Les syndromes douloureux du poignet
Article de M. Sadowski D. Della Santa
Les syndromes douloureux du poignet, aigus ou chroniques, sont relativement fréquents et
peuvent toucher tous les groupes d’âge. L’origine des douleurs peut être osseuse, articulaire,
péri-articulaire, neurologique, vasculaire ou référée du rachis cervical, de l’épaule ou du
coude. Le diagnostic sera orienté de manière déterminante par une anamnèse et un examen
clinique systématique. Les examens complémentaires seront ensuite choisis en fonction des
éléments cliniques. L’influence des facteurs psychosociaux et de leurs répercussions
professionnelles devra également être prise en compte.
Les douleurs du poignet sont à la main ce que les lombalgies
sont à l'individu (R. Vilain)
Introduction
Le poignet est à la fois un système ostéo-articulaire complexe capable d'une multitude de
mouvements déterminant l'orientation de la main dans l'espace et le lieu de passage d'un grand
nombre de tendons, nerfs et vaisseaux destinés à la main. Les causes de douleur du poignet
étant multiples, elles représentent pour le praticien un important défi diagnostique et
thérapeutique. Cet article a pour but d'apporter une des lignes directrices au praticien non
spécialisé pour les pathologies les plus courantes.
Anamnèse
Les éléments déterminants de l'anamnèse comprennent le mode d'apparition de la
symptomatologie, son caractère, sa localisation, son irradiation, les facteurs qui la modulent.
Une douleur mécanique, péjorée à l'effort, à l'appui, lors de mouvements répétés est le plus
souvent associée à une lésion ostéo-articulaire ou tendineuse. Dans les cas traumatiques, il ne
faut pas sous-estimer les conséquences d'une simple chute de sa hauteur avec réception sur le
poignet. L'énergie considérable dispersée dans le poignet peut occasionner une association de
lésions osseuse et ligamentaire.1
En l'absence de fracture visible sur les radiographies, une douleur persistante malgré une
immobilisation d'une dizaine de jours devra faire suspecter une lésion ligamentaire radio-
ulnaire distale, scapho-lunaire ou luno-triquétrale, voire de deux d'entre elles ou des trois
associées.2
Des douleurs permanentes irradiant à l'épaule associées à un œdème, à un érythème, à une
hypersudation, suivies d'une raideur et d'une hypertrichose sont très évocatrices d'une
algodystrophie (syndrome douloureux régional complexe ou maladie de Sudeck).
Une douleur spontanée, nocturne ou de repos doit faire évoquer une tumeur (kyste synovial,
ostéome ostéoïde), un trouble vasculaire (thrombose de l'artère ulnaire, nécrose aseptique du
lunatum) ou une infection (ostéomyélite).
Enfin, plusieurs affections systémiques peuvent se manifester par des douleurs du poignet.
L'anamnèse et l'examen général évoqueront une maladie rhumatismale telle qu'une arthrite
rhumatoïde, psoriasique, lupique, une chondrocalcinose ou une goutte.
Examen clinique
En plus du poignet, l'examen clinique doit évaluer l'entier du membre supérieur, à savoir le
coude, l'épaule y compris le rachis cervical à la recherche d'une douleur référée.
L'examen du poignet et de la main commence par l'inspection, à la recherche de lésions
trophiques, érythème, tuméfaction, déformation, cicatrice adhérente ou hypertrophique.
La palpation et les diverses épreuves spécifiques sont dirigées en fonction de la pathologie
suspectée.
Les amplitudes articulaires sont mesurées et comparées avec le côté controlatéral. La mesure
de la force de serrage, également rapportée au côté sain, est un indicateur objectif de la
sévérité de l'atteinte. Répétées à intervalle régulier, ces valeurs témoignent de l'évolution de la
lésion dans le temps.
L'examen clinique est envisagé ici selon une systématique topographique, allant des structures
superficielles aux structures profondes et ceci pour chacun des quatre cadrans du poignet :
dorsal, palmaire, radial et ulnaire (tableau 1).
Cadran dorsal
Les structures nobles superficielles importantes sont les tendons extenseurs du poignet, des
doigts et du pouce dont la pathologie la plus fréquente est la ténosynovite. Celle-ci peut avoir
une cause irritative telle qu'un carpe bossu 3 (ostéophytose carpo-métacarpienne), un cal
osseux exubérant du radius ou une protrusion de matériel d'ostéosynthèse. En l'absence
d'étiologie mécanique, une origine rhumatismale ou septique doit être suspectée.
Cliniquement, on note un empâtement parfois douloureux à la palpation et des crépitations
lors de la mobilisation du poignet ou des doigts. En cas de rupture de l'extenseur d'un doigt, le
rayon concerné adopte une attitude en flexion avec impossibilité d'extension active de la
première phalange. La tendinite du long extenseur du pouce peut survenir sur un tendon
dégénératif consécutivement à des gestes répétitifs ou au décours d'une fracture du poignet, le
tendon s'usant sur un tubercule de Lister acéré. En cas de rupture, la tension du tendon n'est
alors plus palpable dans la tabatière anatomique.
Reflet d'une surcharge mécanique, voire d'une lésion dégénérative, un kyste arthrosynovial se
présente sous forme d'une voussure dorsale, généralement en regard de l'articulation médio-
carpienne. De consistance élastique, elle est adhérente au plan profond. Initialement, la lésion
peut se manifester en l'absence de voussure. On doit alors suspecter un kyste inclus qui peut
être confirmé par sonographie.
Une douleur localisée en regard du semi-lunaire, souvent spontanée et aggravée par l'effort,
fait suspecter une nécrose aseptique (maladie de Kienböck). La radiographie standard peut
confirmer le diagnostic et en révéler le stade évolutif. La résonance magnétique permet de
préciser le degré de vitalité de l'os.
Dans un contexte de traumatisme du poignet, une douleur localisée sur l'interligne scapho-
lunaire, évoque une entorse interosseuse. Elle peut être dépistée par la manœuvre de
décoaptation radio-scaphoïdienne de Watson.4 La manœuvre est positive en cas de ressaut
douloureux (figure 1). Certains patients laxes présentant volontiers un ressaut du côté sain,
l'examen doit se faire systématiquement des deux côtés. Radiologiquement, on recherche un
écartement scapho-lunaire sur la radiographie de face (L 3 mm). La radiographie de profil
permet d'apprécier la stabilité du carpe caractérisé par l'alignement radio-luno-capitatum. En
cas d'entorse scapho-lunaire grave, on observe une bascule dorsale du semi-lunaire (angle
radio-lunaire L 20°). On parle alors d'instabilité dorsale du carpe (DISI) 5 (figure 2).
Plus rare, l'instabilité post-traumatique luno-triquétrale s'apprécie cliniquement par la
manœuvre du cisaillement antéro-postérieur de Reagan.6 La manœuvre est positive si on
perçoit une laxité douloureuse de l'articulation (figure 3). Les radiographies de face peuvent
révéler une incongruence entre triquetrum et semi-lunaire et les clichés de profil une bascule
ventrale du semi-lunaire (angle radio-lunaire L 20°). On parle ici d'instabilité de type ventral
du carpe (VISI) (figure 4). Le diagnostic d'entorse scapho-lunaire ou luno-triquétrale peut être
posé par arthro-scanner ou arthro-IRM ou directement par arthroscopie.7
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