Pneumologie 2016
Dr Gilles DARNEAU
CANCER BRONCHIQUE
1. GENERALITES / EPIDEMIOLOGIE :
Extraordinaire fréquence :
2014 : 40 000 nouveaux cas par an (3 hommes pour 1 femme).
Chez l’homme, 2
ème
cancer après la prostate mais le plus mortel.
Chez la femme, augmentation de 30 % en 7 ans, 2
ème
cancer après le sein (mais première cause de
mortalité par cancer aux U.S.A).
Cancer grave :
Taux de survie à 5 ans < 15 % ( toutes formes confondues )
1 cancer sur 7 est opérable ; 1 opéré sur 4 est en vie à 5 ans.
Cancer toujours étroitement lié au tabac mais… :
90 % des cancers bronchiques surviennent chez des sujets fumeurs ou ex-fumeurs.
10 % des cancers surviennent chez des hommes non fumeurs et 20% chez les femmes.
Les progrès thérapeutiques deviennent significatifs :
Les chances de guérison ne se sont pas significativement améliorées ces dernières années.
Cependant, la meilleure maîtrise des différentes thérapeutiques (chimio., radiothérapie, thérapies
moléculaires ciblées…) et de leurs effets indésirables, permettent d’obtenir des survies plus longues,
et surtout une meilleure qualité de survie.
2. DEFINITION / ANATOMOPATHOLOGIE :
Cancer : tumeur maligne formée par la multiplication désordonnée de cellules d'un tissu ou d'un
organe, qui va envahir progressivement les structures de voisinage et pourra donner des métastases à
distance par 2 voies : sanguine et lymphatique.
Poumon :
- dissémination lymphatique plus fréquente que sanguine
- modification cellulaire : la cellule tumorale modifie ses propriétés élémentaires
- insensibilité aux signaux antiprolifératifs,
- résistance à l’apoptose,
- potentiel réplicatif illimité,
- capacité d’angiogenèse expliquant le phénotype invasif et métastasant.
Les thérapeutiques moléculaires ciblées peuvent agir sur différents médiateurs moléculaires impliqués
dans l’acquisition de ces propriétés.
Temps de doublement ( T2 ) : temps que met une cellule pour donner naissance à 2 cellules.
Déterminé pour un type histologique. Variation dans l’évolution du cancer.
2 groupes de cancer :
Cancer primitif :
Tissu conjonctif : sarcomes rares au niveau bronchopulmonaire
Tissu épithélial : carcinomes +++
Cancer bronchique : 2 groupes
Endocrine à petites cellules : 10% ;T2 court 30 jours
- diffusion ganglionnaire et métastatique
- non chirurgical
- sécrétion hormone like : syndrome Schwartz Bartter
Non Endocrine : T2 long > 60 jours
- Différencié ou orthoplasique
- épidermoïde ou malpighien : 30 %
- glandulaire ou adénocarcinome : 50 %
- bronchiolo-alvéolaire : 5 %
- Indifférencié, classé selon :
- la taille des cellules : petites / grandes.
- le caractère sécrétoire : neuroendocrine
Cancer secondaire ou métastases pulmonaires d’un cancer extra-thoracique : sein, ovaire, colon,
prostate le plus fréquemment. Le poumon est un "filtre" sanguin et lymphatique donc les
métastases pulmonaires sont fréquentes.
3. CANCEROGENESE / EPIDEMIOLOGIE :
3.1. Facteurs :
3.1.1. tabac :
Favorise la transformation de cellules normales.
Dans une cigarette il y a 15O composants dont 2O au moins sont cancérigènes.
Le risque de cancer dû au tabac est lié à la consommation globale de tabac, évaluée en paquets-
années : 2O cigs/jour pendant 1 an = 1 paquet/année = 1 PA. 20 PA risque X 10, 40 PA risque X 25,
80 PA risque X 100.
Les facteurs aggravants sont :
La précocité du tabagisme
L’absence d’arrêt supérieur à 2 ans
Inhalation de la fumée ou non.
Pipe, cigare : risque < cigarette.
Exposition professionnelle associée.
Tabagisme passif
Arrêt de tabagisme « trop tardif » : notion de mutations génétiques induites par le tabac,
prédisposant au cancer bronchique. Ces mutations peuvent être définitives et donc maintenir le
risque de cancer même après l’arrêt du tabac.
3.1.2. facteurs professionnels : amiante et polluants industriels
Certains comme l'amiante sont des agents cancérigènes, d'autres potentialisent le risque du tabac.
L'amiante favorise l’apparition de cancer avec un temps de latence très long ( 1O à 2O ans ). Ils sont
parfois difficiles à identifier ou évaluer.
3.2. Histoire naturelle du cancer:
0
10
20
30
40
T2
diagnostic
volume cellulaire1 c 10 cm
décès
1 mm 1 cm
Cancer épidermoïde : T2 = 6O jours soit un diagnostic posé le + souvent vers 30 T2 soit 5 ans après la
transformation de la première cellule.
4. CANCER BRONCHIQUE non endocrine ( carcinome épidermoïde,
adénocarcinome) :
4.1. signes d'appel :
- généraux : asthénie, amaigrissement, fièvre (témoigne en général d'une maladie étendue)
- cliniques : hippocratisme digital, signes de localisation métastatique.
- respiratoires : toux, hémoptysies, pleurésie, bronchite, pneumopathie, dyspnée.
- thoraciques : dysphagie, dysphonie, douleur ( traduisent une extension locale ).
4.2. signes cliniques :
- signes pulmonaires,
- adénopathies périphériques,
- foie, os ...
4.3. RxThorax + scanner thoracique:
- type d’anomalie : opacité, atélectasie…
- siège , taille, extension locale, adénomégalies
- métastases foie, surrénale, os...
4.4. diagnostic histologique :
fibroscopie bronchique : tumeur proximale
- tumeur sous forme de lésion bourgeonnante, d’infiltration ou de sténose
- biopsies ou brossage
- siège du processus tumoral important en cas de chirurgie
ponction transpariétale sous scanner : tumeur périphérique
- sous scanner avec une aiguille
- bilan de coagulation préalable
- risque de pneumothorax et parfois d’hémorragie, surveillance hospitalière.
ponction ganglionnaire transbronchique sous écho-endoscopie
ponction d’une métastase hépatique, osseuse…
4.5. Etude anatomopathologique et biologie moléculaire :
histologie :morphologie et architecture
immunomarquage
biologie moléculaire : recherche mutation de récepteurs membranaires
- Tyrosine kinase (EGRF)
- autres : KRAS, HER, ALK, ROS ….
4.6. bilan d'extension :
thoracique : plèvre, médiastin, paroi
extrathoracique : ganglions, foie, surrénales
En pratique, 2 examens :
- IRM ou scanner cérébral avec injection
- TEP scaner : tomoscintigraphie au FDG
o Marquage de l’activité glucidique des cellules par Fluro-Désoxy-Glucose
o Associe un scanner et une caméra scintigraphique
o Sensible mais non spécifique
4.7. bilan biologique :
NF, VS, bilan hépatique, calcémie...
dosage des marqueurs tumoraux rarement élevé
4.8. classification TNM : Tumor Node Metastasis
T :
T1 : tumeur < 3 cm et distale
T2 : tumeur > 3 cm et/ou atteinte de la plèvre viscérale et/ou d'une bronche lobaire et/ou d'une
bronche souche mais à plus de 2 cm de la carène.
T3 : tumeur envahissant la paroi thoracique et/ou le diaphragme et/ou la plèvre médiastine et/ou le
péricarde et/ou la bronche souche à moins de 2 cm de la carène.
T4 : tumeur envahissant le médiastin.
N :
N0 : pas d'atteinte des ganglions.
N1 : atteinte des ganglions hilaires.
N2 : atteinte des ganglions médiastinaux homolatéraux.
N3 : atteinte des ganglions médiastinaux controlatéraux.
M :
M0 : pas de métastases.
M1 : métastases.
4.9. traitement :
4.9.1. chirurgie :
Si
1. la tumeur peut être enlevée totalement : T1/2/3
2. les ganglions médiastinaux ne paraissent pas envahis : N0/1
3. il n'y a aucun signe en faveur de métastases : M0
4. la " quantité " de poumon restante après l'intervention est compatible avec une vie
normale.
5. état général, respiratoire et cardiaque compatibles.
Types d'intervention: lobectomie ou pneumonectomie selon l'étendue de la tumeur
Chimiothérapie adjuvante si tumeur > 3 cm ou N1/2
4.9.2. chimiothérapie :
Elle ne permet que de prolonger la vie sans espoir de guérison et surtout d’améliorer le confort de
survie.
Si
1. la chirurgie est impossible.
2. l'âge et l'état général sont compatibles.
3. le patient et son entourage sont demandeurs d'un traitement.
Modalités en 2013
Dublet de 2 drogues à la base des principaux protocoles dont un sel de platine.
Cures en hospitalisation de jour toutes les 3 semaines
Evaluation au terme de 2 cures.
2 cas :
- répondeur : on continue 4 cures au total et discussion d’un traitement de maintenance :
- monochimiothérapie
- TKI
Jusqu’à évolution…
- non répondeur : arrêt ou 2° ligne
4.9.3. radiothérapie :
stades localisés au thorax T2/3/4 N1/2/3 M0
Associée à la chimiothérapie, concerne les sujets jeunes, en bon état général
Améliore les survies prolongées
33 séances continues de 2 Gy
Formes périphériques non opérables sans atteinte ganglionnaire
tumeur incluse dans le champ
à visée curative, stéréotaxie
Effets II
asthénie, dysphagie, fibrose pulmonaire
4.9.4 Thérapies moléculaires ciblées :
Les thérapeutiques moléculaires ciblées peuvent agir sur différents médiateurs moléculaires impliqués
dans l’acquisition de nouvelles propriétés des cellules tumorales. Une approche donc plus rationnelle,
plus spécifique dans le but d’améliorer la qualité de vie des patients, de diminuer le nombre et la durée
des hospitalisations et surtout d’augmenter la survie reliée au cancer.
Ce domaine en pleine évolution permet d’agir sur trois étapes différentes de la division cellulaire :
• l’inhibition du signal de transduction cellulaire
• l’inhibition de l’angiogenèse
• la modulation de l’apoptose
TKI (tyrosine kinase inhibitor)
- présence d’un récepteur membranaire tyrosine kinase de la cellule tumorale EGRF (Epidermal
Growth Factor Receptor).
- TKI :empêche le développement et induit sélectivement la mort des cellules cancéreuses.
- certaines tumeurs ont une mutation de ce récepteur (adénocarcinome, non fumeurs en particulier) ce
qui augmente l’éfficacité des TKI
- 2 drogues : IRESSA ( GEFITINIB) ,TARCEVA ( ERLOTINIB )
- traitement de première intention si mutation et chirurgie impossible
- traitement de seconde intention en maintenance ou récidive
Inhibiteur de la néoangiogénèse
- empêche la néo formation de vaisseaux sanguins qui irriguent les tumeurs cancéreuses. Cela inhibe
alors la croissance de la tumeur
- toujours associé à un chimiothérapie et maintenu ensuite
- AVASTIN (Bevacizumab)
4.9.5 Soins de « confort » de la dyspnée
bronchoscopie interventionnelle :
- désobstruction mécanique complétée par laser, thermocoagulation, cryothérapie
- bronchoscope rigide sous AG, détruit la tumeur visible dans la bronche et limite les complications
locales
- prothèse endobronchique en silicone
4.9.6 Curiethérapie HDD endobronchique :
Radiothérapie locale endobronchique
Elle peut traiter les carcinomes in situ inopérables.
4.9.7 Soins de support ou soins palliatifs (Best supportive Care)
Dyspnée
O2, corticothérapie, kinésithérapie …
Drainage pleural
Bronchoscopie interventionnelle
Douleur
Antalgiques selon le type de douleur
classe I, II ou III
Aide psychologique
Par l’équipe médicale, le psychologue…
4.10. pronostic / évolution:
Selon classification TNM :
T1 N0 = 80 % de survie à 5 ans.
T3 N2 = 10 % 5 ans.
Opéré : 1 patient sur 4 est en vie à 5 ans.
Non opéré : pronostic de 3 mois à 5 ans. Il dépend de l'étendue de la tumeur TNM, l'état général, la
réponse au traitement," l'entourage psychologique ".
Evolution locale thoracique et métastatique ( cerveau, foie, surrénales... )
5. CANCER NEUROENDOCRINE A PETITES CELLULES :
Cancer à temps de doublement très court, donc qui se développe très vite, de pronostic sombre (3 à 6
mois sans traitement, 12 à 24 mois avec traitement, 2% de guérison).
5.1. signes d'appel :
cliniques :
- généraux : état fébrile, amaigrissement, asthénie;
- respiratoires : toux, hémoptysies, bronchite; dyspnée…
- syndrome paranéoplasique: sécrétion inappropriée d'hormone like par la tumeur neuroendocrine. Le
plus fréquent est la sécrétion d'Hormone like anti ADH ce qui entraîne une natriurèse augmentée, puis
une hyponatrémie sévère ( nausées, somnolence, coma ... ).
radiologiques : volume tumoral souvent important, adénopathies+++.
5.2. bilan d'extension :
2 notions importantes :
1. Volume tumoral incluable ou non dans un champ de radiothérapie
2. Diffusion de la maladie
Ce bilan fixe le pronostic et permet d'adapter le traitement.
local : thoracique, sans métastase.
diffus : atteinte hépatique, cérébrale, osseuse.
Dosage marqueur tumoral Enolase NeuroSpécifique (NSE) souvent élevé
Le bilan d’extension comporte :
- IRM cérébrale
- TEP scanner
5.3. traitement :
Ce type de cancer n'est d’emblée pas opérable en raison de la diffusion ganglionnaire et métastatique
quasi systématique au moment du diagnostic.
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