Deuxième faiblesse : Aujourd'hui, toute forme de contestation à
l'échelle internationale se teinte d'antiaméricanisme
(« surexposition ») et non seulement parce que les Américains traiteraient
avec mépris et arrogance les autres pays mais aussi parce que dans de
nombreuses crises internationales, les Américains, pour des motifs plus ou
moins empreints de bonne conscience, sont les seuls à vouloir assumer et
organiser une intervention extérieure.
Des attentats commis contre des intérêts américains dans les années 90, parmi
lesquels ceux de Oussama ben Laden. Le 11 septembre 2001 frappe les
capitales politique et économique des Etats-Unis. Guerre asymétrique, d’un
genre nouveau, mené par un réseau contre un Etat. Ces attentats montrent
aussi les fragilités des Etats-Unis, frappés sur leur sol. Le président George W.
Bush (président depuis janvier 2001) prépare la riposte : guerre contre les
Talibans, qui abrite les principaux membres du réseau. Octobre-novembre
2001 : opération américaine en Afghanistan, avec le soutien de la communauté
internationale. La nouvelle politique étrangère des Etats-Unis est toute entière
résumée par la guerre au terrorisme. Lire texte de George W. Bush, page 136.
Définition de l’ « axe du Mal ». Légitimation de la guerre préventive ; enfin,
autre différence avec la guerre de 1990-1991, le néo-conservatisme
américain souhaite exporter les idées et les pratiques qui fondent la
culture américaine. La guerre d’Irak décidée en 2003 malgré les protestations
d’une grande partie de la communauté internationale (France, Allemagne,
Russie, Moyen-orient, Chine) et sans l’accord de l’ONU a renforcé
l’unilatéralisme américain (refus du protocole de Kyoto, refus de la CPI créée
en 1998). Si dans un premier temps, l’intervention américaine se solde par un
succès rapides, l’armée est confrontée aujourd’hui à une situation très difficile,
avec des pertes élevées. De plus la menace terroriste n’a pas disparu et
l’islamisme pourtant en perte de vitesse en sort renforcé (l’Irak, une base
territoriale pour les terroristes, sans parler du nord Pakistan). Une partie de la
société américaine commence aujourd’hui se retourner, comme le montrent les
dernières élections. Au total, la deuxième guerre du Golfe a sans doute
révélé que le monde contemporain n’est plus tout à fait unipolaire car il
est impossible à une seule puissance de contrôler l’ensemble de la
planète ; mais il n’est pas encore multipolaire car aucune puissance
n’est aussi complète que la superpuissance américaine. Le retour de la
Russie et l’affirmation de la puissance chinoise ne laisse cependant pas
place au doute : les Etats-Unis ne sont plus seuls, contrairement au
début des années 1990.
Dans son essai intitulé Après l'empire,essai sur la décomposition du système américain paru aux éditions
Gallimard en 2002, le démographe Emmanuel Todd formule, lui, l'hypothèse que l'Amérique
consomme ce que le monde produit et que le pays vit de l'accaparement d'une richesse extérieure
sans autre contrepartie que l'entretien d'un appareil militaire prêt à intervenir sur tous les terrains
abritant les marchés sensibles : tout se passe, selon l’auteur, comme si les EU recherchaient le
maintien d’un certain niveau de tension internationale, une situation de guerre limitée mais
permanente, par exemple en exagérant la menace terroriste pour se rendre indispensables et
perpétuer leur présence multiforme dans toutes les régions du monde. Les Etats-Unis, pose
franchement l’auteur, sont-ils encore utiles au monde depuis la fin de la guerre froide ? Si ces
derniers ont exercé un « impérialisme positif » en luttant contre les totalitarismes, « les Etats-Unis
sont en train de devenir pour le monde un problème ».