L’immunopathogénie de la TB 5
inhiber la mise en route de l’immunité contre M. tu-
berculosis. Quoique les cellules Treg puissent évi-
demment être—et évidemment sont—exploitées par
M. tuberculosis en sa propre faveur, elles jouent un
rôle important dans le maintien d’une homéostase
immunologique en prévenant un excès d’in amma-
tion ainsi que l’auto-immunité.55 Comme on le discu-
tera ci-dessous, le réglage n de l’équilibre in amma-
toire dans la TB est d’importance majeure pour un
contrôle optimal de l’infection et il est probable que
les Treg se sont développées pour aider à créer et à
maintenir cet équilibre.
Une multitude de cellules et de mécanismes entre-
mêlés sont dès lors impliqués dans la réponse immune
à l’égard de l’infection par M. tuberculosis, sa régula-
tion, son réglage n, notamment les fonctions d’acti-
vation/effecteur et d’inhibition/régulation. L’équilibre
entre la réponse et la capacité à fournir des impacts
effectifs aux cellules-cible infectées par M. tuberculo-
sis va déterminer dans quelle mesure la réponse de
l’hôte conduira à un contrôle de l’infection et peut-
être même à l’éradication bactérienne ou par contre
dans quelle mesure l’infection va progresser et com-
porter des nombres croissants de bactéries, des lé-
sions tissulaires pulmonaires et la transmission d’or-
ganismes du type M. tuberculosis à de nouveaux
hôtes sensibles.19
Vaccins actuels et nouveaux contre la tuberculose :
quel type d’immunité devraient-ils induire ?
Les vaccins BCG actuels, qui sont tous dérivés des
lots de BCG originaux obtenus par Calmette et Gué-
rin, sont parmi les vaccins les plus largement distri-
bués au niveau mondial et ont été administrés proba-
blement plus de 4 milliards de fois. En dépit des
rapports impressionnants sur la sécurité globale du
BCG, il est apparu récemment que les nouveau-nés
atteints d’une infection active par le VIH sont suscep-
tibles de développer une BCgite disséminée. Ceci re-
présente un risque signi catif dans les populations at-
teintes par le VIH,56 et a poussé le Global Advisatory
Committee on Vaccine Safety de l’OMS à recomman-
der de ne plus utiliser le BCG chez les enfants séropo-
sitifs pour le VIH.
Alors que le BCG est ef cient pour la prévention
des TB graves chez les jeunes enfants, sa limitation
principale est constituée par son incapacité à protéger
les adultes de manière signi cative et régulière contre
la TB pulmonaire. On ignore pourquoi le BCG ne
réussit pas à cet égard.57 Il est possible que le BCG ne
réussisse pas à activer de façon adéquate les cellules
immunitaires ou les mécanismes essentiels pour l’im-
munité protectrice à l’égard de la TB. Dans l’état
présent des choses, ceci est dif cile à démontrer car
nous ne comprenons pas complètement quels sont les
mécanisme-clé de la protection contre la TB. La plu-
part des spécialistes de la vaccination contre la TB ar-
gumentent le fait, qu’au minimum, les nouveaux vac-
cins TB doivent induire un large répertoire de cellules
T CD4+ et CD8+, de préférence douées de caracté-
ristiques multifonctionnelles.58 La multi- ou poly-
fontionnalité concerne la production simultanée de
multiple cytokines (IFN-γ, IL-2, TNF, IL-17) et/ou
l’expression de multiples fonctions effectrices (perfo-
rine, granulysine, cytolyse, etc.) par les cellules T indi-
viduelles. A côté de l’exécution de diverses fonctions
effectrices et de la production simultanée de multiples
cytokines, ces cellules produisent également typique-
ment des niveaux plus élevés de cytokines. Toutefois,
à l’inverse des attentes initiales, ces cellules ne sem-
blent pas être en corrélation avec la protection in-
duite par le BCG chez les nourrissons59 et les
a dultes.60–62 De plus, elles sont également présentes
dans la TB active, quoiqu’elles puissent néanmoins
participer à la réponse protectrice de l’hôte visant à
limiter l’infection61 plutôt qu’à contribuer à une ma-
ladie active. Finalement, on n’en sait que peu concer-
nant la capacité du BCG à activer des cellules immu-
nitaires supplémentaires qui participent à la réponse
immunitaire à l’égard de M. tuberculosis tels que
MAIT, d’autres cellules T restreintes à Ib/CD1 de la
classe HLA, les cellules NK, les cellules γδ T récep-
trices (TCR) ainsi que les cellules « innées » supplé-
mentaires qui peuvent également développer certaines
formes de mémoire immunologique.63
A côté de la possibilité que le BCG échoue à ac-
tiver de manière adéquate les cellules immunitaires
ou les mécanismes essentiels pour la protection, une
possibilité alternative est que d’autres facteurs inhibent
ces actions tels que le rôle immunomodulateur des
mycobactéries non-tuberculeuses,57 les co-infections
(à côté du VIH, les helminthes et les virus), les Treg
induits par le BCG,54 ou l’affaiblissement éventuel de
la mémoire immunitaire au cours de l’adolescence qui
est la période la plus critique pour la (ré)-infection
TB et sa progression vers une maladie active. Une
étude récente a démontré que chez les souris infectées
par les helminthes, les réponses immunitaires pulmo-
naires innées à l’égard de M. tuberculosis, sont frei-
nées, phénomène médié par l’activité IL-4.64
Il est vraiment nécessaire d’élaborer des vaccins
qui puissent soit stimuler les effets protecteurs pré-
coces du BCG, soit les remplacer par des meilleurs
vaccins (domaine revu dans Ottenhoff et Kaufmann2).
Ces vaccins devraient non seulement induire une
meilleure immunité, mais ils devraient aussi circon-
venir les parcours inhibiteurs activés par le BCG.
Différents efforts internationaux sont en cours selon
trois stratégies conceptuelles différentes.65 La première
stratégie vise à améliorer le BCG, soit en le complétant
de manière génétique avec l’expression d’antigènes
supplémentaires (par exemple la cible antigénique à
sécrétion précoce 6 [ESAT-6], la protéine 10 du ltrat
de culture [CFP-10], les régions 1 de différence [RD1]
ou d’autres), ou encore en modi ant le vaccin de ma-
nière génétique a n d’améliorer son ef cience dans
l’induction de l’immunité (comme par l’autophagie ou
des stimulations croisées via l’apoptose). La deuxième