Dissertation - Excédents - Déficits

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Justine Bouyssou
Macroéconomie
25/03/09
Conférence de F. Bittner
Dissertation : Excédents et déficits commerciaux : quels sont les gagnants et les
perdants ?
En 2008, la France a enregistré un déficit commercial record, de près de 55 milliards
d’euros de déficit. Si les médias s’accordent pour dire que c’est mauvais, personne ne semble
toutefois tirer la sonnette d’alarme. Serait-on indifférent au solde du commerce extérieur ?
La balance commerciale est l’indicateur macroéconomique par excellence du solde
commercial, outil indispensable pour déterminer les politiques économiques et pour évaluer
les performances de l’économie nationale. Elle fait partie de la balance des paiements,
élaborée en France par la Banque de France pour le compte de l’Etat, et qui recense toutes les
transactions d’une nation avec l’extérieur sur une période donnée (importations et
exportations de biens et services, transactions de l’Etat, dons, mouvements de capitaux …).
La balance commerciale, quant à elle, concerne uniquement les importations et exportations
des marchandises – ou « visibles »-, et non les « invisibles » (c’est-à-dire les services, comme
le tourisme). On parle d’excédent commercial quand les exportations sont supérieures aux
importations, et de déficit commercial dans le cas inverse. Si l’utilisation de la balance
commerciale était dans les années 60 la référence, l’INSEE utilise de plus en plus le
pourcentage d’exportations dans le PIB (c’est-à-dire le rapport en pourcentage d’exportations
dans le PIB sur une période précise), qui mesure le degré d’ouverture d’un pays sur
l’extérieur. De même, l’on utilise la propension moyenne à importer, rapport en pourcentage
des importations dans le PIB, indicateur de la pression de la concurrence étrangère.
Quand on voit des déficits très importants dans des pays développés tels que les EtatsUnis – ou la France, nous pouvons nous demander quels sont les véritables enjeux de la
balance commerciale : l’excédent d’un pays ayant pour conséquence logique le déficit d’un
autre, il semble crucial de contrôler ses importations et exportations. Est-ce un véritable choix
de politique économique que de garder un tel déficit ? Ou est-ce véritablement paralysant
pour une économie ? Nous allons donc nous demander quels sont les gagnants et les perdants
des excédents et déficits commerciaux.
Dans une première partie, nous verrons qu’un pays semble à avoir tout à y gagner en ayant un
excédent commercial, puis nous nuancerons en montrant qu’il peut y avoir des bons et des
mauvais excédents et déficits, rendant l’évaluation des gagnants et perdants moins évidente.
I) Un pays semble avoir tout à y gagner en ayant un excédent
commercial
1.1.
L’excédent commercial semble être une source de prospérité pour une nation
Les exportations et importations dans l’équation du PIB en économie ouverte mettent en
avant l’importance d’un excédent commercial.
Tout d’abord, l’équilibre sur le marché des biens est égale à cette équation :
Y + M = C + I + G+ X
C+Y+G+X–M=Y
La somme du produit intérieur Y et du produit étranger égale la demande finale. Nous
sommes dans une économie ouverte, où les exportations sont source de demande pour les
biens produits dans le pays et les importations sont une fuite hors du circuit économique, car il
s’agit d’une demande de biens pour l’étranger.
La différence entre importations et exportations donne le montant de l’excédent– ou du
déficit. Ainsi, pour la France, nous pouvons voir en 2003 sur le graphique ci-dessous que
l’écart augmente, creusant le déficit.
Les exportations étant sources de revenu, il est préférable qu’elles soient élevées.
Selon l’idée mercantiliste, l’accumulation est synonyme de prospérité.
D’après l’idée mercantiliste, l’accumulation de métal précieux est synonyme de prospérité.
Elle est donc bénéfique pour toute la nation. Un pays aurait donc avantage à avoir une balance
commerciale excédentaire, dans ce principe d’accumulation des richesses à l’intérieur du
pays. En privilégiant les exportations, on privilégie l’accumulation de la monnaie sur le
territoire. Les excédents commerciaux des uns ont alors une contrepartie logique : le déficit
commercial des autres. Par exemple, les excédents chinois et japonais sont en grande partie la
conséquence du déficit commercial américain, les Etats-Unis important massivement leurs
produits.
Le mécanisme lorsqu’il y a un excédent commercial est le suivant : la demande intérieure
diminue ou augmente moins vite que la demande « extérieure ». De ce fait, les importations
augmentent moins vite que les exportations. Un pays gagne véritablement à avoir une
balance commerciale excédentaire, quand elle est due à la compétitivité des produits
nationaux. Elle est alors synonyme de dynamisme commercial.
Si l’excédent semble privilégié, car synonyme de prospérité, compétitivité et dynamisme, le
déficit commercial est, lui, synonyme de décroissance.
1.2.
Le déficit commercial, symptôme d’une atonie commerciale
Le déficit commercial est souvent le témoin d’une moindre compétitivité
Dans le passé, les déficits étaient plus ou moins la règle, les excédents étant très rares. Par
exemple, en France entre 1945 et 1991, la balance commerciale ne fut excédentaire que treize
années, d’autant plus que dans les années 1950-1960, avec l’inflation la hausse des prix
intérieurs ont renchéri la valeur des produits exportés, tout en augmentant la valeur des
produits importés, ceci favorisant un déficit commercial. Ainsi, le déficit de la balance
commerciale peut exercer une pression déflationniste, même s’il est du à l’origine à l’inflation
(dans le cas de la France). Dans ce cas là, il faut modifier le taux de change afin de rétablir
la compétitivité des prix des exportations. Le déficit commercial peut donc être du à des
pertes de part de marché ou à une mauvaise spécialisation géographique.
Il est aussi témoin d’une demande intérieure plus forte
Le déficit peut aussi être structurel. C’est le cas quand le développement de l’activité d’un
pays est stimulé par la demande intérieure : la propension à importer est très forte. Dans ce
cas là, le pays ne peut atteindre le plein-emploi sans avoir un déficit des paiements courants.
A partir des années 1970 aux Etats-Unis, les causes du déficit qui ont été soulignées ont été la
surévaluation du dollar, affectant la compétitivité des ventes à l’étranger, mais aussi une perte
de compétitivité dans le secteur de l’industrie, ce qui est un point faible pour les Etats-Unis.
Ainsi, déficit semble rimer avec décroissance ou perte de compétitivité. Cependant la vision
du bon excédent et mauvais déficit est trop simpliste : les véritables gagnants sont ceux qui
exploitent au maximum leur situation commerciale.
II) Toutefois, la réalité est plus contrastée : il y a des bons déficits et des
mauvais excédents
2.1. Le déficit commercial n’est pas toujours mauvais.
Le déficit commercial et la croissance ne sont pas antinomiques.
Si nous prenons l’exemple de la France, nous pouvons voir sur le graphique ci-dessous que le
solde du commerce extérieur est indépendant de la croissance du PIB en France.
Notamment, l’année 2004 monter qu’il est possible d’avoir une croissance relativement
élevée malgré un fort déficit commercial.
A l’inverse, en 1997, le solde du commerce extérieur est excédentaire, ce qui est ambigu car
cela va de pair avec un ralentissement économique et un chômage élevé.
Ces constats sont la preuve qu’il peut y avoir des bons et des mauvais déficits ou excédents :
certains facteurs de croissance, et d’autres freins au dynamisme économique du pays.
« Les déficits commerciaux de croissance existent aussi. Quand une nation s'enrichit, sa
demande intérieure bondit, et avec elle ses importations », selon Véronique Riches-Flores.
La remise en question du principe d’accumulation par les classiques remet en question
les avantages de l’excédent commercial.
La théorie mercantiliste de l’accumulation a été fortement remise en question par les
classiques. En effet, selon la critique classique, ce n’est pas parce qu’une partie de la
population exporte et accumule du métal précieux que tout le monde en bénéficie : il y a donc
aussi des perdants, remettant en cause la doctrine de la nation entière qui y gagne.
De plus, ce n’est pas l’accumulation qui fait la richesse : si un pays a beaucoup d’or, mais
qu’un autre a des unités de production très performantes, le deuxième s’en sortira mieux. La
capacité de production est donc synonyme de prospérité. Or, la capacité de production est
totalement indépendante de la balance commerciale. Un pays gagne ainsi à avoir un déficit
commercial quand celui-ci amène une hausse de l’investissement technologique.
Enfin, le dernier point est que l’accumulation des métaux précieux provoque une
augmentation des prix. Ceci n’est pas bon pour le commerce, car les produits sont donc plus
chers et moins compétitifs. Une nation n’a donc pas intérêt à accumuler de la richesse pour
voir la balance commerciale la plus excédentaire possible.
Ce point de vue classique souligne le fait qu’une accumulation n’est donc pas forcément
préférable.
Un déficit commercial peut profiter à tous. L’exemple des Etats-Unis et de son « déficit
sans pleurs » (J. Rueff) est révélateur.
Dans les années 1981-1985, la hausse du dollar a augmenté le déficit commercial américain et
enrichi leurs partenaires commerciaux, qui ont en contrepartie recyclé leurs excédents sur les
marchés financiers américains, alimentant un véritable cercle vertueux de la balance
américaine. L’économiste S. Marris dans « Les déficits et le dollar » (Stephen Marris,
1985) explique que le déficit commercial des Etat-Unis pèse sur le dollar d’une manière
limitée avec un effet de retard, et que les gains commerciaux peuvent etre annulés par
l’évolution des taux de change. Ainsi, Toutefois, le déficit de la balance commerciale ne doit
pas être compris comme un signe de déclin car les filiales des firmes US à l’étranger
rapatrient par les circuits financiers leurs profits (d’où l’idée que tout finit par s’équilibrer).
2.2. L’excédent commercial peut aussi être une faiblesse
Tout comme un déficit n’est pas forcément mauvais signe, l’excédent commercial est
parfois aussi signe de faiblesse. En effet, quand il y a excédent, il y a aussi un surcroit
d’épargne : le pays n’investit pas assez. On dit aussi qu’il faut un excédent des transactions
courantes (cap d’épargne supérieure à cap d’investissement) pour avoir des taux à long terme
faibles. C’est le schéma classique de la fixation du tau d’intérêt par l’épargne et
l’investissement.
Dans le cas de hausse de préférence pour le présent (et donc de consommation),
l’accumulation initiale de dette finance un surcroit de consommation. A long terme, le bienêtre est réduit.
Le véritable gagnant est celui qui a la plus grande productivité
Quand il y a une hausse de la productivité globale, l’accumulation finance le supplément
d’investissement. A long terme, la richesse augmente.
Quand il y a un supplément de dette, cela impose une amélioration de la compétitivité et de la
balance commerciale. C’est le cas aux Etats-Unis, c’est pourquoi leur déficit leur est
finalement bénéficiaire, car cela pousse à une meilleure productivité.
Conclusion
Ainsi, déficits et excédents commerciaux comportent tous deux avantages et inconvénients, en
fonction de leurs principaux composants. Les pays étant acteurs d’une économie ouverte dont
les rouages macroéconomiques sont entremêlés, c’est donc l’équilibre des différentes
composantes du commerce extérieur qui permet d’évaluer leur situation. Les véritables
gagnants sont ceux qui arrivent à combiner productivité et investissement. La seule balance
commerciale ne permet donc pas de montrer la puissance commerciale d’un pays.
Finalement, comme son nom l’indique, il s’agit d’une balance commerciale, il faudrait donc
arriver à un équilibre pour que la situation soit stable. D’où la question de l’indicateur : est-il
vraiment pertinent de mesurer un poids commercial avec la simple balance ?
Sources
o Ouvrages
Macroéconomie, Problèmes contemporains, Artus, P, Economica, 2003
Macroéconomie, Begg/Fischer/Dornbush, 2e ed., Dunod, 2002
Economie Internationale, Fondements et Politique, Colette Nême, Litec, 1991
La Nouvelle Economie Mondiale, F. Teulon, PUF, 2008
o Sites internet
http://www.banque-france.fr/fr/publications/telechar/autres_telechar/pecha.pdf
http://www.lexpansion.com/economie/le-deficit-commercial-est-un-signe-decrise_24453.html
http://www.lexpansion.com/economie/actualite-economique/le-deficit-commercial-de-lafrance-est-il-inquietant_113399.html
http://www.lexpansion.com/economie/actualite-economique/la-chine-pulverise-son-record-dexcedent-commercial_139378.html
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