4 G. FICHOU, J. HUISMAN, F. MANGOLTE, J.-P. MONNIER
Nous montrons que Rk(Rn)est un anneau non-noethérien pour lequel le Null-
stellensatz est valable (5.24). Cela est d’autant plus remarquable que l’inter-
section de tous ces anneaux, à savoir R∞(Rn), est un anneau noethérien pour
lequel le Nullstellensatz n’est pas valable ! Une version affaiblie du Nullstellen-
satz est néanmoins vraie pour R∞(Rn), cette version fait intervenir le radical
réel d’un idéal de fonctions régulières [6, § 4.4]. Ce Nullstellensatz réel, bien
qu’intéressant en lui-même, ne répare en rien le défaut accablant de l’anneau
des fonctions régulières qui est de posséder trop d’idéaux premiers, ce qui ne
manque pas de poser des problèmes en géométrie réelle régulière. Nous ver-
rons, en revanche, que la géométrie réelle k-régulue, pour kfini, ne pose pas
ces problèmes, et, de ce fait, se rapproche plus de la géométrie algébrique sur
un corps algébriquement clos que la géométrie réelle régulière.
Malgré le caractère non noethérien de l’anneau Rk(Rn), son usage reste
raisonnable en géométrie algébrique car nous démontrons que son spectre
de Zariski Spec Rk(Rn)est un espace topologique noethérien. De manière
équivalente (grâce à la validité du Nullstellensatz justement) l’ensemble Rn
muni de la topologie k-régulue est un espace topologique noethérien, lorsque k
est fini (cf. 4.3). Ici et dans toute la suite de cet article, la «topologie k-régulue»
est la topologie dont une base de fermés est la collection des sous-ensembles
de la forme
Z(f) = {x∈Rn|f(x) = 0},
où fest k-régulue sur Rn. Cette topologie est strictement plus fine que la
topologie de Zariski sur Rn, lorsque n≥2. Cette dernière pouvant également
être dénommée topologie régulière ou ∞-régulue.
Dans un deuxième temps, nous posons les bases de l’étude des variétés
régulues abstraites. Nous revenons sur un fibré en droites régulier pathologique
sur R2bien connu qui n’est pas engendré par ses sections régulières globales [6,
Example 12.1.5], et montrons que cette pathologie disparait si ce fibré est
interprété comme fibré en droites régulu. Nous en déduisons alors la validité
des Théorèmes A et B de Cartan dans le cadre régulu (5.46 et 5.47).
Nous concluons par un chapitre consacré à la caractérisation géométrique
des fermés régulus de Rnet montrons un résultat fondamental : les fermés
régulument irréductibles de Rncoïncident avec les sous-ensembles algébrique-
ment constructibles fermés de Rn(Théorème. 6.4). Dans le cas des courbes et
des surfaces, nous poussons notre étude et proposons en particulier une relec-
ture régulue des fameux parapluies de Cartan, de Whitney, et d’un parapluie
de Kollár. Nous introduisons aussi un nouveau parapluie cornu (6.12).
A notre connaissance, les fonctions régulues ont été étudiées de façon sys-
tématique pour la première fois par Kucharz dans [22] (où elles sont appelées
continuous rational). Dans son article, Kucharz montre que ce sont les bonnes
fonctions pour approcher le plus algébriquement possible les fonctions conti-
nues. Il démontre notamment que toute classe d’homotopie d’une application
continue entre deux sphères de dimensions quelconques contient une applica-
tion régulue, là où les applications polynomiales et régulières font défaut !
Dans [19], Kollár étudie les problèmes de restriction et d’extension de
fonctions continues rationnelles définies sur une variété réelle algébrique affine.