«Penchez la tête en arrière et avec l`autre main, poussez le menton

20 Fédra
CPR
Imaginez que vous êtes assis à une terrasse et qu’un
passant s’effondre sous vos yeux. Il ne présente
plus aucun signe de vie. Vous commencez bien sûr
par appeler immédiatement les secours. Mais alors
commence l’attente angoissée jusqu’à l’arrivée du
SMUR, qui met environ une dizaine de minutes
pour arriver sur place… Grâce au projet Phone CPR
(réanimation cardio-pulmonaire ou massage car-
diaque par téléphone) du SPF Santé publique, vous
n’avez plus à attendre passivement que les secours
arrivent. Pendant ce temps d’attente, le téléphoniste
du centre d’urgence 100/112 donne à l’appelant des
instructions de réanimation pas à pas (Protocole
A.L.E.R.T.). Et cela peut sauver des vies.
CHAQUE SECONDE COMPTE
Si une victime d’un arrêt cardiaque ne reçoit pas
immédiatement un massage cardiaque, ses chances
de survie baissent de 10% par minute. Le sang n’est
plus pompé dans l’organisme et le cerveau n’est plus
approvisionné en oxygène. Les premières minutes
après l’arrêt cardiaque sont donc cruciales. Malgré
la rapidité d’intervention du SMUR, moins d’un
dixième des victimes arrive en vie à l’hôpital (5% à
8% selon les études). Le projet Phone CPR fait aug-
menter considérablement les chances de survie de la
victime. «En cas d’arrêt cardiaque, chaque seconde
compte», explique Jos Vermeiren, du SPF Santé pu-
blique. «La Phone CPR permet de doubler, voire tri-
pler les chances de survie.»
AVEC OU SANS HAUT-PARLEUR
Grâce à l’accompagnement téléphonique qui est
fourni, les secouristes de fortune obtiennent des ré-
sultats trois fois meilleurs que ceux des personnes
qui ne bénécient pas d’un tel accompagnement.
Jos Vermeiren: «Un bon massage cardiaque per-
met d’éviter que le cerveau manque d’oxygène, ce
qui réduit le risque de lésions cérébrales et ce qui
permet aussi d’augmenter le nombre de victimes qui
arrivent en vie à l’hôpital. Même les secouristes de
formation retirent des avantages de la Phone CPR:
la qualité des secours prodigués s’en trouve encore
améliorée. Il va de soi que si l’appelant a déjà suivi
un cours de premiers soins et qu’il connaît un peu les
techniques de réanimation, cela aide. Mais ce n’est
pas une condition essentielle. Le Centre de Secours
100/112 commence par poser des questions très spé-
ciques pour avoir la certitude que la victime a bel et
bien fait un arrêt cardiaque et l’opérateur explique
Massage cardiaque
par téléphone
«Penchez la tête en arrière et avec l’autre main, poussez le menton vers le haut. Toujours pas de
respiration? Placez à présent vos mains à hauteur du sternum et commencez par pratiquer 100
massages cardiaques par minute.» Ne vous y trompez pas: ceci n’est pas un cours de secourisme,
mais un exemple de réanimation par téléphone. Un projet du SPF Santé publique qui sauve des vies.
Jos Vermeiren:
«Il est nettement préférable de
faire quelque chose que d’assister
passivement à la scène.»
octobre 2010 21
ensuite très précisément les gestes à poser pour pra-
tiquer la réanimation correctement. L’appelant reste
en outre tout le temps en contact direct avec la cen-
trale jusqu’à l’arrivée du SMUR. De cette manière, il
peut aussi poser des questions supplémentaires sans
interrompre la procédure de réanimation. Il est pra-
tique en pareil cas de disposer d’un téléphone avec
haut-parleur, mais ce n’est pas indispensable.»
MIEUX QUE RIEN
L’idée d’une réanimation par téléphone vient à des
États-Unis. «Nous avons repris à notre compte le
slogan de l’association de cardiologie américaine
Any CPR is better than no CPR’», explique Jos Ver-
meiren. «Il est nettement préférable de faire quelque
chose que d’assister passivement à la scène. Les
risques sont d’ailleurs négligeables. Comme le dis-
patcher du Centre de Secours pose des questions très
spéciques, les erreurs de jugement par exemple
pratiquer un massage cardiaque sur une personne
victime d’une crise d’épilepsie sont limitées au plus
strict minimum. L’expérience à l’étranger nous ap-
prend en outre que les secouristes de fortune n’occa-
sionnent des lésions supplémentaires que dans 2%
des cas. Selon une étude portant sur 1.700 cas de
Phone CPR, un massage cardiaque n’a été appliqué
de manière contrindiquée qu’à trois reprises, entraî-
nant des lésions mineures à la cage thoracique. Dans
le cas le plus grave, il s’agissait d’une côte fracturée.
Cela n’est rien à côté d’une vie humaine que l’on
sauve.»
PROMETTEUR
Le SPF Santé publique a lancé cet été un projet pilote
à Liège et dans le Limbourg. Depuis lors, le projet
Phone CPR est opérationnel dans les Centres de Se-
cours 100/112 de Bruges, Bruxelles et dans toute la
Wallonie: tous les opérateurs téléphoniques ont suivi
à cet effet une formation spéciale de quatre heures.
Jos Vermeiren: «Normalement, tous les centres
belges de secours appliqueront le système à partir du
mois de février prochain. Une étude scientique sera
entamée début novembre à Liège et Hasselt pour en
mesurer les résultats, mais ceux-ci sont d’ores et déjà
prometteurs: un grand nombre d’interventions avec
Phone CPR ont été couronnées de succès.»
réanimation pas à pas
22 Fédra
CPR
«Elle a tiré son mari, beaucoup plus lourd qu’elle,
hors de son lit et a réussi à le réanimer
Maarten Mulkers travaille sur le SMUR de Genk et s’occupe de la formation des
préposés au Centre de Secours 100/112. «Récemment, une femme âgée de 80 ans
a appelé notre service de secours: son mari était au lit et ne présentait plus de signe
de vie. Mais pour qu’un massage cardiaque soit efficace, il faut que la victime soit
étendue sur un support dur. La manœuvre n’était pas évidente parce que le mari
en question était beaucoup plus lourd que sa femme. Le dispatcher de la centrale a
quand même réussi à convaincre la femme de rassembler toutes ses forces pour tirer
son mari hors du lit afin de pratiquer la réanimation. Sans la Phone CPR, elle n’aurait
jamais eu le courage de le faire. Et le mari s’en est finalement sorti!»
«Un homme de 44 ans a récemment survécu grâce à la Phone CPR»
Jean-Pierre Cornet (60 ans) a longtemps travaillé comme infirmier sur le SMUR et il s’occupe à présent de la
formation et du coaching des membres du Centre de Secours 100/112 de Bruges. «Nous avons déjà appliqué la
Phone CPR à une trentaine d’appels. Hier, nous avons encore réussi à sauver un homme de 44 ans. Nous avons
pu guider quelqu’un par téléphone jusqu’à ce que le SMUR prenne le relai. Comme le cerveau n’a pas manqué
d’oxygène en attendant l’arrivée du SMUR, le patient n’a subi aucun dommage neurologique. Dans un cas sur
trois, la Phone CPR a été un succès. Cela paraît peu, mais sans Phone CPR, les chances de survie sont encore
plus faibles! Trois fois moindres…»
«En état de choc, les personnes sur place ont besoin de guidance.»
Samuel Stipulante est infirmier sur le SMUR héliporté de Bras-sur-Lienne (Centre Hos-
pitalier Universitaire de Liège) et coordonne le projet Phone CPR. «Une dame de 40 ans
chute dans les escaliers. Elle est victime d’un traumatisme crânien et fait un arrêt car-
diaque. Il est 3h du matin et le temps nécessaire pour que les secours soient sur place
est à ce moment de 15 à 17 minutes. C’est donc son mari qui prodiguera les premiers
gestes et permettra de sauver la patiente. Bien entendu, les personnes présentes dans
de telles situations se retrouvent en état de choc, ce qui entraîne une perte des compé-
tences. Ne leur demandez pas à ce moment-là d’écrire un exposé professionnel. Ils sont
à environ 15% de leurs compétences cérébrales habituelles. Par contre, ils deviennent
de vrais ‘robots’. Ils ont besoin de guidance. Ils écoutent parfaitement le son de votre voix,
ce qui, grâce au protocole standardisé A.L.E.R.T., nous permet de les aider à effectuer un
massage cardiaque par téléphone. Il s’agit de gestes simples, qui ne demandent pas de
moyen matériel particulier et qui triplent les chances de survie du patient.»
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«Penchez la tête en arrière et avec l`autre main, poussez le menton

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