1 Théorème de Rolle
D’un point de vue géométrique, il est assez évident qu’entre deux points où
une courbe dérivable prend la même valeur, il existe toujours au moins un
point de la courbe où la tangente est horizontale. Un théorème de Michel
Rolle, publié en 1691, établit clairement ce fait. Nous verrons plus loin que le
théorème de Rolle est un cas particulier du théorème de la moyenne de Lagrange.
Preuve du théorème 1 Puisque fest continue, le théorème des extremums
absolus garantit que fatteint un maximum et un minimum absolus sur l’inter-
valle [a,b]. En conséquence du théorème des extremums relatifs, ces deux
extremums ne peuvent se trouver qu’aux points suivants de l’intervalle :
1. aux bornes de l’intervalle [a, b];
2. à un point intérieur de l’intervalle où f(x) 0;
3. à un point intérieur de l’intervalle où fn’existe pas.
Selon l’hypothèse, la fonction fest dérivable en tout point de ]a, b[, ce qui
élimine l’option 3. Les seules possibilités sont donc les bornes aet bainsi que
les points intérieurs où f(x) 0. Examinons ces deux cas.
1. Si le maximum et le minimum sont tous les deux en aet en b, alors les
valeurs maximale et minimale de fsont égales, c’est-à-dire que f(x) f(a) f(b).
Donc fest une fonction constante et f(x) 0 pour tout xdans l’intervalle
]a,b[; cpeut alors être choisi n’importe où dans l’intervalle ]a, b[.
2. Si le maximum ou le minimum existe en un point intérieur cde l’inter-
valle, alors f(c) 0 selon le théorème des extremums relatifs, et nous avons
trouvé un point cconfirmant la conclusion du théorème de Rolle.
Prêtez attention aux hypothèses du théorème de Rolle. Si l’une des condi-
tions n’est pas observée, il est possible que la fonction fn’admette aucune
tangente horizontale sur l’intervalle (figure 2).
THÉORÈME 1 Théorème de Rolle
Soit fune fonction satisfaisant les trois conditions suivantes :
•fest continue en tout point de l’intervalle fermé [a, b];
•fest dérivable en tout point de l’intervalle ouvert ]a, b[;
•f(a) f(b).
Alors, il existe au moins un nombre cdans ]a, b[ tel que f(c) 0
(figure 1).
x
y
0
y f(x)
f'(c1) 0
f'(c2) 0
f'(c3) 0
c2c3
c1
ab
Figure 1 Selon le théorème de Rolle,
toute courbe dérivable admet au moins
une tangente horizontale entre deux
points d’ordonnées égales. Le nombre c
pour lequel f(c) 0 n’est pas
nécessairement unique : ici, f(x) 0
entrois points.
x
y
ab
x0
x
y
ab
x0
x
y
a
y
f (x)
b
y
f (x)
y
f (x)
a) f dérivable partout sur ]a, b[
mais discontinue à l’une des
bornes.
b) f discontinue en un point
intérieur et nécessairement non
dérivable en un point x0 de ]a, b[.
c) f continue sur [a, b], mais
non dérivable en un point x0
de ]a, b[.
Figure 2 Trois situations où fn’admet pas de tangente horizontale sur ]a, b[.
ROLLE
Mathématicien autodidacte, Michel Rolle
(Ambert, 1652 – Paris, 1719) était comptable
et il étudiait l’algèbre dans ses moments
libres. En 1690, il publie le traité d’algèbre
qui contient sa « méthode des cascades »,
permettant d’encadrer les racines réelles de
certains types d’équations. Un an plus tard,
dans sa « Démonstration d’une méthode pour
résoudre les égalités de tous les degrés », on
y trouve le théorème qui porte son nom et
selon lequel « une fonction ne peut s’annuler
plus d’une fois dans l’intervalle séparant
deux racines réelles consécutives de sa
fonction dérivée ». De nos jours, on formule
ce théorème de façon équivalente en disant
qu’entre deux zéros d’une fonction déri-
vable se trouve toujours au moins un zéro
de sa dérivée. Rolle se méfiait des nou-
velles méthodes du calcul différentiel et
il s’évertua à les dénoncer et à combattre
le livre de calcul de L’Hospital. Ironie du
sort que ce mathématicien français soit
aujourd’hui reconnu pour son apport dans
le domaine qu’il essaya de discréditer de
son vivant !