Note de recherche sur l’apport de l’économie sociale et
solidaire dans la co-construction démocratique des politiques
publiques: réflexions ancrées dans des expériences
canadiennes, québécoises et latino-américaines
Yves Vaillancourt
Décembre 2014
Copublication du CRISES et du LAREPPS, UQAM, Montréal
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Note sur l’auteur
Yves VAILLANCOURT détient un doctorat en science politique. Il est professeur émérite à
l’École de travail social de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il est membre
régulier du Centre de recherche sur les innovations sociales (CRISES) et du Laboratoire de
recherche sur les pratiques et les politiques sociales (LAREPPS). Il est cochercheur au sein
de l’ARUC (Alliance de recherche université-communauté) sur la thématique « Pauvreté
invalidante et citoyenneté habilitante ». Il est membre du Groupe d’économie solidaire du
Québec (GESQ) et du Collectif pour le renouvellement de la social-démocratie.
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TABLE DES MATIÈRES
Note sur l’auteur .................................................................................................................................................... 2
TABLE DES MATIÈRES ........................................................................................................................................ 3
INTRODUCTION ..................................................................................................................................................... 4
Partie 1 BALISES THÉORIQUES ET IMPLICATIONS POLITIQUES ..................................................... 6
Partie 2 ENSEIGNEMENTS TIRÉS DE DEUX EXPÉRIENCES CANADIENNES ................................ 10
Partie 3 ENSEIGNEMENTS TIRÉS DE SIX EXPÉRIENCES QUÉBÉCOISES ...................................... 12
Partie 4 ENSEIGNEMENTS TIRÉS D’EXPÉRIENCES LATINO-AMÉRICAINES .............................. 15
4.1 Impasse de la co-construction au Mexique ................................................................................... 17
4.2 Co-construction et budgets municipaux participatifs au Brésil ............................................ 19
4.3 La co-construction au Venezuela, en Bolivie et en Équateur ................................................. 23
4.3.1 Rompre avec le modèle néolibéral, ce n’est pas rien! ....................................................... 24
4.3.2 Les Assemblées constituantes : des temps fort de co-construction ............................ 26
4.3.3 La polarisation au sein de la gauche freine la co-construction ..................................... 28
4.3.4 La gauche anarchiste s’intéresse peu à la co-construction ............................................. 34
4.4 Une fenêtre d’opportunité s’ouvre au Chili : le débat sur l’Assemblée constituante .... 35
CONCLUSION ......................................................................................................................................................... 44
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................................................... 48
4
INTRODUCTION
1
Ces dernières années, nous nous sommes intéressé au concept de co-construction des
politiques publiques, en définissant cette dernière comme étant une élaboration de
politique publique à laquelle participent non seulement des élus de la société politique, ce
qui est plus conventionnel, mais aussi des acteurs de la société civile, ce qui l’est moins.
Nous avons commencé à travailler sur cette thématique en 2006, après avoir reçu une
invitation des collègues du CRISES (Centre de recherche sur les innovations sociales) à
produire un chapitre de livre sur le sujet
2
. Depuis ce temps, nous avons eu l’occasion de
faire plusieurs communications et de publier une diversité de textes sur ce thème, les uns
de nature plus théorique, les autres de nature plus empirique. Dans nos écrits et
interventions, nous avons constamment été amené à réfléchir en lien avec trois questions.
Premièrement, y a-t-il de la co-construction de politiques publiques? Deuxièmement, s’il y a
co-construction, est-ce qu’elle est démocratique? Troisièmement, est-ce que les acteurs de
l’économie sociale et solidaire (ESS) y participent?
En travaillant sur ces questions liées à la co-construction des politiques, nous avons eu
l’occasion de constater, notamment en France, que certains chercheurs et acteurs
sociopolitiques attachés à l’État jacobin pouvaient se montrer perplexes devant l’utilisation
de l’expression « co-construction des politiques publiques ». Une telle perplexité provient
du fait qu’à leurs yeux la construction des politiques publiques appartenait aux seules
personnes détenant des mandats d’élus politiques et ne pouvait donc pas être une
prérogative partagée avec des acteurs de la société civile dont ceux de l’ESS. En
conséquence, les personnes pourvues d’une sensibilité jacobine accepteront de s’intéresser
à la thématique de la participation citoyenne, mais à condition que cette dernière reste
confinée à des activités de consultation et ne pénètre pas dans les processus décisionnels en
matière de politique publique.
Nonobstant les résistances au concept de co-construction des politiques exprimées dans
certains milieux, nous avons constaté ces dernières années que cette façon de concevoir la
participation citoyenne dans les décisions de politiques publiques exerçait un attrait
croissant dans une diversité de milieux et de lieux, notamment dans les réseaux intéressés
par la promotion de l’ESS. Au Québec et au Canada, au cours des dernières années, la
thématique de la co-construction a été appropriée et utilisée dans divers milieux de
pratique et de recherche s’intéressant à la promotion de l’ESS et de son apport dans la
démocratisation de l’économie et de la société. Nous avons noté le même intérêt en
1
La rédaction de cette note de recherche a été stimulée par notre participation comme conférencier invité à
deux colloques qui ont eu lieu en France sur la thématique de la co-construction des politiques publiques et
qui ont mobilisé à la fois des chercheurs et des acteurs dans le domaine de l’ESS. Nous faisons référence d’une
part aux 14e Rencontres du Réseau interuniversitaire de l’économie sociale et solidaire (RIUESS) tenues à Lille
du 21 au 23 mai 2014 et, d’autre part, aux 5e Rencontres de l’ESS en Vaucluse tenues à Avignon le 20 octobre
2014.
2
En fait, la commande faite par les collègues du CRISES (Centre de recherche sur les innovations sociales), en
2006, consistait à rédiger un chapitre sur l’économie sociale et la co-construction des politiques publiques
dans le cadre de la préparation d’un livre sur l’économie sociale. Ce livre, coordonné par Marie J. Bouchard, fut
publié en français en 2012 et en anglais en 2013 (Bouchard, 2012 et 2013).
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Amérique latine et dans les Caraïbes (ALC), dans les réseaux d’ESS comme le RILESS
(Réseau de chercheurs latino-américains en ESS) et le RIPESS-LAC (Réseau intercontinental
de promotion de l’ESS-Amérique latine et Caraïbes). En Europe, l’idée de la co-construction,
parfois avec des appellations autres, circule dans les colloques et publications du CIRIEC-
International (Centre international de recherche et d'information sur l'économie publique,
sociale et coopérative), du RTES (Réseau des collectivités territoriales d’économie
solidaire) et du RIUESS (Réseau interuniversitaire en ESS), comme en témoigne la
programmation de la 14e Rencontre annuelle tenue à Lille en mai 2014.
À nos yeux, la co-construction démocratique des politiques publiques à laquelle l’ESS
participe demeure une denrée rare. Elle s’apparente à un état de grâce quand elle surgit
dans la vie démocratique d’une société. Elle ne constitue pas une recette applicable partout
et à tout moment. Si on la définit avec rigueur, elle devient plus rare. Néanmoins, à ce
moment-là, elle n’en demeure pas moins pertinente, indispensable et source d’innovation.
Le texte qui suit est structuré en quatre sections. Dans une première, en mettant à
contribution nos écrits antérieurs, nous synthétisons les balises théoriques du concept de
participation de l’ESS à la co-construction démocratique des politiques publiques, en la
distinguant de la participation à la co-production des politiques. Dans les trois sections qui
suivent, nous illustrons les paramètres théoriques fournis dans la première section en
tirant certains enseignements à partir d’études de cas et de recensions d’écrits concernant
successivement le Canada (section II), le Québec (section III) et la région de l’Amérique
latine et des Caraïbes (section IV)
3
.
3
Parmi les trois dernières sections, de nature plus empirique, celle sur l’Amérique latine et les Caraïbes (la
section IV) sera plus neuve et approfondie que les sections II (sur le Canada) et III (sur le Québec) dans
lesquelles nous nous efforçons de synthétiser des résultats de recherches et d’écrits antérieurs. Toutefois,
attendu les limites des sources documentaires disponibles, la question de la participation des acteurs de l’ESS
à la co-construction des politiques sera davantage abordée dans les sections II et III que dans la section IV.
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