Infections Urinaires de l`Enfant

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Examen Classant National / Programme Officiel (2013)
Question N° 157. Infections urinaires de lʼenfant
- Interpréter les résultats des bandelettes urinaires et des examens
cytobactériologiques des urines.
- Diagnostiquer et traiter une cystite aiguë.
- Connaître la conduite à tenir face à une cystite récidivante.
- Diagnostiquer et traiter une pyélonéphrite aiguë, identifier les situations
nécessitant une hospitalisation.
- Diagnostiquer et traiter une prostatite aiguë, identifier les situations
nécessitant une hospitalisation.
- Expliquer la place de lʼantibiothérapie chez un patient porteur dʼune sonde
urinaire.
Pr Pierre-Yves MURE (Chirurgie Pédiatrique, LYON), Dr Justine BACCHETTA
(Néphrologie Pédiatrique, Lyon) et Pr Yves GILLET (Urgences Pédiatriques, Lyon)
Pr Marie-Laurence POLI-MEROL (Chirurgie Pédiatrique, Reims)
Introduction Les infections urinaires (IU) sont les infections bactériennes les plus fréquentes en pédiatrie (1 % des enfants de moins de 2 ans, avec une prédominance masculine durant les premiers mois de vie et une prédominance féminine ensuite). La colonisation microbienne suit le chemin inverse de l’écoulement normal des urines. 1-­‐ Diagnostic On distingue : •
Les cystites aiguës, souvent bactériennes et parfois virales, sont non (ou peu) fébriles. Elles s’accompagnent d’urines troubles, malodorantes et de signes fonctionnels urinaires volontiers intenses. 1
•
les pyélonéphrites aiguës (PNA), bactériennes s’accompagnent de signes généraux et de douleurs lombaires, sans signes vésicaux francs. Chez les nourrissons de moins de trois mois, la PNA est une infection sévère, notamment en cas d’uropathie malformative sous-­‐jacente. Dans cette classe d’âge, un syndrome infectieux grave (méningite associée possible), avec troubles digestifs, déshydratation, perturbations ioniques, ictère et parfois insuffisance rénale, est souvent associé. Le diagnostic d’IU est porté à la fois sur des éléments cliniques et biologiques. La positivité de la bandelette réactive confirme théoriquement le diagnostic ; la valeur prédictive positive de « leucocytes et nitrites positifs» est de 70 % et la valeur prédictive négative est proche de 100 %. L’examen cytobactériologique urinaire (ECBU) initial est fondamental pour le diagnostic (leucocyturie > 10 000 / ml, un seul germe > 100 000 / ml sur urines non centrifugées) et l’adaptation thérapeutique. Le recueil des urines doit être soigneusement réalisé après désinfection locale. Le prélèvement est fait à mi jet chez les enfants continents. Pour les plus petits, un collecteur est mis en place pendant 30 minutes au maximum. En cas de doute ou de nécessité de réponse rapide, un sondage ou exceptionnellement un cathétérisme sus-­‐pubien est parfois nécessaire. L’ECBU de contrôle en cours de traitement et/ou en fin de traitement n’est justifié que s’il existe des arguments pour une souche bactérienne résistante. 2-­‐ Bactériologie des IU pédiatriques en France L’évolution des profils de résistance des bactéries impliquées dans les PNA doit être prise en compte pour l’adaptation des traitements : 60 à 90 % des IU de l’enfant sont liées à Escherichia Coli, les autres germes les plus couramment en cause étant Proteus mirabilis et Klebsiella spp. Le niveau de résistance des Escherichia coli en France est particulièrement élevé (50 % de résistance à la pénicilline A, 20 % de résistance au cotrimoxazole, 5 % de souches résistantes aux céphalosporines de troisième génération utilisées par voie injectable). Par ailleurs, et de manière inquiétante, les souches d’E Coli multi-­‐résistantes communautaires (bactéries productrices de bêta-­‐lactamases à spectre étendu ou BLSE) augmentent en France chez l’enfant tout en restant cependant mineures dans l’épidémiologie globale des IU pédiatriques en 2014 (moins de 10%). Un facteur favorisant de ces souches BSLE semble être l’utilisation des céphalosporines (et notamment les céphalosporines orales), ce qui incite à la plus grande prudence lors de leur prescription. Il convient de rappeler que la sensibilité au céfixime n’est d’ailleurs pas strictement identique aux céphalosporines injectables, d’où les recommandations de tester systématiquement cette molécule [1]. Enfin, l’amoxicilline et l’association amoxicilline-­‐acide clavulanique, même pour les bactéries sensibles à ces antibiotiques, 2
n’offrent pas, par voie orale, un facteur prédictif d’efficacité suffisante pour les IU de l’enfant, et il convient donc de ne pas les utiliser en première intention en cas d’IU fébrile. 3-­‐ Prise en charge thérapeutique : les recommandations de l’AFSSAPS 2007 Même si des publications récentes semblent montrer la non-­‐infériorité d’un traitement oral exclusif [2], les recommandations de l’AFSSAPS en 2007 sont toujours les référentiels opposables, proposant une conduite thérapeutique claire [1]. Le Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique (GPIP) a rediscuté des recommandations de l’AFSSAPS 2007 dans un communiqué de septembre 2014, prenant en compte la nouvelle écologie bactérienne des IU de l’enfant et l’augmentation de fréquence des souches BLSE. •
Pour les cystites aiguës, le traitement de première intention doit comporter une monothérapie par voie orale pour une durée de cinq jours. Deux antibiotiques étaient proposés par l’AFSSAPS en 2007 : le cotrimoxazole en priorité (sulfamethoxazole 30 mg/kg par jour et triméthoprime 6 mg/kg par jour en deux prises) ou le céfixime (8 mg/kg par jour en deux prises). Cette dernière molécule devrait être réservée aux cas de résistance, de contre-­‐indication ou d’intolérance au cotrimoxazole. En plus de ces deux alternatives thérapeutiques, le GPIP propose d’utiliser aussi l’association amoxicilline/acide clavulanique (80 mg/kg par jour, maximum 3 grammes par jour, en 3 prises) ou l’amoxicilline. •
Pour les PNA, le traitement doit associer un traitement probabiliste parentéral puis une phase d’entretien orale. La première phase, d’une durée de deux à quatre jours, en fonction de l’évolution clinique, se compose le plus souvent d’une monothérapie par céphalosporine de troisième génération (ceftriaxone 50 mg/kg par jour en une seule injection intraveineuse ou intramusculaire) chez l’enfant hospitalisé. Dans tous les cas chez l’enfant de moins de 1 mois, cefotaxime toutes les 8 heures, qui aurait un moindre impact sur l’écologie bactérienne. Une biantibiothérapie associant ceftriaxone et aminosides doit être mise en œuvre chez les enfants de moins de trois mois, en cas d’uropathie malformative, de syndrome septicémique sévère ou chez l’enfant immunodéprimé. La molécule utilisée lors de la deuxième phase du traitement est adaptée à l’antibiogramme ; dans la mesure du possible, la molécule à utiliser en première intention est le cotrimoxazole (chez l’enfant de plus de un mois), aux posologies décrites précédemment. La durée totale de traitement d’une PNA est de 10 à 14 jours, en fonction de l’évolution clinique ; en cas de PNA à germe atypique, l’avis d’un spécialiste en infectiologie pédiatrique est nécessaire. Certains arguments de la littérature peuvent faire discuter un traitement oral exclusif des PNA non compliquées dans des populations à faible risque [3,4,5]. Néanmoins, la description d’abcès rénaux (voire de pyonéphrose) secondaires à un traitement antibiotique oral non adapté (posologies trop 3
faibles, durée de traitement trop courte et/ou molécule inadéquate) est classique, ce qui doit rendre prudent dans l’antibiothérapie orale initiale d’une PNA. Il semble donc licite de prendre en charge les enfants en respectant les recommandations de l’AFSSAPS avec les ajustements proposés en 2014 par le GPIP; pour les groupes d’enfants à faible risque (et notamment les adolescents sans uropathie malformative connue, ni immunodépression, ni antécédent d’infection urinaire à répétition), en cas de PNA non compliquée, on peut néanmoins proposer une antibiothérapie orale d’emblée par fluoroquinolone (ofloxacine 200 mg matin et soir pendant 7 jours), mais cette stratégie ne fait pas partie des recommandations. Quoi qu’il en soit, la prise en charge des IU doit dans tous les cas associer la prise en charge du cercle vicieux « constipation/troubles fonctionnels urinaires/IU » et d’un éventuel facteur favorisant comme une uropathie malformative sous-­‐jacente. 4-­‐ Intérêt de l’antibioprophylaxie ? Aucun consensus n’existe à l’heure actuelle et il n’y a aucun argument dans la littérature démontrant son intérêt pour la prévention des cicatrices rénales à long terme [2,5]. Si elle est instaurée, l’antibioprophylaxie (céfaclor chez les enfants de moins de 1 mois, cotrimoxazole ensuite, en prise unique le soir, 1/2 à 1/5 de la posologie curative) se heurte au risque de non-­‐observance, de modification de la flore bactérienne et au caractère empirique de sa prescription. Les médicaments à base de nitrofurantoïne sont désormais contre-­‐indiqués chez l’enfant en prophylaxie, du fait des risques d’effets secondaires pulmonaires notamment. S’ils sont utilisés, l’indication doit être une indication de spécialiste, et ce, pour la durée la plus courte possible. 5-­‐ Principe du bilan paraclinique Une IU chez l’enfant peut survenir sans malformation sous-­‐jacente, mais peut également être le premier signe d’appel d’une malformation rénale et/ou des voies urinaires (en littérature anglo-­‐
saxonne, les CAKUT ou Congenital Abnormalities of Kidney and Urinary Tract). Ainsi, une échographie rénale et des voies urinaires est dans tous les cas nécessaire en cas d’IU prouvée bactériologiquement. En cas de cystite, elle s’attachera à éliminer les exceptionnels cas de tumeurs ou de malformations. En cas de PNA, elle permettra à la fois de chercher des signes de complication (foyer de néphrite, abcès, lithiase) et des arguments pour une uropathie malformative. La vessie doit être pleine pour bien apprécier l’état de la paroi vésicale. Elle doit être réalisée en urgence en cas de sepsis grave ou d’uropathie connue ou suspectée. Elle sera programmée en consultation externe dans les autres situations. Il n’existe pas de consensus pour la réalisation d’autres examens radiologiques (scintigraphie et cystographie notamment) [8,9,10]. En cas de premier épisode d’IU avec écho rénale et des voies 4
urinaires (vessie pleine) normale, la tendance actuelle des équipes est de ne pratiquer aucun examen complémentaire. En revanche, en cas d’échographie anormale (vessie à paroi épaissie, dilatation urétérale et/ou pyélo-­‐calicielle), et/ou de récidive d’IU, l’indication de ces examens doit être discutée (notamment la cystographie à la recherche d’un reflux vésico-­‐urétéral). 6-­‐ Prise en charge étiologique L’infection urinaire est le plus souvent la résultante d’une anomalie acquise de l’écoulement des urines, c’est-­‐à-­‐dire d’une mauvaise vidange vésicale associée à un réservoir bactérien (prépuce ou constipation). Elle s’inscrit fréquemment chez l’enfant, en particulier chez la petite fille, dans le cadre de troubles de l’élimination. Ceux-­‐ci sont avant tout objectivés par l’interrogatoire et l’examen clinique. L’échographie pré et post mictionnelle complète habituellement le bilan avec éventuellement une débitmétrie urinaire. Ce tableau demande rarement une cystographie et relève de conseils mictionnels voire de rééducation vésico-­‐sphinctrérienne quand l’âge le permet, avec prise en charge des phénomènes de constipation. Dans des cas plus rares, l’infection urinaire s’associe à une anomalie congénitale de l’écoulement des urines qui peut être objectivée dès la période anténatale par l’échographie. Trois zones sont particulièrement vulnérables, •
la jonction pyélo-­‐urétérale, •
la jonction urétéro-­‐vésicale, •
la jonction vésico-­‐urétrale. Leur anomalie de développement est souvent suspectée à l’échographie par la visualisation d’une dilatation segmentaire de la voie excrétrice (bassinets, calices, uretères, vessie, urètre postérieur) et/ou par des anomalies de l’échostructure du parenchyme rénal ou de la paroi vésicale. La cystographie garde une place plus fréquente dans ces situations car un geste de correction peut être nécessaire. I Anomalie de la jonction pyélo-­‐urétérale : syndrome de jonction pyélo-­‐urétérale Une anomalie de la jonction pyélo-­‐urétérale est généralement suspectée par l’échographie en présence d’une dilatation isolée du bassinet et des calices (Fig. 1). Même si il n’existe pas de consensus, on peut considérer qu’une dilatation du bassinet > 10 mm de diamètre antéro-­‐postérieur au niveau du sinus du rein est significative et demandera la mise en place d’une surveillance clinique et écho-­‐scintigraphique. Comme tout système obstructif, un syndrome de la jonction pyélo-­‐urétérale peut conduire à la survenue d’une complication infectieuse. 5
Une infection urinaire fébrile avec dilatation majeure du bassinet (supérieure à 30-­‐40 mm de diamètre antéro-­‐postérieur) et/ou sepsis mal contrôlé doit faire proposer un drainage ; néphrostomie per cutanée ou drainage interne (sonde double J) en fonction des équipes, en plus de l’antibiothérapie par voie parentérale. Une scintigraphie rénale au DMSA (acide dimercapto-­‐
succinique) marqué au Tc99m est réalisée dans les 2 à 3 semaines qui suivent la pose de néphrostomie ou à distance de l’épisode infectieux en l’absence de dérivation initiale, afin d’évaluer la valeur fonctionnelle relative de chacun des deux reins. En cas d’absence de fonction du rein dilaté ou d’altération fonctionnelle sévère (< 5-­‐10% de fonction relative), une néphrectomie est proposée. Dans les autres cas, une résection anastomose de la jonction pyélo-­‐urétérale éventuellement associée à une pyéloplastie, est réalisée. Un drainage pyélo-­‐
urétéral par une sonde transanastomotique est souvent laissé en place pendant quelques jours. Un suivi échographique est ensuite mis en place. Certaines équipes proposent de contrôler la scintigraphie entre 3 et 6 mois après la chirurgie. II Anomalies de la jonction urétéro-­‐vésicale A Mégauretères primitifs (non refluants) Le mégauretère primitif se définit comme une dilatation urétéro-­‐pyélo-­‐calicielle sus-­‐jacente à un obstacle significatif au niveau de la jonction urétéro-­‐vésicale. L’échographie mesure la dilatation de l’uretère, souvent supérieure à 10-­‐15mm de diamètre, du pyélon et des calices, et étudie le parenchyme rénal. La dilatation urétérale conduit habituellement à compléter le bilan par une cystographie qui élimine un reflux-­‐vésico-­‐urétéral de haut grade et permet de vérifier l’urètre chez le garçon. L‘infection urinaire sur mégauretère primitif est habituellement sévère et difficile à traiter. Pour lever l’obstacle, une dérivation urinaire externe par néphrostomie ou interne par sonde double J peuvent s’avérer nécessaires en plus de l’antibiothérapie (Fig. 2). Comme pour le syndrome de la jonction pyélo-­‐uétérale, une scintigraphie rénale au DMSA est réalisée dans les 2 à 3 semaines qui suivent ou à distance de l’épisode infectieux en l’absence de dérivation. Elle évalue le retentissement rénal et oriente la prise en charge. Une néphro-­‐urétérectomie peut être indiquée en cas d’absence de fonction du rein dilaté ou d’altération fonctionnelle sévère. Lorsque la fonction est conservée en scintigraphie, différentes options thérapeutiques sont proposées en fonction de l’âge de l’enfant. Une réimplantation vésico-­‐
urétérale éventuellement associée à un modelage urétéral n’est habituellement pas indiquée chez le nourrisson pour ne pas altérer la maturation vésicale. L’option chirurgicale habituelle est alors le drainage temporaire par une sonde double J si elle n’a pas été mise en place à la phase initiale. Elle est idéalement posée sous cystoscopie. L’objectif est de lever l’obstacle urétéro-­‐vésical pour éviter 6
ou repousser le moment de la réimplantation. La sonde double J est habituellement laissée en place pendant plusieurs mois. La pose de sonde double J permet d’éviter le recours à la réimplantation urétéro-­‐vésicale dans environ 70% des cas, mais le recul reste encore insuffisant. Une circoncision peut être proposée chez les garçons afin de diminuer le risque de récidive d’infection urinaire en supprimant le réservoir bactérien préputial. Au-­‐delà de l’âge de un an, une réimplantation urétéro-­‐
vésicale avec modelage urétéral après résection de la partie terminale de l’uretère est habituellement proposée à distance de l’épisode infectieux. B Urétérocèles L’urétérocèle est une dilatation pseudo-­‐kystique de l’uretère terminal dans sa portion sous-­‐
muqueuse. Il en existe plusieurs formes anatomiques, la plus fréquente étant l’urétérocèle ectopique (hétérotopique) ou extra-­‐vésicale sur duplication urétérale (60% des cas). Elle est surtout retrouvée chez la fille (sex ratio 4/1) et peut être bilatérale dans 10% des cas. L’urétérocèle sur système simple est plus rare en pédiatrie. Elle est alors toujours orthotopique mais peut être obstructive, s’accompagnant d’une dilatation urétéro-­‐pyélocalicielle d’amont plus ou moins associée à des lésions rénales de dysplasie. Le dépistage de l’urétérocèle est souvent fait en échographie anténatale en présence d’un kyste intra-­‐vésical. Elle peut également être découverte à la naissance devant une infection urinaire fébrile. Beaucoup plus rarement, une masse lombaire secondaire à une volumineuse dilatation du calice supérieur, une rétention aigue d’urine par obstruction du col vésical mèneront au diagnostic. L’échographie permet d’apprécier la taille de l’urétérocèle, sous forme d’une image kystique dans la vessie à parois généralement fines et régulières, la dilatation des voies excrétrices d’amont et l’état du parenchyme rénal. Dans la majorité des cas, le parenchyme rénal du pôle supérieur, correspondant à l’urétérocèle, est dysplasique. La cystographie rétrograde permet de préciser l’anatomie de l’urétérocèle qui apparaît sous la forme d’une image lacunaire parfois prolabée en dehors de la vessie et recherche un reflux vésico-­‐urétéral dans l’uretère polaire inférieur. En cas de dilatation importante du système supérieur ou en cas d’obstacle à la vidange vésicale, avec menace sur le parenchyme fonctionnel, la décompression endoscopique est habituellement indiquée. Le geste est réalisé sous anesthésie générale, à vessie peu remplie, de façon à voir bomber l’urétérocèle et distinguer ses limites d’avec la paroi vésicale et le col vésical. La perforation endoscopique se fait par ponction à l’aide d’une sonde bug bee ou par section déclive à la lame froide. L’affaissement de l’urétérocèle est contrôlé sur une échographie faite à un mois post-­‐
opératoire. Le bilan peut être complété en fonction des équipes par une cystographie (le risque de la perforation est l’apparition d’un reflux vésico-­‐urétéral dans l’uretère polaire supérieur) et une scintigraphie isotopique qui évalue la fonction du pôle supérieur du rein dupliqué. Par la suite, les enfants asymptomatiques, sans dilatation importante, sans reflux majeur, pourront bénéficier d’un 7
traitement conservateur. Un traitement chirurgical est recommandé dans les autres situations et ceci d’autant plus si l’enfant s’est déjà infecté. Le choix de la technique dépendra alors de la fonction du pôle supérieur : néphrectomie partielle pour les pôles non fonctionnels ; ablation de l’urétérocèle, reconstruction du trigone et réimplantation urétéro-­‐vésicale des deux uretères dans les autres cas. Des anastomoses pyélo-­‐pyéliques ou pyélo-­‐urétérales plus ou moins hautes peuvent également être proposées. C Reflux vésico-­‐urétéral Dans l’immense majorité des cas, une PNA est le fait d’un reflux vésico-­‐urétéral (RVU). Le RVU est un phénomène parfois intermittent qui ne sera donc pas toujours objectivé par la cystographie. La classification des RVU en cinq grades est un concept radiologique qui ne présage pas du mécanisme du reflux. Deux mécanismes sont ainsi décrits : le RVU fonctionnel qui s’inscrit généralement dans le cadre d’un dysfonctionnement vésico-­‐sphinctérien et le RVU malformatif (Tableau I). Quel que soit le mécanisme du RVU, la croissance, en améliorant la maturation du fonctionnement vésico-­‐
sphinctérien et/ou en allongeant le trajet intra-­‐mural de l’uretère, permet d’améliorer ou de faire disparaître bon nombre de RVU [11]. Pratiquer une cystographie pour authentifier un RVU dont on ne fera que surveiller l’évolution est donc discutable, et ce d’autant plus que l’échographie est normale. Elle s’impose cependant chez le petit nourrisson garçon au moindre doute de valves de l’urètre postérieur (intérêt de l’étude échographique de la paroi vésicale). La présence d’un RVU est par ailleurs un mauvais signe prédictif de lésion rénale après PNA [10]. La chirurgie du RVU est controversée; elle est habituellement destinée aux RVU malformatifs de grade élevé. Cette correction n’influence pas le risque de cicatrices parenchymateuses, ni celui d’hypertension artérielle ou d’insuffisance rénale à long terme, mais réduit le risque de récidive des épisodes de PNA. Une méta-­‐analyse de la Cochrane Database ne montre pas de bénéfice clinique évident sur le long terme lorsque le RVU est traité, qu’il le soit de manière médicale, chirurgicale ou mixte [10]. D’une manière générale, la prise en charge initiale sera toujours conservatrice (antibioprphylaxie jusqu’à acquisition de la propreté, rééducation vésico-­‐sphinctérienne et conseils hygiéno-­‐diététiques dans le cadre des RVU fonctionnels). La circoncision est proposée par certaines équipes pour réduire le risque de récidive infectieuse. Une correction chirurgicale du RVU pourra être proposée devant la persistance des infections urinaires fébriles malgré une prise en charge initiale bien conduite. La correction du reflux peut faire à la réimplantation urétéro-­‐vésicale par abord direct ou l’injection endoscopique sous-­‐méatique d’une substance inerte qui crée un socle sur lequel vient s’appuyer l’uretère pour s’opposer au reflux. 8
III Anomalies vésico-­‐urétrales A Valves de l’urètre postérieur (VUP) Les VUP concernent uniquement le garçon. Le diagnostic est en général fait en échographie anténatale ou dans les premiers jours de vie mais certaines formes peuvent échapper au diagnostic et se révéler plus tardivement à l’occasion d’une infection urinaire fébrile. Les signes évocateurs en échographie sont une dilatation urétéro-­‐pyélo-­‐calicielle uni ou bilatérale, une vessie à parois épaissies, une dilatation de l’urètre postérieur. La cystographie confirme le diagnostic. La vessie apparaît souvent à paroi irrégulière multi-­‐diverticulaire parfois accompagnée d’un reflux vésico-­‐
urétéral uni ou bilatéral. Les clichés per-­‐mictionnels SANS sonde dans l’urètre (de ¾ et de profil) montrent une dilatation de l’urètre postérieur en amont des valves (Fig.3). C’est une urgence médico-­‐chirurgicale. Une fois le diagnostic confirmé, une sonde urétrale est mise en place jusqu’au geste chirurgical de résection. En cas d’échec du sondage, un catheter sus-­‐pubien peut être posé sous anesthésie locale. Un bilan biologique complet est réalisé à la recherche de troubles hydro-­‐électrolytiques. Le traitement chirurgical consiste en la résection endoscopique des valves. Une antibioprophylaxie intra-­‐veineuse est toujours réalisée lors du geste et souvent prolongée en post-­‐opératoire. La résection des valves est généralement faite avec un résecteur pédiatrique ou par section à la lame froide. Un drainage est habituellement laissé en place 48 heures. D’autres techniques de résection peuvent être utilisées : la section par une électrode gainée bug-­‐bee ou la section au laser YAG sont utilisés. Le suivi est ensuite fait conjointement entre l’équipe chirurgicale et l’équipe de néphrologie pédiatrique. La surveillance est à la fois clinique (courbe de poids, miction, tension artérielle, infections urinaires fébriles), biologique (créatininémie, ionogramme sanguin et urinaire) et échographique (suivi de la dilatation des voies excrétrices ainsi que de la croissance et différenciation rénale). Certaines équipes contrôlent la cystographie un à deux mois après la résection endoscopique. B Autres anomalies vésico-­‐urétrales (atrésies de l’urètre, mégalourètres, sinus uro-­‐génitaux) Elles sont exceptionnelles et ne seront pas détaillées dans ce cours. 7-­‐ Quand adresser l’enfant en consultation de néphrologie ou d’urologie pédiatrique ? Quatre indications de consultation spécialisée peuvent être retenues : si l’enfant présente des mictions très nombreuses avec fuites urinaires, s’il n’a pas un bon jet urinaire (miction goutte à goutte, poussée abdominale), s’il présente des infections urinaires à répétition, et enfin si l’échographie rénale et des voies urinaires n’est pas normale ce qui peut témoigner d’une uropathie malformative. En cas d’examen neurologique anormal des membres inférieurs, des investigations 9
complémentaires pourront être discutées pour éliminer une vessie neurologique sur anomalie médullaire, ce qui nécessitera dans ce cas une prise en charge adaptée (voir item 49). 8-­‐ Le suivi à long terme La PNA n’est pas une pathologie complètement anodine : s’il existe à court terme un faible risque de sepsis, il existe surtout à long terme un risque de cicatrices rénales pouvant induire hypertension artérielle, microalbuminurie, protéinurie et insuffisance rénale chronique ; ce d’autant plus probablement que les PNA sont récidivantes ou traitées tardivement. Sur les 127 adultes étudiés issus d’une série de 267 patients ayant été traités dans l’enfance pour RVU, 11 % étaient hypertendus, 24 % avaient une microalbuminurie, 9 % une protéinurie et 3 % une insuffisance rénale chronique modérée [12]. Pour les jeunes femmes ayant présenté des IU dans l’enfance, il existe également un risque accru de PNA lors des grossesses. Lors d’une PNA, 50 à 60 % des enfants présenteront des lésions parenchymateuses initiales ; la moitié d’entre eux a un risque de cicatrices parenchymateuses [9]. L’objectif principal de la prise en charge d’une PNA doit donc être de prévenir la survenue de ces séquelles, par un diagnostic et une antibiothérapie adaptée précoces, avec des posologies suffisantes pour permettre une bonne diffusion de la molécule dans le parenchyme rénal. Toute la question reste néanmoins de savoir si les cicatrices sont secondaires à l’infection elle-­‐même et/ou à une éventuelle dysplasie rénale sous-­‐jacente fréquente dans les RVU malformatifs. Dans tous les cas le risque reste très théorique et les parents ne doivent pas être inquiétés à tort. 9-­‐ Que dire aux parents ? 1-­‐ Les infections urinaires (IU) sont les infections bactériennes les plus fréquentes en pédiatrie. 2-­‐ Les facteurs de risque d’IU sont les suivants : constipation, troubles mictionnels, et facteurs locaux favorisants (phimosis chez le garçon et coalescence des petites lèvres chez la petite fille). En ce qui concerne la constipation, votre enfant doit avoir au moins une selle par jour, pas trop dure ni volumineuse. Si ce n’est pas le cas, on peut augmenter la quantité de fibres dans l’alimentation (légumes verts, fruits, céréales complètes), les boissons (eau, infusions) et diminuer les gourmandises (boissons sucrées, bonbons, gâteaux, biscuits, viennoiseries). Si ces mesures ne suffisent pas à normaliser le transit, un traitement laxatif pourra être prescrit. En ce qui concerne les troubles mictionnels, c’est-­‐à-­‐dire les fuites urinaires (slip mouillé en fin de journée), les urgences pour uriner, les mictions trop fréquentes (> 8 fois par jour) ou trop rares (< 4 fois par jour), ils sont très souvent causés par des mictions rares, en particulier si l’enfant attend le dernier moment pour aller uriner ou évite d’utiliser les toilettes de l’école. Il faudrait que l’enfant urine 6 à 7 fois par jour (en pratique toutes les 2 heures – 2 heures 30 min), en veillant à sa bonne installation sur la cuvette des toilettes pour qu’il puisse uriner sans poussée abdominale et en vidant complètement sa vessie. 10
3-­‐ Le seul examen d’imagerie à réaliser en première intention est l’échographie rénale et des voies urinaires, vessie pleine. L’ECBU de contrôle après traitement n’a aucun intérêt. 4-­‐ En cas de récidive de fièvre sans point d’appel évident, il faut réaliser une BU +/-­‐ ECBU (avant l’âge de 3 mois l’ECBU doit être systématique) pour éliminer une IU. 5-­‐ Pour protéger les reins pour toute la vie, des conseils de néphroprotection élémentaire devraient être respectés : avoir une alimentation pas trop riche en sel et pas trop riche en protéines (c’est-­‐à-­‐
dire une portion de poisson ou une portion de viande ou un œuf par jour), éviter les médicaments toxiques pour les reins (et en première intention les AINS, que ce soit en automédication ou pas), éviter le surpoids, la sédentarité et le tabagisme. Prévoir une mesure de pression artérielle annuelle de principe. Conclusion Les recommandations de l’AFSSAPS publiées en 2007, réactualisées et rediscutées par le GPIP en 2014, permettent d’harmoniser la prise en charge des IU de l’enfant en France. S’il n’existe pas encore de consensus actuel clair pour les investigations paracliniques de la PNA, la tendance générale est cependant à la moindre invasivité. Cependant, la plupart des équipes s’accordent sur la nécessité de réaliser une échographie des voies urinaires dès le premier épisode infectieux. Scintigraphies isotopiques et cystographies doivent rester des indications de spécialistes. A long terme, la lutte contre les facteurs de risque cardio-­‐vasculaire, le suivi régulier de la pression artérielle et de la bandelette urinaire doit être recommandée chez les patients ayant présenté des épisodes de PNA pendant l’enfance. 11
Références 1. AFSSAPS. Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires du nourrisson et de l’enfant 2007: Available from: http://www.afssaps.fr. 2-­‐ Bocquet N, Sergent Alaoui A, Jais JP, Gajdos V, Guigonis V, Lacour B, et al. Randomized Trial of Oral Versus Sequential IV/Oral Antibiotic for Acute Pyelonephritis in Children. Pediatrics. 2012 Feb;129(2):e269-­‐75. 3. Hodson EM, Willis NS, Craig JC. Antibiotics for acute pyelonephritis in children. Cochrane Database Syst Rev 2007:CD003772. 4. Mori R, Lakhanpaul M, Verrier-­‐Jones K. Diagnosis and management of urinary tract infection in children: summary of NICE guidance. Bmj 2007;335:395-­‐7. 5. Sangrador C, Guerrero S. Recomendaciones de la conferencia de consenso "Mannejo diagnostico y therapeutico de las infecciones del tracto urinario en la infancia". An Pediatr 2007;5:517-­‐25. 6. Craig J, Simpson JM, Williams GJ, Lowe A, Reynolds GJ, McTaggart SJ, Hodson E, Carapetis JR, Cranswick NE, Smith G, Irwig LM, Caldwell P, Hamilton S, Roy LP. Antibiotic prophylaxis and recurrent urinary tract infections in children. N Engl J Med 2009 ;361 :1748-­‐59 7. Hodson EM, Wheeler DM, Vimalchandra D, Smith GH, Craig JC. Interventions for primary vesicoureteric reflux. Cochrane Database Syst Rev 2007:CD001532. 8. Keren R. Imaging and treatment strategies for children after first urinary tract infection. Curr Opin Pediatr 2007;19:705-­‐10. 9. Girardin E. Imagerie dans la pyélonéphrite aiguë de l'enfant. Société de Néphrologie Pédiatrique; Nantes 2007. 10. Gordon I, Barkovics M, Pindoria S, Cole TJ, Woolf AS. Primary vesicoureteric reflux as a predictor of renal damage in children hospitalized with urinary tract infection: a systematic review and meta-­‐
analysis. J Am Soc Nephrol 2003;14:739-­‐44. 11. Wennerstrom M, Hansson S, Jodal U, Stokland E. Disappearance of vesicoureteral reflux in children. Arch Pediatr Adolesc Med 1998;152:879-­‐83. 12. Lahdes-­‐Vasama T, Niskanen K, Ronnholm K. Outcome of kidneys in patients treated for vesicoureteral reflux (VUR) during childhood. Nephrol Dial Transplant 2006;21:2491-­‐7. 12
Tableau I : Classification des reflux vésico-­‐urétéraux. RVU fonctionnel RVU malformatif +++ + Age Enfant Nouveau-­‐né -­‐ Nourrisson Sexe Prédominance féminine Prédominance masculine PNA Diagnostic prénatal -­‐ PNA Faible (0 à 3) Elevé (3 à 5) Echographie généralement Echographie généralement normale anormale Intermittent Permanent Normale Anormale +++ + + +++ +++ + O + Fréquence Mode de révélation Grade radiologique Caractères du RVU Jonction urétéro-­‐vésicale Troubles mictionnels Risque rénal Traitement médical Antibioprophylaxie Traitement instabilité vésicale Traitement rétention stercorale Place de la chirurgie 13
Figures Fig. 1: Echographie objectivant une dilatation pyélo-­‐calicielle droite (27 mm de diamètre antéro-­‐
postérieur en intra-­‐sinusal et 47 mm en extra-­‐sinusal). Fig. 2: Néphrostomie de dérivation sur mégauretère gauche infecté mal contrôlé par l’antibiothérapie. Fig. 3 : Cliché per-­‐mictionnel de cystographie montrant une vessie multi-­‐diverticulaire et une dilatation de l’urètre postérieur en amont de valves de l’urètre. Notez également un reflux dans les voies séminales. 14
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