QA63

publicité
QUESTION’AIR
FICHE n°
Les fiches du CEMS Air
63
Droit et institutions - Juillet 2012
LES ÉTATS-UNIS, UNE HYPERPUISSANCE ?
L’Amérique de l’après-11 septembre, plongée dans la crise depuis 2008, semble ne plus incarner
l’hyperpuissance de la fin de la guerre froide. En effet, la crise financière n’a pas seulement révélé les
carences de la première économie du monde, elle traduit également une crise de confiance qui traverse
toute la société américaine. Et si le modèle américain était en train de vaciller ?
I. L’AMÉRIQUE EN CRISE ?
1. La concurrence
La consommation américaine a enrichi, entre autres, la Chine dont elle a contribué à faire le principal « atelier » de la planète. L’endettement à l’égard de ce dernier s’est accru depuis une dizaine d’années
et la Chine est devenue le premier créancier du pays. Le relèvement du plafond de la dette en août 2011 et
la perte du triple A qui suivit cette décision inquiétèrent un temps les dirigeants chinois. La dégradation
de la compétitivité américaine nourrit également des craintes.
D’autres puissances comme l’Inde mais surtout l’Union européenne, premier PIB de la planète,
opposent une sérieuse concurrence à l’hégémonie américaine. Sur les 150 premières sociétés mondiales, on
compte désormais une soixantaine de compagnies européennes contre une cinquantaine américaines. Sur
le plan agricole et industriel, l’Europe représente un concurrent sérieux tandis que l’émergence du Brésil
et le « retour » au premier plan de la Russie dessinent un monde de plus en plus multipolaire.
2. La crise de confiance ?
Entraînant la croissance mondiale, l’économie américaine voit son modèle, reposant sur une hyperconsommation soutenue par un crédit facile, remis en cause en 2008 lors de la crise des subprimes. On a
reproché l’endettement excessif des foyers américains, qui n’ont pourtant fait que suivre l’État fédéral
endetté depuis le XXe siècle. L’illusion de la richesse faisait pourtant taire toutes les critiques du système,
jusqu’en 2008.
Cette crise financière s’est doublée d’une crise de confiance d’une société qui avait placé en Barack
Obama de nombreux espoirs. Ces derniers se sont heurtés à la Realpolitik : le financement de l’assurance maladie peine, le communautarisme fragilise l’unité de la nation, la promesse de fermer la prison
de Guantanamo reste toujours lettre morte. Le taux de chômage dépasse, en 2012, les 8 % tandis que la
paupérisation touche désormais plus de 35 millions d’Américains. On devine les signes de cette crise dans
l’effervescence des mouvements de protestations à droite comme à gauche entre les Tea Party et les Indignés de Wall Street.
II. LES AMÉRICAINS RESTENT LES PREMIERS
1. Une puissance militaire intacte
Auréolés de leur succès de la guerre froide, les États-Unis sont devenus l’hyperpuissance d’un monde
unipolaire. Durant plus d’une dizaine d’années, l’Amérique se veut le gendarme du monde mais connaît
quelques revers, notamment en Somalie, sous l’ère Clinton. L’un des paradoxes du 11 septembre fut de
montrer que jamais elle n’avait été si forte, obligeant les terroristes à employer des méthodes lâches.
Le budget consacré à l’armement lui permet d’assurer une présence planétaire, terrestre et maritime.
www.cesa.air.defense.gouv.fr
www.eoaa.air.defense.gouv.fr
Les fiches du CEMS Air
FICHE n°
Droit et institutions - Juillet 2012
63
Dotée de l’arme nucléaire depuis 1945, l’armée américaine est la seule capable de se déployer sur plusieurs
théâtres d’opérations majeurs en très peu de temps. Les critiques formulées contre ses décisions unilatérales (guerre en Irak de 2003) n’empêchent pas les grandes puissances occidentales de lui emboîter le pas
dans la lutte contre le terrorisme.
2. Une puissance économique malgré la crise
Le déclin de l’Amérique est prophétisé depuis une trentaine d’années, et pourtant les États-Unis
demeurent une grande puissance. Leur potentiel agricole est immense. Leur stratégie énergétique fondée
davantage sur le charbon que sur le pétrole leur permet d’atténuer les effets de la hausse du coût de ce
dernier. Wall Street demeure la première place financière et l’Amérique continue d’attirer les capitaux du
monde entier. Les bons du Trésor américain ne connaissent pas de déclin tandis que le dollar demeure
la monnaie de réserve et de transaction mondiale. Plus de 11 000 filiales industrielles concourent à la
diffusion des produits américains dans le monde. L’innovation scientifique, la recherche développement,
l’esprit entrepreneurial, l’immigration choisie et surtout un optimisme à toute épreuve constituent des
atouts essentiels à la reprise de la croissance et au maintien du pays comme première puissance mondiale.
Enfin, malgré la crise, les investissements extérieurs continuent d’augmenter.
III. L’AMÉRIQUE FAIT TOUJOURS RÊVER
1. Le miroir de la société moderne
Le dynamisme démographique est un des piliers de la puissance américaine. Avec près de 300 millions d’habitants, les États-Unis représentent près de 5 % de la population mondiale et 1/3 du PIB mondial.
Les États-Unis sont encore le premier pays d’accueil au monde. Depuis une loi de 1990, cette immigration
souvent « choisie » constitue une force de travail et de rayonnement sans équivalent. 123 millions de personnes constituent une main-d’œuvre active dans un système libéral où la mobilité et la flexibilité assurent
le dynamisme de l’économie. La forte augmentation de l’emploi à temps partiel et la relative faiblesse des
salaires dans le tertiaire tempèrent cette vision optimiste.
Si l’Amérique continue d’attirer les migrants du monde entier, elle le doit à cette part de rêve américain qu’elle suscite à travers une domination culturelle presque sans égale. Séries télévisées, publicités, films,
sport, loisirs, musique, mode et alimentation vantent un style et un niveau de vie parmi les plus élevés du
monde.
2. Une grande puissance malgré tout
Malgré la concurrence mondiale, les États-Unis maintiennent leur domination dans de nombreux
secteurs d’activités : produits agricoles (maïs, lait, viande, soja), technique de pointe (Boeing), chimie
(Procter), numérique (Microsoft). Ils assurent encore 1/5 de la production mondiale.
Leur politique étrangère fondée sur l’outil militaire et l’emploi du soft power leur assurent une présence sans égale dans le monde : financement des organisations internationales (un quart du budget de
l’ONU), développement de radios anglophones en Afrique, encouragement d’associations humanitaires
sous contrôle américain, maîtrise du réseau de communications et du renseignement (knowledgement).
Le retrait progressif des troupes des théâtres du Moyen-Orient et la relative discrétion américaine lors du
Printemps arabe traduisent une redéfinition des priorités américaines de cette « puissance par défaut » qui
fascine toujours autant.
Pour aller plus loin :
- KASPI André (dir.), La Civilisation américaine, PUF, 2004
- ZACHARIA F., L’Empire américain : l’heure du partage, Saint-Simon, 2009
Rédaction en chef et direction de la publication :
Centre d’enseignement militaire supérieur Air (CEMS Air)
ISSN 1963-2150
Édité par le Centre d’études stratégiques aérospatiales (CESA) - École militaire - 1 place Joffre - 75700 PARIS SP 07
Service gestion synthèse- tél. : 01 44 42 80 64 - MTBA : 821 753 80 64 - e-mail : [email protected]
Téléchargement