Projet « Cultures et Formations »
Les deux autres, animateurs, ont une formation différente. Le premier, psychologue, s’est spécialisé
dans le domaine du VIH/sida à la suite de différents stages, et grâce à une formation de courte durée
en councelling, est devenu coordinateur de la cellule de conseil dépistage et animateur au sein de
groupes de parole. Le second a un profil plus atypique. Titulaire d’un bac comptabilité, il a travaillé
pendant six ans dans une entreprise pétrolière avant de créer sa propre entreprise de vente de voitures.
Désintéressé par ce métier, il est devenu, au hasard d’une rencontre, enquêteur dans le cadre d’une
étude sur les comportements sexuels des adolescents, puis assistant de recherche lors d’une évaluation
sur la participation des personnes atteintes du VIH dans les activités communautaires de prévention et
de prise en charge. C’est ainsi qu’il a commencé à s’impliquer dans ce domaine et a été engagé comme
animateur de sensibilisation sur le VIH/sida. Alors qu’il est le moins spécialisé, c’est paradoxalement
le seul à ne pas avoir reçu de formation avant d’exercer.
b. Les formateurs – artisanat
Deux formatrices africaines, avec des profils très différents, ont été rencontrées dans le domaine de
l’artisanat. La première, âgée de 22 ans et titulaire d’un IUT de gestion commerciale, a choisi ce
métier car « il comportait beaucoup de déplacements » et n’a suivi aucune formation afin d’en
dispenser à des artisans. La seconde, âgée de 38 ans et titulaire d’une maîtrise en sociologie, a travaillé
de nombreuses années comme formatrice, puisque avant de s’adresser à des artisans, elle a occupé
pendant de nombreuses années un poste de responsable de la formation et de l’information dans un
projet d’appui aux petites et moyennes entreprises.
Qu’il soit européen ou africain, le profil-type du formateur n’existe pas. En matière de santé par
exemple, on retrouve tant des spécialistes (infirmiers, médecins) que des individus aux expériences
variées. Nous voudrions ici avancer une différence qui semble être faite entre des formateurs
« professionnels » et des animateurs « amateurs » chargés de faire des sensibilisations
. Ce sont
souvent des personnes plus jeunes qui animent ces séances de sensibilisation de quelques heures, qui
nécessitent beaucoup de personnel puisqu’elles ont lieu plusieurs fois par semaine. Ayant aucune
connaissance à la base, elles sont intronisées expertes sur un sujet tel que le VIH/sida après une
formation de quinze jours. Nous avons d’ailleurs constaté que, sortis des grandes notions apprises par
cœur, ces animateurs ont des difficultés à répondre aux questions posées par les participants. En atteste
la réflexion d’une animatrice : « au début, je recopiais les questions difficiles et j’allais demander au
président ou bien au secrétaire qu’il me donne la réponse ».
Mais, outre les connaissances techniques, devenir formateur (ou animateur) nécessite des compétences
méthodologiques en matière d’animation. En effet, comme beaucoup de nos interlocuteurs le
soulignent, il est difficile de gérer un groupe adulte (« il est difficile de tenir le public en haleine »,
« de l’intéresser », « de le rendre attentif »), ayant un statut parfois plus élevé (« le début est difficile,
surtout quand le public n’est pas homogène. Vous vous retrouvez parfois devant des médecins qui sont
vos supérieurs »).
Cette formation en andragogie est dispensée par plusieurs organismes au Burkina Faso, sous
différentes appellations : « formation de formateurs compétence avancée », « cours international de
formation en recherche-action » et doit permettre d’acquérir, en quinze jours ou trois semaines, des
compétences pour préparer, animer et évaluer une formation. Comme dans le cas des animateurs, ce
n’est pas l’absence de formation qui pose problème mais la prétention devenir expert en quelques
semaines.
Si beaucoup d’individus ont été formés dans ce cadre, certains avouent, que malgré le diplôme obtenu
à la fin, avoir beaucoup plus appris sur le terrain et dû adapter les différentes méthodes aux réalités.
Même si elles n’ont pas fait l’objet pour l’instant d’une étude approfondie, nous avons le sentiment
que dans ces formations se retrouvent les différents problèmes mis en évidence dans d’autres travaux :
standardisation, homogénéisation, placage des méthodes d’apprentissage occidentales.
Pour une explicitation de la différence entre formation et sensibilisation, voir « Quels objectifs pour quelles
formations ? », E. Pratviel, op.cit.