TIC, diffusion spatiale des connaissances et agglomération

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TIC, diffusion spatiale des connaissances et agglomération
C. Autant-Bernard* , Nadine Massard** et C. Largeron*
Article à paraître dans la revue « Géographie, économie, société »
En réduisant les coûts de transmission de l’information, l’essor des TIC libérerait les activités
d’innovation de la contrainte spatiale. Cependant, en s’appuyant à la fois sur les approches théoriques
qui se font jour depuis quelques années et sur les premières constatations empiriques, cet article
montre que l’idée simple d’une disparition de la distance n’est pas confirmée. Les modèles
d’économie géographique, comme les analyses du rôle des TIC dans la mise en contact des individus,
considèrent des forces opposées pouvant conduire à un éclatement spatial des activités ou au contraire
au renforcement des agglomérations. Les études empiriques susceptibles de fournir une évaluation
chiffrée de ces forces respectives font actuellement surtout ressortir la complémentarité entre TIC et
contacts face à face, laissant présager plutôt du maintien du rôle de la distance.
Mots clef : TIC, innovation, localisation, économie géographique, contacts face à face.
TITLE: ICT, knowledge diffusion and agglomeration
The decrease in information costs induced by the development of ICT would make innovative activities
free of spatial constraint. However, based on both the recent theoretical approaches and the first
empirical observations, this paper rejects the idea of the end of distance. The economic geography
models, as well as the analyses of ICT impact on interpersonal relations, consider opposite forces that
may generate either a spatial dispersion of economic activities or conversely a reinforcement of
agglomerations. The empirical studies likely to evaluate these forces now essentially highlight the
complementarity between ICT and face to face contacts, predicting the somewhat persistence of
distance.
Keywords : ICT, Innovation, Location, Economic geography, Face to face contacts
*
CREUSET, Université Jean Monnet St-Etienne, 6, rue basses des rives – 42 023 St-Etienne Cedex 2.
Email : [email protected], [email protected]
**
ICTT-INSA de Lyon et CREUSET, Université Jean Monnet St-Etienne, 6, rue basses des rives –
42 023 St-Etienne Cedex 2.
Email : [email protected]
1
1. Introduction
Les externalités informationnelles, mises en évidence par Marshall (1920), ont acquis
un pouvoir explicatif important dans les modélisations théoriques de ces vingt cinq dernières
années. Elles apportent des éléments nouveaux pour la compréhension des processus
d’innovation et de croissance d’une part et des dynamiques de localisation des activités
économiques d’autre part. Ainsi, après avoir longtemps considéré ces phénomènes comme
secondaires, Krugman reconnaît aujourd’hui toute leur importance dans la configuration
spatiale des activités économiques et regrette que la nouvelle économie géographique ne leur
accorde pas plus d’attention (Krugman, 2000).
Cependant, le développement des Technologies de l’Information et de la
Communication (TIC) semble de nature à remettre en cause cette relation entre proximité
géographique et accumulation de connaissances. En effet, les innovations majeures qui ont eu
lieu dans les domaines du matériel informatique, des logiciels et du matériel de
communication sont de nature à imposer des bouleversements. De manière générale, on peut
s’attendre à deux types de répercussions sur l’activité économique, et plus particulièrement
sur les activités innovantes, fortement consommatrices de connaissances 1 .
- Premièrement, si on considère les TIC comme facteur de production, on peut s’attendre à
des gains de productivité avec les répercussions que cela implique en terme de croissance. Le
fait marquant sur lequel repose cette idée est la concomitance de la forte croissance
américaine de ces dernières années avec la diffusion des TIC (Welfens, 2002). Cependant,
plusieurs études demeurent très réservées quant à l’impact spécifique des TIC sur la
croissance et la productivité. Ainsi par exemple, pour la plupart des pays d’Europe, la relative
faiblesse de la croissance observée dans les années 1990 serait non seulement due à un
moindre investissement dans les TIC mais aussi à une contribution des TIC à la croissance
trois fois plus faible qu’aux Etats-Unis (Mairesse et al., 2002). Ces controverses ne sont pas
sans rappeler le fameux « paradoxe de la productivité » de Solow.
- Deuxièmement, on peut s’attendre à des répercussions sur les dynamiques d’agglomération,
et ce pour plusieurs raisons. D’une part l’émergence d’un nouveau secteur d’activité conduit à
1
Plus marginalement, un troisième type de conséquence peut être repéré. Les conversations téléphoniques, les
rencontres lors de conférences, les visites de laboratoires de recherche sont complétées par une communication
d’ordinateur à ordinateur au sein de réseau nationaux et internationaux. Du fait de l’accélération de l’échange de
connaissances induite par ce développement des TIC (Les travaux de recherche sont par exemple de plus en plus
souvent disponibles en ligne bien avant d’être publiés dans les revues ou les ouvrages), il est probable que l’on
2
des implantations nouvelles (la localisation des start-up de la nouvelle économie ne suit pas
nécessairement la localisation des autres secteurs d’activités) ainsi qu’à la disparition ou à la
restructuration d’entreprises (le développement de moyens de communication et
d’information nouveaux rend obsolètes des techniques plus anciennes). Ces mouvements dans
la démographie des entreprises de TIC sont susceptibles de modifier la configuration spatiale
de ce secteur d’activité. D’autre part et plus fondamentalement, le développement des TIC
modifie les conditions de transmission des connaissances. En facilitant les échanges
d’information, l’essor des TIC est de nature à modifier les contraintes de localisation. En
effet, de nombreux travaux se sont développés au cours des années 90 mettant en évidence
l’impact des coûts et infrastructures de communication sur les dynamiques de localisation et
de croissance. Les activités d’innovation, fortement dépendantes de l’accès à l’information et
de la diffusion des savoirs devraient s’en trouver particulièrement affectées.
Ainsi, associées au mouvement accru de codification des connaissances qui marque la
période récente, les TIC réduisent considérablement les coûts de la transmission
d’information et de connaissance dans l’espace. En cela, elles libéreraient les activités
d’innovation de la contrainte spatiale en élargissant le champ de diffusion des externalités et
en augmentant les capacités d’interactions entre agents éloignés. Les phénomènes de
concentration appuyés sur les effets de proximité géographique seraient alors progressivement
amenés à disparaître, laissant d’autres formes de proximité prendre le dessus dans la
détermination des interactions scientifiques et technologiques (communautés de chercheurs
nées des liaisons Internet par exemple…).
Comme l’observe Gaspar (1996), nombreux sont ceux qui ont pronostiqué la
disparition du besoin de proximité et l’avènement d’un monde sans espace, en se basant sur
l’idée que les contacts électroniques remplaceraient les contacts face à face. Cairncross
(2001), notamment, prédit « the death of distance ». Cependant les premières constatations
« de terrain » ne révèlent pas ce potentiel de décentralisation des TIC. Simultanément au
développement des TIC, les mouvements de concentration de la population et des activités
économiques se renforcent encore ouvrant le débat sur ce qu’Imagawa (2002) appelle le
« paradoxe de l’accumulation ». Les approches théoriques plus fouillées qui se font jour
depuis quelques années ne confirment pas directement l’idée simple d’une « mort de la
distance » et montrent plutôt l’existence d’effets contraires de l’introduction des TIC sur la
relation innovation/proximité.
assiste à une accélération des processus d’innovation. Les travaux dans ce domaine s’inscrivent dans une
perspective d’économie de l’innovation.
3
Alors que les politiques publiques de développement régional n’évitent pas toujours
un certain déterminisme sur les propriétés décentralisatrices des TIC, cet article revient sur
deux questions essentielles liées au développement de ces technologies : Va-t-on assister (ou
assiste-t-on déjà) à une réduction de la contrainte de proximité qui prévaut souvent dans la
transmission des connaissances ? Quelles peuvent être les conséquences éventuelles de cette
réduction de la contrainte de proximité sur la géographie des activités d’innovation et de la
croissance ?
Deux types d’approches sont repérables dans ce domaine. Le premier s’intéresse au
rôle des TIC dans la mise en contact des individus et s’interroge sur le devenir des villes
comme lieu essentiel des apprentissages par interactions fondées sur la proximité (section 2).
Le second, plus macroéconomique, utilise les modèles d’économie géographique pour étudier
les implications d’une levée de la contrainte spatiale de diffusion des externalités sur la
localisation des activités d’innovation et donc sur les dynamiques de croissances régionales
différenciées. Les interactions entre télécommunications et transport sont ici mises en avant
(section 3). Tous deux montrent l’existence de forces opposées pouvant conduire à un
éclatement spatial des activités ou au contraire au renforcement des agglomérations. Les
études empiriques susceptibles de fournir une évaluation chiffrée du poids de ces forces et de
l’éventuelle domination de l’une par rapport à l’autre sont encore très peu nombreuses. Nous
les présenterons dans la section 4 et verrons qu’elles font actuellement surtout ressortir la
complémentarité entre TIC et contacts face à face et le maintien du rôle de la distance. La
cinquième section présente les principaux enseignements qui ressortent de cette revue de
littérature et ouvre de nouvelles perspectives de recherche dans ce domaine.
2. Interactions face à face, apprentissage et avantages des agglomérations
urbaines
2.1. Une relation clairement établie entre ville et accumulation de connaissances
Si les relations entre croissance et information sont anciennes (Schumpeter, 1935 ;
Romer, 1986), plus encore le sont les relations entre villes et information (Marshall, 1920). Le
lien entre accumulation de connaissance et ville est en revanche plus récent. On doit en effet
la mise en évidence des effets bénéfiques de la proximité géographique sur la diffusion et
l’accumulation de connaissance à Lucas (1988). En considérant que la connaissance n’est pas
librement disponible, mais qu’elle est au contraire incorporée dans les hommes qui la
4
véhicule, Lucas apporte une explication aux phénomènes de concentration urbaine. Les
connaissances, sous forme de capital humain, sont fortement localisées dans la mesure où
la mobilité des individus est faible. « What can be people paying Manhattan or downtown
Chicago rents for, if not for being near people ? » (R. Lucas, 1988, p. 39). Ainsi, la
productivité serait supérieure dans les grandes métropoles. Il peut donc y avoir des écarts
durables, voire des trajectoires de croissances divergentes d’une zone géographique à
l’autre. Nombreux sont les travaux qui défendent l’idée que la connaissance et le capital
humain jouent un rôle majeur comme moteur de la croissance des agglomérations (cf.
Glaeser, 1994 pour une revue).
Le niveau local de capital humain et de connaissance créé ne résultent donc pas
uniquement de la somme des apprentissages réalisés isolément par chaque agent. Les
fondements microéconomiques des externalités de capital humain sont le partage des
connaissances et des compétences qui se produit entre individus lors d’interactions
formelles ou informelles. Comme le montrent Jovanovic et Rob (1990), ces interactions
agissent sur la diffusion et la croissance du savoir par le biais de l’imitation et de la
confrontation
de
connaissances
diversifiées.
L’amélioration
des
moyens
de
communication agit alors comme une aide à la transmission de la connaissance par les
interactions et autorise donc des niveaux de croissance plus élevée.
Cette analyse a ensuite pu être confirmée, par les travaux Rauch (1993) et Glaeser
(1999) montrant que la productivité et la croissance des villes augmentent lorsque le niveau
d’éducation s’élève. Elle a aussi été précisée par Glaeser et al. (1992) ou Henderson et al.
(1995) qui étudient l’origine sectorielle des externalités locales.
Le travail de Rauch (1993) consiste à tester l’effet de la concentration du capital
humain sur les gains de productivité, sachant que dans les zones à plus fort niveau de capital
humain, le niveau de salaire est plus élevé. Son analyse porte sur les aires métropolitaines
américaines. Il démontre que le niveau d’éducation et l’expérience génèrent des gains de
productivité, grâce au partage des idées à un niveau local2 .
On peut aussi apporter à l’appui de ces réflexions les travaux menés dans les années
1990 en géographie de l’innovation, testant la dimension locale des flux de connaissance.
Malgré les difficultés méthodologiques et les disparités liées aux spécificités des contextes
institutionnels nationaux, nombreuses sont les études qui confirment le caractère localisé des
spillovers (Autant-Bernard et Massard, 1999 pour une revue).
2
Cependant, comme il le reconnaît, son travail ne permet pas véritablement d’observer le partage des idées. Il
faudrait pour cela une analyse à un niveau plus désagrégé.
5
Ainsi, l’échange de connaissances paraît clairement contribuer à l’explication du
caractère géographiquement aggloméré des activités économiques, et en particulier des
activités innovantes. Dans ce contexte, le développement des TIC est-il susceptible de réduire
le besoin de proximité géographique et la polarisation spatiale qui l’accompagne ? On peut
trouver une réponse en deux temps dans la littérature : dans un premier temps l’étude des
relations entre utilisation des technologies de communication et agglomérations urbaines
montre l’intérêt des zones à forte densité de population pour le développement des
technologies interactives tandis que le second temps cherche plutôt à démontrer, au sein des
relations interactives, le caractère substituable ou complémentaire des TIC et des contacts face
à face.
2.2. Technologies interactives et agglomération urbaine
L’importance accrue du rôle des villes dans une économie fondée sur la connaissance
a été relevée par plusieurs auteurs. Les villes sont des lieux au sein desquels les flux
d’information sont particulièrement stimulés. En distinguant les méthodes de communication
selon qu’elles utilisent des technologies à sens unique (télévision par exemple) ou à double
sens (téléphone), Imagawa (2002) précise les mécanismes sous-jacents. Les technologies à
double sens permettent l’échange interactif d’information. En cela elles se distinguent des
technologies à sens unique de deux points de vue essentiels : elles seules sont source
d’externalités positives d’une part, et elles transmettent des informations différenciées selon
les lieux et les personnes concernées, d’autre part.
Les interactions permises par les technologies à double sens sont sources
d’externalités positives de communications, c’est-à-dire à la fois d’ externalités de réseaux3 et
d’externalités « d’appels » 4 . Ces externalités impliquent des rendements croissants et
expliquent donc l’existence d’une relation positive entre la densité de population et le taux de
pénétration des technologies interactives.
Par ailleurs, les informations transmises par les voies interactives sont généralement
hétérogènes et spécifiques. Elles ne permettent pas de diffusion large et indifférenciée. Dans
ce cadre, des coûts de recherche sont générés. L’obtention de l’information pertinente
nécessite l’appariement spécifique des partenaires de la communication et cet appariement est
souvent conditionné par la proximité spatiale ou l’existence de liaisons préalables.
3
L’utilité reçue par les usagers s’accroît avec le nombre de personnes connecté au réseau
« call externalities » selon Imagawa. L’utilité s’accroît lorsqu’on reçoit des communications à la charge de
l’émetteur
4
6
Contrairement aux échanges informationnels à sens unique, les transactions informationnelles
interactives sont donc plus particulièrement localisées au sein de région à forte densité de
population. Le rôle des zones urbaines dans le développement de ce type de communications
interactives est ainsi souligné.
2.3. TIC : substitut ou compléments aux relations face à face ?
Insistant sur l’importance des interactions et particulièrement des relations face-à-face
dans la transmission des connaissances, des travaux posent plus directement la question de
savoir si les communications électroniques sont plutôt des compléments ou des substituts aux
échanges de face à face. Sans revenir ici sur les débats distinguant connaissances tacites et
codifiées, « incarnées » ou «désincarnées » de la connaissance, nous considérons que ces
formes ne définissent pas des caractéristiques intrinsèques de la connaissance mais résultent
des stratégies et des pratiques de communication mises en place par les acteurs pour organiser
le transfert de connaissance 5 . Pour que ce transfert produise de la connaissance nouvelle,
autrement dit soit source d’apprentissage il suppose généralement l’association des différentes
formes de connaissances, les unes pouvant être transférées à distance par les moyens
électroniques, les autres supposant des contacts face-à-face. Gaspar et Glaeser (1998)
considèrent en effet que contacts en face à face et contacts via les TIC sont pour une part
complémentaires (nombre de contacts via les TIC servent de points de départ ou de poursuite
à des contacts en face à face) et poussent ainsi aux renforcement des forces d’agglomération.
Réciproquement, les contacts face-à-face peuvent également être un complément aux flux
d’information électroniques. Thrift (1996) constate ainsi que la fonction principale des centres
financiers mondiaux est d’interpréter en temps réel la somme considérable d’information
générée chaque jour. La mise à disposition massive et aspatiale de l’information renforce la
nécessité d’avoir à sélectionner l’information pertinente. Et ce processus d’interprétation et de
sélection serait favorisé par des interactions en face-à-face. De la même façon l’abondance et
la complexité des informations scientifiques disponibles rendent les interactions face à face
indispensables à une bonne absorption des connaissances transmises.
Selon les théories de l’apprentissage et de la formation de capital intellectuel évoquées
ci-dessus (Jovanovic et Rob, 1990 notamment), cet apprentissage procède par imitation et
suppose l’interaction directe entre qualifiés et non qualifiés. Les agglomérations urbaines
5
Cf. notamment les nombreux articles parus sur ce thème dans la revue Industrial Dynamics and Corporate
Change, 9, 2000.
7
apparaissent alors comme des lieux où ces interactions, qui bénéficient de la proximité
géographique, sont les plus susceptibles de se développer (Glaeser, 1999).
L’introduction des TIC dans ce contexte comporte deux volets. Elle accroît le nombre
d’interactions possibles au sein d’une économie et elle modifie la part relative des interactions
directes réalisées en face à face car elle autorise certaines formes d’interactions directes à
distance. Sur cette base, Gaspard et Glaeser (1998) montrent que les TIC conjuguent en fait
deux effets contraires sur les déterminants de la localisation des apprentissages et donc de la
production de connaissance.
- d’une part, sachant que toute interaction comporte à la fois des communications
électroniques (pour les échanges courts surtout) et des contacts face à face (pour les échanges
plus longs et approfondis), le développement des TIC modifie la part relative des interactions
directes réalisées en face à face. L’amélioration des télécommunications fait en effet monter
le niveau à partir duquel les échanges de face à face deviennent nécessaires. Ceci décrit un
effet de substitution qui tendrait à réduire les contraintes spatiales dans l’établissement
d’interactions et en conséquence à réduire l’avantage des agglomérations urbaines dans ce
domaine ;
- d’autre part, le développement des TIC augmente le niveau global des interactions
par la création d’opportunités nouvelles. Chaque interaction établie impliquant une part de
contacts face à face, cette montée globale des interactions se traduit par un besoin accru
d’échanges face à face. Ceci décrit un effet de complémentarité qui va dans le sens d’un
renforcement du rôle des villes, particulièrement important dans le cadre d’une économie
informationnelle de plus en plus « fondée sur la connaissance ».
Le devenir des agglomérations innovantes résulte donc de la conjugaison complexe de
ces deux effets.
D’autres approches de l’apprentissage considèrent que toute diffusion de connaissance
est fortement dépendante de l’existence de « communautés epistémiques », au sein desquelles
les interactions personnelles et la confiance sont les facteurs clés du succès des apprentissages
(Hildrum et Fagerberg, 2002). La capacité des TIC à développer la diffusion de connaissances
est alors fortement contrainte : l’élaboration de langages codifiés n’assure pas la convergence
des langages et ne réduit que très difficilement la nécessité d’un cadre « épistémique »
commun. Ainsi, si on considère la connaissance et sa transmission comme des phénomènes
fortement contextualisés impliquant une dimension sensorielle forte, la capacité des TIC à
accroître la mobilité de la connaissance apparaît encore moins évidente. Ceci pousse à la
définition de modèles d’apprentissage plus complexes, prenant en compte de manière moins
8
générique les TIC en distinguant la diversité des moyens (transmission de texte, d’image ou
de son, synchrone ou asynchrone…) et surtout leurs modalités d’utilisation (cadre
institutionnel, organisationnel, individuel ou collectif.).
Dans cette perspective, la distinction pertinente n’est pas celle qui associe connaissance tacite
à diffusion locale et connaissance codifiée à diffusion à distance. Pour certains chercheurs en
géographie de l’innovation, la proximité physique en soi a peu d’influence, l’important pour
la diffusion de connaissances c’est la qualité des échanges effectifs existant entre les agents
(Zucker, Darby … 2000). De la même façon, les TIC n’autorisent pas à elles seules la
transmission de connaissances à distance. Leur capacité à le faire dépend des structures
relationnelles existant entre les agents. En ce sens, lorsqu’ils s’appuient sur une proximité
relationnelle forte, les échanges par les TIC ne sont pas moins forts, moins tacites, moins
sociaux, moins négociés… que les échanges en face à face (Amin et Cohendet, 2003). Ils ne
s’y substituent pas mais les complètent en s’appuyant sur des structures relationnelles
différentes, non fondées sur la proximité géographique (appartenance à une firme
multinationale, réseau de chercheur en collaboration, réseaux d’anciens élèves d’une même
école, etc.).
3. Infrastructures de communication et dynamique d’agglomération.
Dans une approche plus macro-économique du développement différencié dans
l’espace, les modèles d’économie géographique permettent d’envisager les répercussions
d’une amélioration des conditions de communication soit sur la localisation des activités
économiques dans leur ensemble soit spécifiquement sur la localisation des activités de R&D.
Couramment ces modèles situent les TIC comme un élément nouveau du processus historique
de réduction générale des coûts de transaction qui a marqué le XXème siècle. Ces coûts de
transaction englobant non seulement les coûts de transport et les barrières tarifaires mais aussi
les coûts de communication.
L’innovation dans le domaine des télécommunications est de nature à réduire les coûts
et les délais d’échanges d’informations. Or, si les flux de connaissance sont sans coût, les
forces d’agglomération deviennent ténues, poussant à la dispersion des activités économiques.
A l’extrême, comme l’indiquent Henderson, Shalizi et Venables (2001), si les transports et la
9
communication sont sans coût, la géographie économique est vouée à la disparition : « if
transport and communications are costless we encounter the end of geography » p. 84.
On peut cependant repérer deux perspectives dans ces analyses en distinguant
l’approche statique de l’économie géographique et l’approche dynamique de la croissance
endogène avec déterminants géographiques.
3.1. TIC et baisse des coûts de transaction dans les modèles d’économie géographique
Dans le cadre des modèles statiques d’économie géographique à la Krugman (1991),
les TIC viendraient simplement renforcer l’effet de la baisse des coûts de transport en
étendant son impact au secteur des services et globalement des flux immatériels. Le schéma
Centre-Périphérie pourrait d’abord s’en trouver renforcé. Mais il se pourrait aussi, qu’après un
certain seuil, cette accentuation de la baisse des coûts de transfert réduisent suffisamment le
poids des liaisons interindustrielles dans la détermination des localisations pour conduire à un
retour vers les localisations déterminées par les prix des facteurs. Un effet de dispersion de
l’activité pourrait alors être attendu6 .
Henderson et Mitra (1996) observent aussi qu’une réduction des coûts d’échange de
l’information agit comme une force de dispersion7 . En reliant explicitement les théories de la
localisation aux externalités informationnelles, leur modèle met au centre des dynamiques de
localisation les coûts de transport, le prix des loyers, mais aussi les possibilités de
communication. Le niveau des échanges d’information entre deux villes décroît au fur et à
mesure que la distance qui les sépare augmente. Dans ce contexte, les choix de localisation
pour l’implantation d’une ville nouvelle dépendent du taux de décroissance des échanges
d’information avec la distance. Plus ce taux est élevé, plus l’incitation est forte pour localiser
la ville nouvelle à proximité de la ville centre. Inversement, plus le coût de l’information est
faible, plus on se localise à distance.
La baisse des coûts d’information associée au développement des TIC est donc de
nature à modifier la configuration spatiale des activités économiques, soit dans le sens d’une
plus d’une plus forte agglomération de ces dernières (tant que les coûts restent tout de même
au-dessus d’un certain seuil), soit au contraire dans le sens d’une plus grande dispersion.
6
Cette « histoire » est basée sur les conclusions du modèle Krugman et Venables (1995).
L’approche de Henderson et Mitra (1996) s’écarte des modèles traditionnels d’économie géographique dans la
mesure où les choix de localisation ne résultent pas des comportements d’individus atomistiques. Le marché de
l’emploi est au contraire caractérisé par une situation de monopsone liée à la présence d’un agent chargé du
développement de la ville périphérique.
7
10
3.2. TIC et globalisation des externalités de connaissance dans les modèles de la
synthèse « économie géographique-croissance endogène »
Dans les modèles dynamiques de croissance endogène avec déterminants spatiaux on
montre que la réduction forte des coûts de transaction des marchandises dans un monde où les
externalités de connaissances restent localisées peut conduire à des phénomènes
d’agglomération renforcés. L’introduction des TIC et le développement des infrastructures qui
y sont liées, viendraient alors décloisonner les interactions technologiques et les flux de
connaissances, impliquant une réduction forte des forces d’agglomération et une possible
dispersion des activités d’innovation dans l’espace (Riou, 2002). Comme la baisse des coûts
de transport pour les flux physiques, la baisse des coûts de communication rendrait obsolète la
notion de distance pour les flux immatériels, et en particulier l’échange de connaissances. Les
prédictions des modèles indiquent alors que la réduction des coûts (ou la réduction des délais)
de communication s’accompagne d’une diminution des forces d’agglomération et est donc
susceptible de conduire à une plus forte dispersion des activités économiques et en particulier
des activités de R&D.
Pour certains même, les régions périphériques devraient bénéficier d’un phénomène de
rattrapage technologique basé sur ces nouvelles opportunités de diffusion du savoir (Baldwin,
Martin, Ottaviano, 2001).
Dans les termes de F. Cairncross (2001, p.16) :
« To allow communications to work their magic, poor countries will need sound regulations,
open markets, and above all, widely available education. Where these are available, countries
with good communications will be indistinguishable. They will all have access to services of
world class quality. They will be able to join a world club of traders, electronically linked, and
to operate as though geography has no meaning. This equality of access will be one of great
prizes of the death of distance » 8 .
Pour d’autres auteurs, certains effets peuvent cependant remettre en cause ce résultat
premier. De la même façon que dans Krugman (1991) la baisse des coûts de transport peut
engendrer une plus forte concentration, il est possible que la baisse des coûts de
communication s’accompagne d’une hausse du degré d’agglomération.
En effet, les conclusions précédentes négligent le fait que les TIC offrent des moyens
de communication à distance qui n’affectent pas de la même façon toutes les activités et tous
les échanges d’informations, certains restant sans doute peu affectés par ces nouvelles
8
cité aussi par Venables (2001).
11
technologies. Venables (2001) distingue quatre voies par lesquelles les TIC peuvent affecter
les coûts de transaction : ces technologies modifient les coûts de recherche et d’appariements,
les coûts direct de transport, les coûts de contrôle et de management et les coûts liés aux
délais de communication entre deux localisations. Les TIC réduisent certains de ces coûts
mais elles peuvent parfois agir de façon ambiguë en touchant de manière très différenciée les
activités et les fonctions économiques. Même dans les activités a priori les plus sensibles à ces
évolutions, comme la recherche-développement et l’innovation, les TIC ne recouvrent pas
nécessairement la totalité des échanges de connaissance. En particulier, comme nous l’avons
vu ci-dessus, il n’est pas évident que ces nouvelles technologies remplacent les contacts face à
face. Les messageries électroniques remplacent sans doute plus les échanges téléphoniques
que les rencontres interindividuelles9 . Au-delà, lorsque les TIC s’avèrent être des
compléments aux contacts face à face leur développement peut s’accompagner d’un
renforcement des forces d’agglomération et du rôle de la proximité dans l’accumulation de
connaissances.
Enfin, l’importance du rôle des grandes firmes et des groupes pourrait aussi impliquer
une plus forte utilisation des TIC pour la diffusion de connaissances intra-firme. Ainsi plutôt
que de favoriser l’implantation de firmes innovantes dans les zones périphériques, le
développement des télécommunications, associé au maintien de coût de transport positif,
pourrait au contraire conduire les firmes à concentrer d’autant plus facilement les activités
innovantes dans les zones agglomérées qu’elles savent pouvoir ensuite transporter cette
connaissance facilement dans leurs implantations du monde entier (Gersbach et Schmutzler,
2000). Là encore, une conclusion définitive reste difficile tant on manque d’études empiriques
permettant de cerner plus précisément l’articulation de ces différents effets.
4. TIC et proximité géographique : Evidences empiriques
4.1. La concentration spatiale des TIC
En tant qu’infrastructure matérielle, les TIC sont très inégalement réparties sur le
territoire. Tant du point de vue des secteurs producteurs de TIC que des utilisateurs, on repère
9
Les messageries électroniques améliorent les possibilités offertes par les échanges téléphoniques, puisque les
conversations entre individus géographiquement distants peuvent alors se produire de manière asynchrone, à des
moments convenant à chacun des participants.
12
une forte concentration spatiale de l’activité dans ce domaine. Les études menées au niveau
mondial montrent ces inégalités fortes 10 ; sur l’Europe elles révèlent clairement une
concentration des TIC dans la « banane bleue » avec quelques débordements vers les pays
nordiques (Koski et al., 2002). Au niveau national, l’Ile de France et Midi-Pyrénées
apparaissent comme les deux régions françaises les plus orientées sur la production des TIC,
les seules à franchir la barre des 6% d’emplois affectés à ces secteurs (Briant, 2001). Les
régions du Nord et de l’Est (à l’exception de l’Alsace) ont au contraire très peu développé ces
activités jusque là. Pour ce qui concerne l’utilisation on retrouve sans surprise l’Ile de France
en tête des régions françaises suivies de la zone Sud-Est (PACA + Languedoc-Roussillon)
puis de Centre-Est et Sud-Ouest. D’autres régions bien placées en termes de production se
retrouvent par contre reléguées dans les derniers rangs en termes d’utilisation : il s’agit des
régions du Centre et de l’Ouest (Briant, 2001). Ainsi, si par des mesures de décentralisation à
un moment (équipement de télécommunication en Bretagne par exemple) la production a pu
être dispersées vers des régions nouvelles, l’utilisation des équipements TIC reste fortement
liés au niveau d’activité préexistant 11 . De façon générale les études montrent que ce sont les
entreprises les plus innovantes et disposant d’une dimension internationale qui sont les plus
susceptibles d’investir dans les équipements TIC (Lesne et Mairesse, 2001). Un certain effet
d’autorenforcement semble exister qui ne poussent pas les régions les plus en retard à investir
dans les TIC comme moyen de rattrapage technologique.
Par ailleurs, l’hypothèse théorique d’une plus forte utilisation des communications
interactives dans les zones à forte densité de population est confirmée par la relation
économétrique mise en évidence par Imagawa (2002) sur les données japonaises entre
communication interactive et densité de population. Les études en termes de durée de
communications confirment aussi ce fait : au Japon et dans une moindre mesure aux EtatsUnis, le temps passé au téléphone est plus important en zone urbaine qu’en zone rurale 12 .
10
Avec en particulier une production de TIC et des taux d’utilisation par habitant record aux Etats-Unis.
Une étude réalisée à partir des noms de domaine sur Internet en Italie montre une très forte concentration de la
distribution géographiques des utilisateurs, concentration qui dépasse celle de la population et des revenus
(Bonaccorsi et alii, 2002)
12
On note toutefois un résultat contradictoire dans le cas des Etats-Unis : les zones les moins peuplées sont
celles qui utilisent le plus le téléphone. Il pourrait donc y avoir deux types de lien entre localisation et usage du
téléphone : dans les zones les plus reculées, il permet de pallier la distance géographique. En revanche, dans les
zones urbaines, se localisent des agents qui du fait de leurs activités ont intérêt à la fois à se trouver dans une
agglomération et à téléphoner. Autrement dit, les agents qui choisissent de se localiser dans les grandes villes
sont principalement ceux qui utilisent beaucoup le téléphone. Il faudrait en fait regarder, pour des agents
similaires – même type d’activité – si l’usage du téléphone est le même suivant la localisation. Il faudrait
également étudier la destination des appels. Probablement que l’on retrouverait une structure géographique
proche de celle constatée pour les copublications, à savoir : appels surtout en direction du principal centre urbain
11
13
Au total, en tant que zones de concentration d’activités et de population, les
agglomérations urbaines semblent être les lieux privilégiés de production et d’utilisation des
TIC. Mais au-delà de cette conclusion, notre problématique nous pousse plutôt à nous
interroger sur ce que seraient les effets spatiaux éventuels d’une diffusion généralisée des
TIC. Dans un monde où l’accès aux marchés et aux sources de connaissances semble encore
assez fortement facilité par la proximité géographique, comme nous le montrent les résultats
obtenus sur des estimations de modèles de gravité ou de potentiel marchand et
technologique 13 , la question est de mesurer l’impact éventuel des TIC sur la dimension
géographique des interactions.
En utilisant la littérature qui s’interroge plus spécifiquement sur le devenir des villes
dans un contexte de développement de moyens de communication à distance, il s’agit dans le
paragraphe suivant d’observer si le développement récent des TIC s’accompagne
effectivement d’une réduction de la taille des villes.
4.2. Conséquences géographiques de l’introduction des TIC : réduction ou
accroissement des forces d’agglomération ?
La difficulté pour évaluer les implications géographiques du développement des TIC
est double. D’une part, l’obtention des données est délicate, notamment en raison du caractère
récent de l’introduction des TIC, qui ne permet qu’une évaluation sur une période brève (les
données relatives à l’utilisation d’Internet ou des téléphones portables sont disponibles
seulement à partir de la seconde moitié des années 90). Cela entre en opposition avec
l’observation des phénomènes de localisation qui relèvent de tendances à long terme et
nécessitent une observation sur des périodes longues. Pour cette raison, la comparaison entre
développement des TIC et niveau d’agglomération repose souvent sur l’utilisation du
téléphone plutôt que sur des techniques plus récemment éprouvées. Les observations ainsi
réalisées semblent confirmer, aux Etats-Unis, au Japon et en Europe la complémentarité entre
développement des TIC et agglomération spatiale des activités économiques.
régional pour les agents localisés en zones rurales et appels plus nationaux et internationaux dans les grandes
villes.
13
Utilisés surtout en économie internationale pour mesurer l’impact de la distance entre les pays sur leur niveau
de relations commerciales, les modèles de gravité (Bergstrand, 1989; Deardorff, 1998) et les variables de
potentiel marchand (Harris, 1964), commencent à être utilisés pour mesurer l’impact des difficultés d’accès sur
les flux technologiques (Keller, 2001) ou l’impact de la distance dans l’accessibilité aux sources de
connaissances (cf. Riou, 2002).
14
Les données que nous avons pu collecter dans le contexte européen restent très
parcellaires, mais semblent cohérentes avec les observations de Gaspar et Glaeser (1998) sur
les Etats-Unis et le Japon (cf. graphique ci-dessous).
Graphique 1 :
Evolution comparée de la croissance urbaine et de la pénétration du téléphone en Europe.
90
80
70
60
Hab. des aires
urbaines en France
50
40
Téléphone fixe en
Europe
30
20
10
19
75
19
78
19
81
19
84
19
87
19
90
19
93
19
96
19
99
0
L’accroissement concomitant des TIC et du niveau d’urbanisation laisse penser que les
innovations dans ce secteur ne réduisent pas les forces d’agglomération. Cependant, il est
difficile d’établir un lien de causalité entre ces deux tendances. Elles sont sans doute plutôt la
résultante de forces exogènes communes.
Des études plus fines sont donc nécessaires pour tenter de repérer la relation entre
dimension géographique des échanges et moyen de communication à distance et pour tenter
de repérer les éventuels effets de substitution ou au contraire de complémentarité qui pourrait
exister entre communication par les TIC et contacts face-à-face. Mais ces études sont encore
peu nombreuses et peu centrées sur les activités de recherche et d’innovation.
Sur la base des travaux de Imagawa (1996, 2002) sur données japonaises et des
investigations sur données américaines menées par Gaspar (1996), Glaeser (1998) et Gaspar
et Glaeser (1998), on peut recenser cependant un ensemble de faits marquants :
15
-
au Japon, le nombre d’appels téléphoniques entre deux zones dépend négativement de la
distance entre ces deux zones. Si 91% des contacts face à face (mesurés par le transport de
passagers) sont internes aux agglomérations, plus de 80 % des appels téléphonique et 79%
des appels sur téléphone cellulaire le sont aussi. Les interactions par le biais des TIC ne
semblent donc pas « libres » de toutes contraintes géographiques.
-
le développement du téléphone ne s’est pas accompagné d’une réduction du nombre de
voyages d’affaires. Les études de corrélation réalisées par Imagawa (2002) entre appels
téléphoniques et contacts face à face (transport de personnes) au sein de différents rayons
de distance géographique (une fois contrôlés les déterminants de ces échanges tenant aux
effets traditionnels de gravité : population, revenu par habitant, distance géographique…)
montrent une très forte corrélation à courte distance qui a ensuite tendance à diminuer
avec l’éloignement mais qui ne s’inverse jamais. Ainsi l’effet de complémentarité entre
TIC et contacts face-à-face, très fort à courte distance, diminue pour de plus longue
distance mais n’est jamais remplacé par un effet de substitution. L’hypothèse d’une
substitution entre transport et télécommunication est aussi mise à mal par d’autres auteurs
qui remarquent au contraire que le développement des TIC est loin d’avoir résolu les
problèmes de congestion dans les transports 14 .
-
L’estimation de deux modèles de gravité cherchant à expliquer le nombre de contacts face
à face et le nombre de contacts téléphoniques entre deux préfectures japonaises conduisent
Imagawa aux conclusions suivantes. A population et niveau de revenu constant, la
fréquence des contacts face-à-face diminuent rapidement avec la distance de manière
relativement proportionnelle. La fréquence des appels téléphoniques décroît moins
rapidement avec la distance et de plus avec un effet de seuil important à la frontière de la
préfecture d’origine. Ceci semble confirmer à nouveau le lien positif entre face-à-face et
téléphone à courte distance. Plus précisément encore l’accroissement des contacts face à
face à un effet positif significatif sur l’accroissement du nombre de communications
téléphoniques 15 et cet effet de complémentarité diminue encore une fois avec la distance.
De telles approches sont révélatrices de l’existence d’une forte complémentarité entre
échanges interindividuels par les TIC et en face-à-face. Elles ne nous permettent cependant
14
Cf. Mokhtarian (1998) et Mokhtarian, Salomon (2002) cité in Mokyr (2002). Ces auteurs remarquent par
exemple que le téléphone cellulaire est par construction un complément aux déplacements humains puisqu’il
facilite la mobilité des hommes.
15
On doit cependant rester ici prudent sur l’interprétation car les régressions ne permettent pas d’assurer qu’il
n’existe pas de variables omises importantes qui affecteraient les deux formes de contacts.
16
pas d’appréhender la question spécifique de la dimension géographique des externalités de
connaissance. En observant les échanges téléphoniques, on se situe bien au-delà des flux de
connaissance scientifique. Il est donc difficile d’en tirer des résultats pour la diffusion et
l’accumulation de connaissance.
Pour aller plus loin sur cette question, Un ensemble de travaux évalue l’impact des TIC
sur la production scientifique, la communication entre chercheurs et les modalités de diffusion
des connaissances. Ces études s’interrogent sur le rôle de substitut ou au contraire de
complément des TIC par rapport aux modalités plus traditionnelles d’échanges de
connaissances. En ce sens, leurs conclusions sont souvent plus larges que la seule
conséquence géographique qui nous intéresse ici. Cependant, cette analyse générale de la
complémentarité ou de la substituabilité entre les différentes modalités de diffusion des
connaissances permet de donner un premier éclairage des implications spatiales des TIC en
termes de diffusion des connaissances.
4.3. Impact des TIC sur la communication scientifique : complémentarité ou
substituabilité avec les moyens de communication traditionnels ?
Les travaux précédents suggèrent qu’à l’évidence, si certaines modalités de l’échange
d’information semblent pouvoir être remplacées par des contacts électroniques, la
substituabilité est loin d’être parfaite. Du point de vue des échanges scientifiques, on constate
que les TIC révolutionnent certaines modalités de publications tant concernant l’accès à ces
informations (format électronique ou format papier) que la nature des publications
(conférences, rapports, articles, livres). Ainsi, d’après l’étude de S. Stevens-Rayburn et N.
Bouton (1998) sur l’évolution de la recherche en astronomie, on peut penser que le format
électronique devrait devenir un point de passage obligé. Les publications traditionnelles, non
disponibles instantanément, risquent de devenir secondaires, en raison non pas d’une qualité
moindre, mais de la préférence accordée par les individus aux informations les plus
accessibles. Cette idée est confirmée par A. Goodrum et al. (2001) qui constatent que les
articles les plus cités en version papier sont ceux qui ont été préalablement disponibles sur le
web. C’est également confirmé par l’étude de S. Lawrence (2001a). Ce dernier s’interroge sur
l’impact de la mise à disposition gratuite des connaissances scientifiques sur le web. Il analyse
pour cela les citations dans le secteur informatique. Il ressort une corrélation très nette entre le
nombre de citations dont un article fait l’objet et le fait qu’il soit disponible en version
électronique. En moyenne, un article disponible en ligne est 2,6 fois plus cité qu’un article
disponible seulement en version papier. Bien qu’il soit difficile de déterminer le sens de la
17
corrélation (les articles mis en ligne prioritairement peuvent être les articles fondamentaux qui
auraient, de toute façon été plus cités), il est cependant légitime de penser qu’en raison de leur
accessibilité, les articles du web sont plus «visibles » et donc plus susceptibles d’être lu et
cités 16 .
Le web transforme la façon dont les chercheurs ont accès à la littérature scientifique.
Cette transformation ne provient pas d’un accroissement du volume d’information disponible
(S. Lawrence, 2001b). L’essentiel de l’information était déjà disponible via les bibliothèques
ou la rencontre des personnes compétentes. Le changement tient donc surtout à une meilleure
accessibilité à cette information (fonctionnalité, coût, accès, diffusion).
Malgré les risques 17 , on voit aujourd’hui assez bien l’intérêt d’une mise à disposition
électronique des articles traditionnellement publiés dans des revues. En revanche, les atouts
des TIC sont plus rarement mis en évidence pour justifier une substitution aux contacts face à
face. En effet, substituer un article électronique à un article imprimé ne constitue pas un
changement majeur, dans la mesure ou la modalité de transmission de la connaissance est
similaire, ne faisant appel dans aucun des deux cas à un échange direct entre le producteur de
la connaissance et celui qui y a accès. Les échanges qui ont lieu en face à face sont donc
affectés très différemment par le développement des TIC.
Au-delà de leur intérêt formel (échange de connaissance) les contacts en face à face
procurent un certain nombre d’avantages que l’on a du mal à retrouver dans les rencontres
virtuelles ou la mise à disposition d’informations sur le web. Ainsi, les conférences ne sont
pas seulement l’occasion de présenter une recherche à un auditoire compétent afin d’en
recueillir les réactions. Elles créent également des opportunités de conversations informelles,
de rencontres avec des collègues, des éditeurs de revues scientifiques, des organisateurs de
conférences futures, etc. Les vidéo-conférences ne semblent pas offrir ce type d’atouts. Les
TIC offriraient donc des supports alternatifs aux échanges de type « publications » mais
viendraient par contre plus difficilement concurrencer et remplacer les échanges face à face 18 .
16
Lawrence compare en effet les citations de publications ayant une même origine (même conférence par
exemple). On peut donc raisonnablement penser qu’elles disposent d’une qualité scientifique comparable. Or les
articles en lignes sont là aussi plus cités que les autres.
17
Ces évolutions, concernant la nature des informations ainsi que les moyens pour y accéder, présentent
cependant des risques, tels que l’inégal degré de qualité scientifique ou les biais d’accès liés aux moteurs de
recherche. Comme le constate S. Lawrence (2001b), l’essentiel du trafic et des liens se concentre sur un nombre
très restreint de sites, dépendants des premiers résultats fournis par les moteurs de recherche.
18
Certaines expériences tendent toutefois à relativiser cette analyse. Ainsi, Crawford et al. (1996) ont recueilli
les avis de participants à une conférence électronique en chimie. Outre les commentaires positifs formulés par
ces participants concernant le contenu des papiers présentés, il ressort un très net enthousiasme pour la forme
innovante de la conférence. Les 450 participants, issus de 33 pays, auraient particulièrement apprécié : i) la
18
Duarte et Snyder (2001) considèrent que la communication vidéo n’est pas un bon média pour
des discussions visant l’émergence de nouvelles idées ou le développement conceptuel. Des
difficultés de communications interpersonnelles apparaissent que l’on ne retrouve pas dans le
face-à-face. La transmission vidéo transforme le contexte de la gestuelle (langage du corps et
des yeux) des participants à tel point que le message reçu par cette gestuelle peut être très
différent de l’intention initiale.
En simplifiant l’accès à l’information et les échanges de connaissance les TIC
apportent donc des fonctionnalités nouvelles susceptibles de remettre en cause les formes
traditionnelles de diffusion des connaissances telles que les publications voire certains types
de rencontres en face à face. Cependant, même si les contacts électroniques semblent offrir
une modalité d’échange pertinente, permettant notamment aux individus d’économiser du
temps et des ressources financières, ils ne semblent pas pouvoir se substituer complètement
aux rencontres traditionnelles en face à face.
Au-delà, le développement de ces nouveaux moyens de communication peut
s’accompagner d’un renforcement du besoin de contact face à face. En effet, non seulement la
substituabilité n’est pas parfaite entre les nouvelles formes de communication et
d’information, mais il semble même qu’il y ait une certaine forme de complémentarité, ce qui
confirmerait l’hypothèse de complémentarité présentée dans les théories de l’apprentissage
localisé décrites ci-dessus (Gaspar et Glaeser, 1998). Au total l’impact sur l’agglomération
dépendra de l’importance relative de l’effet de complémentarité. D’un point de vue
empirique, on dispose à l’heure actuelle de trop peu d’observations pour fournir une
évaluation de cet effet.
On peut toutefois constater que le développement des possibilités de publications et
d’échanges en ligne coïncide avec un accroissement du nombre des copublications. Les
publications électroniques mais aussi les formats papier, indiquent beaucoup plus
fréquemment les adresses électroniques des auteurs que ne l’étaient les coordonnées
téléphoniques ou postales. Elles sont en outre plus faciles à utiliser pour nouer un contact que
le téléphone ou le déplacement physique, créant ainsi des opportunités d’échanges et de
recherches beaucoup plus collectives. Le développement des TIC, en facilitant les contacts,
qualité des discussions, favorisée par la possibilité de temps de formulation des commentaires, ii) le fait de ne
pas avoir à se déplacer, iii) la suppression de certaines barrières relationnelles présentes dans les formes
traditionnelles de conférences et n’offrant pas des opportunités de participation égale pour tous.
19
semble donc permettre des collaborations plus nombreuses 19 . Le développement des contacts
électroniques peut donc être à l’origine d’un renforcement des collaborations et des besoins de
rencontres en face à face, facilités par la proximité géographique. Gaspar et Glaeser (1998)
observent par exemple que l’accroissement des copublications dans les revues économiques
ne s’est pas accru au profit des seules collaborations à distance. L’augmentation du nombre de
collaborations avec des chercheurs de la même institution ou de la même zone géographique
est au contraire très significatif. On remarquera d’ailleurs que la révolution des technologies
de l’information est en grande partie née dans des districts industriels type Silicon Valley.
Cependant l’étape suivante n’est-elle pas celle de la constitution de districts industriels
virtuels rassemblant des acteurs du monde entier ? Plus précisément l’idée de
« collaboratoire » 20 ou de laboratoire sans mur reflète bien les potentialités offertes par le
développement d’Internet pour le développement du travail scientifique en collaboration y
compris à distance (Finholt, 2003 21 ) et l’attente qui en a résulté concernant la levée des
contraintes de proximité et de co-localisation. L’hypothèse d’une nouvelle ère scientifique
fondée sur la science comme intelligence distribuée à tous sans contrainte d’espace a pu voir
le jour. Les enseignements des expériences de « collaboratoires » mises en œuvre dans divers
domaines entre 1980 et 2002, montrent qu’au-delà du partage et de l’exploitation de données
communes, le développement de réseaux complexes de collaborations scientifiques en univers
virtuel reste difficile et ne s’affranchit pas de la nécessité de rencontres face-à-face ou de zone
de co-localisation. L’utilisation systématique des nouvelles technologies ne permet pas non
plus en soi de dépasser les sources de hiérarchie ou d’asymétrie créée par l’organisation
historique du travail scientifique.
5. Conclusion
Les TIC produisent plusieurs effets susceptibles de répercussions sur les agglomérations
urbaines :
19
Toutefois, comme le montre A. Odlyzko (2000), ce processus de développement des copublications
scientifiques a débuté bien avant l’arrivée d’internet, même s’il semble s’être accéléré nettement depuis la fin des
années 80.
20
Proposé pour la première fois à la fin des années 1980 par des informaticiens « a collaboratory is a center
without walls, in which researchers can perform their research without regard to physical – interacting with
colleagues, accessing instrumentation, sharing data and computational resources, and accessing information in
digital libraries » (Wulf, 1989, p.19 cité in Finholt, 2003).
21
Ainsi que l’ensemble du numéro spécial « Collaboration technologies and the economics of collaborative
research » de la revue Economics of Innovation and New Technology, vol.12, 1, 2003 édité par P.A. David et
W.E. Steinmueller
20
-
Elles rendent presque nuls les coûts d’échange d’informations. Cette réduction des
coûts modifie le rôle des agglomérations dans la transmission de savoirs, sans qu’il
soit pour autant possible de prédire un renforcement ou une réduction du besoin de
proximité. Ce paradoxe posé par la localisation des spillovers de connaissance dans
des zones où la révolution de l’information et de la communication réduit
considérablement les coûts de communication tient pour D. Audretsch et P. Welfens
(2002) à la différence entre information et connaissance. L’information, facilement
codifiable, appelle une signification et une interprétation unique, tandis que la
connaissance est plus floue, plus difficile à codifier et transmettre. Or, si le coût de
transmission de l’information est devenu invariant quelle que soit la distance
géographique à couvrir, le coût marginal de transmission de la connaissance reste en
revanche croissant avec la distance. De manière générale, plus le contenu de l’échange
est complexe, irrégulier, incertain, imprévisible et difficilement codifiable, plus la
sensibilité à la distance géographique est forte.
-
Elles réduisent les pertes informationnelles dues à la communication à distance. La
sensibilité à la distance de la transmission de connaissances s’en voit donc modifiée
mais là encore de façon paradoxale. D’un côté, l’amélioration de la capacité à
transmettre des informations complexes diminue d’autant la sensibilité à la distance de
la transmission de connaissances. D’autre part, l’abondance de l’information transmise
et la multiplication des opportunités de communications renforcent le besoin de
proximité pour l’interprétation, l’absorption et la transformation des informations
transmises en connaissances.
-
Elles autorisent l’accès individuel à des communications globales. Cet accès nécessite
la mise en réseau. Cette dernière est réalisée avant tout dans les agglomérations, en
raison des externalités qui sont associées à la mise en place de tels réseaux. Ainsi, en
tant qu’infrastructure matérielle les TIC ont un coût d’accès important. Les effets de
complémentarité et les besoins de coordination qu’impliquent les investissements en
TIC créeraient des nouvelles asymétries spatiales dans l’accès à ces infrastructures et
donc dans la diffusion des connaissances.
Ces transformations à l’œuvre dans la dimension géographique de la transmission des savoirs
vont immanquablement modifier les conditions de localisation des activités innovantes et avec
elles le panorama de la géographie économique sans que les analyses théoriques ne permettent
aujourd’hui de concevoir clairement le sens de ces modifications.
21
La conception très générique des TIC réduisant les coûts de transmission de l’information, ou
augmentant la part des connaissances codifiées dans l’économie, est sans doute à l’origine de
cette ambiguïté. De manière générale une spécification plus fine des modèles théoriques
concernant les fonctions des TIC dans la transmission de connaissances et les processus
d’apprentissage est à développer. Elle pourrait éviter la tendance au déterminisme
technologique décentralisateur de certaines politiques publiques locales.
Il importe par ailleurs de renforcer les moyens d’étude de ces évolutions complexes afin de les
anticiper et d’adapter en conséquence les politiques de développement régional. Il manque en
particulier encore une collecte régulière et la publication d’informations systématiques sur les
systèmes de télécommunication et les infrastructures d’information ainsi que sur les pratiques
informationnelles des agents. Il s’agit par là non seulement de mieux évaluer les potentialités
offertes par les technologies elles-mêmes mais aussi de mieux en cerner les modalités de mise
en œuvre. Comme nous avons pu le remarquer dans le cas de la recherche scientifique, même
lorsque les potentialités sont là, la technologie seule ne suffit pas à bouleverser les modes
organisationnels préétablis. Une bonne compréhension de l’impact d’une évolution dans la
mobilité des connaissances sur les processus de croissance régionale différenciée ne peut faire
abstraction de cette étape empirique. Au-delà des études ciblées sur les pratiques d’usage des
TIC 22 , des informations systématiques font défaut à la fois en raison de l’absence d’agence
locale chargée de l’organisation, de la construction et du suivi des systèmes de
communication et en raison de la rapidité à laquelle les transformations ont lieu. Ainsi, bien
qu’il y ait beaucoup d’information disponible sur les infrastructures de télécommunication et
les investissements à un niveau national et international, l’obtention d’informations sur
l’utilisation des systèmes de communication urbains, régionaux, nationaux ou internationaux
en matière de recherche et de diffusion de connaissance nécessite de l’imagination, du temps
et des ressources. L’économiste peut sans doute compter sur le développement de la
webmétrie pour pouvoir bientôt disposer de données exploitables.
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