Préambule
Après avoir suivi, pendant plusieurs années, un apprentissage en art dramatique, j’ai
intégré, en 2006, la Haute Ecole de Théâtre de Suisse Romande (HETSR, la
Manufacture) et entamé ainsi une formation plus intensive.
L’enseignement dans cette école est varié et les approches du jeu de l’acteur
différentes selon l’intervenant. Mais, petit à petit, deux directions me sont apparues, que
je schématise ainsi : l’une qui préconise plutôt de s’identifier à un personnage ; l’autre
qui demande plutôt de prendre en compte une distance entre l’acteur et le personnage.
Ces approches différentes, souvent contradictoires, m’ont conduite à mettre en doute
ma façon d’aborder le jeu et à interroger ma façon d’apprendre. J’ai senti la nécessité de
trouver une position plus personnelle face au jeu. J’avais le sentiment de devoir faire
des choix quant à ce que je souhaitais défendre. De plus, pour m’épanouir en tant
qu’actrice je devais désormais découvrir et développer un caractère plus particulier, et
comprendre comment je fonctionnais au delà de ce qu’on me demandait. Je devais
davantage construire mon jeu en fonction de mes particularités mais aussi en fonction
de ce que j’avais envie de défendre au théâtre. Et ce besoin de réflexion autour du jeu a
provoqué une paralysie de l’action. Ne sachant plus comment jouer, j’ai cherché à
comprendre ce qui provoquait la crise que je traversais : sur quoi se fondaient les
contradictions dans les approches proposées ; Comment pouvaient-elles devenir
positives pour le jeu ?
Puis la lecture de L’acteur au XXe siècle, éthique et technique d’Odette Aslan1 m'a
fait prendre conscience de l’existence des théories implicites dans l’enseignement qui
m’était prodigué et a aiguisé ma curiosité. Souhaitant comprendre les fondements des
contradictions qui m’apparaissaient, j’ai entrepris de revenir sur ma formation, afin de
mettre à jour le lien éventuel entre l’enseignement dispensé et les théories implicites
ainsi que l’importance qu’elles ont eue dans le processus de transmission.
En effet, je ressens la nécessité de rendre cohérents les éléments que j’ai accumulés
et qui ne cessent d’évoluer. Je conduis cette étude afin de prendre du recul, d’acquérir
une plus grande autonomie dans mon travail et de mieux envisager mon avenir. Il me
faut donc prendre en compte cette étape importante et me concentrer sur mon
expérience.
1 Odette Aslan, L’acteur au XXe siècle, éthique et technique, L’Entretemps, (Les Voies de
l’acteur), Saussan, 2005