16 | Mercredi 6 juin 2012 | Le Quotidien Jurassien
MAGAZINE santé } Cette page Magazine santé
est réalisée en collaboration
avec l’Hôpital du Jura et le
Service cantonal de la santé
publique.
Diagnostiquer et prévenir les parasites
consommer des aliments frais,
biens conservés, des viandes et
poissons plutôt cuits en cas de
doute, des fruits et légumes rin-
cés, permet déjà d’éliminer une
bonne partie du risque d’infec-
tion parasitaire. «Pour les person-
nes qui voyagent, ces règles de
base et de bon sens sont primor-
diales. Selon la destination, elles
doivent être accompagnées par
d’autres gestes préventifs. Com-
me se vêtir et dormir sous mous-
tiquaire dans les zones infestées
par la malaria, prendre un médi-
cament antipaludique (avant,
pendant et après le voyage) ou en-
core éviter le contact avec des
eaux stagnantes.» PF
ou de les affaiblir. Lorsqu’un pa-
rasite ne peut être délogé, le por-
teur reste infecté et suit un traite-
ment lui permettant de vivre avec
le parasite.»
Le meilleur bouclier:
la prévention
Le plus difficile en cas d’infec-
tion parasitaire, c’est tout simple-
ment d’y penser. «Lorsqu’un pa-
tient se plaint de douleurs abdo-
minales ou de diarrhées, on ne
pense pas tout de suite qu’il peut
avoir des amibes», note le Dr
Schubarth.
Pour éviter ces hôtes ingrats, la
prévention reste la meilleure des
armes. Bien se laver les mains,
dies tropicales prend éventuelle-
ment le relais», explique le Dr Pe-
ter Schubarth. Reconnaissable
par sa forme, son lieu de vie, le
parasite, une fois repéré, doit être
analysé. Les informations livrées
par le corps peuvent aussi trahir
une attaque parasitaire: «La pré-
sence d’anticorps ou de certains
sous-groupes de globules blancs
chez un porteur sont souvent des
signes d’infection», précise le mé-
decin.
Une fois le parasite diagnosti-
qué, un protocole de soins est mis
en place. «Pour l’homme, il
n’existe aucun vaccin contre les
importuns. Mais des médica-
ments permettent de les éliminer
La présence d’un parasite n’est
pas toujours facile à déceler. Si
certains provoquent des effets se-
condaires visibles et assez facile-
ment détectables, d’autres agis-
sent discrètement et sont plus
pernicieux. L’analyse des selles au
microscope, la sérologie (analyse
de sang), l’imagerie et autres exa-
mens plus poussés si nécessaires,
permettent de repérer les parasi-
tes dans l’organe ou la partie du
corps infectée. «Ces examens
peuvent être faits dans presque
tous les hôpitaux. Si on ne trouve
rien, on peut pousser plus avant
les analyses par d’autres tests plus
spécifiques. Dans ces cas com-
plexes, un spécialiste des mala-
Je suis l’hôte ingrat de votre corps
V
ALLIANCE ET DÉPENDANCE Parasite, ce mot provoque toujours une petite grimace de dégoût.
Mais qui sont vraiment ces pique-assiettes qui se servent de nous pour se développer? Explications
avec le Dr Peter Schubarth, médecin-chef spécialisé en infectiologie et médecine tropicale à l’Hôpital du Jura
De gauche à droite et de haut en bas: amibes vues au microscope, ascaris, tête de tænia et tænia sont des parasites fréquents de l’intestin
humain. DR
– Un conseil ?
– Une bonne hygiène de soi, se la-
ver régulièrement les mains, au
moins avant de manger et en sortant
des toilettes, rincer les fruits et légu-
mes avant leur consommation, la vi-
gilance en général à l’égard des ali-
ments consommés; ces attitudes
préventives réduisent considérable-
ment le risque parasitaire pour
l’homme.
PEGGY FREY
posant pas de médicament pour l’éli-
miner, on peut toutefois calmer la
maladie ou procéder à une ablation
de la partie du foie infectée. En Suis-
se, on compte une trentaine de cas
annuels atteints de l’échinococcose.
Les poux des cheveux se transmet-
tent d’une tête à l’autre par contact.
Les morpions également se trans-
mettent par contact. Les poux du
corps, eux, vivent dans les habits et
font des excursions sur notre peau
uniquement pour se nourrir.
se, fréquent chez les jeunes enfants,
se contracte simplement en portant
ses mains sales à la bouche. La toxo-
plasmose se contracte surtout par le
biais du chat, l’hôte définitif préféré
du parasite. L’échinococcose se
transmet à l’homme par le biais de
fruits des bois consommés après
avoir été souillés par les excréments
d’un animal lui-même parasité (re-
nard et chien surtout). Ce parasite se
développe dans les cellules du foie
qu’il détruit très lentement. Ne dis-
serait presque sans fin, tant leur
nombre est important. Les plus fré-
quents sont une multitude de sortes
d’amibes, les ascaris et autres vers
parasitaires comme le tænia ou ver
solitaire, l’onchocerca responsable
de la cécité des rivières, le schistoso-
me coupable de la bilharziose. Plus
graves sont les cas de paludisme.
Connu aussi sous le nom de mala-
ria, ce parasite est transmis à l’hom-
me par le moustique qui en est le
vecteur. De là, il vit dans le sang, la
rate et le foie, provoque des crises de
fièvre aigüe, voire mortelle. En Suis-
se, le paludisme est la cause de deux
à trois décès par an. Disparu de nos
frontières, autrefois, ce parasite était
présent au Tessin ou dans le See-
land.
Dans la galerie des monstres, ou-
tre le tænia dont la longueur peut at-
teindre 10 m, on a aussi la filaire de
Médine qui peut mesurer deux mè-
tres et vit juste sous la peau.
– Outre ceux que l’ont peut rame-
ner d’un voyage, quels sont les para-
sites qu’on trouve en Suisse?
– L’oxyurose, un petit ver blanc
présent dans les selles des enfants,
est un parasite assez fréquent. Sans
gravité, il provoque juste des déman-
geaisons anales et peut être traité fa-
cilement. Pour ce qui est de la toxo-
plasmose, sans grande conséquence
pour les adultes, mais gravissime
pour le fœtus de la femme enceinte,
on estime qu’environ 1/3 de la popu-
lation mondiale est atteinte. Plus
grave, l’échinococcose se contracte
en consommant des fruits des bois
poussant près du sol et souillés par
les excréments d’un animal parasité.
Pour ce qui est des ectoparasites,
les poux et morpions sont des hôtes
indésirables connus et communs
sous nos latitudes. Très contagieuse,
la galle est beaucoup plus rare. Sou-
vent ramenée d’ailleurs, elle se
transmet par le simple touché.
Contrairement aux légendes ur-
baines, ici il n’y a pas d’insectes qui
pondent sous notre peau.
– Comment contracte-t-on ces
écornifleurs peu désirables?
– On les attrape essentiellement
par la nourriture. Beaucoup de ces
parasites se trouvent sur des fruits et
légumes mal lavés, ou des viandes
mal conservées. Le verre de l’oxyuro-
LQJ:
– Quelle est la définition médi-
cale d’un parasite?
Dr Peter Schubarth: – Un parasite est
un organisme animal ou végétal qui vit
aux dépens d’un autre être vivant, ap-
pelé l’hôte. Pour se développer, le para-
site se sert de son hôte en lui portant
préjudice. Mais sans le détruire afin de
ne pas mettre sa propre existence en
danger.
Microscopiques, les parasites peu-
vent être de forme unicellulaire (ex.
amibes). Dans ce cas, on les appelle
aussi protozoaires. Ils peuvent se déve-
lopper dans le sang ou dans les cellules
de certains organes. De taille générale-
ment plus importantes, la famille des
parasites pluricellulaires, appelés aussi
métazoaires, sont en fait des vers. Ils
peuvent aller du vermisseau microsco-
pique, à un ténia de plusieurs mètres
de long niché dans le gros intestin. Ils
se développent dans le sang, le foie, le
cerveau, les bronches, les reins, les vis-
cères, etc. Selon son mode de dévelop-
pement et ses besoins, chaque parasite
a ses préférences pour se localiser dans
un endroit du corps. Ces parasites in-
ternes au corps sont des endoparasites.
Ils se distinguent des ectoparasites qui
vivent sur la surface corporelle ou juste
sous la peau, comme les poux ou la gal-
le par exemple.
– Sommes-nous exposés à ces im-
portuns en Suisse?
– Si les parasites vétérinaires sont as-
sez nombreux chez les animaux, ceux
qui touchent l’humain sont rares en
Suisse. L’hygiène et les règlements sa-
nitaires stricts les ont presque tous fait
disparaitre. Le conditionnement des
aliments, le respect de la chaîne du
froid, l’assèchement de nombreuses
zones marécageuses, ont aussi contri-
bué à leur élimination. C’est l’assèche-
ment des grands marais au XIXe siècle
qui a par exemple fait disparaître la
malaria, en Suisse, en diminuant les
populations de moustiques. L’amélio-
ration des conditions de travail lors du
creusage de tunnels a éliminé l’anky-
lostomose, qui se développait dans les
boues, encore lors de la construction
du tunnel ferroviaire du Gothard.
– Quels sont les principaux parasites
que l’on peut diagnostiquer ici?
– Le plus souvent ceux que l’on a ra-
mené d’ailleurs, contractés à l’occasion
d’un voyage au long cours dans des zo-
nes plutôt exotiques. Les nommer tous
Les parasites sont différents des bactéries, vi-
rus, prions et autres. «Ils appartiennent à un
autre groupe, note le Dr Peter Schubarth. Sou-
vent, les gens simplifient la chose et disent
qu’ils ont attrapé un microbe, un terme vaste
qui ne veut pas dire grand-chose pour un spé-
cialiste.»
Si certains importuns se montrent nocifs pour
l’être humain, d’autres ne lui font rien et cer-
tains sont même vitaux. «L’homme est plein
de bactéries et de virus, surtout dans son in-
testin. Il s’en accommode très bien et certains
lui sont même indispensables pour être en
bonne santé.» Pour les parasites, «tout est
une question de dosage. En cas de forte infec-
tion, ils peuvent devenir très nocifs pour la
santé, ou ne présenter que peu de danger si
leur présence est faible, car le corps dispose de
certains mécanismes de défense, si l’attaque
n’est pas massive.» PF
FTout n’est pas parasite