout de racine ; il a nettoyé la plaie mais, préférant ne pas interrompre ses vacances, n'a pas consulté de médecin. Quelle question le médecin doit-il poser à son patient en regard de l’incident lié à la blessure à l’orteil ? Quelle est la cause probable des signes et symptômes intenses de ce patient ? Quel est le réservoir qui héberge l’agent pathogène en cause ? Décrivez le mécanisme physiopathologique qui a conduit à l’apparition des spasmes intenses de ce patient. Pourquoi l’antibiotique administré n’a-t-il pas diminué les signes et les symptômes ? (Indice : voir le chapitre 22 et la figure 22.5.) La question à poser est la suivante : « Avez-vous déjà été vacciné contre le tétanos et, si oui, quand l’avez-vous été ? » La toxine tétanique peut être responsable des signes et symptômes intenses de ce patient, en particulier les spasmes intenses de la mâchoire. Le tétanos est une infection causée par des bactéries qui germent dans une plaie profonde, comme celle de l’orteil, et qui produisent ensuite une exotoxine qui diffuse dans le sang. L’infection est liée à l’entrée des bactéries dans l’organisme, mais c’est la toxine qui est responsable des symptômes et des signes de la maladie. Les réservoirs du tétanos sont le sol et les objets souillés par la terre et la poussière. Les racines peuvent être le réservoir de la bactérie sous forme de spores. Le mécanisme physiopathologique qui conduit à l’apparition des spasmes intenses traduit la relation entre la toxine et ses effets sur l’organisme (signes et symptômes). La toxine tétanique, une neurotoxine libérée par la bactérie depuis le site d'infection, pénètre dans le système nerveux central par l’intermédiaire des nerfs 4 5 périphériques ou du sang. Dans le SNC, la toxine tétanique bloque la transmission de l'influx nerveux qui provoque le relâchement musculaire. Par exemple, durant le fonctionnement normal d’un muscle, un influx nerveux déclenche la contraction d’un muscle squelettique ; au même moment, le muscle antagoniste reçoit un signal provoquant son relâchement afin qu'il ne s'oppose pas à la contraction. La toxine, en bloquant le signal de relâchement, cause la contraction des deux muscles en même temps — il en résulte les spasmes caractéristiques du tétanos. Les muscles de la mâchoire sont atteints dès le début de la maladie, rendant l'ouverture de la bouche difficile. Peu à peu, d'autres muscles squelettiques sont touchés, y compris les muscles responsables de la déglutition. Les spasmes des muscles respiratoires finissent par causer la mort. L’antibiotique administré n’a pas diminué les signes et les symptômes parce que ces derniers sont dus à la toxine et non à la bactérie et qu’un antibiotique agit seulement sur des bactéries. 2. Pour chacun des exemples suivants, expliquez s'il s'agit d'une infection ou d'une intoxication par les aliments. a) Des personnes qui ont mangé des crevettes pêchées à Matane, au Québec, présentent, de 4 heures à 2 jours après le repas, les symptômes suivants : diarrhée, crampes, faiblesse, nausées, frissons, maux de tête et fièvre. b) Des personnes qui ont mangé du barracuda pêché en Floride présentent, de 3 à 6 heures après le repas, les symptômes suivants : malaises, nausées, vision trouble, difficultés à respirer et engourdissement. Une intoxication est causée par l’ingestion de nourriture qui contient une toxine. Les effets toxiques se manifestent rapidement. Dans l’exemple b), il s’agit donc d’une intoxication. Une infection est causée par l’ingestion de nourriture contaminée par des bactéries. L’infection se déclare après la multiplication des bactéries et leur production de toxines. Ce processus exige un certain temps, d’où le délai dans l’apparition possible 5 6 des symptômes. La variation dans le temps peut être due à la quantité de bactéries ingérées au départ. Dans l’exemple a), il s’agit donc d’une infection. 3. De l'eau de lavage contenant des bactéries Pseudomonas est stérilisée et utilisée pour nettoyer des sondes intracardiaques. Trois patients qui ont subi un cathétérisme cardiaque sont atteints de fièvre, de frissons et d'hypotension. L'eau et les sondes étaient stériles. L’endotoxine produite par les bactéries est responsable de l’apparition des signes et symptômes. Décrivez le mécanisme physiopathologique qui relie l’endotoxine d’une part à l’apparition de la fièvre et des frissons et d’autre part à l’apparition de l’hypotension. Y a-t-il un lien avec le fait que l’eau et les sondes étaient stériles ? Justifiez votre réponse. En réaction à des endotoxines, les macrophagocytes produisent de l’interleukine 1 (IL-1) qui est transportée par le sang jusqu'à l'hypothalamus dans l’encéphale, où se trouve le centre thermorégulateur du corps. Sous l'action de l'IL-1, l'hypothalamus libère des lipides appelés prostaglandines, qui modifient la valeur de référence de la température du corps et règlent le thermostat de l'hypothalamus à une température plus élevée. La fièvre en est la conséquence. Les frissons sont des réactions de l’organisme associées à la fièvre. Comme le thermostat de l’hypothalamus est déréglé à la hausse, l’organisme doit produire de la chaleur. Les contractions musculaires (frissons) sont un moyen pour l’organisme d’augmenter la température du corps. Comme la fièvre, la chute de la pression artérielle produite par les endotoxines est liée à la libération d'une substance, le facteur nécrosant des tumeurs (TNF), dans le sang par les macrophagocytes. Un des effets du TNF est d'affaiblir les capillaires sanguins ; leur perméabilité est augmentée et ils perdent de grandes quantités de liquide plasmatique. La déperdition de liquide crée une hypovolémie responsable de la chute de la pression artérielle, d’où l’état de choc. 6 7 Les endotoxines peuvent aussi entraîner la libération de substances vasoactives qui provoquent une vasoconstriction cutanée intense : la résistance vasculaire de la peau augmente et la circulation sanguine en périphérie diminue ; une partie du sang est emprisonnée dans le système veineux, et le retour veineux se trouve fortement réduit, et il s’ensuit l’effondrement de la pression artérielle. La stérilisation de l’eau de lavage contenant Pseudomonas a détruit la bactérie par la chaleur. Pseudomonas est une bactérie à Gram négatif. La destruction de ces bactéries à Gram négatif a entraîné la libération de l’endotoxine contenue dans leur paroi. L’endotoxine n’a pas été détruite par la stérilisation et est demeurée dans l’eau de lavage. L’eau a contaminé les sondes intracardiaques lors du lavage. Les patients ont eu des réactions typiques dues à l’effet pathogène des endotoxines. 4. La prévention contre le SIDA met l’accent sur les relations sexuelles protégées et sur la non-réutilisation de seringues usagées. On précise que la maladie n’est pas transmissible par la salive, ou très rarement. Par contre, bien des gens sont convaincus que le virus se transmet par simple contact. Comment expliquez-vous que, dans la très grande majorité des cas de transmission du virus, la contamination a lieu au cours de relations sexuelles ? Le virus du SIDA utilise les voies génitales comme porte d’entrée privilégiée pour accéder rapidement au sang. La muqueuse buccale n’est pas une porte d’entrée privilégiée. Par conséquent, la transmission par la salive ou par un simple baiser est très rare parce que ces portes d’entrées n’offrent probablement pas au virus un accès assez rapide à la circulation sanguine. 5. Les patients traités par chimiothérapie pour leur cancer ont normalement une plus faible résistance à l'infection. Mais voilà qu'un patient recevant un médicament anticancéreux inhibant la division cellulaire (antimitotique) est résistant à Salmonella 7 8 durant la durée de son traitement (il ne peut contracter la maladie). Proposez un mécanisme possible pour expliquer cette résistance. Le traitement antimitotique altère la division cellulaire. Le cytosquelette est un organite important qui forme le réseau de fibrille emprisonnant les chromosomes lors de la division cellulaire. L’effet perturbateur du médicament pourrait être lié à son action sur le cytosquelette. Or, certaines bactéries, et cela pourrait être le cas de Salmonella, utilisent le cytosquelette pour pénétrer dans une cellule hôte et l’infecter. Si le cytosquelette n’est plus normal durant un traitement anticancéreux, l’organisme hôte pourrait devenir résistant à l’infection à Salmonella en particulier. 6. Dans le film Le hussard sur le toit, adapté du roman du même nom de Jean Giono, l’héroïne contracte le choléra. Le héros reconnaît la maladie aux vomissements intenses de son amie, à la froideur de son corps, à sa peau blafarde et à sa très grande faiblesse. Dans un geste désespéré pour lui sauver la vie, il la frictionne énergiquement des heures durant afin de raviver la circulation sanguine. Ses efforts sont finalement couronnés de succès. Le choléra est une toxi-infection causée par la bactérie Vibrio choleræ sérotype O:1, qui produit une entérotoxine choléragène. Cette exotoxine provoque un état de choc sévère, une acidose métabolique et, sans traitement d’hydratation, une mort rapide dans les 24 à 48 heures. Démontrez que l’entérotoxine choléragène possède les propriétés pathogènes générales des exotoxines. Reliez les effets de l’entérotoxine à l’état de choc observé dans les cas sévères de choléra. Une épidémie de choléra a sévi dans les années 1990 en Amérique latine, se répandant du Pérou à la Colombie et dans six autres pays avoisinants. Quelle caractéristique de l’agent pathogène lui confère sa grande capacité à se transmettre si facilement ? (Indice : voir le chapitre 25 et la figure 25.11.) 8 9 De façon générale, les exotoxines sont des protéines produites et sécrétées par des bactéries en croissance au cours de leur métabolisme ; l’exotoxine diffuse dans le milieu environnant et son action pathogène s’exerce spécifiquement contre une structure cellulaire, ce qui entraîne une perte fonctionnelle des cellules des tissus atteints. Même à faible dose, leur toxicité est très grande. Dans le cas du choléra, la bactérie Vibrio choleræ produit et sécrète, en phase de croissance, une protéine toxique appelée entérotoxine choléragène, qui diffuse localement. Cette exotoxine a pour cible spécifique les cellules épithéliales de la bordure en brosse de l’intestin grêle ; elle dérègle la fonction d’absorption en empêchant les échanges de liquides et d’éléments nutritifs de telle sorte que ces derniers ne sont pas absorbés dans la circulation sanguine mais sont entraînés dans l’intestin et perdus sous forme de diarrhées brutales et abondantes. Il s’agit là d’un effet pathogène intense qui reflète la toxicité puissante propre aux exotoxines. L’entérotoxine provoque de grandes pertes de liquides corporels et d’électrolytes responsables, dans les cas sévères, d’une déshydratation très grave. La déshydratation des cellules conduit à une hypovolémie qui réduit le débit cardiaque, ce qui mène à une chute de la pression artérielle ; c’est l’état de choc. La bactérie peut survivre dans plusieurs réservoirs en dehors de l’humain. Les selles que les humains malades ou porteurs sains éliminent peuvent contaminer l’eau et certains aliments (coquillages, crustacés, etc.). Les bactéries survivent bien dans l’eau, de sorte que la transmission s’effectue facilement si les eaux d’alimentation ne sont pas traitées. 9