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Guide du pied diabétique
SOiNS - Hors-série n°1 - mars 2014
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profondément dans les tissus et pro gresser jusqu’aux
articulations. Ou alors, elle va fistuliser à la peau en
fissurant la plaque d’hyper kératose.
L’artériopathie
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L’artériopathie oblitérante des membres infé-
rieurs (AOMI), ou artérite, peut survenir chez les
patients diabétiques, bien qu’elle ne soit pas spéci-
fique du diabète. L’AOMI est favorisée surtout par
le tabagisme, mais également par l’hypertension
artérielle et l’hypercholestérolémie. Elle consiste
en un rétrécissement progressif desartères par du
cholestérol, qui se dépose en plaques qui se fibro-
sent: le flux sanguin et ralenti, voire totalement
bloqué.
L’AOMI peut entraîner des douleurs des jambes
par manque d’oxygénation des muscles à la
marche: c’est la claudication intermittente. Elle
peut créer des plaies que
l’on dit ischémiques. Ce
sont des ulcères artériels,
très douloureux (à l’in-
verse des lésions neuropa-
thiques, comme le mal
perforant qui sont indo-
lores).
Alors que l’ulcère veineux
est généralement superfi-
ciel et étendu, l’ulcère
artériel est creusant avec
des bords nets (dits “à
l’emporte- pièce”). Sa loca-
lisation sera plutôt le bord
du pied, ou alors au niveau
de la jambe. Il peut aussi
toucher les extrémités des orteils (figure2), ou se
présenter sous forme de nécrose (peau noircie et
cartonnée).
❚
En cas de lésion neuropathique ou trauma-
tique, l’AOMI va aggraver la situation car l’oxygé-
nation étant amoindrie, la cicatrisation est
retardée, voire impossible: les plaies restent
atones et n’évoluent pas vers le bourgeonnement.
Les troubles de la statique plantaire
❚
Toute déformation du pied va aggraver les
lésions de neuropathie, entraînant frottements
et traumatismes, ou encore de mauvais position-
nements du pied. Ces troubles de la statique plan-
taire sont parfois dus à la neuropathie (comme
l’avant- pied rond et les orteils en griffe, figure3).
Très souvent, ils ne sont pas liés au diabète
(comme l’hallux valgus, ou “oignon”).
❚ Après une amputation d’orteil, l’équilibre du
pied est également modifié, avec un risque élevé
de plaies secondaires (figure4). Le chaussage doit
obligatoirement être adapté par des chaussures
sur mesure.
La gradation du risque podologique
Chaque sujet diabétique doit bénéficier, lors de son
bilan annuel, d’une gradation de son risque podo-
logique (quatre grades, de 0 à 3, tableau2), qui
permettra de mettre en place les mesures de pré-
vention. En effet, le risque de lésion est corrélé de
façon exponentielle au grade: pas d’augmentation
du risque podologique par rapport à la population
générale pour les patients de grade 0, mais risque
multiplié par 35 pour les patients de grade3[3].
❚Grade 0: sans neuropathie, le risque podo-
logique est de 0/3, c’est- à- dire équivalent au reste
de la population. Hormis
les soins d’hygiène habi-
tuels, aucun conseil spéci-
fique n’est nécessaire, ni
aucun interdit, notam-
ment concernant la
marche à pied nus ou les
vacances à la plage…
❚Grade 1: s’il existe une
neuropathie diabétique
isolée, le grade est de 1/3
et le risque de lésion est
multiplié par 5: des
conseils spécifiques sont
alors indispensables. Ils
concernent l’hygiène, les
soins, le chaussage, les
gestes et produits à éviter ou favoriser. Il faut éviter
–ou traiter- la sécheresse cutanée, les mycoses,
l’hyperkératose, les cors et durillons.
❚
Grade 2: il est défini par une neuropathie asso-
ciée à une autre anomalie (AOMI et/ou trouble
statique). Le risque de lésion est 10fois plus élevé
que dans la population générale. En plus des
conseils précédents, le patient bénéficiera d’une
prise en charge régulière par un pédicure-
podologue: quatre soins annuels sont rembour-
sés par la Sécurité sociale sur prescription
médicale[4]. Le pédicure- podologue effectuera
des soins, comme le ponçage de l’hyperkératose,
l’hydratation, la taille des ongles. Il luttera contre
les troubles statiques en réalisant des «semelles»
sur mesures et autres orthèses.
❚
Grade 3: les diabétiques les plus à risque de
plaie sont de grade 3. Ce sont ceux qui ont des
antécédents de plaie chronique (ayant duré
Figure2. Plaie ischémique
sur artériopathie oblitérante
des membres inférieurs
(AOMI).
©Ducloux
Figure4. Troubles de la
statique plantaire: séquelles
d’amputation entraînant des
zones de frottement.
©Ducloux
Figure3. Troubles de la
statique plantaire: avant- pied
rond et orteils en griffe.
©Ducloux
Un mauvais équilibre
glycémique est un facteur
d’aggravation des plaies: non
seulement il semble retarder
la cicatrisation, mais, surtout,
il augmente le risque d’infection
par diminution de l’effi cacité
du système immunitaire
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