L’accord ne sera cependant pas appliqué en 1948 pour cause de « guerre froide » : suite à la
montée de l’hostilité entre les Etats-Unis et l’URSS, les relations de la Pologne sont gelés
avec tous les pays occidentaux. Lorsque les relations reprennent en 1956, le gouvernement
polonais est dirigé par Wladyslaw Gomulka, porté au pouvoir par le peuple lors de la
« révolution d’octobre 1956 » contre l’avis de l’Union Sovétique. Gomulka est avant tout un
nationaliste polonais : s’il entend payer la dette, c’est pour réaliser le programme de
modernisation de la Pologne afin de sortir du sous-développement et traiter d’égal à égal avec
l’Occident. Certes, la faiblesse économique polonaise est telle que pour solder le passé,
Gomulka accepte une petite dette : en 1956 la Pologne paie les indemnités pour la
nationalisation des biens des capitalistes américains avec un prêt de 233 milions de dollars
accordé par les mêmes… Cependant, le montant de cette dette est bien dérisoire comparé aux
chiffres dont nous seront coutumiers 20 ans plus tard : en 1970 la dette polonaise extérieure
est de 1,7 miliard de dollars, mais en 1980 elle est de 25 miliard !
En ce qui concerne la France, les relations de la Pologne avec ce pays s’améliorent dès 1956
et plus encore avec l’arrivée au pouvoir du Général de Gaulle en France. La France gaulliste
pratique une politique de « détachement » en douceur de la spèhère d’influence soviétique des
pays communiste anciennement alliés et vassaux en leur accordant tout ce dont ils ont besoin
pour leur développement autonome. Certains diplomates particulèrement polonophiles
(Etienne Burin des Roziers, proche de de Gaulle et ambassadeur en Pologne dans les années
60) comparent même l’aspiration polonaise au développement et au bien être de sa population
à l’ambition largement partagée par la droite gaulliste et la gauche d’une France moderne,
urbaine, profitant de la société de consommation ! Les équipes de fonctionnaires des
différents ministères, les délégations d’enteprises, d’universitaires, de scientifiques et
d’artistes se succèdent de la France vers la Pologne et de la Pologne vers la France tout au
long des années 60
. Les possibilités de coopération industrielle, commerciale, scientifique et
technique sont examinées et dûment fixées par des accords bilatéraux avantageux pour les
deux partenaires. La Pologne cherche à acheter auprès de la France les biens d’équipement
pour ses industries naissantes : les infrastructures ferroviaires, aéronautiques, les centrales
thermique et hydroliques, les équipement de sidérugie… La Pologne a besoin de tout cela
pour pouvoir elle-même produire, en plus du charbon, des machines outils, des voitures, des
trains, des bateaux sans parler des biens de consommation modernes dont la population
polonaise, qui vit une formidable ascension sociale par l’éducation gratuite et une
urbanisation sans précédent, est littéralement assoiffée. Les plans économiques du
gouvernement polonais incluent la création de secteurs qui n’existaient pas auparavant : la
chimie (raffinerie de pétrole, chimie fine, engrais artificiels), les médicaments, les
cosmétiques, le plastique, en plus de l’essor de la production du textile, agroalimentaire et de
la mécanisation de l’agriculture polonaise. Un tel chantier ainsi que les possibilités de
débouchés qui s’ouvrent pour les entreprises de pointe françaises enthousiasment le diplomate
français Eric de Carbonne, qui dans une note au MAE du 2 mai 1957 va jusqu’à affirmer que
la France devrait absolument soutenir ce projet de « sortie d’une économie coloniale » !
Mais la dette est là pour contrecarrer ces beaux projets. Le paiement de la dette reprend selon
les modalités de l’accord de 1948 mais le résulat est mitigé, la demande en charbon
s’amenuisant dans l’économie alors que la Pologne des années 1960 n’a toujours à offrir que
cette matière première ainsi que ses produits agricoles sur les marchés internationaux. Les
fonctionnaires du ministère de l’économie et du budget français qui dirigent les nouvelles
N’oublions pas qu’à cette époque l’Etat décide de la politique économique et contrôle le commcerce exétieur et
le contrôle de change. Toute économie est d’abord subordonnée au décisions politiques, ce qui est exactement le
contraire à notre époque ultralibérale ou l’Etat sert politiquement les mutinationales.