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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode
analytique et la méthode numérique
SDF and SRE: Analytic and numeric methodology comparison
Pierre Sedevcic
Technicatome / Metravib - Lyon
Résumé
Il existe principalement aujourd’hui 2 méthodes de synthèse utilisées dans le cadre d’une démarche de personnalisation :
La méthode analytique, dans laquelle les calculs sont réalisés à partir de données représentatives statistiquement de l’environnement
(par exemple une densité spectrale d’accélération de la vibration),
La méthode numérique, dans laquelle les calculs sont réalisés à partir d’un signal vibratoire quelconque défini dans le domaine des
temps.
C’est dernière n’est pas véritablement une nouvelle méthode mais les progrès de l’informatique et plus particulièrement ceux relatifs au
temps de calcul, permettent aujourd’hui une utilisation de ces méthodes sur des calculateurs courants, ce qui était impensable il y a
quelques années.
En effet, la méthode numérique est plus lourde en temps de calcul que la méthode analytique réalisée à partir de DSP ou de définition
de balayage sinus. En revanche, elle présente l’immense avantage de permettre à l’utilisateur de s’affranchir de quelques-unes des
simplifications théoriques inhérentes à l’utilisation de modèle analytique. L’utilisateur peut ainsi employer des courbes de Wöhler ou
Basquin multi-dimensionnelles pour intégrer des paramètres supplémentaires influents sur l’endommagement (par exemple, la
température) ou travailler sur des environnements complexes non forcément modélisables (mélange d’aléatoire non gaussien, sinus et
transitoire) sans être obliger de segmenter ou d’effectuer de dangereuses approximations.
Après une présentation de la méthode numérique et de ses avantages et inconvénients, une comparaison est réalisée à partir de
données enregistrées sur véhicule automobile lors de roulages sur piste d’essai.
1. PRINCIPES DE LA METHODE NUMERIQUE
1.1.
Grandeurs caractéristiques
Soit un échantillon parallélépipède de dimension A, B et C, tel que représenté figure 1.
ÄC
C
A
F
F
B
Figure 1
Si on applique une force F perpendiculairement à la surface AB de cet échantillon, on obtient une contrainte ó telle
que :
ó = F / AB
ó est en N/m2 ou Mpa
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
L’application de cette contrainte conduit à une déformation
rapport entre l’allongement ÄC et la longueur C :
å
définie comme une extension ;
å
est exprimé par le
å = ÄC / C
å
est sans dimension
Il existe également une relation entre ó et å . Il s’agit du module d’élongation E (ou module d’Young) défini par la 1ère
expression de Hooke :
å
E= ó /
E est en N/m2
1.2.
Effort statique et dynamique
Dans la pratique beaucoup de pièces sont soumises à un effort statique auquel se superpose un effort dynamique. La
contrainte se décompose alors en une précontrainte constante ómoy à laquelle s’ajoute une contrainte dynamique óalt
tel que représentée dans la figure 2.
Figure 2
1.3.
Etapes de calcul
1.3.1.
Obtention de l’élongation et calcul de la contrainte
Comme indiqué dans le paragraphe précédent, la loi de Hooke permet de poser que:
ó = Ex å
Dans le cas d’un calcul de fatigue classique, il suffit donc de mesurer l’élongation de la pièce å (généralement par jauge
de contrainte) et de calculer la contrainte ó. On prend pour hypothèse que le matériau est un métal et que l'on effectue
les essais à température ambiante et constante : E est alors constant et en conséquence les contraintes et les
déformations sont proportionnelles.
Attention, le comportement à température ambiante est totalement différent du comportement en plus haute température
pour lequel la déformation est fonction de la contrainte mais aussi du temps d’exposition et de cette température.
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Figure 3
La figure 3 représente un exemple de mesure d’élongation.
Dans le cas de la personnalisation, il n’est pas mesuré une élongation (réponse du système étudié) mais une excitation
(entrée du système étudié) tel que représenté figure 4.
ãe
Excitation
t
Système 1ddl variant en
fonction de fp
σ
Réponse
t
Figure 4
En effet, lorsqu’une vibration aléatoire à moyenne nulle est appliquée à un système mécanique linéaire à un degré de
liberté, de fréquence propre fp et d’amortissement î, on obtient la réponse du système mécanique, caractérisée par le
déplacement z(t) entre la masse et son support. Le système étant considéré comme linéaire, la contrainte σ calculée avec
le modèle est proportionnelle au déplacement relatif.
Nous obtenons donc par l’utilisation de ce modèle 1 ddl une élongation puis une contrainte (réponse du système ) à
partir d’une accélération ou une vitesse ou un déplacement (excitation).
Hypothèses prises :
Ø Module d’Young constant (acier, température ambiante)
Ø Système modélisé en 1ddl
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
1.3.2.
Comptage des cycles de contrainte
Une fois parfaitement définie la contrainte en fonction du temps, il s’agit de compter les nombres de cycles de cette
contrainte et mieux encore, décomposer ceux-ci en 2 parties, ceux relatifs aux efforts statiques et ceux relatifs aux
efforts dynamiques. Plusieurs méthodes existent telles que le comptage Pic Vallée, le comptage Level Crossing, mais
nous utilisons plus particulièrement la méthode de comptage Rainflow développé par un groupe de travail normatif
(norme AFNOR A03-406). Celle -ci a été particulièrement étudiée pour une application dans le domaine du dommage
par fatigue et décompose les efforts statiques et dynamiques, ce qui n’est pas le cas du Pic Vallée et du Level Crossing.
Le principe du comptage est donc de discrétiser le signal temporel en une somme de cycles ou ½ cycles : Chaque cycle
est définit par un couple de valeurs, correspondant d’une part à son amplitude moyenne (ou précontrainte) et d’autre
part à son amp litude alternée (ou contrainte dynamique) tel que représenté figure 5.
Attention, l’aspect temporel disparaît (plus de chronologie) et seules restent les informations relatives aux amplitudes.
óalt
ó moy
Figure 5
Chaque cycle (ou demi -cycle) correspondant à un couple (ó moy, óalt) est compté et indiqué dans une matrice Rainflow
et qui se présente comme dans la figure 6. Ni est le nombre de cycle (ou demi -cycle) pour un couple (ó moyi , óalt i ).
ó moymin
ó moyi
ó moymax
0
ó moy
óalt i
ni
óalt max
óalt
Figure 6
La matrice Rainflow correspondante au signal de la figure 3, est présentée figure 7. Un code de couleur indique l’ordre
de grandeur du nombre de cycles pour chaque couple (ómoyi , óalt i ). La couleur indique l’importance du nombre de
cycles.
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Figure 7
Hypothèses prises :
Ø Endommagement de même nature en traction et en compression (non-dissociation des deux cas, tant en
statique qu’en dynamique)
1.3.3.
Prise en compte des contraintes statiques
Afin de calculer un endommagement par fatigue du à une contrainte, nous utilisons des courbes de Wöhler. Néanmoins
ces courbes sont tracées pour une sollicitation alternée pure, soit uniquement dynamique. Mais nous avons vu que dans
la pratique beaucoup de pièces sont soumises à un effort statique auquel se superpose un effort dynamique et c’est ce
que nous donne la matrice Rainflow. Il est important de prendre en compte cette contrainte moyenne non nulle, car elle
modifie sensiblement la durée de vie, en particulier quand elle est relativement grande par rapport à la contrainte
alternée.
Il faut donc calculer une contrainte alternée pure équivalente à notre couple (ó moy, óalt) et nous utilisons pour cela un
diagramme de corrections appelé également diagramme de Haig.
Il existe différentes représentations de ce diagramme :
• Parabole de Gerber,
• Droite de Goodman,
• Goodman modifié,
• Droite de Soderberg
• Modification de Langer,
• Modification de Sines.
Un exemple de diagramme de Haig, la parabole de Gerber, est représenté en figure 8.
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
σ alt
120
σ alt pure
100
σ alt1
σ alt2
80
60
40
20
σ moy1
0
0
σ
σ moy2
m
20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240 260
Figure 8
A partir d’un couple de valeur (ómoyi , óalt i ) on obtient un point sur une parabole de Gerber qui nous indique alors une
contrainte alternée pure ó alt pure équivalente. Dans l’exemple de la figure 8, on peut voir qu’une contrainte dynamique
óalt 2 inférieure à une autre óalt 1 , mais située sur la même parabole, peut donner la même contrainte alternée pure si sa
composante statique ómoy2 est à contrario supérieure à la composante statique ómoy1 de la deuxième.
1.3.4.
Calcul de l’endommagement
Le calcul d’endommagement est effectué à partir du nombre de cycles à un niveau de contrainte ó alt pure équivalente et
d’un ensemble de courbes, appelées Courbes de Wöhler ou courbe S-N (Stress-Number of cycles). Il existe plusieurs
types de représentation, en log-lin, log-log, par exemple représentation de Basquin. Un exemple pour de l’acier et de
l’aluminium est donnée en figure 9.
σ
óR
óD
3.5
3.3
3.1
2.9
2.7
2.5
2.3
2.1
1.9
1.7
1.5
1.3
1.1
0.9
1E+0 1E+1 1E+2 1E+3
Zone oligocyclique
ACIER
ALU
Limite de
fatigue
N
1E+4 1E+5 1E+6 1E+7 1E+8
Zone
limitée
d’endurance
Figure 9
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Zone
illimitée
1E+9
d’endurance
Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
La représentation d’une courbe de Wöhler peut-être découpée en 3 zones :
•
Le domaine oligocyclique qui correspond aux contraintes les plus grandes, supérieures à la limite d’élasticité du
matériau où N varie de ¼ cycle jusqu’à 104 ou 105 cycles (acier doux) suivants les auteurs.
•
Le domaine d’Endurance Limitée où la rupture apparaît d’une manière certaine sous une contrainte plus faible que
la limite d’élasticité du matériau avec N compris entre 104 à 105 (borne basse) et 106 à 107 (borne haute).
•
Le domaine d’endurance illimitée où la courbe tend vers une limite parallèle à l’axe des cycles. En théorie pour les
métaux ferreux, il n’y a jamais rupture par fatigue quel que soit le nombre de cycles appliqués à un niveau de
contrainte inférieur à la contrainte limite de fatigue σD .
Ces valeurs ne sont données qu’à titre indicatif afin d’illustrer le propos et ne sont pas à généraliser à tous les matériaux.
Par ailleurs, il est à noter que la courbe de Wöhler est une courbe statistique (valeur moyenne) , ce qui implique que
l’atteindre indique seulement une probabilité de casser 1 pièce sur 2. Ce qui veut dire que la limite d’endurance est la
contrainte alternée ó alt pure pour laquelle il y a rupture de 50% des pièces après N cycles et que la limite de fatigue est la
plus grande amplitude de contrainte pour laquelle il n’y a pas de rupture après un nombre infini de cycles.
1.3.5.
Loi de Miner
Grâce aux courbes de Wöhler, nous obtenons un endommagement Di pour un nombre de cycles ni à un niveau de
contrainte ó alt pure que nous appellerons maintenant ó i . Or, à partir du compteur Rainflow, nous avons un ensemble de ni
cycles à un niveau de contrainte ó i .
Nous utilisons alors la loi de Miner relative au cumul des dommages. Cette loi nous indique que si une pièce subit ni
cycles à un niveau de contrainte ó i , elle reçoit un endommagement élémentaire Di tel que
Di = ni / Ni
avec Ni le nombre de cycles à la rupture pour un niveau de contrainte ói .
σ
σi
Di
ni
Ni
Nombre de cycles
Figure 10
Si on observe la figure 10, on peut se représenter ce dommage élémentaire comme une valeur sans dimension qui
représenterait un pourcentage de participation au dommage. On obtient par exemple 1 soit 100% d’endommagement si
n i et Ni sont égaux. Si n i est égal à la moitié de Ni , on obtient alors 50% d’endommagement.
Ce calcul est réalisé pour l’ensemble des ni cycles à un niveau de contrainte ó i , et la loi de Miner nous indique alors
qu’il y a sommation des dommages et que D = Σ Di avec rupture si D ≥ 1
Nous avons alors un dommage D pour la contrainte calculée avec le modèle, relatif à une fréquence propre et un
amortissement caractéristiques du système à un degré de liberté utilisé dans le modèle.
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
1.3.6.
Itération sur les fréquences propres
En résumé, à partir d’une mesure d’excitation et d’un modèle 1 ddl et en fonction d’une fréquence propre (voir figure
4), nous avons obtenu une élongation puis une contrainte (réponse du système ), puis un compteur Rainflow, puis une
valeur de dommage.
Il s’agit maintenant d’itérer sur l’ensemble des fréquences propres souhaitées. Généralement, les N fréquences propres
fp sont définies à partir d’une fréquence basse et d’une fréquence haute dépendantes des modes supposés du matériel, et
d’une loi de répartition (linéaire ou logarithmique).
On obtient alors pour chaque fréquence propre une valeur de dommage, ce qui nous donne donc un spectre de dommage
par fatigue appelé SDF.
Dommage
D
SDF
fpi
Fréquence propre
Le principe est le même pour le calcul de spectre de réponse extrême SRE où l’on recherche les extrema sur les
contraintes calculées en sortie du modèle pour chaque fréquence propre.
Attention, les SDF et SRE sont calculés pour un amo rtissement î donné.
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2.
COMPARAISONS
2.1. Mesures en roulage stabilisé
Il a été réalisé une mesure en roulage stabilisé dont les signaux temporels et le spectre sont présentés figure 11.
Figure 11
Un calcul de Kurtosis glissant (courbe rouge dans l’aire supérieure) indique une valeur sensiblement constante de 3
,caractéristique d’un signal relativement stationnaire et gaussien.. On peut également illustrer cette conclusion par un
calcul d’histogramme représenté en figure 12.
Figure 12
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
Les résultats de calculs des SRE, SDF et DSP équivalente avec les deux méthodes, sont représentés figure 13. Les
résultats calculés à partir de la méthode analytique sont en bleu, les résultats calculés à partir de la méthode numérique
sont en rouge.
Figure 13
Si on analyse ces résultats, on constate que les écarts entre les deux méthodes sont relativement faibles :
Ø Pour le SRE (courbes du haut), un écart moyen inférieur à un rapport 1,1 et un pic d’un rapport 1,4 à 46 Hz
(soit un écart maximum de 1,5 g),
Ø Pour le SDF (courbes médianes), un écart moyen inférieur à un rapport 2 ce qui est insignifiant pour un
dommage,
Ø Pour la DSP équivallente, un écart moyen inférieur à un rapport 1,3 avec uniquement un pic à 1,7.
Ces résultats sont très logiques. La méthode analytique extrapole ses données à partir d’une représentation statistique
supposée qu’est la DSP alors que la méthode numérique se base exclusivement sur le signal disponible en entrée. Par
exemple, la méthode analytique va supposer la présence de pics qui ne figuraient pas dans le signal d’entrée ce qui
provoque un SRE légèrement supérieur à celui obtenu par la méthode numérique.
Mais globalement et au vu des hypothèses faites par ailleurs, on peut affirmer que les résultats sont extrêmement
semblables.
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
2.2.
Mesures en piste spéciale avec obstacles
Il a été réalisé également une mesure en roulage sur piste avec obstacles dont le signal et le spectre sont présentés figure
14.
Figure 14
Un calcul de Kurtosis glissant (courbe rouge dans l’aire supérieure) indique une valeur oscillant entre 2 et 4 avec des
pics jusqu’à 20 caractéristique d’un signal non stationnaire.
Si nous calculons l’histogramme, nous obtenons (figure 15) une représentation d’un signal non gaussien.
Figure 15
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Calcul de SDF et SRE : Comparaison entre la méthode analytique et la méthode numérique
Les résultats de calculs des SRE, SDF et DSP équivalente avec les deux méthodes, sont représentés figure 15.
Comme précédemment les résultats calculés à partir de la méthode analytique sont en bleu, les résultats calculés à partir
de la méthode numérique sont en rouge.
Figure 16
Si on analyse ces résultats, on constate que les écarts entre les deux méthodes sont maintenant très importants :
Ø Pour le SRE (courbes du haut), un écart moyen d’un rapport 2,3 et un pic d’un rapport 2,4 à 46 Hz (soit un
écart de 16,1 g),
Ø Pour le SDF (courbes médianes), un écart moyen d’un rapport 100 et un pic d’un rapport 300,
Ø Pour la DSP équivallente, un écart moyen d’un rapport 3 avec des pics à 6.
On voit dans ce cas, l’erreur commise par l’utilisation en méthode analytique d’une DSP calculée sur un signal non
gaussien, non stationnaire.
3.
CONCLUSIONS
Cette présentation a pour but de démontrer la possible mise en œuvre d’une méthode de traitement numérique dans le
cadre de la personnalisation. Cette solution est maintenant rendue possible par les progrès de l’informatique et plus
particulièrement de la puissance de calcul disponible sur les calculateurs de bureau. Cette méthode permet de
s’affranchir d’un certain nombre d’hypothèses et contraintes inhérentes aux méthodes analytiques. Par ailleurs, elle
ouvre la voie vers de nouveaux domaines d’applications telle que les matériaux à hautes températures ou élastomères
grâce à des intégrations de courbes de Wöhler 2D, des modules d’Young non constant, dissociation de la traction et de
la compression, etc…
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