Le théâtre et l`école Histoire et perspectives d`une relation

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Le théâtre et l’école
Histoire et perspectives d’une relation passionnée
ANRAT
Notes de lecture par Gaëlle CABAU
Introduction : Fragments d’autrefois, Jacques Lassalle
- Première représentation : Le voyage de Monsieur Perrichon
- Je découvris les pouvoir de l’artifice, souvent le plus court chemin vers la
saisie du vrai
- On n’en a jamais fini avec son enfance. On n’en oublie jamais tout à fait les
rêves et les premières complicités.
- Le théâtre à l’école apprend pour la vie à rire de soi. Il entraîne à prêter à
l’autre une attention, indulgente à ses travers, et prompte à le distraire, s’il
faut de ses secrets, de ses faiblesses.
- L’école passait par le théâtre qui ramenait à l’école. Tout convergeait en
harmonie.
- Adolescence : la vie, chaque matin, recommençait, aimable et identique à ce
qu’elle avait été la veille.
- D’incessantes mues imposaient à ma voix des couacs de fausset, et à mon
corps, frêle échalas, de brusque et imprévisibles poussées.
- Le théâtre que je méprisais si fort dans la salle me permettait-il sur scène
d’exprimer quelque chose de mes révoltes et de mes dissonances.
- Dans les Fourberies : Pour qui jouez-vous ? Pour les spectateurs ou pour le
vieux Géronte ? Pour les spectateurs. Vous ne pouvez jouer pour les
spectateurs que si vous jouez d’abord la situation réelle avec Géronte.
Trouvez-vous une banquette, étendez-vous dessus, et simulez tranquillement
votre dialogue avec les soudards. (Conseils de Michel de à J. Lassalle)…
Cette marche bouleversait toutes mes idées reçues sur la nécessité de
surjouer, d’asservir la scène à la lettre du texte, et de séduire le public.
- Lire c’est percer les secrets du texte, c’est l’écrire une seconde fois.
- Pendant des mois plus rien ne compte que l’accomplissement du spectacle.
Le monde alentours se réalise, la pendule du temps s’arrête. Et puis, le
soir de la première, l’aventure qui avait confisqué nos jours et obsédé nos
trop courtes nuits s’estompe.
- Le théâtre se joue toujours, en définitive, entre veille et songe, dans une
autre vie.
- Il arrive parfois que le théâtre donne un sens à ce qui sans lui n’en avait
plus. C’est qu’avant d’être un auxiliaire d’enseignement, le théâtre est
souvent un aiguilleur de destin.
- On peut vraiment par le théâtre aborder tous les continents, libérer toutes
les paroles, forcer tous les verrous.
- Qu’elle l’ait voulu ou non c’est l’école qui m’a révélé le théâtre, et dans le
même temps m’a empêché de ne jamais tout à fait m’y abandonner.
- On attend sans doute la lébration des noces de l’art et de l’enseignement.
Réclame une interaction entre pratiques pédagogiques et pratiques
artistiques.
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- Double quête : celle d’un art partageable, loin des dogmes et des terroristes,
celle d’une pédagogie créatrice, qui met à la question plus qu’elle ne
sacralise.
Le théâtre et l’école : éléments pour une histoire, repères pour un avenir
(Philippe Mérieu)
Premier acte : entre l’école et le théâtre, il faut choisir…
- De Platon à Rousseau, le même rejet du théâtre
L’école est dédiée à la formation intellectuelle, l’art à la
formation affective, c’est à dire à la sensibilité.
Mythe de la caverne : théâtre d’ombre / résistance à la
séduction
Pour Platon, le théâtre est l’expression de la diversité et
de la singularité, alors que l’école doit permettre de
s’exhausser au-dessus de la singularité et de la diversité
pour accéder à des concepts qui sont des idées
générales.
L’art, conçu comme le lieu de l’artefact, va contre la
véritable éducation
Pourtant l’amphithéâtre et la classe sont précisément des
mises en scène ritualisées de l’accès au savoir rationnel
avec des objets symboliques.
Lieu de la frivolité, de la superficialité, de la tromperie /
lieu du sérieux et de la construction de la vérité.
Alain écrit : « A l’école on n’applaudit pas »
Mais paradoxalement l’école se théâtralise afin d’exalter
la raison qui la fonde.
- Le théâtre réhabilité par les marginaux
Les jésuites découvrent les vertus pédagogiques du
théâtre : la formation de la personne passe par l’exercice
spirituel : capacité à faire le vide en soi, de se rendre
disponible à l’altérité, de faire taire les passions pour
laisser venir l’autre.
Deuxième acte : quand le théâtre entre à l’école ce n’est pas si simple
- Le théâtre comme formation de l’intériorité
moyen d’accéder à la densité du geste et du mot, à
l’intentionnalité du comportement. La pratique du
théâtre permet de lutter contre l’insignifiance dans la
construction de son rapport aux autres.
Accéder à l’expression de l’humain
Condorcet : l’accès à la pensée rationnelle elle-même
suppose la construction de l’intentionnalité réfléchie, de
la maîtrise de soi
Utilise l’artefact pour échapper à la dispersion.
N’est pas fuite dans l’illusion mais retour vers une réalité
fondatrice.
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La théâtralité ne nous éloigne de la vie que pour nous
permettre d’y revenir en ayant fait l’expérience de son
intensité dramatique.
- Entre »théâtre-formation » et « théâtre-production »
moyen de mobiliser les élèves, sorte d’attracteur
ou pratique centrée sur la formation de la personne
Problème : tentation d’imiter le théâtre professionnel et
risque de devenir plus une activité d’exclusion que
d’intégration
Problème : frustration liée à la tendance à juger de la
qualité de leur pédagogie sur la qualité de leur
production.
Ne doit pas devenir une gratification narcissique dans
une parodie de théâtre professionnel.
Troisième acte : l’école et le théâtre : la réconciliation
- Fonder l’entrée du théâtre à l’école par les fondamentaux
- Construire un espace symbolique :
au collège, bien souvent, espace chaotique. Or le théâtre
identifie les places et les rôles par son organisation de
l’espace.
Consiste à débrouiller le chaos relationnel et à restaurer
un univers où il existe des places : celui qui écoute, celui
qui parle…
Découverte également de la fonction du symbole :
passage assumé avec le TNP de Vilar au cor
symbolique : le théâtre construit un espace le geste a
du sens
Introduit des invariants, fait émerger des lignes de
forces, permet de se gager de la précipitation du
quotidien.
- Faire vivre la parole du texte
travail sur la voix qui fonde le rapport du texte à la
parole.
Il s’agit dans le théâtre d’habiter une parole, de la rendre
vivante, contemporaine.
Mais aussi faire entendre un silence, une sitation /
société qui a toujours peur du vide / parole qui parfois
se casse, s’interrompt
- Instituer un collectif permettant « la focalisation »
Le troisième des fondamentaux, c’est le partage/ je
regarde seul la télévision
Faire vivre la voix dans un espace collectif
Institution d’un collectif dans lequel les spectateurs
rencontrent ensemble un certain nombre d’évènements
Devant la télévision, on peut faire autre chose :
téléphoner, manger…
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On met entre parenthèses toute une série d’autres
activités et, pendant ce temps, on se consacre à une
activité commune que l’on vit de manière collective.
Focalisation essentielle pour permettre à chacun de se
mettre vraiment « en jeu » donc aussi « en je » dans sa
propre vie
- Travailler avec les partenaires pour accéder aux fondamentaux de la
théâtralité
le théâtre est un art à part entière et l’école ne peut pas
singer cet art
ce qui est produit n’est pas préparé par des exercices
mais constitue l’exercice mis en scène dans le temps et
l’espace.
- un point crucial : la formation des maîtres
nous devons donc travailler en formation avec des
comédiens pour apprendre à rendre la parole et les
textes vivants
Aller voir des spectacles de théâtre dans les conditions
réelles de représentation, avec ses zones d’ombre et ses
difficultés
La culture ne relève pas du seul domaine des morts :
présence d’auteurs vivants, rencontre avec une œuvre en
gestation
Constitutivement, l’institution scolaire est conservatrice :
vibration de nouvelles façons de dires et de représenter.
L’école a besoin de transmettre une histoire, comme le
théâtre a besoin de réinventer son présent.
Chercher ce qui rend les textes présents pour nous
aujourd’hui.
Nous aider à sortir de la solitude pour entrer dans
l’humanité.
La transmission ce n’est pas une opération d’inculcation,
ni de contrainte, mais bien de capacité à faire entendre
ce en quoi un objet culturel concerne et interpelle tout
homme.
La littérature nous parle de quelqu’un d’autre et
pourtant nous parle de nous au plus près de ce qui nous
constitue
Le travail de l’enseignant consiste donc à trouver des
textes, contemporains ou non, qui permettent à l’élève de
sortir de la toute-puissance, de l’immédiateté, de la
solitude superbe et violente, de l’identification grégaire.
Eviter l’opposition stérile entre le contemporain et le
patrimonial, pour se demander quels objets culturels
peuvent être offerts à des élèves qui fassent sens pour
eux.
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Théâtre et Ecole : les fruits de la passion (Pierre-Etienne Heymann)
- Situation au début des années cinquante
Peu de chance de rencontrer un théâtre de qualité
Manque de formation artistique
Chancerel expérimente le jeu dramatique comme l’un des
vecteurs d’une pédagogie nouvelle
- première décentralisation : 1950-1968
modification du paysage avec apparition des TNP
but : démocratiser la culture en la diffusant auprès d’un
public géographiquement et socialement nouveau
les collaborateurs du spectacle ne franchissent
cependant que très rarement la porte des établissements
l’engagement des enseignants est fortifié par la nature du
répertoire des théâtres populaires : œuvres classiques
Conviction qu’en amenant les enfants à fréquenter le
théâtre, c’est le public de demain qui se constitue. Mais
la crainte existe que les élèves ne deviennent la vache à
lait du théâtre
Pas de formation aux techniques théâtrales pour les
professeurs.
André Gisselbrecht pour qui l’école est « le seul
instrument qui permettre, en l’absence même d’une
révolution sociale, de corriger les inégalités culturelles. »
Problème car les enseignants invitent les hommes de
théâtre à faire la classe.
Mise en place d’un nouveau conformisme : pièces
classiques dans des mises en scènes traditionnelles :
répertoire de célébration culturelle
Planchon lance le slogan : « le pouvoir aux créateurs »
- Le choc de mai 1968
Francis Jeanson lance la notion de « non-public »
Distance : difficulté d’accessibilité, de compréhension, de
lisibilité, de sensibilité… du public par rapport aux
œuvres
Les comédiens prennent conscience de cet écart entre
l’art qu’ils servent et les préoccupations de leurs
interlocuteurs
Le non public le plus immédiatement disponible est la
population scolaire.
Enseignants qui ont perdu confiance dans la dagogie
traditionnelle : « j’ai des problèmes avec ma classe, est-ce
que vous pourriez m’envoyer un comédien ? »
Problème des moyens
- L’ère de l’action culturelle : 1970-1981
promouvoir ce que Bernard Dort a appelé un « théâtre
d’éveil de la conscience critique »
De nombreux acteurs n’acceptent plus d’être des
interprètes : apparaître dans un personnage, comme un
autre, leur semble de l’histrionisme.
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