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ISCHEMIE AIGUË DES MEMBRES INFERIEURS
P. LERMUSIAUX - B. CHARBONNIER CHU Trousseau Tours
POUR COMPRENDRE
1. MECANISMES DE L'ISCHEMIE AIGUË
Lorsqu'un vaisseau principal s'obstrue de deux choses l'une : soit ceci se fait de manière
progressive et le réseau collatéral va pouvoir se développer. L'obstruction sera alors plus
ou moins symptomatique, mais rarement aiguë. Soit l'obstruction est brutale, par
exemple dans le cas d'un embol venant du coeur et allant bloquer une artère saine, ou
lors de la survenue d'une hémorragie dans une plaque d'athérome transformant une
plaque peu sténosante en une thrombose, avec formation de thrombus en amont et en
aval. En cas d'obstruction brutale, va se développer une ischémie aiguë. Le siège de
l'obstruction va aussi influencer la symptomatologie clinique. Une obstruction d'une
bifurcation artérielle laissera peu de possibilités à la collatéralité de se développer.
Parmi les causes d'ischémies aiguës, on distingue habituellement l'embolie d'origine
cardiaque survenant sur des artères saines et la thrombose de vaisseaux athéromateux.
L'analyse est en fait souvent beaucoup plus complexe, car des embolies peuvent survenir
sur des vaisseaux athéromateux et une thrombose compliquant une sténose
athéromateuse peut envoyer des embols en aval, créant des embolies d'origine artérielle.
C'est dire que l'artériographie est le plus souvent d'une grande aide pour définir la
stratégie thérapeutique.
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2. CONSEQUENCES DE L'ISCHEMIE
Conséquences locales :
La revascularisation après une phase d'ischémie aboutit à un oedème musculaire. Les
muscles de la jambe sont entourés d'une aponévrose qui ne peut se distendre. C'est dire
que si l'oedème est important, les muscles vont être comprimés et l'ischémie va persister
par un effet de garrot. L'importance de l'oedème est proportionnelle à la durée de
l'ischémie et à sa sévérité. Le moyen d'éviter ce phénomène de garrot est de réaliser une
aponévrotomie. Ceci consiste à pratiquer une incision cutanée jambière interne et
externe, puis à inciser les trois loges aponévrotiques. Il est parfois nécessaire d'y
adjoindre des aponévrotomies de cheville et du pied. La cicatrisation de ces
aponévrotomies est très longue et des greffes seront ultérieurement nécessaires. Il est
donc important d'essayer de refermer ou, tout du moins, de rapprocher les berges
cutanées dès la phase d'oedème aigu passé, en général à partir du troisième jour post
opératoire. Lorsque l'ischémie est moins sévère, les aponévrotomies ne sont pas
réalisées de principe, mais pourront s'avérer nécessaires quelques heures plus tard
devant une loge antéro-externe tendue et douloureuse.
Conséquences générales :
Lorsque la masse musculaire ischémique est importante et lorsque la revascularisation
est tardive, la lyse des cellules musculaires va libérer la myoglobine qui peut entraîner
une tubulopathie rénale avec anurie. Un lavage de membre en per opératoire et une
diurèse forcée vont limiter les conséquences métaboliques. Le lavage de membre
consiste, après avoir clampé l'artère et la veine, à injecter du sérum physiologique dans
l'artère et à le récupérer par une incision réalisée sur la veine.
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3. PLAN CHOISI
Le plan habituel d'une question d'internat est de choisir une forme clinique typique,
d'envisager des diagnostics différentiels, de décrire le chapitre traitement sous forme
méthodes et indications. En fait, si le tableau clinique d'ischémie aiguë est stéréotypé,
les étiologies sont multiples et le traitement variable. Il en résulte de nombreuses erreurs
de compréhension. Ainsi, tous les malades se voient traités par sonde de Fogarty, alors
que ce type de traitement à des indications spécifiques. Aussi, nous avons préféré
décrire des situations cliniques précises en traitant chacune d'elle sous forme d'une mini-
question.
4. POINTS IMPORTANTS
4.1. Les questions que le chirurgien va poser à l'interne de garde
La gravité de l'ischémie : elle est déterminée par l'examen du membre malade
(sensitivomotrice ou non).
L'étiologie est évoquée :
a) par l'examen du membre controlatéral (embolie probable si tous les pouls sont
perçus, thrombose athéromateuse ou embolie sur artère pathologique si les pouls
distaux sont absents),
b) par la recherche de troubles du rythme.
4.2. Devant un malade souffrant d'une ischémie aiguë des membres inférieurs, le
decin doit répondre à cinq questions
1/ faire le diagnostic, ce qui est en règle facile.
2/ déterminer la gravité, ce qui va conditionner l'urgence d'un geste chirurgical.
3/ déterminer la cause, ce qui va conditionner la tactique opératoire.
4/ déterminer le niveau de l'obstruction.
5/ apprécier l'état cardiaque et général du malade.
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4.3. Dans la rédaction d'une question, il faut traiter l'ischémie aiguë et ne pas
oublier de traiter la cause ! ( exemple une valvulopathie emboligène pour éviter la
récidive).
4.4. Questions fréquentes
a) Eléments cliniques en faveur d'une embolie devant une ischémie aiguë :
- absence d'artériopathie controlatérale,
- présence d'une pathologie emboligène (valvulopathie, troubles du rythme),
- sévérité de l'ischémie,
- début très brutal.
b) Eléments cliniques en faveur d'une thrombose athéromateuse :
- présence d'une artériopathie controlatérale,
- antécédents de claudication intermittente,
- existence de facteurs de risque de la maladie athéromateuse,
- amélioration de l'ischémie après introduction de l'Héparine,
- ischémie moins sévère de début plus progressif.
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QUESTION : ISCHEMIE AIGUË DES MEMBRES INFERIEURS
Faire le diagnostic et apprécier le degré d'urgence est la plupart du temps assez facile.
Il faut, par contre, savoir que le traitement chirurgical d'une ischémie aiguë peut être
complexe et nécessite l'avis d'un chirurgien vasculaire expérimenté. Le risque c'est
l'amputation, mais aussi un risque vital en cas de revascularisation tardive d'une ischémie
étendue.
1. Diagnostic
Le diagnostic est facile. C'est la survenue d'une douleur de début brutal, associée à un
refroidissement du membre inférieur. A l'inspection, le membre est pâle et à la
palpation, il est froid. Il n'y a plus de pouls capillaire.
2. Déterminer la gravité
C'est examiner le membre atteint pour rechercher un déficit sensitif et/ou un déficit
moteur. En cas de déficit sensitivo-moteur complet du pied, c'est une véritable course
contre la montre pour éviter une amputation ou des séquelles ultérieures.
3. Déterminer la cause
L'interrogatoire précisera l'existence d'une claudication intermittente, de troubles du
rythme ("palpitations"), de facteurs de risque (tabac, diabète, hypertension artérielle,
cholestérol). C'est habituellement l'examen du membre inférieur oppo qui va donner
la solution. Si tous les pouls sont perçus et le malade en arythmie complète, il s'agit
probablement d'une embolie. Si les pouls poplités et distaux ne sont pas perçus, les
artères sont athéromateuses et, qu'il s'agisse d'une embolie sur artères athéromateuses ou
d'une thrombose athéromateuse, la stratégie chirurgicale sera sensiblement la même.
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