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Revue Médicale Suisse
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27 juillet 2011 0
thérapie ciblée anti-
EGFR
et anti-VEGF (bévacizumab) com-
me l’adénocarcinome ; il existe sous bévacizumab, un risque
d’hémorragie pulmonaire fatale chez les patients avec un
carcinome épidermoïde (souvent central et massif).2,9,12,13
L’immunocytochimie à l’aide de plusieurs anticorps (par
exemple : TTF-1, p63, cytokératines 7 et 5/6), utilisée de
manière complémentaire sur des frottis cytologiques déjà
colorés et/ou sur des
cell-blocks,
permet dans la majorité des
cas de faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre lors-
que la morphologie du CNPC est ambiguë. Les adénocar-
cinomes pulmonaires sont typiquement positifs pour TTF-1
et les cytokératines 7 et sont négatifs pour p63 et les cyto-
kératines 5/6. Les carcinomes épidermoïdes ont typique-
ment le profil inverse.13 Néanmoins, cette sous-typisation
à partir d’un nombre limité de cellules tumorales soulève
le problème de la représentativité et de l’hétérogénéité
tumorale sur le plan morphologique mais également molé-
culaire (par exemple : mutations). Les carcinomes adéno-
squameux (au moins 10% de l’une des deux composantes
en histologie) existent mais sont rares. Une fois le diagnos-
tic d’adénocarcinome (ou de CNPC compatible avec un
adénocarcinome) posé, la réalisation de tests moléculaires
(
EGFR
,
KRAS
, autres) peut être entreprise.
utilisation des échantillons cytolo-
giques pour les tests moléculaires
Les échantillons histologiques obtenus par biopsies
trans pariétales/transbronchiques ou par résection chirurgi-
cale sont le plus souvent utilisés et sont adéquats pour
tester les mutations spécifiques en vue d’une thérapie ci-
blée.12 Toutefois, chez un nombre croissant de patients
susceptibles de bénéficier d’une thérapie ciblée, seul du
matériel cytologique est disponible pour le diagnostic de
la tumeur et pour les tests moléculaires. Selon le cas, il peut
s’agir de matériel provenant de l’épanchement pleural/pé-
ricardique, de l’aspiration ou du brossage bronchique, du
lavage bronchoalvéolaire (LBA), de la ponction à l’aiguille
fine (21-22G) de la masse pulmonaire ou de la cytoponc-
tion transbronchique d’adénopathies (
Transbronchial needle
aspiration
– TBNA ) guidée ou pas par ultrasons (
Endobron-
chial-ultrasound
– EBUS). Cette dernière technique, apparue
dès 2007 dans les algorithmes européens de stratégies
diagnostiques,14 remplace progressivement la médiasti-
noscopie pour le diagnostic et le
staging
initial des cancers
pulmonaires.5,15
Plusieurs études récentes ont montré que la faisabilité
et la sensibilité de ces analyses (
EGFR
,
KRAS
,
BRAF
et
PIK3CA) sont aussi bonnes sur du matériel cytologique
qu’histologique.1,5,6,15,16 Tous les types de préparation cy-
tologique sont potentiellement utilisables (frottis, cytospin,
cell-blocks
), en particulier les
cell-blocks
. La proportion de cas
ou le matériel cytologique est insuffisant pour les analyses
moléculaires est globalement inférieure à 25% mais varie
beaucoup en fonction du type de prélèvement (nettement
moindre pour les épanchements et le TBNA-EBUS que
pour les aspirations bronchiques et les LBA).5,6,15 L’évalua-
tion immédiate du matériel par le cytopathologiste lors des
prélèvements (
Rapid on-site evaluation
– ROSE), applicable
en particulier pour le TBNA-EBUS, permet de s’assurer que
le matériel soit qualitativement et quantitativement suffi-
sant tant pour le diagnostic que pour les analyses complé-
mentaires nécessaires (immunocytochimie et tests molé-
culaires). Elle permet ainsi d’éviter les complications et les
coûts liés à un nombre élevé de prélèvements, voire la ré-
pétition d’une procédure diagnostique.
Une étude a montré que le matériel provenant de lames
cytologiques colorées de manière standard (Papanicolaou)
se prêtait même mieux à l’analyse des mutations d’
EGFR
par PCR
(Polymerase chain reaction)
que le matériel provenant
de biopsies. Ceci pourrait être expliqué par une meilleure
conservation de l’ADN dans le méthanol (cytologie) que
dans le formol (histologie).1
Néanmoins, la faisabilité de ces analyses sur du maté-
riel cytologique doit être évaluée de cas en cas, car elle dé-
pend de l’abondance et surtout de la proportion de cel-
lules tumorales. En effet, contrairement à l’histologie où la
zone tumorale peut être adéquatement sélectionnée, en
cytologie, les cellules tumorales sont mélangées aux diffé-
rentes cellules bénignes (population hétérogène de cel-
lules), ce qui a pour effet de «diluer» l’échantillon et donc
de diminuer la sensibilité des analyses.
Les méthodes les plus fréquemment utilisées pour dé-
terminer les mutations d’
EGFR
ou de
KRAS
sont la RT-PCR
et le séquençage.2 Le séquençage direct permet de détec-
ter toutes les mutations possibles dans les exons mais la
technique est moins sensible que la RT-PCR et elle est li-
mitée par la présence des cellules non néoplasiques.1,6 La
RT-PCR utilise des oligonucléotides
(primers)
qui se lient
spécifiquement aux régions bordant les mutations les plus
fréquentes lorsqu’elles sont présentes. Cette méthode est
très sensible mais elle ne permet de détecter que les mu-
tations connues, qui sont aussi les plus fréquentes. Elle ne
permet pas de détecter des mutations rares ou qui n’ont
pas encore été documentées.
Idéalement, il faut au moins une centaine de cellules
tumo rales avec une proportion de cellules tumorales/non
tumorales supérieure à 25% pour pouvoir procéder à une
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Type de mutation/ Sous-type histologique
altération d’adénocarcinome
EGFR Adénocarcinome bien différencié,
avec composante bronchioloalvéolaire
non mucineuse, papillaire et/ou micro-
papillaire
KRAS Adénocarcinome (bronchioloalvéolaire
ou non) de type mucineux
BRAF Adénocarcinome papillaire
ELM4-ALK Adénocarcinome de type solide et/ou
avec composante à cellules isolées
CTNNB1 Adénocarcinome à cellules claires
(Bêtacaténine) ou de type fœtal
Tableau 1. Association possible entre le type d’alté-
ration génétique et le sous-type d’adénocarcinome
pulmonaire
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