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Normes SPS et compétitivité-qualité de la filière fruits et légumes
frais au Sénégal
Par
Adama Guèye
UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR
FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES ET
DE GESTION
(FASEG)
BP 5683 Dakar –Fann -Tél. : (221) 33 859 23 60
fax. : (221) 33 824.79 56 - e-mail: [email protected] - Dakar
(SENEGAL)
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Résumé
L’utilisation abusive des pesticides est devenue un réel problème pour la qualité des fruits et
légumes frais au Sénégal. Les fruits et légumes produits au Sénégal contiennent des résidus de
pesticide qui font deux voire cinq fois les Limites Maximales de Résidus fixées par le Codex
Alimentarius (Cissé et Tall, 2001 ; CLX, 2008 ; Gueye, 2009). Ce qui nous a poussé à se
questionner sur l’impact de cette faible qualité sur la compétitivité de la filière horticole du
Sénégal. La plupart des analyses théoriques montrent que pour les pays en développement, les
difficultés à commercer sur le marché mondial est le fait des écarts par rapport à la qualité
exigée (Henson et al 2002, Mbaye, 2005). L’intérêt de cet article est qu’il cherche à combiner
les indicateurs prix et qualité pour mieux cerner les implications de politiques sur la
compétitivité de la filière horticole du Sénégal. Les résultats obtenus montrent que le fait de
ne pas se conformer aux normes SPS peut avoir comme conséquence la baisse ou même
l’absence d’exportation. Le paiement d’une prime de qualité aussi est très incitateur pour le
respect des normes. Par exemple, le Maroc exporte plus en volume que le Kenya, mais ce
dernier gagne plus en valeur du fait de la bonne qualité de ces produits. En somme, la
politique d’incitation pour améliorer la qualité des produits exportés a un impact très positif
sur la compétitivité.
Mots-clés : Compétitivité, norme SPS, Qualité, Filière fruits et légumes frais, Sénégal
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Tables des matières
Introduction
I. Présentation de la filière horticole du Sénégal
II. Les normes SPS et le commerce des produits horticoles au Sénégal
III. L’importance de la qualité dans la compétitivité (analyse théorique)
IV. Le cadre conceptuel : le modèle ricardien ajusté pour prendre en compte la qualité
V. La compétitivité du Sénégal face à ces concurrents
Conclusion
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Introduction
L’agriculture continue d’occuper une place importante dans l’économie sénégalaise malgré la
baisse de sa participation dans la formation du PIB. Elle emploie près de 60% de la population
active et contribue à hauteur de 10% dans la formation du PIB (MEFS, 2011). Avec la
politique de diversification de l’Etat certaines filières, identifiées comme porteuses, ont connu
un regain d’intérêt. L’horticulture est désignée comme l’une de ces filières porteuses du fait
de la vaste gamme de produits qu’elle met sur les marchés locaux et extérieurs et du niveau de
revenu qu’elle génère pour les paysans, notamment en zone urbaine et périurbaine. La
production horticole a connue un second essor après celui des années 70, lui permettant de
passer d’environ 150 000 à 228 000 tonnes entre 1992 et 2000 et à 429 000 tonnes en 2007
soit une croissance de 5.5% par an (statistiques DH, 2007).
Une telle croissance de la production a pour conséquence une amélioration des exportations
qui suivent la même tendance. La filière d’exportation de produits horticoles du Sénégal a
commencé à se développer dès le début des années 1970. Le Sénégal jouit non seulement
d’un climat favorable mais aussi d’une bonne position géographique pour exporter des
produits tropicaux hors saison. Les exportations sont passées de 6 175 tonnes en 1995 à 9 000
tonnes en 2000 et 31 000 tonnes en 2009. Les principaux marchés ciblés sont les pays
limitrophes et l’Union Européenne (Statistiques DH, 2003 ; Niane, 2004).
Le secteur horticole est devenu l’une des priorités pour la politique nationale de
diversification des cultures, de sécurité alimentaire, d’investissement, de réduction de la
pauvreté, d’accès aux marchés extérieurs et d’augmentation des revenus. Les documents de
politique agricole de l’Etat que sont : Déclaration de Politique de Développement Agricole
(DPDA), Plan Directeur Horticole (PDH), Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté
(DSRP), Loi d’Orientation Agro-Sylvo-Pastorale (LOASP), Plan REVA (Retour vers
l’Agriculture), Stratégie de croissance accélérée la grappe Agriculture Agrobusiness,
constituent une illustration parfaite de l’importance du secteur horticole dans l’économie
sénégalaise.
Cependant, pour les produits horticoles comme pour tous les autres produits agricoles, le
principal problème des exportations sénégalaises est la qualité. La contamination à
l’aflatoxine pour l’arachide, les résidus de pesticides pour les fruits et légumes, le calibrage et
l’épuration pour la gomme arabique constituent des obstacles de taille pour les exportations.
Les producteurs et les exportateurs ont besoin d’une formation en matière de compétence
techniques et de gestion de même qu’un accès au capital d’exploitation. En plus de la
compétitivité liée au prix, la compétitivité liée à la qualité constitue un problème pour la
politique sectorielle des pays africains. Certaines techniques de production sont liées au faible
niveau de formation et d’information des producteurs. Au Sénégal seuls 27% des producteurs
emploient des techniques de production soutenables dans le secteur horticole (Gueye, 2009).
La compétitivité sur le marché extérieur ne se limite pas seulement au prix mais prend en
compte aussi l’aspect qualité incluant le respect de l’environnement et des conditions sociales.
En ce qui concerne la filière horticole sénégalaise, la mauvaise utilisation des pesticides
constitue un vrai problème pour la qualité des fruits et légumes frais. Une large gamme de
pesticides est utilisée par les producteurs dont les plus connus sont : métamedophos, dikofol,
dimethovat, malathion, Tamaron, batik, douzebane et sulfur. Les pesticides sont souvent
appliqués juste avant la récolte. L’utilisation continue du même pesticide conduit à la
résistance des parasites. Ce qui conduit souvent les producteurs à utiliser des pesticides
recyclés sur le marché et qui ne sont pas destiné à l’origine aux produits alimentaires. De
même les laboratoires nationaux ont retrouvé des résidus de polluant organique dont le DDT,
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sur les légumes commercialisés sur le marché local1. Cette utilisation abusive et non
réglementée des pesticides est à l’origine de la contamination des fruits et légumes en résidu
de pesticide. Malgré la réglementation sur la commercialisation des pesticides et
l’encadrement des projets et institutions (PPEA, FAO, etc.) les producteurs horticoles
sénégalais ne sont toujours pas en mesure de respecter les normes SPS exigées par le marché
de l’UE.
Cet article cherche à mesurer l’impact de l’utilisation des pesticides sur la compétitivité
internationale des fruits et légumes du Sénégal. Le modèle Ricardien d’avantage comparatif
sera adapté à cette étude. Une variable qualité sera introduite comme déterminant des
exportations. Le reste du document sera articulé comme suit : après une brève présentation de
la filière nous allons passer en revue les normes SPS régissant le commerce international des
produits horticoles dans la section 2. Dans la section 3 nous allons présenter une revue de la
littérature sur les concepts de la compétitivité prix et de la compétitivité qualité. Le cadre
conceptuel lié à cette étude sera présenté dans la section 4 et les résultats d’analyse dans la
section 5.
I Présentation de la filière horticole du Sénégal
Au Sénégal, la production horticole est entreprise dans la plupart des zones agro-écologiques
du pays, mais la principale zone de production est celle des Niayes. Longeant la côte Ouest de
Dakar à Saint Louis, la zone des Niayes est une zone agro-écologique à vocation horticole.
C’est une bande littorale de 180 km de long et de 5 à 30 km de large allant de Dakar à Saint-
Louis en passant par Thies et Louga. Plus de 60% de la production de fruits et légumes au
Sénégal provient de la zone des Niayes. De même, la proximité des grands centres de
consommation (les villes de Dakar, Thiès et Saint Luis) facilite l’écoulement de la production.
La nappe phréatique peu profonde (1 à 2m) facilite l’approvisionnement en eau dans cette
zone (Niane, 2004 ; CDH, 2008).
Cette zone des Niayes de formation fragile est victime de différentes agressions. Après
l’occupation anarchique des habitats, la zone est victime d’une certaine forme de dopage des
cultures par les intrants chimiques, notamment par les pesticides. La pression parasitaire
constitue une contrainte importante pour la production maraîchère, notamment durant la
saison des pluies. Certains parasites tendent à devenir endémiques (nématodes, teignes,
viroses, cochenilles). L’intensité des dégâts occasionnés dépend largement de la capacité des
maraîchers à maitriser les techniques de lutte. Alors que, les connaissances des producteurs
sur les méthodes de lutte contre les ravageurs et les maladies sont généralement limitées
(Moustier, Moumbélé et Huat, 2004).
Les modes d’utilisation des pesticides diffèrent selon le type de producteur (petit producteur
traditionnel, grand producteur moderne). Les petits producteurs traditionnels s’inscrivent
souvent dans :
l’utilisation par aspersion qui consiste à traiter les attaques parasitaires à l’aide d’un
seau contenant le pesticide et de branchage comme aspersoir ;
le saupoudrage qui est fait à la main et sans gants ni masque de protection ;
le traitement par pulvérisation à partir de pulvérisateur manuel ou motorisé.
Ces types de traitements sont très répandus dans la zone des Niayes.
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1cereslocustox(2007),Panierdelaménagère
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