La nage bactérienne est rendue
possible grâce aux mouvements
giratoires d'un ou plusieurs flagelles
localisés à un pôle cellulaire. La
vitesse atteinte est considérable
pour une cellule de cette taille!: 50
μm/s, soit 18 cm/h, pour la bactérie
Pseudomonas aeruginosa, ce qui lui
permet de balayer des surfaces
importantes à la recherche
d'opportunités nutritives ou
infectieuses. Il est essentiel de
caractériser les paramètres
physiques et biologiques régissant
la nage bactérienne au voisinage de
surfaces abiotiques ou biologiques
afin de comprendre les étapes
préalables à la colonisation de
l'organisme.
La nage bactérienne est modifiée à proximité des
surfaces cellulaires
Le flagelle des bactéries est un long appendice ancré
dans la membrane bactérienne. Des protéines
motrices, localisées à sa base, induisent sa rotation!;
les deux sens de rotation du flagelle sont possibles,
permettant à la bactérie d’avancer (propulsion) ou de
reculer (traction). La nage près de surfaces induit un
moment de force sur le corps de la bactérie qui
provoque la courbure de la trajectoire. Ceci permet à la
bactérie d'employer plusieurs modes de nage.
L'équipe Pathogenèse Bactérienne et Réponses
Cellulaires du laboratoire Biologie du Cancer et de
l’Infection, en collaboration avec une équipe de
biophysiciens de l'ENS-Lyon (dirigée par Laurence
Lemelle ; laboratoire Joliot-Curie), a mis en évidence
trois types de trajectoires chez la bactérie P.
aeruginosa lorsqu’elle nage à proximité de surfaces.
Les chercheurs ont montré que ces trajectoires sont
caractérisées par des vitesses, des courbures, des
modes de motilité (linéaire, courbe ou des pauses) et
des fréquences de transition entre ces différents
modes qui sont spécifiques aux trois types de
trajectoires. Les bactéries utilisent ces trois trajectoires
à proximité de surface abiotique (verre) ou cellulaire
(cellules confluentes), mais les trajectoires lentes sont
favorisées à proximité des cellules. Les chercheurs ont
montré que cette préférence est due à la présence
d'autres filaments bactériens appelés pili. Ces
filaments sont capables d'interagir avec les surfaces
solides de façon non spécifique ou grâce à des
récepteurs membranaires. Lorsque les bactéries sont
dépourvues de pili, la nage lente n'est plus favorisée,
ce qui suggère une interaction transitoire entre pili et
récepteurs cellulaires."
P. aeruginosa emploie des types de trajectoire
différents pour balayer finement ou au contraire pour
parcourir rapidement de grandes distances. Ce choix
est influencé par le type de surface rencontré. Les
bactéries dépourvues de flagelle s’avèrent être
beaucoup moins infectieuses dans différents modèles
d'infection in vivo.%
Des leurres chimiotactiques pourraient être utilisés
pour brouiller les informations, empêcher la nage
directionnelle et potentiellement limiter le potentiel
infectieux des bactéries pathogènes."
Référence!
Golovkine G, Lemelle L, Burny C, Vaillant C, Palierne JF,
Place C and Huber P. Host cell surfaces induce a type IV pili-
dependent alteration of bacterial swimming. Scientific
Reports, 2016
Trajectoires bactériennes sur cellules. Enregistrement pendant 10 s de
bactéries-GFP à proximité de cellules confluentes (noyaux en bleu).
Contact : Philippe Huber !
BCI!
Laboratoire Biologie du Cancer et de l'Infection!
UMR_S 1036 - CEA - Inserm - UGA
Caractériser le protéo-virulome du staphylocoque doré
Le staphylocoque doré est une
bactérie commensale ou pathogène,
pouvant provoquer des maladies de
sévérité variable chez L’Homme. Lors
de la prise en charge d’une infection
staphylococcique, la souche
bactérienne est isolée à partir de
prélèvements biologiques, puis
identifiée. Un antibiogramme est alors
réalisé, et les gènes codant pour
certains facteurs de virulence sont
recherchés. Cependant, dans
certaines situations médicales, la
mise en évidence des gènes de
virulence n’est parfois pas possible
ou reste insuffisante. C’est le cas
notamment des toxi-infections
staphylococciques (toxi-infections
alimentaires, choc toxique) où la
maladie résulte de l’action de toxines
alors que la souche bactérienne peut
ne plus être présente dans
l’échantillon analysé. Dans ce type de
pathologie, la mise en évidence
directe des toxines, et non des gènes
qui codent ces toxines, est
nécessaire.
Contact : Virginie Brun !
BGE !
Laboratoire Biologie à Grande Échelle !
UMR_S 1036 - CEA - Inserm - UGA
Références!
[1] Adrait et al. Journal of Proteomics, 2012!
[2] Picard et al. Journal of Mass Spectrometry, 2012!
[3] Dupré et al. Analytical Chemistry, 2015!
[4] Gilquin B, Jaquinod M, Louwagie M, Kieffer-Jaquinod S,
Kraut A, Ferro M, Becher F and Brun V. A proteomics assay to
detect 8 CBRN-relevant toxins in food. Proteomics, 2016
Des méthodes basées sur l’utilisation d’anticorps
existent pour détecter certaines toxines
staphylococciques. Cependant, ces toxines sont
nombreuses et parfois très proches sur le plan
structural. C’est pour cela que les chercheurs de
l’équipe Étude de la Dynamique des Protéomes du
laboratoire Biologie à Grande Échelle ont recours à
l’analyse par spectrométrie de masse couplée à la
chromatographie liquide (LC-MS) pour leur détection.
Cette approche présente une excellente spécificité qui
permet de discriminer des toxines aux séquences en
acides aminés très proches, et surtout une capacité de
multiplexage (analyse simultanée de plusieurs toxines)
qui autorise la caractérisation du "protéo-virulome"
bactérien en une seule et unique analyse."
L’exploration par LC-MS du "protéo-virulome" permet
à cette équipe d’améliorer la connaissance de la
virulence du staphylocoque doré![1-4]. Ainsi, en
collaboration avec le centre national de référence des
staphylocoques, les chercheurs étudient la régulation
de l’expression de ces toxines dans certaines
pathologies comme le choc toxique. Dans le domaine
de la sécurité alimentaire, les efforts de développement
de ces chercheurs ont abouti à une méthode
permettant de cribler les 8 entérotoxines les plus
couramment impliquées dans les épisodes de toxi-
infections alimentaires collectives![2]."
Enfin, dans le domaine des risques nucléaires,
radiologiques, biologiques et chimiques, cette équipe a
récemment développé une méthode d’analyse sensible
et multiplexée permettant de détecter dans une
matrice alimentaire 8 toxines de la menace NRBC!: 3
entérotoxines staphylococciques, les shigatoxines
STX1 et STX2 d’Escherichia coli entérohémorragique,
la toxine epsilon de Clostridium perfringens, la toxine
CDT de Campylobacter jejuni et la ricine."
Cette méthode peut être utilisée pour détecter la
contamination malveillante de produits alimentaires par
des toxines bactériennes ; ouvre également de
nouvelles perspectives dans le domaine de la sécurité
alimentaire![4].