Universit´e Lyon 1 – 2010-2011
Master 1 – Groupes classiques et g´eom´etrie
Compl´ements sur les sous-groupes ferm´es de GLn
Ici, Kd´esigne Rou C.
1Sous-vari´et´es
R´ef´erence : Michel Demazure, Catastrophes et bifurcations, Ellipses, 1989.
D´efinition d’une sous-vari´et´e
Soit dN. On dit qu’une partie Mde Rdest une sous-vari´et´e si elle est une sous-vari´et´e
en chacun de ses points. On dit que Mest une sous-vari´et´e de dimension mde Rden l’un de ses
points x0s’il existe un voisinage Wde x0et un diff´eomorphisme f:WUsur un ouvert U
de Rdqui envoie x0sur 0, tel que MW=f1({0} × Rm) (ici, on identifie Rd=Rnm×Rm).
Une telle pr´esentation donne un syst`eme d’´equations de Mau voisinage de x0: on note les
composantes de fainsi :
xV, f(x) = (f1(x), . . . , fd(x)),
alors MVest l’ensemble des xqui sont les solutions de
()f1(x) = f2(x) = · · · =fdm(x)=0.
Remarquons que le syst`eme () est non d´eg´en´er´e, au sens o`u les diff´erentielles des fien x0
sont lin´eairement ind´ependantes : par exemple, on peut dire que leurs matrices sont les lignes
de la matrice jacobienne de f, qui est inversible.
Deuxi`eme caract´erisation (´equivalente)
`
A pr´esent, soient f1, . . . , fdmdes fonctions diff´erentiables d´efinies sur un voisinage Wd’un
point x0de Rd; on suppose que f1(x0) = · · · =fdm(x0) (c’est accessoire) et que que les
diff´erentielles (dfi)x0(1 idm) sont lin´eairement ind´ependantes (c’est essentiel). Alors
l’ensemble Mdes solutions du syst`eme () ci-dessus est une sous-vari´et´e en x0.
En effet, par le th´eor`eme de la base incompl`ete, il existe des formes lin´eaires u1, . . . , umsur
Rdtelles que
((df1)x0,...,(dfdm)x0, u1, . . . , um)
soit une base du dual de Rd. Mais alors, les fonctions fdm+1 =u1, . . . , fn=umsont diff´eren-
tiables et ´egales `a leur diff´erentielle et la fonction f= (f1, . . . , fn) : WRdest une application
diff´erentiable dont la diff´erentielle en x0est inversible, donc un diff´eomorphisme local de Wsur
un voisinage de 0.
Espace tangent
On reprend les notations de l’un des paragraphes ci-dessus. L’espace tangent `a Men x0est
l’image de {0} × Rmpar l’inverse de la diff´erentielle de f, (dfx0)1. C’est aussi l’intersection des
formes lin´eaires :
Tx0M=
dm
\
i=1
ker(dfi)x0.
Remarquons que cet espace est ´egalement l’intersection des noyaux des diff´erentielles de
toutes les fonctions diff´erentiables nulles sur M.
1
Lignes de niveau d’une submersion (II-6.4)
Soit Wun ouvert de Rdet f:Re(eN) une application diff´erentiable. On suppose que
fest une submersion en un point x0de W, c’est-`a-dire que la diff´erentielle de fen x0est une
surjection de Rdsur Re(en particulier, de). Alors la ligne de niveau de f`a laquelle appartient
x0,
M=f1(f(x0)),
est une sous-vari´et´e en x0de dimension deet son espace tangent en x0est
Tx0M= ker df.
En effet, si on note f= (f1, . . . , fe) les composantes de f, les matrices des diff´erentielles
des (dfi)x0sont les lignes de la matrice jacobienne de dfx0. Puisque par hypoth`ese, la matrice
jacobienne est de rang e, ses elignes sont lin´eairement ind´ependantes. C’est termin´e !
Application `a SUn
On peut montrer que le groupe unitaire Un(C) est une sous-vari´et´e de Mn(C) en constatant
que c’est l’image r´eciproque de l’identit´e Inpar la submersion
f: GLn(C)→ Hn, f(g) = gg,
o`u Hnesigne l’espace des matrices hermitiennes. Voici la diff´erentielle de fen In: dfIn(H) =
H+H. C’est une surjection puisqu’une matrice hermitienne Aest l’image de A/2.
Pour SUn= UnSLn, on pense `a la fonction F= (f, det) : GLn→ Hn×C. Malheureuse-
ment, cette fonction n’est pas submersive. En effet, sa diff´erentielle est l’application
dFIn:Mn→ Hn×C, H 7→ (H+H,tr H).
Or la trace d’une matrice hermitienne est r´eelle donc les ´el´ements (A, iλ) avec A∈ Hnet λR
n’ont pas d’ant´ec´edent par dFIn. On va s’en tirer, au prix de renoncer `a un traitement global.
Comme le d´eterminant d’une matrice unitaire a pour module 1, il suffit, pour assurer qu’elle
appartient `a SUn, de v´erifier que l’argument du d´eterminant est nul. Mais l’argument n’est pas
d´efini sur C, d’o`u le besoin de se restreindre `a un voisinage de In.
On montre donc que SUnest une sous-vari´et´e en In. Puisque det In= 1, il existe un voisinage
Wde Insur lequel le d´eterminant ne prend aucune valeur dans R. Notons arg : C\R
]π, π[ la d´etermination principale de l’argument. C’est la partie imaginaire de la r´eciproque de
l’exponentielle exp : ]0,+[ + i]π, π[C\R, donc arg est une fonction diff´erentiable et sa
diff´erentielle en 1 est :
hC,d arg1(h) = (d=exp1)1(h) = (d=)0[(d exp)0]1(h) = =(h).
Par composition, il vient :
H∈ Mn(C),d(arg det)In(H) = (d arg)1(d det)In(H) = =tr H.
Comme remarqu´e pr´ec´edemment, SUnWest l’image r´eciproque de (In,0) par l’application :
G:W→ Hn×R, g 7→ (gg, arg det g),
dont la diff´erentielle est :
dGIn(H)=(H+H, =tr H).
2
Pour (A, λ)∈ Hn×R, on a d’´evidence :
A=B+B, λ ==tr B, o`u B=1
2A+
nIn.
Ceci montre que Gest une submersion en In, d’o`u SUnest une sous-vari´et´e en In.
`
A pr´esent, soit gSUn. La translation par g,
Lg: GLnGLn, h 7→ gh
est un diff´eomorphisme et SUnest une sous-vari´et´e en In, donc Lg(SUn) est une sous-vari´et´e en
Lg(In) = g.
2Apart´e : sous-groupes `a un param`etre
Soit Gun sous-groupe ferm´e de GLn(K). On appelle sous-groupe `a un param`etre de Gun
morphisme continu de Rdans G.
Proposition. Soit ϕ:RGLn(K)un morphisme continu. Il existe une matrice X∈ Mn(K)
telle que
tR, ϕ(t) = exp(tX).
D´
emonstration. Montrons tout d’abord qu’un morphisme continu est automatiquement
diff´erentiable, ce qui en soi ne laisse pas de surprendre. On a, pour tout (s, t)R2:
ϕ(s+t) = ϕ(s)ϕ(t).
Par continuit´e de ϕ, on peut int´egrer cette relation : pour a > 0, on a :
sR,Zs+a
s
ϕ(u) du=Za
0
ϕ(s+t) dt=Za
0
ϕ(s)ϕ(t) dt=ϕ(s)Za
0
ϕ.
La fonction dans le membre de gauche est d´erivable. Il suffit donc de montrer que Ra
0ϕest
inversible pour aassez petit.
Fixons une norme sur l’espace des matrices. Il existe une boule centr´ee en Inet contenue
dans GLn(K). Pour aassez petit et pour t[0, a], ϕ(t) appartient `a cette boule ; a fortiori, la
valeur moyenne de ϕsur [0, a],
1
aZa
0
ϕ(t) dt,
appartient `a cette boule (convexit´e si on veut), donc Ra
0ϕest inversible.
D´erivons la relation de morphisme par rapport `a set prenons s= 0 :
tR, ϕ0(t) = ϕ0(0)ϕ(t).
On sait que l’unique solution de cette ´equation diff´erentielle qui prend la valeur Inen t= 0
est : ϕ(t) = exp tX, o`u X=ϕ0(0).
3
3Espace tangent en l’identit´e `a un groupe de Lie
Dans ce texte, on appelle groupe de Lie un sous-groupe de GLn(K) qui est aussi une sous-
vari´et´e de Mn(K). Soit Gun groupe de Lie dans GLn(K).
Remarque. Un th´eor`eme dˆu `a Cartan prouve que tout sous-groupe ferm´e est automatiquement
une sous-vari´et´e (une condition topologique implique une propri´et´e diff´erentielle, comme dans le
paragraphe pr´ec´edent). Cependant, on n’utilisera pas ce th´eor`eme : sa preuve est peu ´eclairante
et il est assez facile de montrer que les groupes classiques sont des sous-vari´et´es.
On note e=Inle neutre de GLn. Par d´efinition, l’espace tangent `a Gen eest l’espace
engendr´e par les vecteurs tangents en e`a une courbe C1trac´ee dans Get contenant e:
TeG={γ0(0), γ : ]ε, ε[G, C1, γ(0) = e}.
Proposition. Pour Gun groupe de Lie dans GLn(K)et e=In, on a :
TeG={X∈ Mn(K),tR,exp(tX)G}.
D´
emonstration. Soit gl’ensemble des Xtels que le sous-groupe `a un param`etre {exp tX}
soit contenu dans G. Comme γ(t) = exp tX est une courbe satisfaisant `a γ(0) = e, il est clair
que pour Xg, on a : X=γ0(0) TeG.
Inversement, soit XTeG. On fixe une courbe γ: ]ε, ε[Gde classe C1, d´efinie sur un
voisinage de 0, telle que γ(0) = eet γ0(0) = X.
On sait que l’exponentielle exp : Mn(K)GLn(K) a pour diff´erentielle Id en 0, donc c’est
un diff´eomorphisme d’un voisinage Ω de 0 dans Mn(K) vers un voisinage Ω0de edans GLn(K).
Notons log : Ω0Ω le diff´eomorphisme r´eciproque. Pour msup´erieur `a m0convenable, γ(1/m)
appartient `a Ω0, ce qui donne un sens `a Xm= log γ(1/m). Noter que exp Xm=γ(1/m)G.
La suite (Xm/||Xm||)mm0prend ses valeurs dans la sph`ere unit´e, qui est compacte. Quitte
`a extraire une sous-suite, on peut donc supposer qu’elle converge.
Soit alors tR. Pour mm0, ´ecrivons
t
||Xm|| =λm+µm,o`u λmZet µm[0,1[ .
Comme la suite (exp Xm)=(γ(1/m)) converge vers e, la suite (Xm) tend vers 0. Comme
(µm) born´ee, la suite (exp µmXm) converge vers e. Par suite, les suites (exp(tXm/||Xm||)) et
(exp(λmXm)) convergent vers la mˆeme limite.
Or, pour tout m, exp(λmXm) = exp(Xm)λmest un ´el´ement de G, qui est ferm´e. Par suite,
la limite appartient aussi `a G. Ainsi,
lim
m+exp tXm
||Xm|| G.
D’autre part, pour massez grand, on constate que
Xm=1
md log γ0(0) + o1
m=1
mX+o1
m.
On en d´eduit que la limite ci-dessus est :
lim
m+exp tXm
||Xm|| = exp tX
||X||,
d’o`u l’on d´eduit que pour tout tR, exp(tX/||X||) appartient `a G, puis que Xappartient `a g.
4
4Noyau de la diff´erentielle d’un morphisme
Proposition. Soit ϕ:GHun morphisme de classe C1entre groupes de Lie. Soit ele neutre
de Get dϕela diff´erentielle de ϕen e. Alors :
Xker dϕe,tR,exp tX ker ϕ.
D´
emonstration. La diff´erentielle de ϕen eest une application lin´eaire de TeGdans TeH.
Soit Xker dϕe. D’apr`es la caract´erisation de l’espace tangent ci-dessus, on a : exp tX G
pour tout tr´eel. On d´efinit donc un sous-groupe `a un param`etre par
χ:RH, t 7→ ϕ(exp tX).
D’apr`es la caract´erisation des sous-groupes `a un param`etre, on a :
tR, χ(t) = exp 0(0),o`u χ0(0) = dϕe(X).
`
A pr´esent, si Xker dϕe, alors χest constante, d’o`u exp(tX) appartient au noyau de ϕ.
Corollaire. Soit ϕ:GHun morphisme de classe C1entre groupes de Lie. Si le noyau de ϕ
est discret, alors la diff´erentielle de ϕen le neutre eest injective. Si, de plus, les espaces tangents
`a Get Hen leurs neutres ont la mˆeme dimension, alors ϕest un diff´eomorphisme local. Si, de
plus, Hest connexe, alors ϕest surjectif.
D´
emonstration. Supposons que le noyau de ϕest discret. Pour Xdans le noyau de dϕe, la
proposition montre que le sous-groupe `a un param`etre χ:t7→ exp(tX) prend ses valeurs dans
ker ϕ. Comme le neutre est isol´e dans le noyau, par connexit´e, χest constant. Il en r´esulte que
dϕe(X) = χ0(0) = 0, ce qui prouve l’injectivit´e de la diff´erentielle.
Lorsque les dimensions des espaces tangents au d´epart et `a l’arriv´ee sont ´egales, la diff´erentielle
est n´ecessairement surjective. Par le th´eor`eme d’inversion locale, ϕest un diff´eomorphisme local
sur un voisinage du neutre de G.
Il en r´esulte que l’image de ϕa un int´erieur non vide. Mais un tel sous-groupe est automati-
quement ouvert (utiliser les translations !), si bien que l’image de ϕest ouverte dans H. Elle est
donc automatiquement ferm´ee. En tenant compte de ce que Hest connexe, il en r´esulte que ϕ
est surjectif.
5
1 / 5 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !