paix de Paris accorda aux Etats-Unis la quasi-totalité des possessions espagnoles outre-mer : les
Philippines, Guam, et Porto Rico (Cuba se voyant accorder une indépendance limitée sous protectorat
américain), les Etats-Unis se trouvant ainsi du jour au lendemain en possession d'un vaste empire
colonial. Les Etats-Unis durent aussitôt mener une guerre coloniale aux Philippines (1899-1902). Cette
guerre, théâtre de nombreuses atrocités commises par les soldats américains, fit entre 500 000 et
1 000 000 morts, pour la plupart civiles. Elle suscita, à l'instar de la guerre Vietnam ou plus récemment de
la guerre d'Irak, la violente opposition d'une partie de l'intelligentsia, notamment de Mark Twain, pour qui
cette guerre, « bourbier » (quagmire, cf supra) moralement injustifiable, constituait une trahison des
valeurs américaines. Justifiant cette action, les impérialistes américains, à l’instar de Theodore
Roosevelt
, considèrent que les ETATS6Unis ont le fardeau de défendre la civilisation dans le monde et
en en particulier sur le continent américain dont sont exclus les Européens.
Au début du XXème s., un grand nombre d’arguments justifiant l’isolationnisme ne tiennent plus :
les Etats-Unis sont désormais une puissance industrielle de premier ordre et possèdent un empire colonial.
De plus, les Etats-Unis sont intervenus dans les grandes questions de politique internationale : médiation
à la conférence d'Algésiras de 1906 (visant à régler la crise franco-allemande de 1905 sur le Maroc) ;
médiation au traité de Portsmouth, qui conclut la guerre russo-japonaise de 1905. Si Wilson, pacifique
convaincu, souhaite au début du conflit se tenir à l’écart, il engage résolument les Etats-Unis dans le
conflit mondial.
Comment peut-on expliquer le retour à l’isolationnisme après la Guerre ? Il est évident que la
lassitude de l'opinion publique américaine face aux querelles des alliés et à la volonté française d'écraser
l'Allemagne est un facteur déterminant : les Européens ne sont décidément pas raisonnables et moraux.
De plus, la personnalité de Wilson, qui, par intransigeance et messianisme, refusa tout compromis avec le
Sénat sur la question de la SDN, joua dans le refus de celui-ci de ratifier le Pacte. Deux raisons à cela :
l'une, politique, relevait de la crainte de devenir le « gendarme du monde » et d'être obligé d'envoyer des
soldats mourir pour des affaires ne concernant pas directement les Etats-Unis ; l'autre, juridique, tenait à
la Constitution américaine ; celle-ci prévoit que c'est le Sénat qui déclare la guerre (article I, section 8) :
or, le Pacte constituait une forme d'alliance permanente et risquait de rendre automatique l'entrée en
guerre des Etats-Unis en cas d'attaque contre un autre membre, ce qui aurait dépossédé le Congrès de sa
prérogative en la matière.
Les années suivantes, marquées par « America First », slogan du Président Harding élu en 1920
sont donc marquées de ce sceau de l’isolationnisme. Les années 1920 et le début des années 1930,
dominées par le courant anti-internationaliste du parti républicain, constituèrent la dernière grande
période d'isolationnisme que connurent les Etats-Unis au XXème siècle. Ce repli sur soi prit plusieurs
formes : refus de prendre position sur les questions de politique européenne, fermeture à l'immigration,
peur du communisme et lutte anti « Rouges » aux relents xénophobes, protectionnisme économique (en
contradiction avec la tradition libérale américaine), en particulier après le krach de 1929. Mais
l'isolationnisme devenait difficile à défendre : le Pacte Briand-Kellogg (du nom des Ministre français des
Affaires Etrangères et Secrétaire d'Etat américain) de 1928, auquel adhérèrent treize autres pays (dont
l'Allemagne, l'Italie et le Japon !), et qui visait à « mettre la guerre hors la loi », est typique de l'idéalisme
wilsonien. Il en va de même de la dénonciation par le Secrétaire d'Etat Stimson de l'invasion japonaise de
la Mandchourie en 1931 : les Etats-Unis énoncèrent à cette occasion la « doctrine Stimson », c'est-à-dire
le refus de reconnaître les modifications territoriales opérées par la force, position de principe qui s'avéra
par la suite tout sauf neutre (ainsi, les Etats-Unis ne reconnurent jamais l'annexion des pays baltes par
l'URSS). Enfin, la politique de protectionnisme douanier, dans un contexte de mondialisation de
l'économie et de la finance (du fait des énormes prêts accordés aux pays européens durant et après la
guerre), s'avéra désastreuse après 1929. Privant les industriels étrangers (débiteurs des banques
américaines) d'accès aux marchés américains, elle obéra leur capacité à rembourser leurs dettes,
“Chronic wrongdoing, or an impotence which results in a general loosening of the ties of civilized society, may in America,
as elsewhere, ultimately require intervention by some civilized nation, and in the Western Hemisphere the adherence of the
United States to the Monroe Doctrine may force the United States, however reluctantly, in flagrant cases of such wrongdoing
or impotence, to the exercise of an international police power.”, Theodore Roosevelt, 1904.