LE TH´
EOR`
EME TAUB´
ERIEN DE WIENER
Ramona ANTON et Aur´elien DJAMENT
juin 2001
Sujet propos´e par R´egis de la BRET`
ECHE
On se propose, `a partir d’un r´esultat g´en´eral ”abstrait” d’analyse de Fourier, le th´eor`eme de densit´e de Wiener (qui
fait l’objet de la section 2), d’´etablir le th´eor`eme taub´erien de Wiener, dont on d´eduit ais´ement d’autres th´eor`emes
taub´eriens plus ”concrets” (section 3). Combin´es `a des consid´erations ´el´ementaires d’arithm´etique (´etablis dans les
sous-sections 1.2 et 4.2.1) et `a quelques lemmes cruciaux (voir 1.3 et 4.2.2), ils entraˆınent aussitˆot des r´esultats centraux
de th´eorie des nombres : nous donnons `a la section 4 l’exemple du th´eor`eme des nombres premiers et du th´eor`eme de
Dirichlet sur les nombres premiers en progression arithm´etique.
Table des mati`eres
1 Pr´eliminaires arithm´etiques 1
1.1 SommationdAbel ............................................... 1
1.2 Fonctions arithm´etiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2.1 La fonction µdeM¨obius........................................ 2
1.2.2 La fonction ϕdEuler ......................................... 3
1.2.3 La fonction Λ de von Mangoldt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.2.4 Les fonctions ϑet ψdeChebyshev.................................. 3
1.3 La fonction ζdeRiemann........................................... 4
2 Le th´eor`eme de densit´e de Wiener 6
2.1 L’alg`ebre de Wiener sur Ret U........................................ 6
2.2 Quelqueslemmes................................................ 7
2.3 L’action des fonctions analytiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2.4 Sous-espaces de L1invariants par translation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
3 Application `a des th´eor`emes taub´eriens 10
3.1 Le th´eor`eme de Wiener . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
3.2 Le th´eor`eme d’Ingham . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
3.3 Le th´eor`eme de Hardy-Littlewood-Karamata . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
4 Applications arithm´etiques 13
4.1 Le th´eor`eme des nombres premiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
4.2 Le th´eor`eme de la progression arithm´etique de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
4.2.1 Caract`eres d’un groupe ab´elien fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
4.2.2 Caract`eres et fonctions LdeDirichlet ................................ 14
4.2.3 Nombres premiers en progression arithm´etique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1 Pr´eliminaires arithm´etiques
La fonction π, qui `a xassocie le nombre de nombres premiers inf´erieurs ou ´egaux `a x, s’av`ere peu maniable : nous
pr´esentons ici des fonctions auxilliaires, introduites par Chebyshev, dont le comportement asymptotique est plus facile
`a ´etudier que celui de π(limx+π(x)
x/ log x= 1, th´eor`eme des nombres premiers), qui fut conjectur´e d`es le dix-huiti`eme
si`ecle. Nous introduisons ensuite la fonction ζde Riemann, qui fournit la cl´e de cette ´etude (cf. preuve du th´eor`eme
d’Ingham).
Convention : les sommations ou produits indic´es par pne portent que sur les nombres ppremiers.
1
1.1 Sommation d’Abel
Les diff´erents proed´es de sommation d’Abel, dont on trouvera une preuve dans [9], constituent un outil tr`es
commode en arithm´etique.
Proposition 1 (formule classique de sommation d’Abel) : Soient (an)n1,(bn)n1des suites de nombres complexes ;
on pose A0= 0,An=Pn
m=1 ampour n1. On a alors, pour tout N1:
N
X
n=1
anbn=ANbN+
N1
X
n=1
An(bnbn+1).(1)
Proposition 2 (formule de sommation d’Abel pour les int´egrales de Stieltjes) : Etant donn´ee une suite (an)n1de
nombres complexes, on pose A(t)=Pntan(t > 0). Alors, pour bC1([1, x]), on a :
X
1nx
anb(n) = A(x)b(x)Zx
1
A(t)b0(t)dt. (2)
Corollaire (comparaison d’une somme et d’une inegrale) : Soit fune fonction r´eelle et monotone sur l’intervalle
[a, b], a,bZ. Alors il existe un r´eel θ=θ(a, b),0θ1tel que :
X
a<nb
f(n) = Zb
a
f(t)dt+θ(f(a)f(b)).
1.2 Fonctions arithm´etiques
On appelle fonction arithm´etique une fonction d´efinie sur N`a valeurs complexes. La fonction f:NCest dite
multiplicative si
(i)f(1) = 1 (ce qui ´equivaut `a fnon identiquement nulle si (ii) est v´erifi´ee),
(ii)f(mn) = f(m)f(n) pour (m, n) = 1.
On dit que fest compl`etement multiplicative si la condition (ii) est satisfaite mˆeme pour (m, n)6= 1.
1.2.1 La fonction µde M¨obius
Soit µla fonction arithm´etique d´efinie par
(i)µ(1) = 1,
(ii)µ(n) = (1)ksi n=p1·. . . ·pk,pipremiers distincts,
= 0 sinon.
La fonction µest multiplicative (cons´equence imm´ediate de la d´efinition). Cette fonction permet d’´etablir les
th´eor`emes d’inversion ci-dessous grˆace `a la formule suivante :
X
d|n
µ(d) = 1 si n= 1,
0 si n > 1.
En effet, les seuls diviseurs dde ntels que µ(d)6= 0 sont ceux sans facteur carr´e, donc, si p1. . . pksont les nombres
premiers (distincts) divisant n > 1,
X
d|n
µ(d) = µ(1) + X
i
µ(pi) + X
i<j
µ(pipj) + . . . +µ(p1p2· · · pk)
= 1 C1
k+C2
k+. . . + (1)kCk
k= (1 1)k= 0.
Th´eor`eme 1 (Premi`ere formule d’inversion de M¨obius) : Soit fune fonction arithm´etique et gd´efinie par
g(n) = X
d|n
f(d).
Alors on a
f(n) = X
d|n
µ(d)gn
d.
2
Ce r´esultat est un cas particulier du th´eor`eme suivant :
Th´eor`eme 2 (Deuxi`eme formule d’inversion de M¨obius) : Soit f: [1,[C, posons
g(x) = X
nx
fx
n,
pour x1. Alors pour tout x1
f(x) = X
nx
µ(n)gx
n.
emonstration : On a en effet
X
nx
µ(n)gx
n=X
nx
µ(n)X
kx
n
fx
nk
=X
nkx
µ(n)fx
nk =X
mx
fx
mX
d|m
µ(d)
et la formule pr´ec´edente donne la conclusion.
1.2.2 La fonction ϕd’Euler
La fonction ϕassocie `a nle nombre d’entiers compris entre 1 et nqui sont premiers avec n. On rappelle la propri´et´e
suivante de ϕ:X
d|m
ϕ(d) = m.
Cette identit´e et la formule d’inversion de M¨obius donnent
ϕ(n) = X
d|n
µ(d)n
d=nX
d|n
µ(d)
d.
Autrement dit, ϕ=Id µ, o`u * d´esigne la convolution de Dirichlet (d´efinie par (ab)(n) = Pk|na(k)b(n
k)).
Comme µest une fonction multiplicative, on en d´eduit :
Proposition 3 :La fonction ϕd’Euler est multiplicative.
1.2.3 La fonction Λde von Mangoldt
On d´efinit Λ par
Λ(n) = log(p) si n=pm,m > 0, ppremier,
0 sinon.
Pour tout entier n1, X
d|n
Λ(d) = log(n) (3)
En effet, si n=Qr
i=1 pai
i, o`u les pisont premiers distincts, on a
Pd|nΛ(d) = Pr
i=1 Pai
a=1 Λ(pia) = Pr
i=1 ailog(pi) = log(n).
Cette identit´e et la formule d’inversion de M¨obius fournissent
Λ(n) = X
d|n
µ(d) log n
d= log(n)
X
d|n
µ(d)
X
d|n
µ(d) log(d)
=X
d|n
µ(d) log(d).
Ainsi Λ = µlog = µlog 1.
3
1.2.4 Les fonctions ϑet ψde Chebyshev
On pose, pour xR,
ϑ(x) = X
px
log p, et ψ(x) = X
pmx
log p.
Remarques : -On a ϑ(x) = 0 pour x < 2.
- Par d´efinition de la fonction Λ de von Mangoldt, ψ(x) = PnxΛ(n).
On va ´etablir des relations entre π(x)
x
log x
,ϑ(x)
x,ψ(x)
x.
Th´eor`eme 3 :Soient l1= lim inf
x→∞
π(x)
x
logx
, L1= lim sup
x→∞
π(x)
x
logx
,
l2= lim inf
x→∞
ϑ(x)
x, L2= lim sup
x→∞
ϑ(x)
x,
l3= lim inf
x→∞
ψ(x)
x, L3= lim sup
x→∞
ψ(x)
x.
Alors l1=l2=l3et L1=L2=L3.
emonstration : Pour tout x1
ϑ(x)ψ(x)X
px
log x
log plog p= log xX
px
1 = log x·π(x).
Donc on a ϑ(x)ψ(x)log x·π(x), ce qui implique ϑ(x)
xψ(x)
xlog x
x·π(x) d’o`u L2L3L1.
Soit α]0,1[ . Pour x > 1, ϑ(x)Pxα<pxlog p. Or xα< p ximplique αlog x < log p, donc
ϑ(x)> α log xPxα<px1 = αlog x(π(x)π(xα)).Comme π(xα)xα,ϑ(x)> α log x(π(x)xα). Ainsi :
ϑ(x)
x> αlog x
x·π(x)αlog x
x1α.(4)
Comme 0 <1α < 1, log x
x1αx+0. En faisant tendre xvers l’infini dans (4), on obtient L2αL1.Comme ceci
est vrai pour tout α]0,1[, L2L1. Donc L1=L2=L3.
Pour l1=l2=l3on proc`ede de mˆeme.
´
Etude de la fonction ψ: Posons F(x) = P
m=1 ψ(x
m) : on va montrer que
F(x) = xlog xx+b(x) log x
o`u b(x) = O(1) quand xtend vers l’infini.
Comme ψ(x) = PnxΛ(x), ψest une fonction positive (et croissante). Par suite Fest une fonction croissante. La
somme P
m=1 ψ(x
m) est en fait finie parce que ψ(x) = 0 pour x < 2.
Pour n > 1, F (n)F(n1) =
X
m=1 ψn
mψn1
m.
Le terme g´en´eral de la somme est nul, sauf pour n
mN, auquel cas il vaut Λ( n
m). Donc par (3)
F(n)F(n1) = X
m|n
Λn
m=X
d|n
Λ(d) = log n.
Ainsi F(n) = Pn
m=1 log m= log(n!).
Cela sugg`ere la comparaison de F(x) avec J(x) = Rx
1log tdt=xlog xx+ 1. On a, pour nxn+ 1,
J(x)< F (n)F(x)F(n+ 1) < J(n+ 2).
Donc |F(x)J(x)|<2 log(x+ 2), et
F(x) = xlog xx+1+b(x) log x=xlog xx+b(x) log x,
b(x) = O(1) quand x→ ∞.
4
Cons´equences :—Ona ψ(x) = O(x)
(en effet Pnx(ψ(x
n)x
n+γ+ 1) = O(log x), puis utiliser la deuxi`eme formule d’inversion de M¨obius)
—D’autre part
F(x) = X
nmx
Λ(m) = X
mx
Λ(m)hx
mi, d’o`u
X
mx
Λ(m)
m=O(x) (car X
mx
Λ(m)
m2
xF(x)).
1.3 La fonction ζde Riemann
On va d’abord ´etablir une identit´e essentielle.
Identit´e d’Euler :Pour <s > 1, on a
X
n=1
1
ns=Y
p
(1 ps)1.
Cette identit´e d´ecoule du th´eor`eme suivant, appliqu´e avec f(n) = 1
ns.
Th´eor`eme 4 :Soit fune fonction arithm´etique multiplicative telle que P
n=1 f(n)converge absolument. Alors on a
X
n=1
f(n) = Y
p
(1 + f(p) + f(p2) + . . .).
Si de plus fest compl`etement multiplicative P
n=1 f(n) = Qp(1 f(p))1.
emonstration : Soient P(x) = Qpx(1 + f(p) + f(p2) + . . .) et A(x) l’ensemble des entiers n1 dont tous les
facteurs premiers sont inf´erieurs ou ´egaux `a x: comme Pest un produit fini de s´eries absolument convergentes, si
P(x) = X
nA(x)
f(n) et S=X
nN
f(n),
|P(x)S| ≤ X
n{A(x)
|f(n)| ≤ X
n>x
|f(n)|.
Vu que P
n=1 |f(n)|converge, limx→∞ P(x) = S.
De plus le produit dans la d´efinition de P(x) converge absolument :
X
px
|f(p) + f(p2) + . . . | ≤ X
px
(|f(p)|+|f(p2)|+. . .)
X
n=2
|f(n)| ≤ ∞.
Si fest compl`etement multiplicative, Qp(1 + f(p) + f(p2) + . . .) = Qp(1 + f(p) + f(p)2+. . .) = Qp(1 f(p))1.
efinition (Fonction ζde Riemann) : On pose, pour <s > 1
ζ(s) =
X
n=1
ns=Y
p
(1 ps)1(5)
On note s=σ+it C.
L’identit´e d’Euler donne ζ(s)6= 0 (pour σ > 1).
La fonction ζest tr`es importante en th´eorie des nombres ; son prolongement analytique est ´etroitement li´e aux
nombres premiers.
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